Le contrôle de la société anonyme par les actionnaires( Télécharger le fichier original )par Jacques Derthal ALBAS Université de Lomé - DEA 2007 |
B- Le recours aux moyens techniquesEn réalité, nous sommes au vingtième siècle, c'est une banalité de le dire mais il faut ici le répéter. Le vingtième siècle est le théâtre d'un bouleversement technologique dont l'origine remonte à quelques décennies. Ce bouleversement a entraîné un essor remarquable et fulgurant des technologies de l'information et de la communication (TIC)166. Parmi celles-ci figure l'internet167. Comment ces TIC contribuent-elles au renforcement du contrôle interne individuel ? Ou encore, ces TIC permettent-elles aux actionnaires de bien exercer ce contrôle ? En effet, à l'heure actuelle, les TIC envahissent considérablement les entreprises. C'est ce que corrobore M. J-C SCIBERRAS lorsqu'il indique que « comme l'ensemble des sociétés, développées ou émergentes, les entreprises sont profondément et rapidement transformées par la pénétration des technologies de l'information et de la communication »168. Ces TIC constituent un facteur de progrès considérable, tant en termes de délais que de coûts. Elles permettent à la société de stocker et de communiquer les informations de manière instantanée ou presque, par envoi à distance. Elles évitent le 162 Colloque du centre de recherche sur le droit des affaires de la chambre de commerce et d'industrie de Paris organise le 1er mars 1994, JCP ed E, n° 39, p. 424. 163 F. PASQUALINI, Principe de l'image fidele en droit comptable, LITEC, Paris,1992, n° 31, p. 27 cite par Jean Louis NAVARO, « Le droit comptable », Semaine Juridique, Entreprise et affaires, A J, Tome 2, 2008, n° 2265, p. 38. 164 R. HOUIN et GORE, D.1967, chr, p. 157. Il convient aussi de signaler que cette solution s'inscrit egalement dans la droite logique de la corporate gouvernance (gouvernement d'entreprise) qui vise a assurer une meilleure information de l'actionnaire, donc une meilleure protection et un meilleur controle de l'activite sociale. 165 Andre TUNC cite par Richard Cesaire KPEOU-KONGOLI, La protection des actionnaires en cas d'augmentation du capital, Memoire de DESS Droit des Affaires, Universite de Lome, FDD, 2001, p. 42. 166 Les TIC peuvent s'entendre, pour reprendre une definition donnee par le conseil des communautes europeennes, de « l'ensemble des systemes, equipements, composants et logiciels qui sont necessaires pour assurer la recherche, le traitement et le stockage de l'information dans tous les domaines de l'activite humaine et dont la mise en oeuvre fait generalement appel a l'electronique et aux technologies similaires » (Decision du 22 dec. 1986 relative a la normalisation dans le domaine des technologies de l'information et des telecommunications JO des Communautes Europeennes) cite par Ndiaw DIOUF, « Infractions en relation avec les nouvelles technologies de l'information et procedure penale : l'inadaptation des reponses nationales face a un phenomene de dimension internationale », RSDA, n°2-3-4, 2003-2004, p. 50. 167 L'internet a ete defini comme « le reseau mondial...auquel plusieurs centaines de millions d'usagers sont aujourd'hui connectes et qui permet de communiquer d'une machine a une autre a travers le monde par des cibles intercontinentaux et des liaisons par satellite au debit considerable », E. Tois, Internet et libertes, quelques reperes, rapport de la Cass.com 2001, http:// www.courdecassation.fr /_rapport/ rapport01 / etudes&dr / Tois.htm 168 Jean-Christophe SCIBERRAS, « L'irrigation de l'entreprise par les nouvelles technologies de l'information et de la communication : le point de vue d'un praticien », Droit. social, 2002, p. 93. déplacement des actionnaires au siège social pour la consultation des documents sociaux qui constituent quelquefois une paperasse difficile à manipuler car, il suffit d'un clic pour les obtenir. A juste titre, le professeur N. DIOUF écrit que « dans les sociétés modernes, nul ne songe à contester l'intérêt que représentent, pour les individus, les entreprises et les institutions, les technologies de l'information et de la communication. On ne peut que se réjouir des possibilités qu'offrent les moyens électroniques pour la collecte, le stockage, la conservation et la transmission des informations »169. Il s'agit de véritables « autoroutes de l'information »170. Pour atteindre ces objectifs, les dirigeants doivent penser à multiplier les moyens d'information et d'amélioration de cette information. L'utilisation des TIC permettra indéniablement de moderniser et d'améliorer l'information afin d'avoir une vue sur les affaires sociales. A cet effet, la société doit aménager un site ouvert au public (publication d'informations concernant la société sur internet) et un site fermé (l'établissement des relations spécifiques entre les actionnaires et la société sur intranet). L'internet facilite la diffusion des informations aux actionnaires. L'avènement de l'internet constitue ainsi un soulagement voire une réponse aux préoccupations des sociétés, notamment des actionnaires. Il permet aux actionnaires d'envoyer leurs projets de résolution et de poser des questions écrites aux dirigeants sociaux. Grâce à l'information qu'ils reçoivent par un simple clic en restant chez eux, ils peuvent contrôler les activités sociales. Ils deviennent ainsi plus conscients de leur pouvoir de contrôle au sein de la société lorsqu`ils sont mieux informés. En outre, le recours à ces TIC permet aux actionnaires d'éviter les frais de déplacement parfois coûteux. Outre les difficultés qui affectent le contrôle interne individuel et l'éventail des moyens qui viennent le renforcer, les actionnaires peuvent aussi exercer en collectivité un contrôle de la gestion des affaires sociales. Il s'agit du contrôle interne collectif. DEUXIEME PARTIE : LE CONTROLE INTERNE COLLECTIF Dans les sociétés anonymes, l'assemblée générale171 d'actionnaires172 est toujours considérée comme l'organe suprême173 ou le peuple souverain174. Elle est titulaire de tous les pouvoirs et ne les délègue que pour des raisons d'efficacité. Elle est en outre en charge de l'ultime contrôle de la société. En pratique, ce contrôle s'exerce par le droit de participation et de vote175 aux assemblées. C'est un droit par lequel les actionnaires participent directement à la vie sociétaire. Ce droit est d'ordre public176. Mais, la réalité est toute différente. En
effet, la plupart d'actionnaires ne viennent pas aux assemblées. Ils
s'absentent presque 169 Ndiaw DIOUF, article précité, p. 83. 170 Ndiaw DIOUF, ibid., p. 60. 171 L'assemblée générale désigne la réunion périodique de tous les membres d'une association ou d'une société (civile ou commerciale) pour approuver la gestion et prendre les décisions les plus importantes. Il désigne, en outre, un conclave qui n'est pas ouvert au public. M. COZIAN et alii, ibid., p. 293. Toutefois, l'auteur souligne qu'en dehors des actionnaires, sont présents aux assemblées les commissaires aux comptes, les journalistes financiers dans les sociétés cotées ; ou en cas de crise, l'actionnaire peut se faire accompagner par un huissier. 172 Par actionnaires, on entend les titulaires d'actions au jour de la réunion, le représentant de l'indivision, l'usufruitier en cas d'assemblée ordinaire et le nu-propriétaire en cas d'assemblée générale extraordinaire, sauf stipulation contraire. Maurice COZIAN, Alain VIANDIER et Florence DEBOISSY, Droit des sociétés, 17eme éd., LITEC, Paris, 2004, n° 649. 173 Cf. art. 242 et s. de l'AUSCGIE. 174 Francine MANSUY, « Assemblées d'actionnaires », Jurisclasseur des sociétés, 1990, n° 136, p. 4. 175 Le terme vote vient du latin votum qui signifie vceu. Il désigne un acte par lequel un actionnaire participe, en se prononcant dans un sens déterminé, au choix de ses représentants ou a la prise d'une décision. 176 Cass. civ. 7 avril 1932, D. H 1933, I, 153 cité par Jacques MESTRE et Christine SEBASTIEN-BLANCHARD, Lamy Sociétés Commerciales, éd. Lamy SA, Paris, 2001, n° 720. société comme le voudrait l'affectio societatis177. En outre, la faible fréquence de leur réunion et l'exercice de leur contrôle dans les sociétés familiales rendent ce contrôle insuffisant (Chapitre Premier). En dépit de cette insuffisance, il convient de signaler que grâce à certains moyens légaux prévus expressément par le législateur comme la représentation et la nullité et d'autres reconnus de façon implicite comme les conventions, le contrôle interne collectif connaît une réelle évolution. Bien plus, la présence de certains organes aux assemblées et le recours à divers autres moyens permettent aux actionnaires de rechercher l'efficacité du contrôle interne collectif (Chapitre Deuxième). |
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