Para. 2 : UNE NECESSAIRE REDYNAMISATION DES SOLUTIONS AUX
DISCRIMINATIONS ETATIQUES
Ces solutions envisageables visent non seulement à se
prémunir contre des risques d'inapplication des décisions de la
Cour de Justice, mais aussi à conférer au ressortissant
190 Article 18 de la Convention régissant la CJC.
191 ISAAC (G) : Droit communautaire
général, 4ème édition, MASSON Droit
Sciences Economiques, p.274.
CEMAC partout sur la Communauté une situation meilleure
que celle qui prévaut aujourd'hui. Il est question pour nous de poser
une pierre à l'édifice de l'intégration
sousrégionale CEMAC et particulièrement l'intégration
personnelle. Pour ce faire, nous nous référons à ce qui,
dans les autres communautés constitue un atout que la CEMAC ignore
jusqu'ici et dont elle gagnerait à en tenir compte. A ce propos, sans
prétendre que nos propositions sont une sorte de solution miracle, nous
pensons que la reconnaissance au profit du ressortissant CEMAC sur l'ensemble
de la Communauté d'une situation meilleure passe par une redynamisation
du recours en manquement d'Etat (A) et l'institution d'une citoyenneté
CEMAC (B).
A- Une redynamisation nécessaire du recours en
manquement d'Etat
Il faut tout d'abord institutionnaliser de manière
claire et précise le recours en manquement d'Etat puisqu'en
l'état actuel du droit communautaire CEMAC, le recours en manquement
d'Etat est implicitement consacré au titre des compétences de la
Cour de Justice Communautaire.192 Pourtant, vu l'importance du
risque encouru ou de ce qui doit être évité, il serait
préférable que ce recours soit institué de façon
explicite de manière à en fixer les
modalités.193 Ensuite des mesures doivent être prises
pour le rendre plus efficace que ce que prévoient les textes en
vigueur.
1- La médiation de la Commission de la CEMAC
dans la procédure judiciaire
S'il est louable que le droit de saisine n'est accordé
à toute personne, même physique témoignant d'un
intérêt certain, il serait tout aussi préférable que
l'action judiciaire passe par un organe intermédiaire, notamment la
Commission de la CEMAC qui pourrait, le cas échéant, la
déclencher auprès de la Chambre Judiciaire, comme c'est le cas en
Union Européenne. Elle jouerait ainsi le rôle du Procureur de la
République en droit interne puisqu'elle est le garant de l'application
du droit communautaire et doit s'assurer que celui-ci est respecté
partout et en tout temps. Cette mesure aurait peut-être
l'inconvénient d'allonger et d'alourdir la procédure certes, mais
aurait certainement pour effet et avantage de la rendre plus efficace. Car non
seulement cet organe pourrait utiliser son pouvoir de persuasion et son
influence pour faire pression sur l'Etat fautif de manière à lui
donner une chance de mettre fin
192 Article 14 précité de la Convention
régissant la CJC.
193 En UE, le recours en manquement d'Etat est prévu et
institué par les articles 169, 170 et 171 du traité CE qui en
fixent les modalités.
aux manquements de nature à restreindre les
libertés communautaires ;194 mais aussi, les Etats membres
pourraient s'affronter à travers lui sans entacher leurs relations
diplomatiques. La vérité est que, comme le remarque un auteur,
« pour les raisons politiques évidentes, les Etats membres
répugnent à s'affronter directement en cas d'infraction du droit
communautaire ».195 Ainsi, cet organe pourrait
éviter que les parties en cause dans une procédure n'arrivent
à la phase terminale ou contentieuse, et ainsi épurer le
problème par sa médiation. On peut même estimer que la peur
d'entacher leurs relations diplomatiques est à l'origine de la
pauvreté des recours des Etats membres de le CEMAC contre les
différentes violations des libertés communautaires des
ressortissants des autres Etats membres.
2- L'institution des mesures contraignantes pour
l'exécution des décisions de justice
La garantie de l'efficacité du recours passe par la
fixation des mesures de nature à obliger les Etats dont les actes ont
été déclarés contraires aux libertés
communautaires à s'exécuter. La solution à cet
égard pourrait revêtir deux aspects :
D'abord une sanction financière contre tout Etat qui ne
s'exécutera pas, le montant étant fixé en rapport avec la
gravité de l'acte posé, et l'importance de la liberté
violée, et son recouvrement pouvant, à défaut
d'exécution volontaire dans un délai déterminé,
être fait d'office comme en matière de cotisations
étatiques.
Et ensuite une sanction politique pouvant consister, par
exemple en des astreintes et des suspensions du droit de participer à
certains programmes communautaires, ou de bénéficier de certains
avantages, ou encore d'accéder à certains fonds communautaires
avant de s'être exécuté. Il s'agit d'instituer des mesures
qui auront pour effet de veiller à l'application des décisions
judiciaires de la Communauté, le but étant de veiller au respect
des libertés communautaires qui seraient, par ailleurs, davantage
protégées à travers l'institution d'une citoyenneté
communautaire.
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