Paragraphe 3. L'administration des biens conjugaux
Elle est réglée par les
articles 490 CF et suivant du code civil. L'évolution s'est faite dans
le sens d'une diminution des pouvoirs du mari. Notamment avant 1965, le mari
avait l'administration de ses biens propres, mais aussi l'administration de la
communauté et celle des biens propre de la femme.
L'administration des biens propres de la femme par le mari
découlait des pouvoirs que celui-ci tenait de sa qualité
d'administrateur de la communauté, alors usufruitière des biens
propres des époux, donc des biens propres de la femme, laquelle n'avait
que la nue-propriété de ses biens propres.
Depuis la reforme de 1965, le mari n'a plus eu
l'administration des biens propres de la femme, car la communauté n'a
plus l'usufruit des biens propres époux. Par ailleurs, les pouvoirs du
mari sur la communauté exigeaient souvent l'accord de la femme.
La loi d'Aout 1987 portant code de la famille, a
substitué aux pouvoirs du mari sur les biens communs une gestion
concurrente de ceux-ci par le mari et la femme.
Le code invite à étudier successivement
l'administration des biens communs et l'administration des biens propre.
I. L'administration des biens communs
Il convient de noter qu'en ce qui concerne la
communauté, le terme d'administration recouvre des pouvoirs plus larges
que de droit commun car il englobe une partie des actes de disposition dont les
biens communs sont susceptibles.
Aussi bien, la loi parle-t-elle aussi de « la
gestion » de la masse commune, qui exprime peut être mieux la
réalité des pouvoirs des époux sur les biens communs.
Ainsi s'expriment notamment les articles 490 et svts disposant
que :« chacun des époux a le pouvoir d'administrer seul
les biens commun et d'en disposer sauf à répondre des fautes
qu'il aurait commises dans sa gestion ».
Ainsi, « si l'un des époux se trouve d'une
manière durable, hors d'état de manifester sa volonté, ou
si sa gestion de la communauté atteste l'inaptitude ou la fraude,
l'autre conjoint peut demander en justice à lui être
substitué dans l'exercice de ses pouvoirs ».
? Les pouvoirs des époux sur les biens
communs
Il est à signaler que chacun des époux a le
pouvoir d'administrer seul les biens communs et d'en disposer, sauf à
répondre des fautes qu'il aurait commises dans sa gestion. Les actes
accomplis sans fraude par un conjoint sont opposables à l'autre.
Cependant, les pouvoirs des époux connaissent un
certain nombre de limites, ce ne sont pas des pouvoirs
discrétionnaires :
? D'une part, les époux sont responsables de leurs
fautes dans l'administration des biens communs,
? D'autre part, les époux ne peuvent disposer des biens
communs qu'à la condition que ce soit sans fraude et sous réserve
d'un certain nombre d'exceptions qui intéressent les gains et salaires,
les actes nécessaire à l'exercice d'une profession, les
dispositions à titre gratuit, les dispositions à titre
onéreux et les baux.
1°. Les gains et salaire
Bien que faisant partie de la communauté, le
régime les fait échapper à la gestion concurrente des
deux époux .Seul l'époux qui les a obtenus peut en disposer.
2°. Les actes nécessaires à
l'exercice d'une profession
Aux termes de l'art 421 al 2 CFr « l'époux
qui exerce une profession séparée a seul le pouvoir d'accomplir
les actes d'administration et de disposition nécessaires à
celle-ci ». Par conséquent, cet époux peut accomplir
des actes de cette nature sur les biens communs dès lors qu'ils sont
nécessaires à son activité professionnelle. Il en
résulte qu'un conjoint ne peut paralyser l'exercice de la profession de
son conjoint par une gestion concurrente de la communauté. Il reste que
le conjoint peut être appelé à donner son concours, il en
est ainsi, lorsque l'acte est soumis à la cogestion du mari et de la
femme.
3°. Les actes de disposition à titre
gratuit
En ce qui les concerne, il faut distinguer selon qu'il s'agit
de libéralités entre vifs ou de legs. Veut-il consentir une
libéralité entre vifs, un époux doit obtenir le
consentement de son conjoint pour que la libéralité soit valable
(art 833 du CFdisposant que les époux ne peuvent, l'un sans l'autre,
disposer entre vifs, à titre gratuit, des biens de la
communauté.
Mais cette règle ne s'applique pas aux gains et
salaires, dont la faculté de disposition est réservée
à chaque époux par l'art 831 CF.
Dès que les gains ou salaires ont été
employé à l'acquisition d'un bien, la donation de ce bien exige
le consentement de deux époux. S'agit-il au contraire, d'un legs, un
époux peut disposer seul par ce moyen de biens de la
communauté.
En effet, la disposition testamentaire ne prendra effet qu'au
jour de son décès, donc au jour de la dissolution du
régime. Par conséquent, si un époux fait un testament par
lequel il lègue un bien de la communauté, il ne peut le faire en
sa qualité d'administrateur de celle-ci, puisque ses pouvoirs auront
pris fin au moment précis où le testament entrera en vigueur.
C'est donc seulement en qualité de copropriétaire du bien
légué que cet époux peut en disposer.
Aussi bien un époux ne peut-il disposer par ce moyen
au-delà de sa part dans la communauté (art 1423 al1 du CFr). En
outre, si le legs par lui consenti porte sur un corps certain faisant partie de
la communauté, le legs ne sera exécuté en nature que si,
par l'effet du partage, le bien légué tombe au lot de ses
héritiers. Dans le cas contraire, le legs ne pourra être
exécuté qu'en valeur, c'est-à-dire, que le
légataire sera créancier des héritiers du testateur pour
la valeur du bien légué.
4°. Les actes de disposition à titre
onéreux
Aux termes de l'art 1424du
CFr « les époux ne peuvent, l'un sans l'autre,
aliéner ou grever de droits réels les immeubles, fonds de
commerce et exploitation dépendant de la communauté, non plus que
les droits sociaux non négociables et les meubles corporels dont
l'aliénation est soumise à publicité de telles
opérations.
Mais chaque époux conserve le droit d'aliéner
seul les autres meubles corporels, à l'exclusion toute fois des meubles
meublants garnissant l logement familial, et cela par application d'une
disposition du régime matrimonial primaire (art 215 al 3CFr). Il peut
aussi aliéner seul les créances, ainsi que les valeurs
mobilières négociables.
5°. Les baux
L'art 1425 CFr qui les concerne, distingue
selon qu'il s'agit de baux portant sur un fonds rural ou sur un immeuble
à usage commercial, industriel ou artisanal pour lesquels le
consentement des époux est exigé ou de baux portant sur d'autres
biens qui peuvent être passés par un seul conjoint et pour
lesquels les règles prévues pour les baux passés par
l'usufruitier sont applicables.
Pour la généralité des baux, il
résulte de ce texte que les baux de plus de neuf ans passés par
un époux sont valables mais, à la dissolution de la
communauté, il ne sont opposables à l'autre époux ou
à ses ayants cause que pour la période de neuf ans en cours (art
595 al 2CFr) : « les baux que l'usufruitier seul a fait
pour un temps qui excède neuf ans ne sont, en cas de cessation de
l'usufruit, obligatoires à l'égard du nu-propriétaire que
pour le temps qui reste à courir, soit de la première
période, et ainsi de suite de manière que le preneur n'ait que le
droit d'achever la jouissance de la période de neuf ans où il se
trouve ».
Quant aux baux de neuf ans au moins, se renouvèlent
par un époux plus de trois ans avant leur expiration, s'il s'agit de
biens ruraux, et plus de deux ans avant la même époque, s'il
s'agit de maisons, ils sont sans effet, à moins que leur
exécution n'ait commencé avant la dissolution de la
communauté (art 595 al 3CFr qui dispose que les baux de neuf ans ou
au-dessous que l'usufruitier seul a passé ou renouvelé plus de
trois ans avant l'expiration du bail courant s'il s'agit de biens ruraux, et
plus de deux ans avant la même époque, s'il s'agit de maisons,
sont sans effet, à moins que leur exécution n'ait commencé
avant la cessation de l'usufruit ».
? La sanction des règles relatives aux pouvoirs
des époux sur les biens communs
Si l'on fait abstraction des art 217 et 220-1 du CFr,
applicables sous tous les régimes, à titre de règles
faisant partie du régime matrimonial primaire (le premier
précisant que chaque époux peut être autorisé en
justice à agir sans le consentement de l'autre, même lorsque ce
consentement est requis, si l'époux qui devait donner son consentement
est hors d'état de manifester sa volonté ou si son refus n'est
pas justifié par l'intérêt de la famille, le second
prévoyant les mesures pouvant être prises par le président
du TGI, au cas où l'un des époux mettrait en péril les
intérêts de la famille, les règles relatives aux pouvoirs
des époux sur les biens communs trouvent leurs sanctions :
? D'abord dans la possibilité pour chaque époux
de demander en justice à être substitué à son
conjoint dans l'exercice de ses pouvoirs, si sa gestion de la communauté
atteste l'inaptitude ou la faraude. La procédure étant celle de
la séparation des biens judiciaire réglementée par les
arts 1445 à 1447CCFr
? En fin, en cas de dépassement de pouvoir de la part
d'un époux, la sanction réside dans la nullité relative
de l'acte dont le prononcé peut être demandé par l'autre
époux ou par ses héritiers, si la nullité n'est pas
couverte par la ratification, dans les deux ans du jour ou cet époux a
eu connaissance de l'acte mais sans que l'annulation puisse être
demandée plus de deux ans après la dissolution de la
communauté (art 1427CCFr) .
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