La présence ecclésiale en milieu hospitalier: le cas de l'archidiocèse de Bangui en République Centrafricaine( Télécharger le fichier original )par Elkana NDAWATCHA Université catholique d'Afrique Centrale Yaoundé - Baccalauréat canonique en Sciences Religieuses 2002 |
III. 2. MEDIATION ENTRE JESUS ET LE MALADEMarc et Luc relèvent la notion de solidarité et de médiation avec la malade en évoquant les personnes qui l'entourent : Jésus et ses disciples. L'Eglise doit aussi entourer le malade à l'hôpital comme Jésus et ses disciples le faisaient. Chez Matthieu, c'est cette attitude d'intimité avec la personne qui est mise en lumière. C'est cette attitude qui devrait être réservée aux malades en principe à l'hôpital. Préserver la pudeur, la dignité et l'intimité de la personne malade. Car, aujourd'hui, le malade est dépossédé de son corps : il est exposé, confié à tout le monde, soigné, regardé, touché manipulé par tout le monde. Le malade ne doit pas être exposé au vu et au su de tout le monde quand il est traité. Jésus l'a compris et c'est ce qu'Il a fait à la belle-mère de Pierre. C'est une interpellation pour tous ceux qui entourent les malades de faire comme Jésus. Aujourd'hui, les agents pastoraux et hospitaliers assurent cette médiation. Pour cela, l'Eglise doit assurer leur formation dans la prise en charge convenable des malades. Ils seront formés dans les domaines de la psychologie du malade, de l'éthique, de la spiritualité, de la pastorale. Etant formés, ils pourront alors mieux servir le malade qui leur est confié sans toutefois altérer l'image de Dieu qui est en lui. Cette formation s'avère importante car elle permettra à ceux-ci d'agir avec compétence dans les soins et dans l'accompagnement du malade. Le pape Benoît XVI a mis l'accent sur cette compétence : « En ce qui concerne le service des personnes qui souffrent, la compétence professionnelle est avant tout nécessaire : les soignants [et les agents pastoraux] doivent être formés de manière à pouvoir accomplir le geste juste au moment juste, prenant aussi l'engagement de poursuivre les soins [et l'accompagnement] »51(*). Il poursuit, car ce sont des êtres humains qui ont besoin, en plus des soins techniques corrects, d'humanité, de l'attention du coeur, de la « formation du coeur 52(*)». Ceux qui s'engagent auprès du malade doivent comprendre que leur présence est un ministère. Ils jouent un rôle privilégié dans l'accomplissement humain du malade53(*) Parmi les soignants, il y a des chrétiens. Le chrétien qui travaille auprès du malade, est là pour exprimer la volonté et les désirs de Dieu54(*) envers son prochain. En effet, le rôle du chrétien qui sert le malade se situe dans cette prise de conscience qu'il y a un lien nécessaire entre vie et foi, engagement dans le monde et vie de charité. Le service des malades : visites d'amitié, services professionnels, visite pastorale auront une importance capitale pour faire cheminer les malades vers l'acceptation de leur état et vers Dieu. Le geste de celui qui approche les malades est symbole d'un geste plus grand et plus total, geste qui vient de Dieu pour envelopper l'homme et le développer. La mission de l'Eglise se poursuit à travers les agents hospitaliers ainsi que les visites faites aux malades et à leurs familles. C'est déjà un accompagnement du malade et une forme de présence aux malades : présence à travers ceux qui procurent les soins médicaux et spirituels aux malades. La présence de l'Eglise doit s'exprimer tout au long de la maladie et doit se poursuivre après la guérison d'où la nécessité de connaître les dimensions religieuse, biologique, psychologique, sociale du malade. Et pour réaliser une assistance authentique, il faut des ressources en personnel.55(*) En effet, « L'accompagnement personnel des malades par les chrétiens, les prêtres [et même les soignants] est indispensable pour éclairer et garantir le sens le plus profond de toute l'aide qui leur est apportée au nom du Seigneur »56(*). Pour que la présence de l'Eglise soit authentique et fructueuse en milieu hospitalier, elle doit collaborer étroitement avec les professionnels médicaux. Car elle a besoin d'eux et eux aussi ont besoin de l'Eglise. La présence de cette dernière en milieu hospitalier n'est pas une occasion de défendre unilatéralement les causes du malade et de fustiger les pratiques et les comportements des soignants. Il faut une présence pacifique. L'Eglise doit aux soignants reconnaissance et gratitude pour le travail qu'ils effectuent pour le bien des malades. Siracide l'a souligné : « Honore le médecin pour ses services, car lui aussi, c'est le Seigneur qui l'a créé... » (Si 38, 1-12). Ils ont besoin d'une écoute, d'une proximité, d'un soutien et d'une aide pour vivre leur travail de manière consciente et salutaire. Pour cela, l'Eglise leur assurera une formation. La formation des professionnels de santé et agents pastoraux sera une préoccupation de l'Eglise. Prendre soin de celui qui soigne, qui accompagne les malades, est une manière indirecte de soigner les malades eux-mêmes et de se rendre présent à leur côté. Elle leur enseignera à être des serviteurs compétents et dévoués, promoteurs de l'humanisation, défenseurs des droits des malades, témoins de Jésus dans le milieu hospitalier. Ces agents considéreront que recueillir une main moribonde, un geste gentil et un sourire sont plus importants que tous les médicaments. Ils recevront en plus de leur formation, une formation en bioéthique chrétienne et médicale. L'Eglise entretiendra avec eux une relation faite de dialogue, de collaboration, de formation, de respect. Promouvoir le dialogue et la collaboration avec les soignants et agents pastoraux sera un devoir prioritaire pour l'Eglise. Parmi les soignants qui font office de soins en milieu hospitalier, il y a des chrétiens. Sous l'impulsion du service de la pastorale ou de l'aumônerie ou relevant de leur propre initiative, ils peuvent créer une association des professionnels chrétiens laïcs qui collabore avec l'aumônier de l'hôpital et l'archidiocèse. Ils vivront l'expérience de leur foi dans l'exercice de leur profession. Par leur canal, l'Eglise pourra intégrer l'organisation hospitalière puisqu'elle est quasi inexistante. Cette association pourra avoir comme objectif par exemple : - Promouvoir un laïcat chrétien engagé dans le milieu hospitalier vivant l'Evangile dans sa profession. - Susciter des méthodes de soins et des occasions de rencontre, de réflexions sur les questions de santé. - Aider les agents hospitaliers dans leur épanouissement humain, professionnel, spirituel et religieux ainsi que dans leur formation en bioéthique. - Promouvoir la santé et les milieux hospitaliers, l'attention intégrale au malade et l'assistance sanitaire à tous les niveaux. - Collaborer à la défense des droits des malades sans aucune discrimination : « je ne sais qui tu es, de quel pays, de quelle race, de quelle religion tu es, tu souffres et cela me suffit »57(*). * 51 Benoît XVI, op. cit., p. 62. * 52 Ibid., p. 63. * 53 Mikaël SCHATTNER, Souffrance et dignité humaine, Mame, Paris, 1993, p. 164. * 54 Mario ALBERTON, op. cit., p. 122. * 55 Evelyne FRANC, op. cit., p. 138. * 56 Edouard SCHILLEBEECKX, « Les sacrements dans le plan de Dieu », in Présences 102, 1968, pp. 33-34. * 57 Citation utilisée dans le jargon médical pour combattre toute forme de discrimination à l'égard du malade. C'est l'être malade qui est le centre d'attention et non les détails. |
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