Identité et appartenance: temps et comput anthropologique chez R. E. Mutuza Kabe( Télécharger le fichier original )par Jean Francis Photios KIPAMBALA MVUDI Université de Kinshasa RDC - Doctorat en philosophie 2012 |
Section 3. Le concept « indépendance » et l'équivoque mutuziste§1. Indépendance du premier genre ou affirmation de l'autonomie de l'Homme NoirIci l'appartenance s'effondre à cause de l'insécurité et laisse la société s'enfermer cherchant la place de l'individu au sein du groupe et la place du groupe parmi les autres groupes. C'est ainsi que sous un premier aspect, l'indépendance désigne, chez Mutuza, le processus par lequel l'homme d'Afrique noire s'est progressivement affranchi de la tutelle d'une colonisation qui lui avait servi de berceau. Après l'effondrement des empires et royaumes antiques, en effet, la colonisation demeura la seule institution capable d'assumer des tâches éducatrices. Fortement charpentée en soi-même, héritière de la culture antique qu'elle intégrait aux données de la civilisation, la colonisation introduisit peu à peu les Hima-Tutsi dans l'héritage combiné de la culture antique et du capitalisme et impérialisme naissant. Elle joua ainsi un rôle de suppléance, sans précédent pour elle(413(*)), et qui n'était pas fait pour durer. Emancipation de la société traditionnelle par rapport à une colonisation dans le domaine politique, culturel, social, économique aussi, définit donc l'indépendance au premier sens du mot. C'est à propos des biens des citoyens que les Représentants de la Colonie Belge à la Table Ronde de Bruxelles utilisèrent à leur profit un mot qui relevait du Droit belge et qui désignait en ce cas le retour d'une colonie à son autonomie. Utilisé par les Représentants en janvier et février 1960, ils exprimaient la revendication que la « Nation » faisait valoir sur des bien-fonds appartenant jusqu'alors à la Métropole. Il y a de ce fait un certain relent polémique dans le nouvel usage de ce mot. En effet, l'indépendance désigne toujours plus au moins le processus au cours duquel les nations ou les hommes font valoir leurs droits propres et leur inaliénable liberté à l'égard d'une instance qui semble y faire obstacle ou qui réellement s'y oppose. C'est l'autonomie légitime de l'homme et de sa société. Les Belges évitaient, pour l'exprimer, le terme d'indépendance historiquement conflictuel et culturellement ambigu. « Ce ne sont pas un peuple, ce ne sont que des tribus. Laissons-les faire l'expérience pour nous permettre d'être des modèles, disaient certains colons »(414(*)). « Ces primitifs attachent trop d'importance au mot indépendance », ajoute un autre colon. « Mais, Dieu est un mot alors que nous y croyons, réplique un troisième »(415(*)). Il est très difficile d'être clair dans l'approbation du meilleur, plus judicieux aussi sur sa fragilité. Beaucoup de ces problèmes sont d'abord énoncés comme des hypothèses. L'exemple le plus frappant est celui proposé par le physicien Amedeo Avogadro. La loi qu'il énonça fut tout d'abord proposée comme hypothèse par le physicien italien Amedeo Avogadro, en 1811. Les chimistes et les physiciens italiens étudièrent cette hypothèse et, dans les années 1850, grâce au chimiste italien Stanislao Cannizzaro, la loi d'Avogadro fut universellement acceptée. La loi dit que dans les conditions normales de température (0 °C) et de pression (1 atm ou 101 325 Pa), une mole de gaz occupe un volume de 22,4 L (volume molaire) et renferme N = 6,023 × 1023 molécules. Cette loi demeura un paradigme en sociologie moderne pour justifier la stabilité sociale et l'harmonie au sein des groupes. C'est la loi de l'organicisme. Ce nombre est analogue à la conception de l'indépendance au premier sens. Car la combinaison et la compression donne autonomie aux gaz. L'indépendance au second sens du mot justifie amplement la sagesse avec laquelle la Table ronde intègre ici, sans employer le mot, l'indépendance prise en son premier sens. * 413 MUTUZA, Les fondements culturels du fédéralisme au Zaïre, §3, p. 51-53. * 414 Ces propos sont ceux que l'on entend dans le film : Lumumba, épisode de la Table ronde. * 415 Dans cette épisode du film Lumumba, on comprend facilement ce que pensaient les Belges des Congolais. |
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