II - LE PRINCIPE DE L'ADHESION OBLIGATOIRE AUX ACCORDS
DE FINANCEMENT
Pour comprendre le principe d'adhésion
obligatoire aux accords de financement octroyés par les partenaires
financiers, il convient d'abord d'expliciter la notion même de contrat
d'adhésion (A), afin de mesurer l'impact que ceux-ci peuvent avoir sur
l'exécution harmonieuse du projet (B).
A- LA NOTION DE CONTRAT D'ADHESION
Dans la conception classique libérale, le
contrat est censé être de deux parties égales en droit, et
qui discutent librement du contenu de leur accord : c'est le contrat de
gré-à gré. Or la pratique moderne montre que le contrat
d'adhésion est l'aeuvre exclusive de l'une des parties
généralement plus puissante économiquement que l'autre.
Cette dernière peut seulement adhérer ou non à un ensemble
de clauses comme ce qui se passe avec les emprunteurs de la Banque mondiale et
les autres agences de coopération au développement
international.
Un contrat d'adhésion est un contrat dont le
contenu contractuel a été fixé, totalement ou
partiellement, de façon abstraite et général avant la
période contractuelle.
Dans un contrat d'adhésion du type qui semble
en vigueur au PFTT, les clauses sont rédigées à l'avance.
L'accord des contractants n'est plus que la condition d'application des
clauses. Georges Berlioz dans son ouvrage : « Contrat d'adhésion
», considère les contrats bancaires comme le domaine
d'élection des contrats d'adhésion. Selon cet auteur, ceux-ci
sont établis sur les formules préétablies par la Banque,
à des conditions que cette dernière, sauf dans les cas
d'opérations extrêmement importantes, n'accepte pas de
discuter.
En effet, au regard de ce qui précède,
on pense que les gouvernements de la CEMAC n'ont pas eu l'opportunité de
discuter de tous les aspects qui entrent dans l'accord de financement
signé avec la Banque mondiale. La pratique des contrats
d'adhésion étant
75 Lavagnon A.IKA : «
La gestion des projets d'aide au développement : historique, bilan et
perspective », 2005, p 131.
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courante dans les établissements bancaires, la
Banque mondiale quoi qu'elle face, est et demeure une institution bancaire et
en tant que telle exerce des pratiques propre aux banques, qui malheureusement
ne s'accommodent pas de l'exigence d'une stratégie de gouvernance
multi-niveaux, relativement au souci d'égalité entre acteurs
souhaité par Marie Claude Smouts dans « Du bon usage de la
gouvernance ».
B - LES CONSEQUENCES SUR LES PROJETS DE
DEVELOPPEMENT
Les conséquences inhérentes à
l'unilatéralisme dans l'élaboration des procédures ainsi
que le principe de l'adhésion obligatoire aux accords de financement
sont diverses et variées.
Il s'agit par exemple de la cohabitation des normes
juridiques, mieux encore de la juxtaposition des procédures juridiques
d'une part, celles de l'Etat emprunteur, et d'autre part, celles du bailleur de
fonds pour gérer un même projet. De ce fait on observe dans la
pratique que les Unités d'exécution appliquent très
souvent et par mimétisme les directives de la Banque mondiale. Une fois
confrontée à une difficulté de compréhension d'une
disposition de ces dernières, l'interprétation qui est
donnée relève de la pratique nationale.
Un autre aspect remarquable est la rédaction
des notes administratives. Il n'est pas rare de constater que la
présentation d'un certain modèle type de rapport ou de
procès-verbal ne correspond pas toujours aux techniques de
rédaction administrative pratiquées dans l'administration des
gouvernements bénéficiaires du financement. Cet état de
chose conduit inéluctablement à la production des documents de
qualité discutable, empêchant ainsi les agents d'exprimer
librement leur connaissance dans le rendu des rapports en raison de l'exigence
du respect des modèles types, et les spécialistes des
procédures du bailleur au sein du projet veillent à ceux que
ceux-ci soient respectés.
Il convient dans le même ordre d'idées de
signaler que, la maitrise approximative des procédures du bailleur de
fonds porte un risque sérieux dans la bonne exécution du projet.
Si l'on se réfère à l'exemple du Cameroun, la
majorité des personnes désignées membre de la Sous -
commission d'analyse (SCA) n'ont pas suffisamment connaissance des
procédures contractuelles de la Banque mondiale. Le renvoi
régulier des rapports des SCA le démontre
suffisamment.
Eu égard à ce qui précède,
on peut penser qu'il s'agit là en partie des sources, mieux encore des
manquements qui induisent la sous- consommation des financements.
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