3.3.2. Les problèmes économiques
D'un point de vue financier, de nombreux obstacles entravent
la généralisation des installations : le prix du système
est élevé alors que les capacités de financements sont
limités et que peu de revenus sont escomptés. En effet, les
installations ne permettent pas de développer en soi le système
productif et le marché du photovoltaïque est peu étendu. La
littérature sur le sujet envisage donc généralement de
décider en fonction du service rendu et non des coûts car par ce
service on veut répondre aux besoins de base de la
population.
136 Benallou & Rodot op. cit., 45
Seulement, l'aspect financier va jouer un rôle
déterminant en termes de durabilité du système. Par
exemple, si les moyens financiers ne sont pas suffisants pour avoir recours aux
techniciens le système aura de fortes chances de péricliter car
leur rôle est primordial pour la maintenance de l'installation et pour
son bon fonctionnement. Des ressources économiques doivent donc
être mobilisées tout au long de la vie de l'installation voire
même au delà si l'on souhaite faire installer un nouveau
système.
On constate donc en premier lieu que le coût d'achat du
système est élevé. En effet, le kit proposé par
l'ABERME et par Nature Tropicale le moins cher et d'une puissance de 85 Wc
revient à l'achat à 650 000 FCFA avec les subventions (1 350 000
FCFA sur le marché). Cela signifie mobiliser pour un ménage rural
deux tiers de ses dépenses totales annuelles (les dépenses
totales annuelles par ménage - de 5,4 personnes - dans les zones rurales
du Bénin étant de 967 829 FCFA en 2007137). Cette
proportion est pour autant sûrement plus importante car dans un pays en
développement les moyennes sont à prendre avec précaution
étant donné l'existence de fortes inégalités, elles
ne permettent donc que de renseigner sur les difficultés
financières que rencontrent les ménages ruraux pour
acquérir un kit photovoltaïque. D'autant plus que les
capacités financières des ménages ruraux ne sont pas les
mêmes d'un endroit à l'autre. Par exemple, les dépenses
moyennes les plus faibles par ménage se trouvent dans le
département du Zou où pour un ménage (de 4,5 personnes)
elles n'atteignent que de 685 324 FCFA138, soit pour ainsi dire le
prix du kit subventionné. Certes l'ABERME propose de payer par
mensualité sur trois ans au maximum afin de répartir les
coûts mais même au bout de trois années l'utilisateur
continuera à avoir des dépenses importantes étant
donné que les batteries ont une durée de vie limitée. Tous
les quatre ans environ il sera nécessaire de changer de batterie dont le
prix s'élève à plus de 100 000 FCFA. Par ailleurs, en
matière de réfrigération solaire, le prix d'un
réfrigérateur est très élevé et se situe
autour des 650 000 FCFA. De même, les systèmes plus modestes
constituent un coût élevé. Ainsi acheter une lampe portable
revient à payer lors de son achat la totalité du coût du
système : l'utilisateur paye en une seule fois la totalité de
l'électricité qu'il va consommer sur plusieurs années.
La technologie solaire est donc loin d'être gratuite
comme on l'imagine. Notamment car si l'énergie solaire est disponible
gratuitement, un système de conversion est nécessaire afin
de transformer cette énergie en électricité, ce qui
entraîne des coûts importants à l'investissement
137 Institut National de la Statistique et de l'Analyse
Économique, op.cit., 3
138 Ibid.
(matériel et main d'oeuvre) et pour sa maintenance. Sans
compter que les modules peuvent être volés ou brisés en cas
de vandalisme car étant en verre ils sont fragiles.
Par ailleurs, une formation de l'utilisateur est
nécessaire pour une exploitation et une maintenance correcte du
système ainsi que la présence de techniciens à
proximité. Des compétences sont donc nécessaires à
la fois pour assurer les formations mais également pour assurer la
maintenance or ces compétences se trouvent généralement
dans les grandes villes. De même, la présence de moyens financiers
est également primordiale pour financer les formations, pour changer et
réparer les installations ainsi que pour assurer un revenu aux
techniciens.
Se pose donc la question des sources de financements : un
soutien public semble donc nécessaire étant donné que les
coûts du solaires sont importants. Seulement comme les moyens financiers
de l'État béninois ainsi que des populations sont limités,
on fait appel à des ressources extérieures. D'autant plus si l'on
envisage de mettre en place un mini-réseau photovoltaïque car au
coût élevé des équipements s'ajoutent le coût
du réseau à installer, son entretien et ses
réparations.
Les ressources extérieures proviennent
généralement de la coopération
internationale139, elles sont donc affectées de façons
ponctuelles et dépendent des priorités des bailleurs de fonds. De
plus, une fois le programme de coopération terminé
(généralement sur trois ou cinq ans), si aucune autre alternative
au financement n'est trouvée les installations courent le risque
d'être abandonnées. En effet, une petite panne pouvant
entraîner l'arrêt du système, s'il n'y a aucun moyen
financier pour faire venir un technicien ou pour payer la réparation, la
panne ne pourra être résolue et le système sera
inutilisable. Par ailleurs, une aide extérieure est
généralement accompagnée de conditions clairement
définies ou sous-entendues, elle n'est donc jamais neutre.
La question des devises n'est pas à négliger
étant donné que les différents composants du
système ne sont pas produits au Bénin et qu'en
général 70% des composants sont importés140, ce
qui implique l'acquisition de devises pour pouvoir les importer du
marché international. Or, l'apport des devises provient essentiellement
de la production agraire et notamment de la
139 Il peut y avoir également des fonds
extérieurs provenant de mouvements religieux. Par exemple, dans un des
villages non électrifiés de la commune de Dangbo, la
mosquée est équipées d'un kit solaire grâce à
des fonds provenant de cheik du Pakistan.
140 Wamukonya 2007, 6-14
monoproduction du coton. Faudrait-il donc augmenter les
cultures pour l'exportation au risque de délaisser les cultures
vivrières, ces dernières jouant un rôle important pour les
ménages aux faibles revenus monétaires? Doit-on favoriser le
photovoltaïque dans le cas où il permettrait de
générer des revenus et des devises?
Le problème des devises et des sources de financements
sont de premier abord des problèmes économiques mais
s'étendent à la sphère politique car ils dépendent
des stratégies et des choix que les différentes instances
politiques sont amenées à faire et à arbitrer.
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