2.2.2 Les origines du pentecôtisme et son
développement
On admet généralement que le pentecôtisme
a trouvé son origine dans l'Ecole de Topeka (Kansas) en janvier 1901. Un
groupe d'étudiants, sous la direction de Charles Parham, pasteur
méthodiste et fondateur de cette Ecole, centrait sa recherche sur
« le baptême du Saint-Esprit ». Ils cherchaient
« un revêtement de la puissance d'en- haut ».
Le récit que fait Miss Ozman de
l'événement a souvent été repris tel quel,
naïvement, par les prédicateurs pentecôtistes : comme
lors de la première pentecôte, l'Esprit descend sur le groupe en
prière, une des participantes se met à louer Dieu en
langues ; bientôt l'expérience se répand au groupe
entier et rayonne vers l'extérieur. Le pentecôtisme était
né tout droit descendu du ciel.
Avec Jean Séguy, essayons de replacer le récit
dans son contexte : « comme quelques autres, je pensais avoir
reçu le baptême du Saint-Esprit lors d'une expérience
antérieure de consécration. Mais lorsque j'appris que le
Saint-Esprit devait se communiquer en plus grande plénitude, mon coeur
se mit à avoir faim de ce consolateur promis ».
Entre les lignes, on devine les dissensions qui divisaient les
mouvements de sainteté : tous attendaient un
« baptême de l'Esprit », mais pour les uns, c'est une
expérience toute intérieure ; pour les autres, ce
baptême devait s'accompagner de signes visibles. Toute la recherche de
l'Ecole biblique de Topeka visait à découvrir les critères
et les signes de ce baptême dans le Nouveau Testament. « Au
moment où des mains se posaient sur ma tête, le Saint-Esprit tomba
sur moi, et je commençai à parler en langues, glorifiant
Dieu », continue Miss Ozman.
Dûment instruits sur le rapport qui doit exister entre
imposition des mains, parler en langues et réception du Saint-Esprit,
les étudiants de Charles Parham en arrive à la conviction que le
seul signe certain du baptême de l'Esprit, selon le Nouveau Testament,
était le parler en langues.
Pour le sociologue français, cet
événement de Topéka marque le début d'une
domestication des phénomènes physiques du baptême dans le
Saint-Esprit. En effet, dans l'Amérique d'après la guerre de
sécession, le « holy rollism », les saints
aboiements apparaissent aux yeux des gens du Nord plus cultivés,
déjà atteints par la critique biblique et la diffusion de
l'évolutionnisme, comme caractéristiques des moeurs
arriérées du Sud. Et tout l'effort du pentecôtisme consista
à orienter ces manifestations, jugées théologiquement et
socialement inadmissibles, vers une forme d'expression plus facilement
contrôlable et reprise dans le Nouveau Testament, à savoir la
glossolalie. Le pentecôtisme apparaît comme un compromis religieux
et social. Et le sociologue insiste sur cette ambiguïté
fondamentale du pentecôtisme qui, d'une part, provoque la liberté
de l'Esprit et, d'autre part, doit empêcher que « le dieu
n'aille trop loin ».
L'expérience pentecôtiste se répandit par
l'intermédiaire de W.J. Seymour, pasteur baptiste noir et
élève de l'Ecole de Topéka, jusqu'à Los Angeles.
C'est là, en 1906, dans l'Eglise noire d'Azussa Street dont il
était un des prédicateurs, que le pentecôtisme trouva son
origine comme mouvement national et international. Les réunions entre
noirs et blancs étaient interdites à l'époque. A l'origine
du moins, le pentecôtisme apparaît comme révolutionnaire.
Rejeté par les mouvements de sainteté et les
congrégations baptistes, le pentecôtisme a dû former ses
propres assemblées. Des courants se répandirent par communication
orale dans le tiers monde, en Amérique latine et en Afrique. Une autre
partie s'organisa, principalement aux USA et en Europe, en différentes
dénominations, comme les « assemblées de
Dieu » ou les églises évangéliques du
réveil. L'élan révolutionnaire s'y perdit rapidement.
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