Paragraphe 2 : Autres dispositions
éparses.
Elles sont relatives aux règles pénales et
civiles d'une part, et les règles contenues dans le code du travail et
dans le code des personnes et de la famille, d'autre part.
A- Les dispositions en matière pénale
et civile
En matière pénale, la loi
prévoit une protection de l'enfant contre l'exploitation sexuelle, le
viol, la vente, la traite et les déplacements illicites. Ainsi,
concernant les déplacements illicites et le trafic d'enfants, on peut
mentionner l'ordonnance n°73-37 du 17 avril 1973. Ainsi l'article
354 dispose que « quiconque aura conclu au Dahomey (Bénin)
une convention ayant pour objet d'aliéner, soit à titre
onéreux, la liberté d'une tierce personne, sera punie de la peine
de mort ». 58
55Arrêté n°1781
ITLS/D du 12 juillet 1954 relatif au travail des enfants et des jeunes gens.
56Arrêté
n°371/MTAS du 26 Août 1987 portant
dérogation à l'âge d'admission à l'emploi des
enfants en République du Bénin.
57Loi N° 2006-04 du 05 avril
2006, portant conditions de déplacement des mineurs et répression
de la traite d'enfants en République du Bénin.
58 Article 354 de l'ordonnance
n°73-37 du 17 avril 1973 portant protection de l'enfant contre
l'exploitation sexuelle, le viol, la vente, la traite et les
déplacements illicites.
L'article 354 A précise que « sera puni
de la même peine le fait d'introduire ou tenter d'introduire au (Dahomey)
Bénin des individus destinés à faire l'objet de la
convention citée à l'article 1er, ou de faire sortir
ou tenter de faire sortir des individus du (Dahomey) Bénin en vue d'une
telle convention à contracter à
l'étranger ». 60
On remarque que ces articles concernent la traite et le trafic
des personnes en général et ne spécifient rien en ce qui
concerne les enfants.
Cependant, l'article 355(B) précise que
« si le mineur est retrouvé vivant, saint d'esprit et de
corps avant le prononcé de l'arrêt de condamnation et ce, sur les
indications fournies par le ravisseur, la peine applicable sera les travaux
forcés à
perpétuité ».61
Contrairement à l'article précédent,
celui-ci est plus spécifique au trafic des enfants. Il est à
remarquer également que dans chaque cas, il est prévu les peines
qui conviennent. C'est le cas de la loi N°2006-4 du 05 avril 2006 portant
conditions de déplacement des mineurs et répression de la traite
d'enfants en République du Bénin comportant vingt-neuf articles
subdivisés en trois chapitres.
Le premier chapitre intitulé « Des
définitions et dispositions générales »
(huit articles) fixe le champ d'application de la loi et définit les
notions telles que l'enfant, la traite et le trafic des enfants, l'exploitation
d'enfant, les traitements cruels, inhumains, dégradants et/ou
humiliants.
Le second chapitre (six articles) réglemente
« les conditions de déplacement des enfants tant à
l'intérieur que vers l'extérieur du territoire de la
République du Bénin et l'entrée d'enfants de
nationalité étrangère en République du
Bénin ». Cette loi dispose par exemple aux termes de
l'article 7, qu'« aucun enfant ne peut être
déplacé à l'intérieur du pays séparé
de ses parents biologiques ou de la personne ayant autorité sur lui sans
une autorisation spéciale délivrée par l'autorité
administrative compétente du lieu de sa résidence sauf
décision judiciaire ou les cas spécialement recommandés
par les services sociaux et les services sanitaires»
60 Article 354 (A) de
l'ordonnance n°73-37 du 17 avril 1973 portant protection de l'enfant
contre l'exploitation sexuelle, le viol, la vente, la traite et les
déplacements illicites.
61 Article 354 (B) de l'ordonnance
n°73-37 du 17 avril 1973 portant protection de l'enfant contre
l'exploitation sexuelle, le viol, la vente, la traite et les
déplacements illicites.
Le troisième chapitre intitulé
« Des dispositions pénales » (quinze
articles) est consacré aux peines prévues pour la
répression des diverses infractions énumérées dans
cette loi. Signalons que les infractions prévues par cette loi sont
essentiellement des contraventions, des délits et des crimes. Des
circonstances aggravantes ont été également
évoquées :
La contravention : est punie d'une
amende de dix mille (10000) francs, toute personne qui ayant
connaissance du déplacement frauduleux d'un enfant, s'est abstenu d'en
informer l'autorité administrative territorialement compétente ou
l'officier de police judiciaire le plus proche (article 20).
62
Les délits
Ils sont entre autres :
- Le père ou la mère qui, sciemment, a
transporté et/ou a remis son fils en vue de la traite de celui-ci ou qui
a aidé d'une façon quelconque le trafiquant encourt un
emprisonnement de six (06) mois à cinq (05) ans
(article 16). 63
- Quiconque a placé, tenté de déplacer ou
accompagné un enfant pour une destination située en
République du Bénin hors de la résidence de son
père et/ou de sa mère ou de la personne ayant autorité sur
lui, sans accomplir les formalités administratives requises est puni
d'un emprisonnement d'un (1) an à trois (03) ans et d'une amende de
cinquante mille (50000) francs à cinq cent mille (500000) francs
(article 17) ; 64
- Quiconque a placé, tenté de déplacer ou
accompagné hors du territoire de la République du Bénin un
enfant autre que le sien ou un enfant sur lequel il a autorité sans
accomplir les formalités administratives en vigueur, est puni d'un
emprisonnement de deux (02) ans à cinq (05) ans et d'une amende de cinq
cent mille (500000) francs à deux millions cinq cent mille (2.500.000)
francs (article 18). 65
62Article 20 de la loi
N°2006-4 du 05 avril 2006 portant conditions de déplacement des
mineurs et répression de la traite d'enfants en République du
Bénin.
63 Article 16 de la loi
N°2006-4 du 05 avril 2006 portant conditions de déplacement des
mineurs et répression de la traite d'enfants en République du
Bénin.
64 Article 17 de la loi
N°2006-4 du 05 avril 2006 portant conditions de déplacement des
mineurs et répression de la traite d'enfants en République du
Bénin.
65 Article 18 de la loi
N°2006-4 du 05 avril 2006 portant conditions de déplacement des
mineurs et répression de la traite d'enfants en République du
Bénin.
Les crimes :
- Quiconque s'est livré à la traite est puni de
la réclusion à temps de dix (10) ans à vingt (20) ans.
En cas de récidive, les peines
prévues aux articles 16 à 21 alinéa 1er de la
présente loi, sont portées au double (article 25).
66
Les circonstances aggravantes : (ce
sont des faits laissés à l'appréciation du juge, qui
aggravant le caractère d'une infraction, lui permettent de prononcer une
peine plus forte).
- Aux termes de l'article 23 de la présente loi
« le recours à la menace, à la force ou à
d'autres formes de contraintes, à l'enlèvement, à la
fraude, à la tromperie, à l'abus d'autorité ou à la
situation de vulnérabilité, à l'offre ou l'acceptation de
paiement ou d'avantages pour obtenir le consentement de l'enfant ou d'une
personne ayant autorité sur lui, aux fins de son exploitation, est une
circonstance aggravante de la traite d'enfants ».
67
· En matière civile, le Code
civil organise la protection de l'enfant. Il lui confère le droit
à un nom, à une nationalité aux articles 55 à 61.
Également, le Code civil déclare le mineur incapable de faire un
contrat (article 1124) en vertu des conditions de validité fixées
à l'article 1108. En effet, le mineur ne peut contracter que s'il a
dépassé l'âge de scolarité obligatoire. Il ne peut
également souscrire à des emplois qui lui sont interdits. Au vu
de tout ceci, l'enfant est incapable de contracter. Ceci constitue d'ailleurs
une cause de nullité du contrat.68
66 Article 14 de la loi
N°2006-4 du 05 avril 2006 portant conditions de déplacement des
mineurs et répression de la traite d'enfants en République du
Bénin.
67 Article 23 de la loi
N°2006-4 du 05 avril 2006 portant conditions de déplacement des
mineurs et répression de la traite d'enfants en République du
Bénin.
68Article 1124 du Code civil,
protection de l'enfant
De même, par rapport au consentement qui est le
fondement même du contrat de travail, on peut dire que l'enfant ne
possède pas a priori un esprit de discernement lui permettant de donner
un consentement intègre pour la conclusion d'un contrat. Or selon
l'article 1109 du Code civil, « il n'y a pas de consentement
valable, si le consentement n'a été donné que par erreur
ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par
dol ».69 Le consentement de l'enfant
n'étant pas a priori libre, il s'ensuit que le contrat qu'il conclut est
nul.
Par ailleurs, l'objet du contrat constitue en
élément de validité du contrat. Et, cet objet, dans un
contrat de travail, consiste en la prestation de travail pour l'une des parties
et la rémunération pour l'autre partie. Or, le travail du mineur
n'étant pas rémunéré, il donne lieu à un
contrat sans objet qui est considéré comme nul.
Enfin, une cause illicite, fausse ou inexistante
entraîne la nullité du contrat. Ainsi, l'emploi des enfants dans
des conditions de travail de l'enfant dans le code civil, nous pouvons dire que
les enfants sont illégalement employés et que leurs
intérêts ne sont pas toujours pris en compte. Mais le code civil
qui réglemente tous les aspects du travail veille à la protection
de ces intérêts.
Le Code des personnes et de la famille et le code du travail
ont également abordé la question de la protection des droits des
enfants.
B- Les dispositions du code du travail et du code des
personnes et de la famille
La Loi n°98-04 du 27 janvier 1998 portant Code du travail en
République du Bénin interdit le travail des enfants de moins de
14 ans. En effet, l'article 166 du Code prévoit que
« Les enfants ne peuvent être employés dans aucune
entreprise avant l'âge de 14 ans ». 70
Ainsi, il est prévu un âge d'admission à
l'emploi. Il faut également noter qu'une catégorisation est faite
au niveau des travaux et des entreprises auxquels l'enfant a accès par
l'article 168, en ces termes : « Un arrêté
(...) fixe la nature des travaux et la catégorie
d'entreprises interdites aux femmes, aux femmes enceintes et aux jeunes gens,
et l'âge limite auquel s'applique
l'interdiction ». 71
69Article 1109 du Code civil,
protection de l'enfant.
70 Article 166 du Code du travail en
République du Bénin.
71 Article 168 du Code du travail en
République du Bénin.
Aussi, lorsque le travail dépasse les forces du jeune
travailleur, soit il est affecté à un autre emploi, soit le
contrat est résolu avec indemnisation comme en cas de rupture normale du
contrat de travail (article 169).72 En outre, le
contrat d'apprentissage est prévu aux articles 64 à 70. On peut
retenir aux termes de ces articles que, nul ne peut être apprenti s'il
n'est âgé de 14 ans révolus. Il doit également
être précisé dans ce contrat les modalités de
rémunération, de nourriture, de logement sans toutefois oublier
que ce contrat doit être soumis au visa des services compétents du
Ministère du travail.
On se rend compte que le Code de travail, en mettant autant de
garde-fous au travail des enfants et en limitant l'âge d'accès,
contribue d'une manière ou d'une autre à l'élimination du
travail des enfants et de surcroît, à celle du trafic des enfants
puisque les enfants, constituant une main d'oeuvre abondante et bon
marché sont très sollicités : c'est une source
abondante de trafic.
Quant au Code des personnes et de la famille, c'est la loi
n° 2002-07 du 14 juin 2004 qui l'institue.
C'est un document réparti en quatre livres dont le
premier, intitulé « Des personnes », procède
à une distinction entre personne physique et personne morale. Il
régit également l'état civil. A cet effet, en son article
6 alinéa 1, l'enfant légitime porte le nom de famille de son
père, l'enfant né hors mariage porte le nom de celui des parents
à l'égard duquel la filiation est établie. Le livre II
aborde avec précision les différents aspects de la vie de
famille, introduisant les innovations relatives au mariage, à la
filiation, à l'autorisation parentale, au régime matrimonial,
à la suspension et à la rupture de la vie conjugale. Par rapport
à l'autorité parentale, l'article 411 dispose que
« Le père et mère ou toute personne investie de
l'autorité parentale sont tenus de subvenir aux frais d'entretien et
d'éducation de l'enfant ».
73
72 Article 169 de la loi
n°98-04 du 27 janvier 1998 portant Code du travail en République du
Bénin.
73Article 411 la loi n°
2002-07 du 14 juin 2004 portant protection des personnes et de la famille.
En effet, le Code de la personne et de la famille
prévoit que le mineur non émancipé sera obligé de
rester au domicile de ses parents ou de la personne exerçant le droit de
garde et peut être contraint à y revenir lorsqu'il quitte ce
domicile sans l'autorisation de ces personnes. La nouveauté
réside dans le fait que cette autorisation parentale est exercée
par les deux parents.
Ainsi, grâce à cette autorité parentale,
aucun enfant ne peut partir du domicile de ses parents sans leur autorisation
même si, quelquefois, certains parents sont complices du départ
à l'extérieur de leur progéniture.
Eu égard à tout ce qui procède, on peut
dire qu'il existe un enchaînement de mesures en faveur de l'enfant.
Nonobstant cela, on assiste à certaines situations d'enlèvements
et de déplacements illicites d'enfants. En résumé, nous
pouvons dire que malgré l'abondance d'une législation protectrice
des droits des enfants, le trafic des ces êtres fragiles persiste au
Bénin. Il en ressort donc que cette législation n'est pas
qualitativement appropriée. Il y a alors des failles auxquelles il
convient de trouver des solutions.
C'est à cet effet qu'on note l'existence au
Bénin de structures étatiques, d'ONG nationales ou
internationales qui s'impliquent activement dans le processus de lutte contre
le trafic des enfants.
Deuxième partie :
Cadre politique et administratif
L'enfant a droit à toute forme de protection. Les
institutions étatiques et les organisations non gouvernementales ont le
devoir de lui garantir les droits reconnus aux plans national, régional
et international.
Pour y parvenir, une meilleure coordination des actions
régionales et sous-régionales, voire internationales, s'impose
surtout en matière de traite des enfants qui a des effets au-delà
de nos frontières.
Il sera question dans cette deuxième partie, de faire
un examen du cadre politico administratif en matière de lutte contre le
trafic des enfants au Bénin notamment.
Ainsi, il sera examiner d'une part le dispositif administratif
et institutionnel en matière du trafic des enfants; et d'autre
part, il sera question d'énumérer les limites ou insuffisances
en matière de lutte contre le trafic des enfants au Bénin et par
ricochet, donner quelques propositions de solutions.
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