Section 1 : Limites de la lutte contre le trafic
des enfants
Les actions menées par l'Etat et les différentes
structures ont certes, permis d'obtenir des résultats satisfaisants sur
le terrain mais beaucoup reste à faire. Le niveau d'intervention est
assez timide au regard de l'ampleur du phénomène qui se pratique
encore dans l'ombre au grand mépris de toute morale, de toute
éthique et en violation des règles en matière des droits
des enfants. Ce sont là des limites qu'il convient de souligner. Elles
sont de plusieurs ordres.
Paragraphe 1 : Au plan préventif et
répressif
La prévention et la répression sont deux
facteurs de lutte contre le trafic des enfants. Pour y parvenir, plusieurs
actions manifestes de la part du gouvernement, des organisations nationales et
internationales, doivent être menées avec une attention
particulière.
A- Au plan préventif
La prévention peut s'entendre comme étant le
rassemblement, la mise en action de toutes les forces capables de jouer un
rôle dans la lutte contre le trafic des enfants. Il s'agit de la mise en
synergie des actions, des personnes, des groupes de personnes physiques et
morales afin de maximiser l'impact de leur travail sur les cibles
visées. Autrement dit, c'est empêcher l'apparition de situation
d'exploitation et de traite d'enfants en agissant à l'avance sur les
facteurs, les causes et les raisons (rationalité des acteurs) pouvant
engendrer ce type de situation. En d'autres termes, c'est l'élaboration
et la mise en oeuvre des moyens et dispositions nécessaires pour, le cas
échéant, faire face aux situations néfastes et secourir
efficacement les victimes (actions de protection).
Ainsi, diverses actions ont été entreprises
à travers la création de structures de protection des enfants et
de lutte contre le trafic d'enfants par des instances publiques comme le
Ministère de la Famille et de l'enfant, le Ministère de la
Justice et la Brigade de protection des Mineurs etc. Les insuffisances en
matière de prévention peuvent être limité entre
autres par:
- le manque de renforcement des capacités
locales ;
- le manque de renforcement de l'Etat de droit et de
l'enregistrement des naissances ;
- le manque de patrouilles frontalières
régulières sur l'ensemble du territoire par les forces de
sécurité publique surtout dans les zones reculées;
- l'insuffisance des mécanismes de surveillance
communautaire par des structures ;
- le non-suivi régulier des mouvements
migratoires ;
- la non-dénonciation des personnes suspectes ;
- la non-interception des enfants qui tentent de traverser les
frontières nationales du fait de la corruption de certains agents de
sécurité publique, en complicité avec des
trafiquants.
En effet, certains de nos agents de sécurité
publique sont impliqués dans la traite des personnes, par la
délivrance de documents de voyage frauduleux, la falsification de
certificats de naissance,... 93
93 Manuel de formation sur les
mesures visant à Prévenir et à Combattre la Traite des
Personnes dans la sous-région Ouest africaine 17 p.
- le manque d'échange d'informations ;
- en un mot le manque du contrôle des documents de
voyage des enfants et du contrôle des frontières nationales.
Par ailleurs, on peut énumérer les facteurs
socio-économiques et culturels manifestés par
l'analphabétisme, la pauvreté, la polygamie, les familles
nombreuses, les pratiques traditionnelles, la déscolarisation. Il y a
également le manque d'infrastructures communautaires comme des
écoles en quantité suffisante pour tous les enfants en âge
d'aller à l'école, des centres d'apprentissage, des centres de
santé, des centres de promotion sociale etc.
B/ Au plan répressif
La répression est l'ensemble des dispositions
draconiennes visant à combattre un désordre public. C'est dans
cet esprit que la législation nationale a prévu des normes pour
sanctionner le trafic des enfants. Mais, force est de constater que ces normes
sont presque inconnues du grand public. Cette situation entraîne comme
effet, la continuation du trafic des enfants.
En effet, par le manque d'une diffusion large des normes
relatives à l'interdiction du trafic des enfants et d'une application
effective des sanctions prévues à cet effet, les populations se
laissent duper lorsque les trafiquants leur proposent un semblant d'avenir
à leurs progénitures.
Cette insuffisance de la législation mérite
d'être soulignée particulièrement à la
lumière des résultats et des constats qui expliquent la traite
transnationale transitant par le Bénin.
Certes, la complexité du phénomène de
traite, l'insuffisance de ressources et les faiblesses possibles de la nouvelle
loi ne rendront pas la tâche facile aux magistrats et aux
autorités administratives et policières chargées de
l'appliquer. Il faut espérer, que les Décrets d'application
viendront combler ces carences et incluront la mise en place de
mécanismes opérationnels, ainsi que la mise à disposition
des ressources humaines et matérielles réalistes et
adaptées au contexte local. Ceci permettrait non seulement
d'évaluer l'application de la loi par les différents acteurs
judiciaires et policières, mais permettrait aussi de mieux identifier
les réelles forces et insuffisances des diverses dispositions qui la
composent.
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