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Le contrôle de la société anonyme par les actionnaires

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par Jacques Derthal ALBAS
Université de Lomé - DEA 2007
  

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B- Les difficultés inhérentes à la mise en oeuvre des mécanismes de contrôle prévus par le législateur

La mise en oeuvre de la procédure d'alerte, de l'expertise de gestion et bien d'autres mesures semble parfois difficile pour certains actionnaires.

1988, n° 12, p. 189. Quant au professeur A. SAYAG, c'est l'« information qu'il fallait autrefois aller chercher dans un registre et notamment au registre du commerce et des sociétés », Colloque du CREDA, 1er mars 1994, JCP E, 1994, 1, p. 427.

34 L'information portable est « celle qui fait l'objet d'une publicité obligatoire en divers lieux accessibles a tous »34. Georges J. VIRASSAMY, article précité.

35 André TUNC, « L'effacement des organes légaux de la société », D. 1952, n° 4, p. 74.

36 Colloque du centre de recherche sur le droit des affaires (CREDA) de la chambre de commerce et d'industrie, ibid., p. 426.

37 M.D. Gabare-Leibler, La remise en cause de l'information du public et des actionnaires aux Etats-Unis, These en droit, Paris, 1,1984 cité par Yves GUYON, ibid., p. 299.

38 C. BONNET, Le secret dans la vie économique, These, Paris, 1970 cité par G .J. VIRASSIMY, ibid., p. 184.

D'abord, dans les sociétés anonymes de petite taille39, les actionnaires, aux termes de l'article 158 de l'AUSCGIE, peuvent « deux fois par exercice, poser des questions au président de conseil d'administration, au président-directeur général ou à l'administrateur général, selon le cas, sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'exploitation. La réponse est communiqué au commissaire aux comptes ». Seulement, ce mécanisme de contrôle qui procure une grande sécurité aux actionnaires minoritaires se révèle être insuffisant. En effet, les actionnaires ont la possibilité de le mettre en oeuvre deux fois par an. Au-delà, ils ne sont pas recevables. Cette limitation de pouvoirs de contrôle de la société est curieuse quand on sait que dans certaines sociétés, il n'existe pas de commissaires aux comptes chargés d'assurer un contrôle suivi de comptes. A cet effet, le professeur H-D MODI KOKO BEBEY affirme que « la seule limitation prévue dans l'exercice du droit d'alerte est relative au nombre de fois qu'un même associé est autorisé à donner l'alerte au cours d'un exercice social »40. D'ailleurs, la loi prévoit que les actionnaires ont la faculté et non le devoir de déclencher l'alerte. Ce caractère facultatif constitue une limite au contrôle interne individuel.

Dans les sociétés anonymes de grande taille, c'est l'inverse de la situation précédente qui se produit. En effet, « la gestion de la société risquerait d'être paralysée si tous les actionnaires, qui sont parfois très nombreux, entendaient exercer ce droit »41.

Ensuite, l'article 159 de l'AUSCGIE dispose qu'« un ou plusieurs associés représentant au moins le cinquième du capital social peuvent, soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, demander au président de la juridiction compétente du siège social la désignation d'un ou de plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion ». Seulement, l'accès à l'information par le truchement de l'expertise de gestion semble être un réel « parcours semé d'embûches »42. Plusieurs facteurs militent en ce sens. Parmi ceux-ci, on peut citer-la liste n'est pas exhaustive- la fraction du capital exigée pour son déclenchement, le contexte jurisprudentiel43 ou encore la difficulté de sa mise en oeuvre dans les sociétés faisant appel public à l'épargne.

Concernant la fraction du capital exigée pour son déclenchement, il faut remarquer que le seuil de cinq pour cent, sans doute significatif aux yeux du législateur de l'OHADA, est une condition impérative. Mais, le juge admet difficilement la demande de désignation de l'expert44. D'ailleurs, l'expression « s'il est fait droit »45 de l'article 160 de l'AUSCGIE témoigne de la rigueur ou de la sévérité de la recevabilité de la demande de désignation de l'expert. En plus, il est demandé aux actionnaires d'épuiser les autres moyens d'information avant de déclencher l'expertise de gestion46. Cela ne facilite aucunement l'information des actionnaires, donc le contrôle des affaires sociales. A cet effet, la doctrine française estime que « le fait d'imposer aux actionnaires une information préalable auprès des organes sociaux risque d'être un leurre et d'avoir un effet paralysant »47. En pratique, les actionnaires étant le plus souvent dirigeants de la société, on voit mal comment ils pourraient demander une expertise sur leur propre gestion48.

39 Les petites sociétés anonymes sont par définition des sociétés dont les membres se connaissent. Ces membres ne désirent pas normalement qu'un étranger puisse s'immiscer dans leurs affaires ; V. André TUNC, Le droit américain des sociétés anonymes, Economica, Coll. Etudes Juridiques Comparatives, Paris, 1985, n° 158, p. 311.

5 Henri Désiré MODI KOKO BEBEY, « La réforme du droit des sociétés commerciales de l'OHADA », Rev. soc (2) avril- juin 2002, p. 261.

41 Yves GUYON, Droit des Affaires, Tome 1, Droit Commercial Général et Sociétés, 12eme éd., Economica, Paris, 2003, p. 298.

42 A. CERATI-GAUTHIER, note sous Cass. com. 11 oct. 2005, 6 déc. 2005, 17 janv. 2006 et 14 févr. 2006, RTDcom 2006, p. 570.

43 MBAIHASRA Eric, L'expertise de gestion dans l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intéret économique, Mémoire de DEA-Droit Privé Fondamental, Université de Lomé, FDD, 2007, p. 37.

44 V. en ce sens CA Abidjan, 5e ch., 2 janv. 2001, arret n° 10, www.ohada.com (ohadata J-02-113).

45 V. en ce sens Rennes, 22 mai 1973, Gaz. Pal. 1973, 2, 700, note PEISSE dans laquelle la demande de désignation de l'expert s'est heurtée a un refus de la part du président du tribunal ou pour un exemple d'un refus confirmé en appel cité par Jean-Pierre SORTAIS, « Rapport sur l'expertise de l'article 226 », Gaz- Pal., 2, doctr, p. 28.

46 Claude CHAMPAUD et Didier DANET, note sous Paris, 14e ch. A, 12 nov. 2003, Dumeylet c/ SA Sté Dallages Industriels Brunet, n° 6, p. 314.

47 Yves Chartier, JCP 1972, I, n° 20 cité par Laurence BOY, « Réflexions sur l'expertise de minorité », D.S 1980, Chr, p. 79, p. 85.

48 Cabinet Gouache, « La protection des actionnaires minoritaires dans la zone OHADA », p. 3, http:// www.gouache.fr/dist/gouache/Fichesthematiques/la%20protectionn°%20des%actionnaires%20minoritaires%20

S'agissant du contexte jurisprudentiel, on peut dire que la jurisprudence en la matière est caractérisée par sa rareté depuis la mise en oeuvre de l'AUSCGIE49. Cette situation est due à la psychose qu'ont les actionnaires de voir leurs demandes être systématiquement rejetées. Cette peur se justifie aussi par le fait que le juge de l'OHADA s'inspire des décisions rigoureuses des juridictions françaises pour rendre les siennes.

Un arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 14 février 2006 semble être très illustratif50. En l'espèce, le sieur Amat, actionnaire minoritaire de la société anonyme La Hauterive Saint-James, avait adressé des courriers au président de son conseil d'administration. Dans ces courriers, celui-ci, dénonçant des « retards aberrants dans le suivi des factures », avait posé les questions suivantes : « qui contrôle la comptabilité du Saint-James ? », « doit-on considérer que notre société ne peut s'approvisionner qu'auprès de la société Borechal quels que soient les prix pratiqués par cette dernière ? »

N'ayant pas obtenu de réponses satisfaisantes, le sieur Amat avait demandé en justice la désignation d'un expert de gestion. Il fut débouté aussi bien par le tribunal de commerce que par la Cour d'appel de Bordeaux. La chambre commerciale de la Cour de cassation, devant laquelle il s'était pourvu en cassation, avait approuvé les juges du fond d'avoir rejeté la demande aux motifs que : « (...) dans les courriers adressés préalablement à la demande d'expertise, M. Amat n'avait fait que s'interroger de façon générale sur la politique de gestion de la société, sans demander de façon précise des explications sur les actes de gestion clairement identifiés (...) ».

Cet arrêt présente plusieurs enseignements. En effet, ce refus de faire droit à la demande au seul motif d'une rédaction imprécise paraît trop sévère, surtout lorsque les actes pour lesquels l'expertise était sollicitée apparaissaient (retards importants dans le recouvrement des créances, relation ambiguë avec une société dont le dirigeant est également le dirigeant de la société).

Concernant les grandes sociétés, notamment celles faisant appel public à l'épargne, les titres sont très largement dispersés dans le public51, le déclenchement de l'expertise ne s'avère pas facile. A cet effet, le professeur Y. CHARTIER affirme que« plus la société sera importante, plus il sera difficile à la minorité de réunir le pourcentage requis »52. Ce qui explique le peu d'intérêt manifesté par les actionnaires à l'égard de cette institution depuis son introduction dans l'espace OHADA. Toutes ces difficultés montrent combien la tâche du juge est malaisée dans l'appréciation de la demande en désignation de l'expert de gestion.

Enfin, avec l'avancée des technologies de l'information et de la communication, les actionnaires peuvent à distance contrôler les affaires sociales. Seulement, la mise en oeuvre de ce systèmes ne sera pas facile car elle nécessite des installations coûteuses. Aussi, au-delà du fait qu'elles constituent un « potentiel risque spécifique »53, le risque de piraterie et de sabotage des locaux de la société n'est pas à écarter. A cet effet, M. R. GASSIN observe que « la plupart des grandes découvertes technologiques ont engendré, à côté des progrès économiques, sociaux et culturels qui en sont une finalité sociale, des retombées négatives diverses, parmi lesquelles figure au premier chef la délinquance »54.

Il faut cependant souligner que l'expertise de gestion engendre des conséquences à l'égard des actionnaires. En effet,
l'expertise est un acte perturbateur qui devrait demeurer exceptionnel et ne pas être demandée à la légère. Elle n'a pas été
conçue pour permettre aux minoritaires de gérer la société ou imposer leur conception de son administration à ceux qui en ont

49 MBAIHAISRA Eric, ibid., p. 38 ; V. notamment quelques rares décisions : CA Abidjan, 25 fév. 2000, NACI SA c/ WIN SARL, www.juriscope.org ; Cotonou n° 256/ 2000, 17 aotat 2000, Affaire Société Continentale des Pétroles et d'Investissement, M. Sefou Fagbohoun, SONACOP, M. Cyr Koty c/ Etat béninois, www.juriscope.org/

50 Cass. com. 14 février 2006, RTDcom 2006, p. 570.

51 Paul LE CANNU, note sous Trib. Com, Paris, 27 juin 2002, Rev. soc 2002, p. 719 cité par MBAIHASRA Eric, précité, p. 45.

52 Yves CHARTIER, « L'expertise de l'article 226 de la loi du 24 juillet 1966 », JCP G 1972, I, 2506 cité par Laurence BOY, ibid., p. 82.

53 Convention sur la cybercriminalité, rapport explicatif, http:// www.conventions.coe , int / treaty / fr / Reports / html // 185.htm.

54 Raymond GASSIN, « Le droit pénal de l'informatique », D.S 1986, Chr, p. 35.

la charge55 ; seront également condamnés, les actionnaires ayant succombé à la tentation de solliciter cette mesure d'instruction dans l'intention de harceler les dirigeants en place56.

Toutes ces difficultés entravent considérablement le contrôle interne individuel. A celles-ci s'ajoutent d'autres difficultés fortement liées à l'incompétence des actionnaires.

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