La répartition spontanée suivant la
marchandise
On remarque ainsi très clairement des regroupements par
thématique de vente dans chaque quadra: dans la quadra A, nous allons
essentiellement trouver des montres et des accessoires de portables. Dans la
quadra B on a là encore beaucoup de matériel électronique,
mais également informatique, jeux vidéos,
téléphones, etc. C'est également dans cette quadra que
l'on va rencontrer le plus de Cds et DVDs à bas prix (piratés).
Dans la quadra C on commence à rencontrer des vêtements
mêlés à la marchandise précédemment
citée, et en n dans la quadra D, l'essentiel de la marchandise est
d'ordre vestimentaire (vêtements, chaussures, accessoires de mode,
sacs)
Lors d'une discussion avec Filipe, un coordinateurde l'UNIO,
il m'expliqua que cette réorganisation volontaire n'est absolument pas
le fruit d'une plani~ cation imposée par qui que ce soit, mais celui
d'un arrangement entre les camelots.
« Par ce qu'il n'y avait pas 1600 personnes qui
acceptaient de travailler là à l'intérieur, par ce que
nous on vient de la rue. Dans la rue les gens passaient, en le voulant ou sans
le vouloir. Là non, les gens doivent aller à l'intérieur
à notre recherche. Tu comprends? Alors qu'est ce qui se passe. Petit
à petit se sont formés des groupes dans chaque quadra. »
(Felipe - Coordinateur à l'UNIO - Entretien
réalisé en septembre 2008)
J'ai longtemps cru que cela signi~ ait qu'il y avait eu des
échanges d'emplacements entre les vendeurs qui avaient souhaité
s'organiser. C'est au cours de discussions que je compris qu'en
réalité, suivant les demandes, les tendances par quadras, les
camelots réadaptaient totalement leur marchandise. Dit ainsi cela
paraît simple, en réalité cela implique une réelle
organisation, des alliances entres camelots qui décident de se lancer
dans un nouveau type de vente, cela n'a rien de spontané, et surtout
d'isolé Et lorsqu'un vendeur souhaite vendre un produit
déjà dominant dans la quadra, il doit avant tout intégrer
un réseau déjà existant.
« Si Dieu veut, on va changer tout ça l'année
prochaine.
Avec qui?
Avec des gens qui vendent, ici la vente est assez mauvaise
pour beaucoup d'entre nous, pour des gens qui vendent des cd, des dvd. On va
s'allier... Tu sais parfois apparaît quelque chose, tu sais comment
c'est. Des fois y a des quadra et il y a quelque chose qui se vend beaucoup. Et
le gars vient, il dit « j'ai besoin de ton box. Je vais te payer tant, je
vais voir l'association, et je vais vendre là. » C'est un peu comme
un loyer. Des fois ça le fait des fois non. (...) Des fois t'as besoin
de travail et des fois tu en a mais t'as besoin d'un local. Et hop, c'est bon.
Tu t'associes, tu gères... »
(Adex - vendeur depuis 7 ans dans la quadra D - Entretien
réalisé en octobre 2008)
tu une di érence de style de marchandises entre les
quadras? », les réponses sont très variées. En e et,
on ne peut pas dire que ce détail ait été remarqué
par tous les camelots. Alors que certains répondront sans
hésitation quelles sont les principales marchandises rencontrées
dans chaque quadra, d'autre ne feront aucune di érence, avec la
réponse récurante « é tudo igual »
(c'est tout pareil). Le détail encore plus étonnant est que
l'ancienneté et l'expérience du lieu ne semblent pas liées
directement à ces réponses. Par contre une di érence qu'un
certain nombre de camelots savent donner est le potentiel de vente des quadras.
La quadra A arrivant en tête et la D en dernier. Cette notion, par
contre, est connue par bien plus de camelots que les di érences de
marchandises.
Ainsi, nous avons vu qu'une succession de transformations
à savoir un zoning du centre ville ainsi que la forte production de
voies rapides ont conduit ce dernier a être totalement
déserté, devenant un centre d'a~ aires. Ce
phénomène allié à la crise des années 80 lui
a fait connaître une période de décadence au cours de
laquelle les métiers de l'informel se sont développés, et
parallèlement le nombre d'habitants des rues a particulièrement
augmenté. Au cours de cette décadence le centre s'est vu envahi
par de nombreux mendiants, qui peuplent encore actuellement le centre la nuit,
lorsque les bureaux ne sont plus en activité.
A partir des année 80 on commence à voir surgir
des projets qui tentent d'intégrer l'informel à la ville (de
façon plus ou moins vicieuse puisque par intégration on souhaite
l'éradication de façon douce d'un type d'architecture). Et ainsi
apparaissent les premiers projets de camelódromos à Rio de
Janeiro. Celui de la rue Uruguaiana ne pointe son nez qu'en 1994, mais est
à ce jour un de ceux qui fonctionne le mieux, et il a le mérite
de s'être développé par auto-gestion, par la seule
participation des camelots. Il est à ce jour intégré
à la ville de manière impressionnante.
Ainsi, nous nous apprêtons à aborder dans la
partie suivante, de quelle façon toute cette organisation s'est elle
instaurée. Nous allons donc pénétrer dans les coulisses du
Camelódromo, a n de savoir qui sont ses acteurs, quels sont les
processus d'organisation qui y sont mis en place. Comme j'y ai
déjà fait référence auparavant, une association,
dénommée l'UNIO est à la tête de ce
développement. Qu'est ce que l'UNIO exactement? Quel est son rôle
au sein du camelódromo et est elle réellement hors de
contrôle comme le stipulent souvent les journaux? A travers les
rencontres des acteurs du Camelódromo nous allons donc voir quels y sont
les fonctionnements internes, quelles y sont les règles, et quel est
l'impact que le Camelódromo a sur le ville.
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Dans les
coulisses du
Camelódromo
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