CHAPITRE
2 :
LES STRATEGIES BANCAIRES
Section 1 : LES
STRATEGIES BANCAIRES : « CONCEPTS ET EVOLUTION »
La stratégie d'entreprise en tant qu'objet de recherche
et de conceptualisation n'a qu'un tiers de siècle. Pourtant et
malgré son jeune âge, elle est en train de se dissoudre dans des
objets ou des champs théoriques voisins. Les frontières entre
stratégie et management s'estompent. Le « marketing
stratégique » obéit aux mêmes tendances
hégémoniques que le marketing vis-à-vis des autres champs
de la gestion. L'émergence du « contrôle stratégique
», qui traduit une crise profonde du contrôle de gestion en tant que
discipline, ne fait qu'ajouter à la confusion.
Le vocabulaire courant traduit ces pertes de sens. Le terme
stratégie est employé pour décrire toutes sortes de
décisions, d'actions, de processus ou de ressources. Lorsque tout
devient stratégique, plus rien ne l'est.
Au cour de cette recherche, on propose de procéder
à un retour aux sources, aux temps proches ou lointains où la
stratégie, qui fût longtemps un art militaire avant d'être
empruntée par les managers, présentait moins
d'ambiguïté. Les définitions héritées de ces
périodes nous permettront de montrer que les développements
actuels de la pensée en stratégie contribuent davantage à
la confusion des genres qu'au progrès de la connaissance.
Pour tenter de redéfinir le concept de stratégie
comme objet de recherche clairement identifié, on expose quelques
propositions et voies de réflexion. Ces propositions s'appuient sur le
concept de processus stratégique. La stratégie mise en oeuvre par
des processus stratégiques traduit en actions des intentions
finalisées. Les processus stratégiques sont créateur de
valeur et visent à modifier les conditions d'insertion de la firme dans
son environnement en exploitant des ressources et des compétences qui,
sous certaines conditions, sont susceptibles de générer des
avantages compétitifs durables. Enfin, les processus sont plus
facilement observables que les ressources et compétences qu'ils
mobilisent et les relations entre processus et performances sont relativement
faciles à identifier.
I. La stratégie dans
l'histoire :
Origine
militaire :
La stratégie a des origines militaires. Elles ont
été rappelées par un ancien militaire converti à la
stratégie d'entreprise. De « Sun Tze » à nos
jours, sur plus de deux millénaires, les principes de la
stratégie militaire ont été élaborés
progressivement.
En premier lieu, on doit retenir que, pour un militaire, la
stratégie est toujours subordonnée à la
politique115(*). Le
militaire est au service de la chose publique. Il n'intervient que sur ordre du
politique lorsque la politique n'a pas été en mesure de
régler les problèmes pendants. « Clausevitz »
illustre parfaitement ce propos lorsqu'il déclare que la guerre n'est
que la poursuite de la politique mais par d'autres moyens.
« Foch » fût un des grands pédagogues de la
guerre. Il lui appartînt de formuler les trois grands principes de la
guerre : concentration des forces, économie des moyens et
mobilité.
Principe de concentration des
forces : on doit choisir d'attaquer le point faible de
l'adversaire en mobilisant des forces telles que la victoire soit
assurée. Il faut être meilleur que les adversaires sur un terrain
limité plutôt que médiocre partout. Ce principe s`oppose
à la dispersion des ressources sur de multiples fronts.
Principe d'économie des
moyens : on ne doit exposer dans l'action que les ressources
nécessaires et suffisantes pour atteindre les objectifs fixés.
Cela suppose que l'action se déroule dans un contexte de ressources
limitées et coûteuses.
Principe de mobilité : il
a pour but de préserver la liberté d'action, c'est-à-dire
le choix du lieu, du moment et de l'opportunité de combattre.
Inversement, limiter la mobilité d'action de son adversaire consiste
à le priver de telles possibilités de choix de telle sorte que
ses actions soient parfaitement prévisibles et qu'une riposte
appropriée puisse leur être opposée.
Ces principes s'appliquent au combat comme à son
évitement c'est-à-dire à la dissuasion. Cette
dernière est efficace lorsque la menace est concentrée sur des
cibles vitales pour l'ennemi et que la mobilité des forces de dissuasion
est garantie. La stratégie militaire est un art de l'action et de la
dissuasion.
* 115 On notera que la
hiérarchie des concepts est ici l'inverse de celle des gestionnaires
pour qui la politique est une forme de mise en oeuvre de la stratégie.
En ce sens, c'est la politique qui dépend de la stratégie.
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