Le contrôle de la société anonyme par les actionnaires( Télécharger le fichier original )par Jacques Derthal ALBAS Université de Lomé - DEA 2007 |
RÉPUBLIQUE TOGOLAISE Année académique 2007 - 2008 UNIVERSITÉ DE LOMÉ Faculté de Droit (F.D.D.) Thème : ~~ON)YME PAR LES A TIONNAIRES LE CONT~~LE DE LA SOCIETE Mémoire de troisième cycle Option : Droit Privé Fondamental Présenté et soutenu publiquement par : Sous la Direction de :
DEDICACE A DIEU, Notre Créateur ; A mon père ; A ma mère. REMERCIEMENTS Plusieurs personnes ont rendu possible la réalisation de ce mémoire et méritent en conséquence notre reconnaissance. A cet effet, nous remercions : + Le professeur Akuété Pedro SANTOS, Doyen de la Faculté de droit de l'Université de Lomé qui, malgré ses multiples charges, a accepté de diriger nos travaux. Nous vous remercions, Monsieur le Doyen, pour votre rigueur, votre disponibilité et votre particulière attention pour la réalisation de ce travail ; + Monsieur Akrawati Shamsidine ADJITA qui, sans hésiter, a mis à notre disposition ses propres documents en vue de parfaire ce travail ; + Madame TSAKADI Awayavi dont les remarques et suggestions pertinentes en droit des sociétés nous ont permis d'améliorer la qualité de notre travail ; + Toute notre gratitude aux enseignants de l'Université de N'Djamena, Tchad ; + Les membres du jury qui, en dépit de leurs multiples charges, ont bien voulu porté sur ce travail une appréciation critique en vue de parfaire la qualité de ce document ;
+ Les enseignants de la Faculté de droit de l'Université de Lomé qui ont, par la qualité de leurs enseignements, participé à notre formation ; + Les enseignants de la Faculté de droit de l'Université de N'Djamena qui nous ont fait découvrir et aimer le Droit ; + Notre oncle TABE Eugène pour son soutien moral et matériel pour l'achèvement de ce travail ; + Nos frères et soeurs Franck, Marie-Noëlle, Pamela, Caroline, Jessica, Hermann, Dillah et Dylan ; + Nos camarades de promotion, en particulier Maître NABEDE Paluki-Mondome et ALASSANE Abdoul Salami Touré ; + Tous nos amis, à savoir MAMGODIBAYE Benjamin, MASNAN Madjiram, NDORADOUM Rogan, MBAIHASRA Eric, KOME Kodé, NGABA Kamougué, MANCY Nadine, KOUMANKOI Victorien, Noussi Sual YAKOUMA. + Tous ceux qui de près ou de loin ont contribué à la réalisation de ce mémoire. AVERTISSEMENT La faculté de droit n'entend donner ni approbation, ni désapprobation aux opinions émises dans ce mémoire. Elles doivent être considérées comme propres à leur auteur. PRINCIPALES ABREVIATIONS A .J : actualités jurisprudentielles. ADAM : association de défense des actionnaires minoritaires. Art : article. AUCE : Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises. AUSCGIE : Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique. BRVM : Bourse régionale des valeurs mobilières (Afrique de l'ouest). CLET : Centre de Librairie et d'Editions Techniques. CNTT : Confédération Nationale des Travailleurs du Togo. CREDA : centre de recherche sur le droit des affaires (France). Ibid : au même endroit d'un texte. J.-cl.stés : juris-classeur des sociétés. JCP : semaine juridique. LGDJ : Librairie Générale.de Droit et de Jurisprudence. LITEC : Librairie de la Cour de cassation. OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires Op. Cit : opus citatum (ouvrage cité). Rev. soc : revue des sociétés. RSDA : revue sénégalaise de droit des affaires. RTDcom : revue trimestriel de droit commercial. SAGA-TOGO : société anonyme de gérance et d'armements du Togo. TGI : Tribunal de grande instance. TIC : technologies de l'information et de la communication. TPI : Tribunal de première instance. INTRODUCTION« La confiance n'exclut pas le contrôle ». Cet adage populaire peut être appliqué aux sociétés anonymes (SA)1 dans lesquelles les capitaux confiés aux dirigeants sociaux par les actionnaires sont indéniablement exposés aux risques liés à la gestion. Cette interrogation reflète évidemment les préoccupations du grand public que celles de la doctrine sur la question de la bonne gestion de la société anonyme par les dirigeants2. C'est dans cette logique que s'inscrit le thème de notre mémoire : « Le contrôle de la société anonyme par les actionnaires ». « Merveilleux instrument juridique du capitalisme moderne »3 selon la formule du doyen RIPERT, la société, terme venant du latin sociétas ou socius, signifie compagnon ou associé4. La société peut être civile ou commerciale. La société anonyme étant une société commerciale par la forme5, elle est définie comme étant « une société dans laquelle les actionnaires ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits des actionnaires sont représentés par des actions. La société anonyme peut ne comprendre qu'un seul actionnaire »6. A ce titre, l'actionnaire étant « le pilier de la société anonyme parce qu'il a contribué par son apport à constituer le mécanisme juridique perfectionné qui a été mis en place »7, il est considéré comme une personne physique ou morale ayant apporté à la société des espèces ou des biens nécessaires à son financement8. Le terme contrôle, de l'ancien français contrerole, registre tenu en double, vient du verbe contrôler qui signifie soumettre à un contrôle, à une vérification minutieuse. Le contrôle est donc une vérification minutieuse de l'état de quelque chose ou de quelqu'un, ou une inspection attentive de la régularité d'une action ou de la validité d'une espèce9. Le contrôle qui s'exerce sur les organes d'administration est susceptible de degré. Stricto sensu, le contrôle des comptes concerne la régularité et la sincérité des comptes sociaux. Lato sensu, le contrôle de gestion englobe la régularité, et l'opportunité économique et commerciale de la gestion. La notion de contrôle présente en outre deux acceptions. D'une part, le contrôle évoque l'idée de domination. Etudier le contrôle de la société, c'est rechercher entre les mains de quels hommes ou de quel groupe voire de quel individu est le capital ; c'est aussi rechercher comment éventuellement il est reparti, par qui et au profit de qui le droit de vote des assemblées s'exerce ; c'est finalement déterminer qui détient en droit ou en fait le pouvoir de décision. C'est ainsi que le 1 Depuis l'Acte uniforme relatif aux sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique entré en vigueur le 1er janvier 1998, les sociétés anonymes sont les seules sociétés de capitaux susceptibles d'être constituées dans l'espace OHADA. 2 Effectivement, la problématique de la gestion de la société anonymes par les dirigeants est considérée comme l'une des clés de voitte des principes de la corporate governance (gouvernement d'entreprise) et ses exigences en matière de transparence. La corporate governance consiste en une meilleure définition des pouvoirs au sein de l'entreprise dans le but d'améliorer l'efficacité de la gestion de l'entreprise et de protéger les actionnaires ainsi que les dirigeants. Elle permet une redistribution des pouvoirs et la reconstruction de l'identité des autres couches de l'entreprise (salariés...). D'après Jean TAMALET, il s'agit d'une doctrine qui vise le rééquilibrage du pouvoir entre l'actionnariat et le management au sein de l'entreprise, http:// www.afic.asso.fr/ Images/ Upload/ Partenariat/ ft 12_corporate_governance_0205.pdf 3 Georges RIPERT, « Les aspects juridiques du capitalisme moderne », cité par Paul LE CANNU, Droit des sociétés, Domat, Droit privé, Montchrestien, Paris, 2002, n° 589, p. 332. 4 Chaput YVES, Droit des sociétés, PUF, Paris, 1993, p. 18. 5 Voir art. 6 de l'AUSCGIE. 6 Voir art. 385 de l'AUSCGIE. 7 Georges RIPERT et René ROBLOT par M. GERMAIN et L. VOGEL, Traité de droit commercial, Tome 1, LGDJ, 17eme éd., Paris, 1998, p. 1106. 8 V. en ce sens art. 5 de l'AUSCGIE. 9 Dictionnaire Le Petit Larousse Illustré, Editions Larousse 2009, p. 246. professeur J. PAILLUSSEAU définit le contrôle comme « la détention d'une majorité de vote dans les assemblées »10. Ce contrôle a nécessairement une coloration patrimoniale11. D'autre part, le contrôle évoque l'idée de surveillance exercée à l'égard des détenteurs du pouvoir. Ce contrôle figure parmi les attributions d'un certain nombre d'organes. Il constitue également l'une des fonctions les plus fondamentales des actionnaires. Cette dernière acception fera l'objet de notre étude. Elle concerne la gouvernance de la société anonyme. A l'instar de l'Etat, société politique par excellence, la société anonyme est organisée, en droit français comme en droit OHADA12, sur le type de la démocratie libérale où la souveraineté est exercée par le peuple à savoir l'assemblée13. Elle est conçue comme une démocratie où les organes sont « non seulement hiérarchisés ; ils sont aussi strictement spécialisés en fonction de leur finalité »14. Le principe de la hiérarchie consacre la prééminence de l'assemblée sur les autres organes, tandis que celui de la spécialisation définit les pouvoirs de chaque organe et empêche qu'un organe supérieur n'empiète sur les prérogatives d'un autre organe. Cela fait de la société anonyme une « organisation juridique unique »15. Les actionnaires sont chargés du contrôle des affaires sociales car toute activité commerciale engendre des risques. C'est à la fois la contrepartie de la chance d'un gain et la mesure de ce gain16. Ce contrôle vise à assainir la gestion quotidienne des dirigeants et, par conséquent, à protéger l'intérêt social. Pour parvenir à cette fin, le droit français et, à sa suite, le droit OHADA qu'il a fortement inspiré, se caractérise par un mouvement de renforcement du droit d'information des actionnaires. Ce mouvement se traduit par une diversification des procédés d'information et par une extension du domaine de l'information. Subséquemment au renforcement du droit d'être informé qu'ont les actionnaires, il s'observe dans les deux systèmes juridiques l'affirmation du droit pour les concernés de bénéficier d'une information efficace ; affirmation qui se fait par le biais d'un renforcement du contrôle légal des comptes et de l'octroi aux actionnaires de la possibilité d'exercer des recours auprès de certaines autorités. L'assemblée générale d'actionnaires est titulaire de presque tous les pouvoirs au sein de la société anonyme. Elle est ainsi en charge de l'ultime contrôle de la gestion des affaires sociales. Ce contrôle est exercé par le droit de participation et de vote17 lors des assemblées. Il s'agit d'un « droit-fonction »18, pour exprimer l'idée que l'actionnaire l'exerce dans l'intérêt de la société. La Chambre civile de la Cour de cassation française, dans un arrêt resté célèbre19, a pu estimer qu'il s'agit d' « un 10 Jean PAILLUSSEAU, « La cession de contrôle et la situation financière de la société cédée », JCP G 1992, doctr, n° 3578, p. 187 ; voir aussi art. 174 et 175 de l'AUSCGIE. 11 Yves CHARTIER, « La gestion et le contrôle des sociétés anonymes dans la jurisprudence », LITEC, Paris, 1978, p. 287. 12 L'OHADA est l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires qui regroupe 16 pays africains et vise a terme l'harmonisation du droit des affaires. A cet effet, huit (8) actes uniformes ont été adoptés, entre autres, l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique. 13 Il existe plusieurs sortes d'assemblées : d'abord, l'assemblée constitutive qui vote les statuts et la nomination des premiers organes de la société ; puis, l'assemblée générale ordinaire (AGO) qui approuve ou désapprouve les comptes de l'exercice, statue sur la répartition des bénéfices et élit les administrateurs ; ensuite, l'assemblée générale extraordinaire (AGE) qui se réunit pour modifier les statuts ; enfin, l'assemblée générale spéciale (AGS) qui réunit des titulaires d'actions d'une catégorie déterminée : actions de capital, de jouissance ou de priorité. Elle est chargée d'approuver ou de désapprouver les décisions des assemblées générales modifiant les droits de leurs membres. Elle demeure indispensable pour la sauvegarde de cette catégorie d'actionnaires. 14 Jean LEBLOND, « Les pouvoirs respectifs de l'assemblée générale, du conseil d'administration, du Président-directeur général, et du Directeur général adjoint, dans la doctrine institutionnelle », Gaz. Pal 1957, 1, doctr, p. 29. 15 Jean PAILLISSEAU, « Le droit est aussi une science d'organisation (et les juristes sont parfois des organisateurs juridiques)», RTDcom 1989, n° 20, p. 10. 16 Patrick SERLOOTEN, « De nouvelles structures de l'entreprise », D 1986, Chr, p. 187 cité par KODOM Molonga, Le contrôle de la société anonyme unipersonnelle , Mémoire de DESS Droit des Affaires, FDD, Université de Lomé, 1999, p. 1. 17 V. en ce sens art. 1844 C. civ qui est le texte général en la matière ; art. 537 de l'AUSCGIE. 18 Georges RIPERT et René ROBLOT, ibid., n°1606. 19 Cass. civ. 7 avr.1932 : D.P 1933, I, p. 153, note P. CORDONNIER cité par Renée KADDOUCH, « L'irréductible droit de vote de l'associé », Semaine Juridique, Entreprise et Affaires, Tome I, 2008, n°1549 ; Affaire du château d'Yquem, Cass. com. 9 février 1999, JCP E 1999, p. 724 cité par Philippe MERLE, Droit commercial, Sociétés commerciales, 12eme éd., Précis Dalloz, Paris, 2008, n° 306. attribut essentiel de l'action ; si son exercice peut être réglementé dans une certaine mesure par les statuts, il ne saurait en aucun cas être supprimé ». En outre, il s'agit d'un droit fondamental pénalement sanctionné20. Le droit à l'information et le droit de participation et de vote21 sont deux droits fondamentaux de l'actionnaire. Ils ne peuvent être écartés ni par les dirigeants, ni par une décision de l'assemblée22. Le droit de l'actionnaire à l'information était considéré traditionnellement comme un moyen d'éclairer le droit de vote de l'actionnaire. Aujourd'hui, ces deux droits sont dissociés, puisque les actionnaires porteurs d'actions à dividende prioritaire sans droit de vote et les porteurs de certificats d'investissement possèdent le même droit à l'information que les autres pour la défense de leurs intérêts pécuniaires. Ces prérogatives reconnues aux actionnaires représentent, pour la plupart du temps, de véritables forces de dissuasion ou une source de contre-pouvoir aux mains des actionnaires non dirigeants aussi bien en droit français que dans l'espace OHADA. Elles permettent aux actionnaires de s'exprimer sur la gestion sociale et favorisent le contrôle de la gestion et des comptes sociaux. Mais, cette vision des actionnaires maîtres de leur affaire ne correspond pas à la réalité. En effet, la mise en oeuvre de ces moyens de contrôle des affaires sociales ne va pas sans soulever de difficultés. Ces difficultés ne seront pas énumérées en fonction des mécanismes offerts aux actionnaires. EIles seront évoquées suivant que les actionnaires agissent individuellement ou collectivement. Dans le premier cas, les actionnaires, pris individuellement, éprouvent d'énormes difficultés lors de la mise en oeuvre du contrôle de la gestion et des comptes sociaux. En effet, ces difficultés varient suivant que l'information est quérable ou portable ou encore selon la mise en oeuvre de certains mécanismes de contrôle à savoir la procédure d'alerte et l'expertise de gestion et bien d'autres. Il en est de même lorsque les actionnaires sont dépourvus de compétences juridiques, comptables et financières. Dans le second cas, la collectivité d'actionnaires ne parvient pas toujours à contrôler la gestion des affaires sociales. D'ordinaire, cette situation est le résultat de leur absentéisme et le jeu des pouvoirs en blanc renvoyés aux dirigeants sociaux, deux phénomènes qui diluent l'effet « démocratique »23 de la société anonyme. Cette situation entraîne également son effacement en tant qu'organe cardinal du contrôle des affaires sociales et une confiscation de ses pouvoirs par la direction. En outre, cet état des lieux découle aussi de leur passivité grandissante, leur indifférence chronique à l'égard de l'activité sociale, de la faible fréquence de la tenue des réunions et du simulacre de contrôle dans les sociétés familiales24. Tous ces maux constituent un frein à la mise en oeuvre de ce droit d'inspection25. Ils entraînent également de risques sérieux aussi bien à l'égard de la société qu'à l'égard des dirigeants sociaux. D'abord, à l'égard de la société, la mise en oeuvre du contrôle peut ternir son image et engendrer un découragement de ses différents partenaires. Bien plus, elle peut faciliter l'immixtion du juge dans la vie sociale. Ensuite, quant aux dirigeants sociaux, ils courent le risque d'être révoqués ou de voir leur responsabilité être engagée en cas de fautes de gestion ou d'entraves à l'exercice de ce contrôle par les actionnaires. De ce qui précède, il se dégage les questions suivantes : les actionnaires peuvent-ils déclencher de façon égalitaire les mécanismes de contrôle prévus par le législateur ? De quelle manière peuvent-ils contrôler de la marche des affaires sociales ? Le contrôle de l'activité sociale qu'ils exercent ne présente-t-il pas des difficultés ou des risques ? Dans ce cas, comment amener les actionnaires à mieux participer à la vie sociale et, par conséquent, à mieux s'exprimer sur la gestion et les comptes sociaux ? 20Cf. art. 892 de l'AUSCGIE. 21 Selon Michel JEANTIN, il s'agit d des droits intangibles (Droit des sociétés, Montchrestien, Paris, 1989, n°197, p. 104) ; les professeurs Georges RIPERT et René ROBLOT considèrent qu'ils s'agit des droits individuels (par M. GERMAIN et L. VOGEL, Traité de droit élémentaire, Tome 1, 17e éd., LGDJ, Paris, 1998, n° 1597, p. 1173) ; les professeurs Francois ANOUKAHA, Paul-Gérard POUGOUE, Abdoullah CISSE, Ndiaw DIOUF, Josette NGUEBOU TOUKAM estiment que ce sont des droits politiques (Sociétés commerciales et GIE, Bruylant, Bruxelles, 2002, n° 242, p. 161) ; le professeur Paul LE CANNU considère que c'est un droit d'intervention de l'actionnaire dans la structure sociale (Droit des sociétés, Domat, Droit privé, Montchrestien, Paris, 2002, p. 520). 22 Toutefois, dans certaines situations, les actionnaires peuvent etre exclus faute de n'avoir pas libéré leurs actions. 23 Paul LE CANNU, Droit des sociétés, ibid., p. 334. 24 Philippe MERLE, ibid., n° 456. 25 André TUNC, Le droit américain des sociétés anonymes, Economica, Coll. Etudes Juridiques Comparatives, Paris, 1985, p. 129. Autrement dit, le contrôle de la gestion et des comptes sociaux par les actionnaires, pris individuellement ou collectivement, est-il efficace ? En effet, face aux difficultés et risques que le contrôle fait naître, le législateur de l'OHADA doit réagir promptement et diligemment. En effet, il n'a eu de cesse de voler à la rescousse des actionnaires en leur donnant la possibilité de participer à la gestion sociale au moyen de droits d'information. Pour atteindre ce but, il a prévu une gamme de mécanismes de contrôle des affaires sociales26. Aussi, le recours aux moyens d'ordre technique, financier ou comptable contribue nettement à renforcer le contrôle de la gestion et des comptes sociaux. En revanche, pour pallier l'ineffectivité du contrôle exercé par la collectivité d'actionnaires, le recours aux moyens reconnus expressément et implicitement par le législateur s'avère indispensable. A ceux-ci s'ajoutent des moyens issus de la pratique comme la présence d'une catégorie particulière d'actionnaires aux assemblées et une politique d'attraction des actionnaires minoritaires aux assemblées, notamment la reconnaissance aux minoritaires d'une place au conseil d'administration et la politique de distribution des dividendes ne sont pas à écarter. Ces divers moyens permettent de remédier à l'inefficacité du régime du contrôle mis en oeuvre par les minoritaires. A cet effet, M. Yves Bérenger MEUKE affirme que « si l'on entend encourager l'actionnariat populaire et, par conséquent, pousser vers la bourse ceux qui n'ont que des moyens modestes et qui seront nécessairement de petits actionnaires minoritaires, il faut dans la conjoncture africaine actuelle leur donner une sécurité »27. Ainsi, le contrôle interne qui était théorique devient réalité par leur participation active dans la gestion sociale, ceci afin d'éviter que l'activité de la société ne périclite suite à certaines fautes de gestion des dirigeants. « La société étant le siège d'une multiplicité d'intérêts parfois divergents qu'il importe de gérer au mieux pour un fonctionnement meilleur de l'entreprise »28, il est tout à fait normal que ce contrôle présente plusieurs intérêts. D'une part, il permet aux actionnaires de connaître l'état des affaires sociales, d'apprécier les performances de la société et de jouer leur rôle essentiel de sentinelle de l'intérêt social. D'autre part, ce contrôle vise à attirer et à retenir les éventuels souscripteurs et investisseurs. Il permet en outre d'éviter une confusion de patrimoines par les dirigeants, de réajuster les pouvoirs au sein de la société et d'élargir le droit d'intervention des actionnaires dans la vie sociale. Le contrôle de la gestion et des comptes sociaux est un contrôle dit interne. Il est inclusif et met les actionnaires sur un pied d'égalité. L'efficacité de ce contrôle varie selon que les actionnaires agissent individuellement ou collectivement. Ainsi, convient-il de préciser que dans le cadre de notre étude, nous examinerons d'une part, le contrôle interne individuel qui requiert l'intervention d'un seul actionnaire (Première Partie) et, d'autre part, le contrôle interne collectif mis en oeuvre par un groupe d'actionnaires (Deuxième Partie). PREMIERE PARTIE : LE CONTROLE INTERNE INDIVIDUEL L'actionnaire est citoyen de la société qui représente sa cité29. Ce statut lui confère le droit d'exercer un contrôle de l'activité sociale. Ce droit lui permet de participer activement à la vie sociale car on ne peut admettre qu'il en soit privé. Il s'agit d'un droit irréductible qu'un statut ou un organe social ne peut restreindre Le contrôle que l'actionnaire met en oeuvre revêt plusieurs formes. Il s'exerce de façon générale par le biais de l'information30 et de divers autres moyens de contrôle consacrés par le législateur. Ce contrôle dit contrôle interne individuel ne peut être effectif que si l'actionnaire est parfaitement informé de la situation de la société. 26 Ce contrôle se réalise par le droit de communication, la procédure d'alerte, l'astreinte et le déclenchement de l'expertise de gestion. 27 Bérenger Yves MEUKE. B, « L'information des actionnaires minoritaires dans l'OHADA : réflexion sur l'expertise de gestion » http : // www.juriscope.org/actu_juridiques/doctrine/OHADA/ Ohada_20.pdf.pp. 1-13 28 Bérenger Yves MEUKE. B, ibid. 29 Maurice COZIAN, Alain VIANDIER et Florence DEBOISSY, Droit des sociétés, 17eme éd., LITEC, Paris, 2004, n° 295, p. 143. Mais, la mise en oeuvre de ce contrôle est souvent malaisée. EIle est confrontée à de multiples difficultés (Chapitre Premier) qui entravent généralement son efficacité. Toutefois, plusieurs mécanismes légaux et certains moyens d'ordre financier, technique ou juridique permettent de pallier ces difficultés et d'assurer de point en point son renforcement (Chapitre Deuxième). |
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