IV.1.2. L'expérience historique de royaumes
La constitution des royaumes constitue un autre
élément culturel qui lie les peuples de l'Afrique de l'Est. Cet
ensemble correspond au sens large à l'Afrique du rift (Y. Lacoste,
1993). Il est formé principalement du Kenya, de l'Ouganda et de la
Tanzanie, auquel on adjoint le Rwanda, le Burundi et la région
congolaise du Kivu en raison de son exploitation minière
régionale spécifique, et plus globalement du fait de leur
enclavement et du brassage démographique qui les caractérisent
les trois.
L'Afrique orientale est définie par Y. Lacoste (1993,
p. 8.83) comme un ensemble qui passe par des alternances de scissions et de
rapprochements. L'administration des royaumes rwandais et burundais fut en
effet associée à celle du Tanganyika par l'Allemagne qui
rêvait d'une Mittel Afrika jusqu'en 1919. Confiée par la
Société des Nations à la Grande Bretagne jusqu'en 2003,
le Tanganyika fut alors intégré au rêve de Cécile
Rhodes, celui d'établir une Afrique anglaise, du cap au Caire.
Enfin, de 1923 à 1962, le Burundi et le Rwanda forma un
territoire belge centrale, en association avec certaines régions de
l'est du Congo. Dès 1900, des unions douanières virent le jour
entre l'Ouganda et le Mombasa. Ces efforts se sont poursuivis au-delà de
la seconde Guerre Mondiale et de l'accession aux indépendances. Les
migrations volontaires ou mouvements de refugiés, alliances politiques
et interventions militaires, relations commerciales officielles ou de
contrebande sont autant de facteurs qui contribuent à la construction de
l'Afrique orientale.
Si de nombreux enjeux sont locaux, l'implication des
populations et des destins exige, pour leur résolution, une dynamique
régionale favorable et inversement (A.Guichaoua, 1992). Plusieurs
autres facteurs semblent d'autre part favoriser l'émergence d'une
certaine intégration.
C'est le cas notamment de l'institution socioreligieuse du
bwami qui a ouvert des nouveaux horizons sur l'institution royale du mwami
telle qu'elle fonctionne au Rwanda, au Burundi, au Buha ou au Bushi
(J.P.Chrétien, 1986, p.257). On peut parler des liens commerciaux, par
exemple la diffusion des bracelets de raphia au Rwanda par les colporteurs
venus du Butembo (D. Newbury, 1980, p.15). Le Rwanda, le Burundi et l'Ouganda
sont situés au carrefour de la grande voie nord-sud qui mène de
la vallée du Nil à celle du Zambèze (le Cap au Caire) avec
les routes est-ouest qui vont des comptoirs arabes sur les rivages de
l'océan indien vers la cuvette du Congo (Y. Lacoste, 1997, p.4).
Dans cette région de l'Afrique de l'Est, se dressaient
depuis des siècles des royaumes extrêmement organisés.
C'est le cas notamment des royaumes du Rwanda(le Rwanda actuel), du Burundi(le
Burundi actuel), de Toro, Nkolé et Buganda en Ouganda actuel, de Buha
(une partie de la Tanzanie), de Bushi (la partie est de la République
Démocratique du Congo). L'on voit bien qu'à l'exception de Bushi,
tous ces royaumes occupent actuellement des territoires des Etats de la CAE.
Ces royaumes se sont étendus au fil des années
en vastes royaumes. Les raisons expliquant le développement de ces
grands ensembles se trouvent donc dans la géographie, l'économie
et aussi le souci de sécurité et ce sont ces raisons qui
reviennent dans l'explication de l'intégration du Rwanda à la
CAE, le souligne le cadre du Secrétariat de la CAE. Seulement, une chose
est certaine, c'est que la partie où ont développé ces
royaumes appartient tout entière à l'Afrique tropicale,
région réputée être le berceau de
l'humanité.
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