2.5. Etat des recherches :
? Recherches sur la
représentation de l'alimentation.
En 1997, Moscovici et Masson ont réalisé une
recherche sur les mutations dans la pratique alimentaire. Ils
ont étudié la place des conserves et plus spécifiquement
des plats préparés industriels dans les comportements
alimentaires des mangeurs. Ils ont d'abord réalisé 10 entretiens
exploratoires afin d'élaborer un guide d'entretien. La dimension «
convivialité » étant ressortie comme discriminante, les
auteurs ont constitué deux échantillons spécifiques de 20
personnes : 1 groupe de sujets mangeant fréquemment seuls et 1 autre
mangeant majoritairement en compagnie.
L'analyse lexicale des entretiens a permis d'obtenir les 5
classes suivantes :
- nourritures (37%)
- technologies (21%)
- contextes de consommation (12%)
- accès aux aliments (15%)
- corporéité/manger (15%)
Selon les auteurs, les aliments, n'ont donc
d'intérêt pour le mangeur que dans la mesure ou ils peuvent
être consommés.
Plus tard, le baromètre santé nutrition
PACA (2008), étudie la représentation de manger avec une
question à choix multiple du type : « Pour vous, manger
représente avant tout... ». Les résultats donnent : Un
plaisir gustatif à 25,4%, une chose indispensable pour vivre à
23,7% et un moyen de conserver la santé à 22,6%. Il a aussi
été étudié « Pour vous qu'est-ce qu'une
alimentation équilibrée ? » 65% répondent : une
alimentation variée.
? Evolution de la
représentation sociale de « bien manger ».
Lahlou, (Lahlou) 1998, est un des premiers à
étudier les Représentations Sociales de « bien manger
», sur les bases de l'enquête du crédoc de 1991. Il interroge
un échantillon représentatif de la population de 2000 personnes.
Il obtient les 8 classes suivantes :
1) entrée- plat principal- fromage- dessert
2) manger à sa faim
3) manger ce qu'on aime
4) pas trop de graisse et de sucre
5) équilibré
6) petits plats
7) convivial
8) restaurant
Replacé dans le schéma conceptuel obtenu
grâce à l'analyse lexicale de « manger » du Grand
Robert (en GRIS), on obtient ceci :
(Finalité)
REMPLIR VIVRE
Equilibré 16%
Pas trop de graisses pas trop de sucre 13%
(Opération)
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PRENDRE
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(Objet)
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(Sujet)
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Entrée- plat chaud- fromage-
dessert 15% NOURRITURES
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Manger à sa faim 14%
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LIBIDO
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Manger ce qu'on aime
17%
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Convivial 14% REPAS
Restaurant 6%
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Petits plats 13%
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(Modalités)
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On remarque que les classes obtenues ne rentrent pas
parfaitement dans le schéma. Elles ne seraient pas des noyaux de base,
mais des programmes articulant ces noyaux, des symplexes. Ces symplexes «
mêlent différents noyaux de base dans une articulation autonome
qui peut servir de règle d'action directement actualisable sous forme de
comportement ». Le noyau de base, PRENDRE, serait ici implicite.
Selon une étude de Mathé T, Pilorin T, Hebel, P.
pour le Centre de Recherche pour l'Étude et l'Observation des Conditions
de Vie, 2008, sur l'évolution des représentations sociales de
« bien manger » sur différentes années, il est ressorti
que :
Pour l'année 1988, ce qui ressort le plus, sont les
noms d'aliments : bien manger, c'est manger tel ou tel aliment. La relation
à la santé existe aussi mais sous les termes de « calories
», « régimes ».
L'année 1995 est plus accès sur la notion
hédoniste : plaisir gustatif, plaisir de l'acte social, plaisir de
manger, avec des mots tels « savourer », « raffiné
». L'aspect santé apparaît ici dans les termes « besoins
» et « produits naturels ».
Enfin, l'année 2007 se caractérise par une plus
forte orientation du vocabulaire sur la santé. Le mot «
équilibre » arrive en 5eme position en fréquence de
citation. La santé est maintenant associée à la mesure ;
bien manger est défini par des termes en rapport à la raison, la
conscience d'un problème. Quant à la notion de « plaisir
», elle persiste.
? Typologies de mangeurs :
En 2003, Jean pierre Corbeau établit trois profils de
mangeurs :
Les complexés du trop : ils se
méfient des aliments qui sont disponibles sur le marché, ils
veulent manger sain et achètent bio, certains vont jusqu'à
refuser de se nourrir par peur de manger. Et, à ces comportements
extrêmes s'ajoutent de plus en plus de « complexés du trop
pour raisons esthétiques ».
Les tenants du nourrissant consistant : ils
aiment les charcuteries et ne conçoivent pas de véritable repas
sans viandes et féculents. S'ajoutent aussi les « mangeurs
plutôt privilégiés qui réinvestissent le patrimoine
gastronomique de terroir » (par exemple, les urbains à la recherche
de leurs racines qui redécouvrent des produits régionaux :
cassoulet...)
Les tenants du nourrissant légers :
Adeptes du régime méditerranéen et des principes
diététiques, ils se méfient des sauces « qui ne
servent qu'à donner du goût ». Ils vont transgresser leurs
principes à des moments de grignotage, ou encore le week-end.
Cette typologie a été étoffée dans
Le baromètre santé nutrition 2008. En effet, il
a été établit des typologies de mangeurs en fonction d'une
synthèse des consommations déclarées et des principaux
facteurs qui y sont associés (incluant les représentations de
l'alimentation) ( voir annexe 1) On obtient alors :
Baromètre santé nutrition 2008
Il y a eu une évolution des typologies au cours du temps :
deux grandes évolutions ont été repérées:
- La réduction du temps consacré à
l'alimentation au profit de produits prêts à manger, dont diverses
formes de restauration hors domicile.
- L'émergence d'un modèle «
Diététique » visant l'équilibre nutritionnel face au
modèle « Gastronomie française traditionnelle »
dominant.
Trois catégories de groupes semblent moins
réceptifs aux recommandations du PNNS: ceux qui sont plus tournés
vers l'hédonisme, les adeptes de l'aspect pratique et ceux qui ont des
revenus très faibles. Cette situation peut être expliquée
par un certain nombre de déterminants :
- La culture alimentaire évolue
lentement. Il n'est donc pas surprenant que le modèle de
gastronomie française traditionnelle « hédoniste » et
reste depuis plusieurs siècles parmi les dominants
(particulièrement lors des fins de semaine et des moments festifs) et
qu'il soit relativement peu remplacé par un modèle
intégrant davantage les recommandations nutritionnelles du PNNS.
- Les jeunes 18-25 ans, qui ont toujours
connu un environnement d'abondance de nourriture, sont relativement «
désimpliqués » à l'égard de l'alimentation.
Les informations nutritionnelles les touchent peu. Ils sont envahis par une
multitude de messages venant des médias, d'Internet et de leur
téléphone portable. Les plaisirs de l'alimentation sont
très probablement concurrencés par de nombreuses autres sources,
d'autres plaisirs sensoriels : la musique, l'univers d'images
(télévision, publicité, voyages...), les sports ... Ces
« nomades
quotidiens » recherchent les qualités
pratiques. Ceci les conduit donc à la consommation de produits
prêts à manger.
- Les individus qui ont des difficultés
financières essaient surtout de manger suffisamment et ne
réussissent pas à manger ce dont ils auraient envie. Lors des
occasions festives et lorsque les contraintes financières se
réduisent, les frustrations quotidiennes les entraînent plus vers
la recherche de plaisir et de gastronomie que vers la diététique.
Le souci de savoir s'il y aura assez à manger pour le lendemain
ne les conduit pas à une approche des conséquences de
leur alimentation à long terme : celle-ci n'a guère de
sens pour eux.
? Effets d'autres variables sur le
comportement alimentaire
· Effet des connaissances :
Il a été montré, dans une recherche sur
« Les effets de variables psychosociales sur l'intention d'adolescents
obèses de changer leurs comportements » (Verlhiac et al, 2006), que
les connaissances en nutrition corrélaient négativement avec le
grignotage, le fait de regarder la télévision et l'indice de
masse corporelle élevée.
De plus, selon le baromètre santé nutrition
région PACA 2008, les personnes connaissant les recommandations du PNNS
suivent plus ces recommandations.
· Effet de genre :
Dans son article « real men don't diet », Brendan
Gough (2005), réalise une analyse des représentations
véhiculées par les médias sur les hommes et
l'alimentation. Il expose le fait que les médias pèsent sur les
hommes, en effet, se préoccuper de la cuisine n'est pas être
« masculin », en ce sens, pour améliorer l'impact des conseils
nutritionnels sur les hommes, il faudrait élargir l'image
propagée par les médias.
· Préférences alimentaires et goût
pour la cuisine
Dans le baromètre santé PACA 2008, ils
étudient la représentation de « cuisiner », sous la
même formulation : « pour vous faire la cuisine c'est... ».
C'est principalement une façon de manger équilibrer 93,6% et un
acte convivial 93,1%.. Leurs recherches ont aussi porté sur les raisons
de composition des menus, les facteurs principaux seraient la santé, les
habitudes du foyer et les préférences personnelles. Sachant que
pour les 18-25 ans, ce sont les préférences personnelles qui
viennent en premier lieu.
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