I/ Le cadre théorique de la recherche
Afin de répondre au mieux à notre
problématique (le climat éthique des concessions
automobiles françaises influence t-il le comportement éthique de
leurs vendeurs ?), il est nécessaire de l'aborder dans un
premier temps sous l'angle de la théorie.
Nous allons donc éclaircir le concept d'éthique,
expliquer le processus de décision éthique, puis mettre en
évidence les comportements non éthiques et les facteurs
d'influence. Nous aborderons ensuite la notion de climat éthique et nous
présenterons différentes théories pour analyser le
comportement éthique du vendeur.
1) Le concept d'éthique :
L'éthique est un concept difficile à
définir. Pour certains auteurs, l'éthique est synonyme de morale.
La définition du dictionnaire La pratique de la philosophie de A
à Z15 confirme cela.
Pour d'autres penseurs, tels que Ricoeur16, il ne
faut pas s'attarder à différencier ces deux termes car ils
peuvent s'employer l'un à la place de l'autre. D'autres encore, pensent
que l'éthique remplace la morale « en substituant aux valeurs de
Bien et de Mal les modes d'existence Bons ou Mauvais, c'est-à-dire que
l'éthique peut alors remplacer la morale en se révélant
titre une application directe de principes moraux17». Certains
aussi, confondent l'éthique avec la déontologie.
Nous allons donc tenter de distinguer l'éthique de la
morale et de la déontologie.
15 « L'éthique est un synonyme de morale,
c'est-à-dire l'art ou pratique ayant pour fin la vie bonne et heureuse
».
16 Ricoeur, P., (1990), Soi même comme un autre,
Le Seuil, Paris, p200
17 Didier ROCHE (enseignant chercheur à l'Ecole
Supérieure de Commerce de La Rochelle.), Ethique et performance des
vendeurs sédentaires : Une relation étroite au sein d'un magasin
d'une enseigne de la grande distribution spécialisée, p3
a) L'éthique et la morale :
D'après Samuel Mercier, l'éthique et la morale
sont étymologiquement équivalentes : ««éthique
» renvoie à une racine grecque, ethos (moeurs) et « morale
» (mot latin proposé par Cicéron pour traduire le mot
grecque « éthique »), renvoie à une racine latine
« mores ».18»
D'après Didier Roche (enseignant chercheur à
l'Ecole Supérieure de la Rochelle), lorsqu'on parle de morale, il en
ressort deux sens :
- La morale peut être considérée comme
étant « une sorte de référence, un ensemble de
règles »
- La morale peut aussi être vue comme étant un
« impératif catégorique » (sens le plus courant).
L'impératif catégorique est un concept de la philosophie morale
d'Emmanuel Kant (Fondation de la métaphysique des moeurs, 1785).
L'impératif catégorique de Kant prend la forme de la loi morale,
qui s'énonce comme suit : « Agis de telle sorte que la maxime de ta
volonté puisse toujours valoir en même temps comme principe d'une
législation universelle. » Il consiste « en l'accomplissement
du devoir, c'est-à-dire que l'action juste est inexorablement gratuite
et désintéressée. »19 La morale est donc
la science du bien et du mal. Nous pouvons donc, d'après Didier Roche,
appeler morale, « le discours normatif et impératif qui
résulte de l'opposition du bien et du mal considérée comme
valeur absolue ou transcendante : c'est l'ensemble de nos devoirs20
». La morale répond alors à la question : « Que dois-je
faire ? »
Au contraire, l'éthique se différencie de la
morale par sa proximité à la prise de décision de
l'individu.
18 Samuel Mercier, L'éthique dans les
entreprises, Editions La Découverte, Paris, 1999, 2004, collection
Repères, p4
19 La pratique de la philosophie de A à Z,
éditions Hatier, Paris, Avril 2000
20 Didier ROCHE (enseignant chercheur à l'Ecole
Supérieure de Commerce de La Rochelle.), Ethique et performance des
forces de vente : une application empirique dans le secteur de l'immobilier,
p5
Selon, Jean-Jacques Wunenburger, deux traditions de
définition existent pour différencier l'éthique de la
morale (1993, p. XIV)21 :
Première tradition : l'éthique
comme
réflexion sur les fondements de la
morale
|
Deuxième tradition : morale universelle et
éthique particulière
|
- Ethique : science du comportement,
des moeurs ; étude théorique des
|
- Ethique : ensemble des règles de
conduite partagées et typiques d'une
|
principes régissant les choix
|
société donnée ; ces règles sont
|
pratiques (point de vue méta-
|
fondées sur la distinction entre le
|
moral).
|
bon et le mauvais.
|
- Morale : ensemble des moyens mis
|
- Ensemble des principes à dimension
|
en °oeuvre pour agir de façon
|
universelle, normative voir
|
humaine ; ensemble des
|
dogmatique ; fondée sur la
|
prescriptions concrètes adoptées par
|
discrimination entre le bien et le
|
des agents individuels ou collectifs.
|
mal.
|
|
Source : adapté de WUNENBURGER (1993, p. XIV) et
extrait du livre de Samuel MERCIER L'éthique dans les entreprises
page 4.
Pour Alain Etchegoyen, l'éthique n'est pas la morale.
La morale est, selon lui, « un système de valeurs et de devoirs qui
cimentent les rapports sociaux dans leur ensemble alors que l'éthique
regroupe des valeurs en fonction d'un intérêt donné.
L'éthique est du domaine du particulier, du personnel, alors que la
morale se veut universelle22. » Nilles (NILLES, 2001), confirme
l'aspect individuel de l'éthique. Cette dernière est, selon lui,
« fondée sur une disposition individuelle à
agir23. »
D'après André Comte-Sponville « la morale
commande, l'éthique recommande24.» Ainsi, si l'on part
de ce principe, il est possible de définir ce qu'est
l'éthique.
21 Samuel Mercier, L'éthique dans les
entreprises, Editions La Découverte, Paris, 1999, 2004, collection
Repères, p4
22 Alain Etchegoyen, La valse des éthiques,
éditions François Bourin, 1991, collection Agora
23 Didier ROCHE (enseignant chercheur à
l'Ecole Supérieure de Commerce de La Rochelle.), Ethique et performance
des vendeurs sédentaires : Une relation étroite au sein d'un
magasin d'une enseigne de la grande distribution spécialisée,
p3
24 Alain Etchegoyen, La valse des éthiques,
éditions François Bourin, 1991, collection Agora, p73
Cette dernière peut se définir comme
étant une discipline cherchant à « énoncer des
propositions universellement valables sur l'action bonne et juste »
(Höffe, 1993)25. Cependant, il faut souligner que chaque
individu est différent, par conséquent, le sens éthique de
chacun ne sera pas le même.
Nous retiendrons au final la définition suivante de
Samuel Mercier, qui semble la plus adaptée à notre sujet de
recherche : L'éthique est « la réflexion qui intervient en
amont de l'action et qui a pour ambition de distinguer la bonne et la mauvaise
façon d'agir. » (MERCIER, 2002, p.34)26.
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