Chants de recueils et culte Protestant aujourd'hui à Kinshasa. Effort pour la revalorisation des chants traditionnels( Télécharger le fichier original )par Maurice Mondengo Iyoka B Université protestante au Congo - Diplome d'études approfondies en théologie 2008 |
1.3.1.4.1.1 Quel chant qui convient ?Kerrien pense avec raison que dire « quel chant qui convient ? », est une des difficultés toujours au rendez-vous chaque fois que les acteurs de la liturgie se mettent à préparer le rassemblement cultuel. Car comme il le dit lui-même et nous le citons, « chacun sait combien le chant tient une place importante dans la vie culturelle, économique et humaine, surtout lorsque l'homme se retrouve avec d'autres pour célébrer un événement particulier (fête de famille, rencontre sportive). On comprend donc que toute célébration liturgique, puisqu'elle est action communautaire, donne une grande place au chant et que sa place soit essentielle dans la célébration chrétienne qui dit l'action de grâce et la louange. Dès lors, une question se pose de manière très forte aujourd'hui face au déferlement des chants liturgiques ou religieux : en célébration, quel est le chant qui convient ? ».401(*) D'après cet auteur, si le chant liturgique n'est pas un problème en soi, mais le déferlement qu'occasionne sa large production aujourd'hui, serait à la base de la désorientation de son choix pour le culte. On est facilement exposé à des tentations orientées vers « ce qui plait » qui est domaine du plaisir, au lieu d'être orienté vers la quête de la fonction que le chant a à remplir par rapport au temps et à l'action liturgiques. L'illustration qu'en donne Kerrien par rapport au choix de critères est très éloquente : Lorsque vous achetez un disque compact ou une cassette, vous choisissez évidemment la musique qui vous plait. Peut-on choisir ce critère lorsqu'il s'agit de chant liturgique ? Si le plaisir de chanter aide à mieux célébrer, il est clair qu'il ne peut être ni le seul ni le premier critère de choix du chant liturgique. En effet, dans la liturgie, chaque chant a d'abord une fonction à remplir par rapport au temps liturgique et par rapport à l'action liturgique qu'il accompagne. 402(*) Il conviendrait de faire remarquer que le problème ici n'est pas celui de faire croire que le chant liturgique ne devait pas plaire, d'ailleurs on n'a jamais dit cela. Mais que le plaisir soit le seul critère de choix, c'est cela toute la difficulté. Car dans la liturgie, chaque chant qu'on entonne a d'abord une fonction à remplir dans le temps et l'action liturgiques où il intervient. Cela dit, il est clair que le plaisir de chanter pourra aider les fidèles à mieux célébrer.403(*) 1.3.1.4.1.2 Choix du chant et difficultés à surmonter
Dans le choix du chant pour le rassemblement cultuel, les acteurs de la liturgie ont des difficultés à vaincre404(*). Mais ces difficultés, estimons-nous, ne peuvent être surmontées que si les acteurs de la liturgie prenaient pas en compte et à coeur un nombre de réalités incontournables qui accompagnent le chant dans les esprits de certaines personnes, malheureusement très nombreuses. Il est nécessaire d'appuyer sur le fait que dans la conception des nombreuses personnes aimant la musique de l'Église et mieux le chant liturgique, ceux-ci sont faits pour égayer. Une autre conception contraire à celle-là est à rejeter. Il est à propos de reconnaître que c'est déjà là une difficulté majeure et difficile à renverser dans les mentalités de certains fidèles, mais pas toujours impossible à vaincre. Ainsi, dans la grille des conceptions ancrées dans la mentalité de nombreux fidèles aujourd'hui, on peut enregistrer entre autres : (1). La vraie musique est celle qui procure du plaisir. Or la vraie musique n'est pas toujours celle qui procure du plaisir ; (2). Un nouveau chant est toujours le meilleur, l'ancien est à rejeter. Or un nouveau chant n'est pas toujours le meilleur ni l'ancien toujours à rejeter ; (3). Le chant qui est méritoire pour la liturgie est celui qui est commercialisé et devenu populaire. Or le chant qui est méritoire pour la liturgie n'est pas toujours celui qui est commercialisé et devenu populaire ; (4). On peut aussi bien chanter sans les autres : chacun pour soi, Dieu pour tous. Or on ne peut pas bien chanter sans les autres. L'esprit de chacun pour soi, Dieu pour tous dans le chant récuse la fonction d'unification qui est reconnue au chant liturgique ; (5). Tout chant se rapportant à Dieu peut s'entonner dans le culte peu importe le moment et le temps liturgiques. Or tout chant liturgique, bien que se rapportant à Dieu ne s'entonne pas à n'importe quel moment liturgique. La liste peut s'allonger infiniment. Ces réalités seraient peut-être de celles que Kerrien déverse dans le panier des difficultés à surmonter pour faire un bon choix du chant liturgique. Essayons d'approfondir, avec cet auteur, quelques-unes des difficultés qui nous semblent communes dans cet exercice. Fort de ce que le choix du chant liturgique, par les acteurs de la liturgie, pour le culte se confronte aujourd'hui aux difficultés pareilles à celles qui suivent, les recommandations de Kerrien peuvent éclairer.405(*) Nous pouvons donc les présenter sous forme de thèses. Thèse 1 Dans beaucoup d'esprits s'est installée l'idée que la seule vraie musique est celle dont le seul but est de procurer du plaisir à l'auditeur. Or, la musique liturgique est toujours une musique destinée à accompagner un rite précis ou du moins une action liturgique.
Thèse 2 Le déferlement des musiques de variété et l'éclatement des cultures musicales ont élargi le champ des styles musicaux et augmenté leur vitesse de diffusion. En conséquence, de multiples " chapelles " musicales sont nées, provoquant des phénomènes de rejet ; un système de " mode " passagère s'est répandu, où un genre nouveau chasse sans cesse le précédent. Thèse 3 L'abondante production de chants liturgiques ou religieux n'échappe pas aux phénomènes d'exaltation du goût individuel et à l'instabilité de la mode. Le choix des chants devient excessivement difficile tant il est soumis aux pressions des courants ou des modes du moment. Alors, la convenance liturgique cède à un système commercial dont les principes premiers ne sont ni l'objectivité liturgique, ni la qualité des textes et des mélodies. Thèse 4 Or, la musique liturgique et particulièrement le chant ont une fonction d'unification. D'une assemblée diverse d'âges, d'expériences, de cultures, ils doivent faire une assemblée célébrante, chantant son Seigneur d'un seul coeur (choeur) et d'une même voix. Thèse 5 Or, le chant liturgique doit avoir un minimum de stabilité de par son rapport au rite. Non seulement il doit aider à le déployer, mais il sert aussi à l'identifier ; non seulement il sert à la beauté des célébrations, mais il doit nourrir la foi des fidèles. L'actuelle ambiance de goûts individualistes, de réflexe de consommation, de recherche à tout prix de l'originalité passagère des modes, rendent difficile le travail de ceux qui ont à trouver le chant liturgique le mieux adapté au rite. Thèse 6
Pourtant des solutions existent et elles peuvent être mises en oeuvre à condition d'avoir toujours à l'esprit que les chants doivent " s'accorder avec l'esprit de l'action liturgique " (CSL 116) et qu'ils doivent être "en connexion étroite avec l'action liturgique" (CSL 112). Il conviendra de revenir particulièrement à la liturgie des Églises membres de l'ECC. Nous le ferons aux fins d'examiner et son contenu en relation avec le chant. C'est à ce niveau de réflexion que nous tenterons de répondre aux questions que nous soulevons sur les chants de recueils et le culte protestant d'aujourd'hui. Mais qu'en est-il de la liturgie de nos Églises protestantes au Congo ? Comment se présente-elle aujourd'hui? Qu'a-t-elle de particulier ? Aujourd'hui, peut-on affirmer que la liturgie des Églises membres de l'ECC est suivie ? C'est à ces questions que nous allons essayer de répondre.
* 401 Ibid. * 402 Ibid. * 403 Ibid. * 404 S. KERRIEN., art. cité. * 405 Ibid. |
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