Section 2. Au niveau du statut des organes
§1. INDÉPENDANCE
Il n'est pas' dans la plupart des organes de
régulation' mis en exergue' leur nature
indépendante.
Les natures juridiques sont disparates'
non-conformes' le plus souvent' à la loi cadre et
l'indépendance, qui doit leur être reconnue, est souvent
ignorée' ce qui les prédispose
à une capture par les autorités politiques et
à une négligence de leur mission de prise en compte des
intérêts des consommateurs.
Si' sur le papier' il est beaucoup
question d'indépendance pour la Commission de régulation
du secteur de l'électricité' elle
est' en réalité très tributaire du
ministère de l'énergie qui lui donne toutes les
orientations' malgré les conditions de
nomination' assez encourageantes pour une bonne
indépendance' prévues à l'article 2 de la loi
98-29 qui disposent que « Le mandat du Président et des Membres
de la Commission de Régulation du Secteur de l'+lectricité est
de 5 ans' renouvelable une fois ».
Pour l'Autorité de régulation des
marchés publics (ARMP)'
l'indépendance y est assez affirmée tant au niveau de la
nature juridique qu'au niveau de la mission' en ce sens qu'elle est
considéré comme étant « une
autorité administrative indépendante » par la
loi 2007-546 du 25 avril 2007 et que sa mission de
régulation a pour objet «(:) de mettre en oeuvre des
procédures d'audits indépendants ».
De même « les membres du Conseil sont
nommés par décret' sur proposition
des administrations' organismes socioprofessionnels et
organisations de la société civile auxquels ils
appartiennent. Ils bénéficient pour les actes
qu'ils prennent dans l'exercice de leurs fonctions d'une protection
spéciale de l'Etat. Ils ne peuvent être' sous
réserve des dispositions de l'article 10 du présent
décret' poursuivis' recherchés'
arrêtés ou jugés à l'occasion des actes
accomplis' des mesures prises ou des opinions ou des votes
émis dans l'exercice de leurs fonctions. Ils exercent leurs fonctions en
toute impartialité et en toute
indépendance ».
Cependant, ce sera après une ou des années
de fonctionnement que nous serons à même d'évaluer le
niveau réel d'indépendance.
L'indépendance est une notion assez présente dans
les dispositions du CNRA.
Aussi' nonobstant les dispositions de
l'article ter sur sa nature d'autorité
indépendante' les dispositions sur la nomination des
membres du CNRA sont assez protectrices d'une certaine
indépendance.
En effet' selon l'article 4 : « La
durée du mandat des membres du Conseil National de Régulation de
l'Audiovisuel est de six ans. Ce mandat n'est ni renouvelable, ni
révocable ».
« Les membres du Conseil National de
Régulation de l'Audiovisuel ne peuvent être poursuivis'
recherchés' arrêtés ou jugés à
l'occasion des actes accomplis ou des opinions émises dans l'exercice de
leurs fonctions ».
Mais, certains acteurs, tels que les partis politiques,
restent toujours à convaincre par rapport à l'indépendance
réelle des membres du CNRA.
L'indépendance est une notion qui revient sans cesse
dans les dispositions de la loi 2004-14 du 1er mars 2004'
instituant le Conseil des infrastructures'
notamment au niveau de l'exposé des motifs' qui estime que sa
mise en place a pour objectif général « d'assurer
une veille indépendante et qualifiée
» et de formuler « des avis
qualifiés et indépendants lorsqu'il est saisi
» et qu'il est habilité à « effectuer
une publication directe et indépendante de ses avis
»' et que ses membres «sont nommés par
décret' observent les incompatibilités
légales qui garantissent leur indépendance
»
Ces dispositions sont confirmées par les articles 1 et
8 de la loi 2004-14 et particulièrement' l'article
11' qui précise que «Dans l'exercice de leurs
fonctions' les membres du Conseil des infrastructures ne
reçoivent d'instructions d'aucune autorité
».
Ce qui est une avancée notable, qui ne se
retrouve, presque, dans aucune disposition d'organe de
régulation.
En ce qui concerne l'Agence de régulation des
télécommunications et des Postes
(ARTP)' aucune disposition d'indépendance ne
vient confirmer l'affirmation contenue dans l'exposé des motifs du code
des télécommunications faisant état du
caractère indépendant que devrait revêtir
l'ARTP.
Au contraire' le décret 2003-63 du 17
février 2003' portant organisation et fonctionnement de
l'ART' ne donne aucune garantie
d'indépendance au Directeur général'
qui est « nommé par décret» et qui est
révocable à tout moment.
D'ailleurs' de toutes les instances de
régulation du Sénégal' l'ART(P)* est
celle qui a connu la plus grande instabilité, au niveau
des instances de direction avec trois directeurs généraux
nommés en 7 ans.
* Depuis l'ART jusqu'à son passage à l'ARTP
Mais' parallèlement, il n'a jamais
été question d'indépendance, pour la
Société nationale des eaux du
Sénégal' ni pour l'Agence de
régulation des marchés' ni pour la
Commission nationale des Hydrocarbures.
Ces organismes sont complètement
capturés par l'autorité politique' au
détriment, le plus souvent, de leur mission de préservation des
intérêts des consommateurs.
§2. POUVOIRS
La plupart des organismes de régulation ont des
pouvoirs' de proposition et de conseil. Ce qui fait
défaut, c'est beaucoup plus' les pouvoirs de
fixation tarifaires' d'investigation, de sanction
effective et de traitement des différends.
Le CNRA n'a aucun pouvoir de régulation de la
qualité des services offerts, ni des prix
pratiqués' par les opérateurs des bouquets
télévisuels' au bénéfice des
consommateurs' même en termes de proposition.
Cette limite est notée au niveau du
CETUD, qui n'a aucun pouvoir de sanction des
opérateurs de transport ou de règlement des
différends entre les opérateurs et les usagers.
Il faut noter que les pouvoirs de l'ARTP sont assez
étendus, en matière d'investigation'
d'approbation des tarifs des opérateurs' et de sanction
etc.
En qui concerne la SONES'
le CNH' la CRSE'
et le CETUD' l'approbation tarifaire
est du domaine du Ministre de tutelle. Ces organes'
n'exécutent que des calculs de la structure tarifaire' ce qui
fait' d'eux' juste' des structures de
proposition dans ce domaine.
Si la SONES et le CRSE ont le pouvoir
de sanctionner les manquements des opérateurs' en
ce qui concerne leurs obligations vis-à-vis des
consommateurs' ce n'est
pas le cas de l'ARM, ni du CNH, ni du
CETUD' tant au niveau du respect de la
qualité' que des prix.
En ce qui concerne l'ARM' elle peut
obtenir une fixation consensuelle des prix des
produits' après concertation entre les producteurs et les
consommateurs.
Nous voyons donc' que des dispositions
cruciales de prise en compte et de protection des intérêts des
consommateurs, échappent au contrôle des organes de
régulation' notamment' en matière
de surveillance tarifaire et de respect des normes et de la qualité.
§3. COMPOSITION DES ORGANES
La composition des organes de régulation est
très disparate. Si certains organes sont très
compacts - 3 personnes pour la CRSE' d'autres sont
pléthoriques - c'est le cas du CETUD avec 26 membres pour
l'assemblée plénière.
Certains rares organes de régulation respectent le
droit fondamental du consommateur à la représentation, et
comptent, une représentation des usagers -consommateurs dans leurs
organes.
C'est le cas du CETUD, avec une
représentation des consommateurs dans l'assemblée
plénière.
C'est le cas' aussi :
des représentants des différentes tranches
d'âge au niveau du CNRA'
des représentants des usagers au sein du Conseil
des infrastructures'
des représentants des usagers au niveau du conseil
d'administration de la SON ES'
des représentants de la société
civile' au niveau du conseil de régulation
et du comité de règlement des différends
de l'ARMP.
Par contre' aucune représentation des
consommateurs' n'est prévue au
niveau de la CRSE' au niveau du CNH et au niveau du conseil de
régulation de l'ARTP.
Or' la représentation des consommateurs est une
des conditions fondamentales de préservation et de
prise en compte des intérêts des consommateurs.
Section 3. Au niveau de l'organisation fonctionnelle des
organes de régulation
§1. INTERLOCUTEUR PRINCIPAL NON
SPÉCIFIÉ
Les organes de régulation ne sont pas organisés
dans le sens de faciliter leur accessibilté et le
contact entre eux et les consommateurs ou leurs organisations.
Aussi' il n'y a pas d'interlocuteur spécifié.
Ce qui rend, parfois extrêmement compliqué le contact interactif,
nécessaire, entre le consommateur et l'organe.
Tout va vers le Directeur
général' ce qui alourdit et ralentit,
beaucoup, la prise en charge des réclamations des consommateurs
du fait de l'indisponibilité du « patron » et qui
souvent' est le seul' à pouvoir
dispatcher' et donc initier' le traitement d'une saisine
faite par un consommateur.
De tous les organes de régulation'
seule l'ARTP a timidement mis en place' récemment un
«Monsieur consommateur» dont l'opérationnalité souffre
de l'instabilité des hommes dans l'organe' avec les
fréquents changements au niveau de l'organigramme.
§2. ABSENCE DE CELLULE « CONSOMMATEURS
»
Mise à part l'ARTP' aucun des
organes de régulation n'a mis en place une cellule « consommateurs
» organisée pour gérer et traiter les
problèmes spécifiques aux consommateurs et à leurs
organisations.
Si' ce début d'organisation en faveur de la
prise en compte des intérêts des consommateurs' est
à saluer au niveau de l'ARTP' beaucoup de choses
restent
encore, à faire, pour un bon traitement
des relations entre l'ARTP et les associations de consommateurs.
Chapitre 2. Les limites au niveau de
l'exécution de la mission des organes de
Régulation
Les limites institutionnelles traitées'
supra' occasionnent des répercussions importantes au niveau
de la conduite de la mission générale de protection des
consommateurs, en particulier' au niveau de la
prise en compte globale de la mission et au niveau du choix des
dossiers.
Ces difficultés sont renforcées par
l'absence de moyens techniques, propres aux organes de
régulation' pour leur besoins d'investigation
scientifique.
A cela s'ajoutent les limites au niveau de
l'interactivité indispensable qui doit exister entre le
consommateur' plaignant' et l'organe de
régulation' qui se doit d'être a mesure
d'appréhender' de la manière la plus juste'
les désidérata des consommateurs.
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