Les violences faites aux femmes dans la ville de Kaolack au Sénégal( Télécharger le fichier original )par Djelia LY Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Maitrise 2011 |
CHAPITRE VI : CADRE D'ANALYSEIV.1.SITUATION AU POINT D'ECOUTE DE L'APROFES KAOLACK : GENERALITE SUR LES CAS RECUS DEPUIS 2008Graphique 1 : Répartition des usagers du point d'écoute reçus de 2008 à 2010 en fonction de leur sexe Ce graphique présente la répartition selon le sexe de toutes les personnes ayant fréquenté le point d'écoute de l'APROFES entre 2008 et 2010.
Source : Base de données du Point d'écoute Nous constatons à la lecture de ce graphique une prédominance de femmes sur les hommes qui fréquentent le point d'écoute de l'APROFES. Parmi les usagers 93.75% sont des femmes et seulement 6.25 %. Ceci parait normal d'autant plus que ce Point d'écoute a était créé pour assister les femmes victimes de violence. Il est important de signaler que les besoins ne sont pas les mêmes. Si les femmes victimes de violences viennent chercher de l'assistance, les hommes eux sont pour la plupart, soit des proches de victimes ou des auteurs de violences. Les hommes appelés proches de victimes viennent au point d'écoute pour dénoncer des cas de violences subies par leurs soeurs, voisines dans la plupart des cas. L'autre partie est composée d'auteurs de violence. En effet lors des médiations la responsable du point d'écoute fait appel aux auteurs de violence pour tenter dans un premier temps de régler le conflit à l'amiable.Nous notons avec ces chiffres que parmi les auteurs de violences du Point d'écoute les hommes sont majoritaires et ils reconnaissent aussi en avoir fait l'acte. Les 93.75 % des usagers sont des femmes victimes de violence de toute sorte. Ces chiffres révèlent ainsi une violence basée sur le genre féminin dans la mesure où cette catégorie est la seule au point d'écoute à subir de tels actes. D'autres structures affirment aussi la présence du phénomène qui persiste dans la région malgré les efforts conjugués des acteurs de développement, c'est le cas du RADI dont la coordonatrice N.N.Fqui fait un accompagnement juridique à ces femmes constate que « La violence est un phénomène qui persiste dans la région de Kaolack même si la une tendance est à la dénonciation et à la sensibilisation ». Nous allons cependantnous intéresser aux types de violences enregistrées au centre. Graphique 2:Typologie des cas de violences reçus La totalité des cas de violence reçus au Point d'écoute entre 2008 et 2010 est représentée par ce graphique, nous l'illustrons ici par une typologie. Source Base de données du Point d'écoute Nous observons à la lecture de ce graphique une diversité de types de violences enregistrés dans la base de données depuis 2007. Les violences physiques, verbales, morales et économiques figurent dans cette typologie. Cependant les coups et blessures volontaires (21%), les cas de viols (10%), les mauvais traitements (7%), la pédophilie (2%) et les cas d'inceste (1%) et les meurtres placent les violences physiques au dessus. Les violences dites économiques suivent avec les défauts d'entretiens (19%), abandon de domicile (15%) refus de paternité (6%). Cependant les violences que l'on pourrait considérer comme des préjudices moraux restent difficiles à cerner. Si l'on se réfère aux entretiens que l'on a eu avec les victimes de violences, tous les types de violence causent de grandes souffrances morales. Seulement, les types de violence visible (physiques) et ceux qui portent des préjudices aux femmes (économiques) sont le plus souvent dénoncés. Néanmoins nous avons noté quelques types de violences considérées comme morales dontla répudiation (8%), les injures (10%) et les mariages forcés et/ou précoces 2%.En s'intéressant à ce graphique de plus prés nous ne manquons pas d'observer qu'une bonne partie des violences listées dans ce graphique sont liées au statut matrimonial de la femme. La plupart des cas cités surviennent dans les liens du mariage. L'exemple de la répudiation, abandon de domicile conjugal, les mauvais traitements et la plupart des coups et blessures volontaires cités dans le graphique concernent des femmes mariées, c'est le cas de cette victime N.D. 36 ans que nous avons interrogée« C'est mon mari l'auteur de la violence, il me frappait fréquemment et avait fini par nous abandonner mes enfants et moi, il est resté un an sans me donner de quoi nourrir les enfants, c'est par la suite que je suis allée au point d'écoute de l'APROFES ». Il y'a donc une nette prédominance de violences conjugales au Point d'écoute de l'APROFES Kaolack. Est-ce parce que les femmes dans les liens du mariage sont plus susceptibles de violence ? Le mariage en tant union et réalité sociale devrait êtreétudié d'une manière plus approfondie afin de déceler les causes de violences. Le partenaire de la femme dans cette union étant son époux est de fait concerné par les violences que subit son épouse, pas parce qu'il en est forcément l'auteur, mais du fait qu'ils entretiennent des rapports pouvant être très explicatifs à la cause des violences. L'une des explications c'est que le mariage d'une part oblige le couple à vivre ensemble (toute relation humaine est potentiellement conflictuelle et le conflit comporte un risque de violence) et d'autre part le mariage crée un rapport de domination (l'homme est le chef de famille) qui peut favoriser l'abus d'autorité et la violence. Par ailleurs, beaucoup de traditions pour la plupart caractérisées par le patriarcat qui est un système cohérent qui façonne tous les domaines de la vie collective et individuelle,invitent la femme à se soumettre à son mari. Toute l'organisation sociale du mariage régit par la religion, la culture, les traditions justifient cette position de vulnérabilité de l'épouse.Nous nous intéressons à présent à l'évolution des cas de violence reçus au Point d'écoute ces dernières années. Graphique 3 :Evolutiondes cas de violence enregistrés au Point d'écoute Le graphique ci-dessous présente l'évolution des cas de violences reçus au Point d'écoute de 2006 à 2009. Source Base de données du Point d'écoute Pour montrer l'évolution des violences au Point d'écoute, nous ne nous sommes pas arrêté aux trois dernières années, en utilisant la base de données nous avons commencé par celles de 2006. Ceci nous a permis de mettre en évidence l'accroissement des violences. En effet, de 131 en 2006, les cas de violences sont passés à 152 en 2007, 184 en 2008 et 203 en 2009. Il y'a donc une augmentation des cas de violences reçues au Point d'écoute d'années en années d'ailleurs la présidente de l'APROFES, B.S. en fait le constat« Le phénomène violence prend de plus en plus de l'ampleur mais il y'a une volonté conjuguée des efforts des organisations de femmes cependant il reste beaucoup à faire dans ce combat aussi bien par les organisations de la société civile que par l'état » .D'ailleurs dans un communiqué que le Point d'écoute a eu à faire en 2007 avec d'autres organisations établies à Kaolack les femmesn'ont pas manqué d'attirer l'attention du public sur une recrudescence des violences non seulement au niveau du Point d'écoute mais sur toute la commune de Kaolack. Ce communiqué a été fait d'ailleurs dans un contexte où toute la population du Sénégal notamment la presse au Sénégal s'indignait d'un cas de violence très atroce survenu la nuit du 17 Octobre 2007, il s'agit de du meurtre de la jeune Caty Gaye.Le Point d'Ecoute affirmant ainsi que« Le constat amer est qu'aujourd'hui les femmes sont de plus en plus l'objet de violences de toutes sortes. »49(*), atteste de la recrudescence de ce phénomène. L'hypothèse selon laquelle les violences augmentent d'année en année se justifie ainsi au Point d'écoute. * 49 Ceci est un extrait d'un communiqué du Point d'Ecoute en 2008 à Kaolack |
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