II. La cohésion du groupe dans le
sport collectif :
Appartenir au monde d'une discipline sportive définit
chez tous les acteurs (dirigeants, entraîneurs, joueurs...) un ensemble
de croyances qu'ils sont plus ou moins conscients de partager et qui
exprimerait leur identité sociale Tajfel( 1982). En effet, on peut
admettre que chaque jeu sportif collectif, de par son essence, sa logique
interne et son histoire, favorise l'émergence d'un univers psychologique
que l'on retrouve, dans la conception de tous les acteurs à travers un
système de normes, mais aussi à travers des modes d'actions
privilégiés. Il existerait une forme de sub-culture propre aux
groupes sportifs avec une histoire, un style, des images ayant du sens pour les
membres et constituant un agent de socialisation important, ensemble qui serait
en partie transmis par les médias de masse.
En ce sens, être footballeur ce n'est pas seulement
être joueur et faire du jeu sportif collectif, c'est aussi montrer que
l'on partage un ensemble d'attitudes mentales, de comportements collectifs, et,
de fait, entretenir les caractéristiques de son univers d'appartenance.
Ces dernières instituent le groupe en tant que personne morale et lui
donnent une identité collective (Deschamps, 1984, 1991). Elles
renforcent également la délimitation de ses frontières.
« Nous sommes ce que nous sommes parce qu'ils ne sont pas ce que nous
sommes » (Tajfel, 1982). En d'autres termes, les croyances
partagées renforcent l'identité sociale et les sentiments de
solidarité (Lipiansky, 1992). En référence au travail de
Bar-Tal (1999) sur la construction du groupe ce sont essentiellement les
notions de normes et de valeurs qui définissent la
spécificité de l'univers auquel on appartient et le
différencient des autres.
Les normes sont des règles, généralement
implicites, qui régissent la manière de penser, de juger,
d'éprouver, de parler et d'agir, qui déterminent «ce qui se
fait» et «ce qui ne se fait pas». On peut aisément
percevoir dans la préparation des matchs de sport collectif de nombreux
comportements normés qui relèvent presque du rituel: l'heure et
le lieu du rendez-vous, le déshabillage dans le vestiaire, le moment du
discours de l'entraîneur, l'échauffement etc...
B. La performance :
I. Les déterminants fondamentaux de la
performance :
La naissance des concepts de motivation et de satisfaction au
travail est étroitement liée au développement du concept
de performance. Les résultats de recherche sur ces deux concepts ont
abouti à des conclusions parfois convergentes, parfois divergentes,
selon les périodes et les avancées de la connaissance.
1. La motivation :
Depuis Taylor et Fayol, la performance est un objet de
recherche fondamental des auteurs en théorie des organisations. Chez
Taylor, l'homme est un « flâneur », il n'est pas disposé
de lui même à travailler dur pour une entreprise ou une
organisation. Il faudrait par conséquent le contrôler et le
motiver. Cette proposition sous-tendrait que les concepts de motivation et de
traits de personnalité s'opposeraient. Le premier interviendrait pour
remédier aux déficiences suscitées par le second. Cette
idée est remise en cause avec l'émergence du courant des
relations humaines. Avec lui, l'analyse des déterminants de la
performance se focalise sur les attitudes et les comportements humains dans les
organisations. Les travaux sur la dynamique des groupes par Lewin et ses
collègues, posent les premiers principes selon lesquels la motivation et
la satisfaction au travail seraient des déterminants individuels
importants de la performance au travail.
La mise en relation de la motivation au travail avec la
performance est de plus en plus examinée au cours des années et
aboutit à l'une des théories de la motivation les mieux
adaptées à l'étude du phénomène : la
théorie des attentes (Vroom, 1964). Avec cette théorie, la notion
de « motivation à être performant » devient couramment
utilisée. La performance au travail sera même centrale dans
l'extension de la théorie des attentes proposée par Porter et
Lawler (1968). La motivation apparaît dans le modèle
théorique de ces deux auteurs comme le déterminant essentiel de
la performance. Elle explique l'orientation des efforts de l'individu dans son
travail, ainsi que l'intensité des efforts qu'il déploie et de
leur permanence dans le temps. « Faire des efforts significatifs pour
faire un bon travail » serait la traduction observable d'un comportement
motivé dans le travail. Ce comportement résulterait en
performance, à condition que l'individu, d'une part, dispose des
capacités pour atteindre les objectifs de performance attendus par
l'organisation, d'autre part, perçoive adéquatement son
rôle dans l'organisation. Puis, si les performances
réalisées génèrent des récompenses
intrinsèques et extrinsèques, un sentiment de satisfaction ou
d'insatisfaction apparaîtra. Ce sentiment dépendra de
l'équité ressentie à l'égard des récompenses
intrinsèques et extrinsèques obtenues. Le modèle
théorique s'achève par une boucle de rétroaction montrant
que le sentiment de satisfaction éprouvé à l'égard
des expériences de travail à un instant donné, conditionne
les perceptions futures qui motiveront l'individu à orienter ses efforts
pour être de nouveau performant.
La nature des objectifs fixés à l'individu
explique l'orientation, l'intensité et le maintien de ses efforts dans
le travail (Locke et Latham, 1990). La théorie de la fixation des
objectifs énonce les différentes conditions de définition
des objectifs qui conduisent à la motivation, puis à la
performance: précision des objectifs, difficulté,
intensité, sens et clarté du contenu, feed-back, transparence de
l'information initiale, récompenses associées, soutien de
l'encadrement, cohérence avec ses propres capacités
perçues par l'individu.
Les mécanismes qui transforment la motivation en
performance sont de quatre ordres selon (Locke et al, 1981).
o une focalisation de l'attention et des actions vers la
réalisation des objectifs.
o un déploiement d'efforts accrus.
o une persistance dans l'effort pour accomplir le travail et
dépasser les échecs.
o un développement de stratégies
orientées vers la réalisation efficace du travail.
(Mento et al, 1987 et Wright, 1990) ont montré le lien
positif et élevé entre la difficulté des objectifs et la
performance au travail. La fixation des objectifs montre des liens positifs
à la fois avec la performance individuelle, la performance du groupe
(équipe) et la performance organisationnelle (Mitchell et Daniels,
2003). Des travaux récents précisent également que le lien
entre les objectifs et la performance serait modéré par
l'engagement dans les objectifs. Ce modérateur est défini par
Tubbs (1994) comme la force de l'attachement d'une personne envers un objectif
personnel. Cependant, les premiers résultats sont contradictoires. Un
méta analyse de nombreuses études ont montré un faible
effet, voire un effet négatif des objectifs sur la performance lorsque
les tâches sont complexes dans le travail. La même analyse est
faite dans le cas de nouvelles tâches affectées dans un emploi. Il
est suggéré alors que les stratégies
développées pour réaliser les tâches auraient un
effet positif. Dans les cas de tâches complexes et nouvelles, travailler
« intelligemment », plutôt que « durement »,
conduirait à de meilleures performances.
2. la satisfaction au travail :
Concernant le concept de satisfaction au travail, et son lien
avec la performance au travail, le consensus n'est pas de mise.
Récemment, Saari et Judge (2004) relevaient dans les discours, des
positions contradictoires quant au lien entre la satisfaction et la performance
des individus au travail.
Iaffaldano et Muchinsky (1985), en réalisant une
méta-analyse sur plus de 200 études théorico-empiriques,
montraient que la corrélation moyenne entre la satisfaction et la
performance était faible.
Pendant toute la seconde moitié du 20ème
siècle, l'étude du lien entre la satisfaction au travail et la
performance a connu des analyses et des débats contradictoires. La
croyance que des individus heureux seraient plus productifs se
développe. Les études empiriques qui vont suivre, notamment entre
1960 et 1985, aboutiront à des résultats pessimistes par rapport
à la proposition soutenue par l'école de pensée des
relations humaines. Iaffaldano et Muchinsky (1985), en concluant sur la faible
corrélation moyenne entre la satisfaction au travail et la performance,
jettent un froid dans la communauté scientifique.
Les travaux contemporains qui s'appuient sur cette
distinction, commencent à produire des résultats qui remettent en
question les résultats d'Iaffaldano et Muchinsky sur le lien entre la
satisfaction au travail et la performance au travail. C'est l'entreprise que se
sont fixés Motowidlo avec d'autres chercheurs du domaine depuis quelques
années. Subséquemment, cette analyse souligne que les recherches
antérieures reposaient sur des enquêtes empiriques
hétérogènes. Les techniques de mesure de la performance
étaient dépendantes des terrains choisis et de la
définition opérationnelle donnée à la performance
(définition souvent jugée comme étant très
étroite). Les comparaisons ont possiblement été
perturbées par cette
hétérogénéité.
II. Les piliers de la performance :
D'après Frédéric Haumonte, Colloque Sport
et Management(2006) il ya cinq piliers de la performance :
1. l'Identité :
Gersende Delorys, coach, préparateur mental et
consultante, également responsable de la commission d'expertise sportive
du Paris Université Club, écrit sur le blog de l'Express
après la Coupe du Monde en Allemagne : « Comme entraîneur de
sportifs de haut niveau, je ne consacre que 10 % de mon temps à la
préparation mentale. Le gros de mon activité, c'est un
travail sur l'identité. Pourquoi je cherche la performance ? Pour aller
où ? Au service de quoi ? A quel prix ? Un mot synthétise tout
mon travail : celui d'ontologie. Autrement dit : la science de l'être.
» Cette question rejoint le sens de mon activité. Les
crises identitaires sont légion chez les sportifs. Citons par exemple
la belle histoire de « Lilian Thuram » revenant à la
compétition alors qu'il avait décidé d'arrêter, et
qui déclarait dernièrement : « J'ai tellement
reçu d'amour que je ne peux pas arrêter de jouer ».
a. L'identité interne : Prendre
conscience de « qui je suis » pour moi est capital. Cela
nécessite de me connaître, de savoir mes valeurs, d'être
conscient de mes modes de fonctionnement, de mon type d'intelligence, de mes
points forts / faiblesses.
b. L'identité externe : Prendre
conscience de « qui je suis » pour les autres ! Cela concerne mon
image, celle de mon entreprise, de mon club... C'est aussi mettre à jour
ma mission : quelle contribution est-ce que j'apporte à mon
environnement ?
2. Orientation et objectifs : Avoir
conscience de l'objectif, du but à atteindre. A tout objectif flou
correspond une bêtise précise !
En Interne : Ce que je veux atteindre. Comment est-ce que
je me vois dans 5, 3, 1 an dans mon club. Quel plan de carrière est-ce
que je me planifie dans mon entreprise ?
En Externe : Ce qu'attendent les autres de moi (mon
environnement). Par exemple les objectifs de mon club (« la montée
en ligue 1 »). Les objectifs que m'a fixés mon directeur lors de
l'entretien annuel d'évaluation...
3. Organisation, cadre, moyens En Interne :
Quels moyens est-ce que je mets en place pour atteindre mes objectifs
? En sport, quel temps je passe à m'entraîner, à
travailler, à me préparer mentalement ? Avec mes amis ? Pour
faire autre chose ? En Entreprise : quelle efficacité ai-je dans la
gestion de mon temps, dans mon organisation quotidienne (emails, gestion de
l'information, relations clients...) ? Quel temps pour prendre du recul sur mon
travail, mes relations avec mon patron, mes employés... ? Quel temps
pour recharger mes batteries en énergie? Quel temps seul ? Quel temps
avec ma famille ? Quelle hygiène de vie ?
4. Communication interne : Il y a deux
niveaux ici :
a. la communication interne au sens du groupe
auquel j'appartiens :
En entreprise, communication interne signifie communication
entre collègues, entre services, entre hiérarchie et
subordonnés... la question sera de savoir quels types de relations
est-ce que j'entretiens avec mes collègues, mon patron, les syndicats...
Dans une équipe de sport collectif, les mêmes questions se posent.
La cohésion passe par une bonne entente,
beaucoup de rires, de joies partagées et la possibilité de
dialoguer même au coeur des difficultés
b. la communication interne avec
soi-même :
Un autre degré, souvent laissé pour compte,
concerne la communication avec soi. Comment est-ce que je communique avec
moi-même ? C'est le sportif qui se parle régulièrement
(c'est différent de se dire « allez, vas-y » ou « quel
nul !»). Dans mes stratégies d'échec ou de réussite
qu'est-ce que je me dis ? Qu'est-ce que je ressens ? Quels comportements
(mimiques, tics) est-ce que j'adopte ? En sport collectif, les numéros
de maillots porte-bonheur, le choix des vestiaires... autant d'ancrages qui ne
sont là que pour aider à garder une stratégie de
vainqueur.
5. l'Evolution : L'évolution est
la somme de tous mes choix éclairés par les
précédents « piliers ». Par quoi est-ce que je commence
pour avancer sur le chemin de mon accomplissement, de ma réussite ?
Comment est-ce que je m'y prends concrètement pour avancer ? En cela
elle est le fruit mûr d'un bon coaching.
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