I.
Fondéménts théoriques de la fonction d'importation
Dans ce paragraphe, nous allons appréhender les
importations à l'aide d'une fonction d'importation avant de nous
intéresser aux multiplicateurs.
A. EVALUATION DES
IMPORTATIONS À TRAVERS LA FONCTION D'IMPORTATION
En considérant comme parfaitement autonomes les
importations et les exportations d'un pays, on constate que le multiplicateur
k de dépense autonome demeure ce qu'il était en
économie fermée, c'est-à-dire exclusivement
déterminé par l'importance des propensions marginales à
consommer et à investir. Seul varie, dans l'analyse des divers processus
possibles de multiplication, le nombre des éléments composant la
demande autonome.
Il est cependant devenu classique de considérer le
niveau des importations comme partiellement induit par le niveau de revenu
global Y. Cette hypothèse nouvelle est logique. En revanche, on
peut, en première approximation, considérer les exportations
comme autonomes, en ce sens qu'elles dépendent davantage du niveau
d'activité économique des pays clients que du niveau
d'activité interne du pays considéré.
En terme linéaire, on écrira :
M = m'Y + Mo,
Dans cette équation, la constante
Mo représente la part autonome (relativement
à Y) des importations, le terme m, constituant la
propension marginale à importer ÄM /ÄY. Le
produit m'Y représente en conséquence les importations
induites résultant du résultat de Y (1). La propension
« m' » est comprise entre 0 et 1 :
0<m'<1 (2)
Prenons donc en considération l'existence
d'importations induites et étudions dans cette perspective le
problème de l'équilibre macroéconomique.
A l'équilibre, on a, en désignant par D
la demande globale :
Y = D = C + I + X - M.
Comme posé dans les chapitres
précédents:
C = c'Y + Co
I = i'Y + Io
X = Xo
M = m'Y + Mo
On peut donc écrire (équilibre):
Y = D = (c' + i' - m') Y + (Co + Io
+ Xo - Mo).
D'où l'on tire:
Y = (Co + Io + Xo -
Mo)/ (1 - c' + i' - m')
Ou encore en posant 1 - c' = s' (propension marginale
à épargner) et Xo - Mo =
No.
Y = (Co + Io + No)/ (s' -
i' + m'). (2)
Le multiplicateur désormais obtenu est donc
ke = 1/ (s' - i' + m').
En hypothèse d'économie fermée, ou en
hypothèse d'économie ouverte avec des exportations purement
autonomes, on avait k = 1/ (1 - c' + i') = 1/ (s' - i'). De toute
évidence, ke<k.
Ainsi l'introduction d'une hypothèse d'importations
partiellement induites (m'>0) conduit à constater une
réduction de l'importance du multiplicateur de dépenses dans le
pays considéré. Ceci est parfaitement normal puisque les
importations ont le même effet, du point de vue du pays concerné
et quant à la détermination du niveau d'équilibre, que
l'épargne (fuite de revenu réduisant d'autant la demande
intérieure). Et, de toute évidence, la formule du nouveau
multiplicateur ke montre que sa valeur est d'autant plus
faible que la propension marginale à importer est plus forte.
B. LA CONSIDÉRATION
DES AUTRES MULTIPLICATEURS
Nous avons précédemment établi qu'en
économie ouverte et en supposant partiellement induites les
importations, le multiplicateur peut s'écrire pour un pays
quelconque : ke = 1/ (s' + m'- i'). D'autre part, le
revenu (ou produit) global d'équilibre est alors : Y= 1/ (s' +
m'- i') = (Co + I o + N o).
Nous supposons, dans le but de simplifier les formalisations,
que i' = 0. Autrement l'investissement intérieur est
purement autonome (i = I o). Dans ces conditions, on
obtient ke x 1/ (s' + m') et à l'équilibre, Y =
1/(s' + m') (C o + I o + N o). Ceci
permet encore de poser : (s' + m') Y = C o + I o
+ N o (1)
Rappelons que N o = X o - M o
(différence entre Exportations et Importations autonomes).
Considérons deux (2) pays, soit un pays A et un pays B (ce dernier peut
représenter le reste du monde pour le pays A). Les symboles
utilisés seront les suivants :
Tableau 12 : Symboles des agrégats et
multiplicateurs des pays A et B
Désignation
|
Pays A
|
Pays B
|
Produit (revenu total)
|
Y1
|
Y2
|
Propension marginale à
épargner
|
s'1
|
s'2
|
Propension marginale à importer
|
m'1
|
m'2
|
Consommation autonome
|
C o 1
|
C o 2
|
Investissement autonome
|
I o 1
|
I o 2
|
Exportations autonomes
|
X o 1
|
X o 2
|
Importations autonomes
|
M o 1
|
M o 2
|
Différence (X o -
M o)
|
N o 1
|
N o 2
|
La fonction d'importation est, pour le pays A :
M1 = m'1Y1 +
M o 1.
La fonction d'importation est, pour le pays B :
M2 = m'2Y2 +
M o 2.
A l'équilibre on peut donc écrire pour
A :
(s'1 +
m'1)Y1 = C o 1 +
I o 1 + X o 1 - M o
1.
A l'équilibre on peut donc écrire pour
B :
(s'2 +
m'2)Y2 = C o 2 + I o
2 + X o 2 - M o
2.
Or, on peut assimiler les importations de A aux exportations
de B (M1 = X o 2) et les
importations de B aux exportations de A (M2 = X o
1).
Pour le pays A :
(s'1 +
m'1)Y1 = C o 1 +
I o 1 + m'2Y2 -
M o 2 - M o 1 (2)
Et le pays B :
(s'2 +
m'2)Y2 = C o 2 +
I o 2 + m'1Y1 -
M o 1 - M o 2 (3)
Substituons, dans les équations (2) et (3) ci-dessus,
leurs variations aux grandeurs Y1, Y2, C o
1, C o 2, I o 1,
I o 2, M o 1 M o
2, M o 1, on obtient :
Pour le pays A :
(s'1 + m'1)
ÄY1 = ÄC o 1 + ÄI
o 1 + m'2ÄY2 - ÄM o
2 - ÄM o 1 (4)
Et le pays B :
(s'2 + m'2) ÄY2 =
ÄC o 2 + ÄI o 2 +
m'1ÄY2 - ÄM o 1 -
ÄM o 2 (5)
Ces équations (4) et (5) autorisent la
définition de divers multiplicateurs du commerce extérieur selon
que l'on les suppose nulles ou au contraire différentes de zéro.
Les variations des importations autonomes d'un pays induisent
des effets opposés sur son point global et sa balance commerciale,
l'inverse exact pouvant être observé chez les partenaires.
Plus précisément toute augmentation autonome des
importations d'un pays réduit, ceteris paribus, son revenu
d'équilibre et dégrade sa balance commerciale, mais induit des
résultats exactement contraires chez ses partenaires commerciaux. A
l'inverse toute réduction des importations d'un pays élève
son propre produit d'équilibre et améliore sa balance
commerciale, mais provoque des résultats strictement opposés chez
ses partenaires.
Ainsi l'action sur les grandeurs liées en commerce
international peut constituer, en économie ouverte, une mesure de
politique économique. En période de déficit commercial
(pour ne prendre qu'un exemple) le pays A peut fort bien envisager
d'améliorer sa balance commerciale en tentant de stimuler ses
exportations et/ou de réduire ses importations. Mais une telle
politique, en induisant des résultats opposés dans les autres
pays, revient à soigner un mal par contamination des partenaires. Ses
conséquences ne sont donc pas sans danger. Aussi lui
préfère-t-on en général les politiques de relance
interne.
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