B. La détermination de la valeur ajoutée en
fonction du statut fiscal du redevable
1. Les redevables soumis à un régime
réel d'imposition
Pour la généralité des entreprises,
à savoir celles soumises à un régime d'imposition
réel d'imposition, « la production de l'exercice est égale
à la différence entre : d'une part, les ventes, les travaux, les
prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les
subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les
travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les transferts de charges
mentionnées aux troisième et quatrième alinéas (de
l'article 1647 B sexies-II-2 du CGI) ainsi que les transferts de
charges de personnel mis à disposition d'une autre entreprise ; les
stocks à la fin de l'exercice ; et, d'autre part, les achats de
matières et marchandises, droits de douane compris ; les
réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice
»37.
De plus, « les consommations de biens et services en
provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services
extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens
pris en crédit-bail, ou des loyers afférents à des biens,
visés (à l'article 1467-1°-a du CG I), pris en location par
un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de
six mois ou des redevances afférentes à ces biens
résultant d'une convention de location-gérance, les frais de
transports et déplacements, les frais divers de gestion, (...) les
dépenses de gros entretien et de grandes visites engagées au
cours de l'exercice, y compris lorsque leur coût estimé au moment
de l'acquisition ou de la création de l'immobilisation principale
à laquelle elles se rattachent a été inscrit à
l'actif du bilan »38.
La valeur ajoutée à prendre en compte est en
principe celle produite par l'ensemble des activités de l'entreprise.
L'administration admet toutefois d'en exclure la fraction correspondant
à des activités placées hors du champ d'application de la
taxe professionnelle ou exonérées39. Mais la
jurisprudence considère que cette doctrine ne peut pas être
invoquée pour une activité bénéficiant seulement
d'une exonération temporaire40.
37 Cf. article 1647 B sexies-II-2 du CGI.
38 Ibid.
39 Cf. D. adm. 6 E-4331 n° 10 et 21, dans «
Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento pratique, éd.
Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3922.
40 Cf. CE 27 novembre 1991 n° 78076, RJF 1/92 n° 72,
dans « Mémento fiscal 2009 », coll. Mémento pratique,
éd. Francis Lefèbvre, 3/2009, n° 3922.
2. Les établissements de crédit et les
entreprises ayant pour activité exclusive la gestion de valeurs
mobilières
En ce qui concerne les banques, les établissements
financiers, les établissements de crédit et les entreprises ayant
pour activité exclusive la gestion de valeurs mobilières, la
production s'obtient, selon les termes de l'article 1647 B sexies II -
3 du CGI, en faisant « la différence entre, d'une part, les
produits d'exploitation bancaires et produits accessoires ; d'autre part, les
charges d'exploitation bancaires ».
La distinction entre ces entreprises et celles qui
relèvent de la définition de droit commun de la valeur
ajoutée précitée est déterminante puisque les
entreprises visées à l'article 1647 B sexies, II-3 du
CGI doivent inclure les charges et les produits financiers dans le calcul de
leur valeur ajoutée, contrairement à la
généralité des entreprises. Ce problème se pose
essentiellement pour les sociétés dont la seule activité
est de déterminer des participations dites « sociétés
holdings pures ». Leurs produits sont exclusivement constitués de
dividendes. Ainsi, la quasi-totalité de la valeur ajoutée
qu'elles produisent est égale correspond au montant des dividendes
perçus, si elles sont considérées comme des entreprises
ayant pour activité exclusive la gestion de valeurs mobilières. A
l'inverse, leur valeur ajoutée serait nulle si ces entreprises
relèvent du régime de la généralité des
entreprises, puisque, dans ce cas, leurs produits financiers ne seraient pas
à inclure dans le calcul de la valeur ajoutée41. Cette
distinction est fondamentale pour les entreprises concernées, moins en
matière de plafonnement de la taxe professionnelle, mais pour la
détermination de la cotisation minimale sur la valeur
ajoutée42.
Ainsi, les sociétés holdings peuvent choisir
d'exercer une activité autre que la détention de participation,
telle que les prestations de services rendues aux filiales, ce qui
entraîne l'exclusion de la holding du champ d'application de l'article
1647 B sexies, II-3 du CGI. En revanche, les sociétés
holdings pures, qui souhaitent le rester, peuvent contester le principe
même de l'assujettissement à la taxe professionnelle, en arguant
de l'absence d'activité professionnelle imposable43.
41 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34501.
42 V. infra.
43 Ibid.
3. Les entreprises d'assurance, de capitalisation et de
réassurance de toute nature
La production des entreprises d'assurance, de capitalisation
et de réassurance de toute nature est égale, en vertu de
l'article 1647 B sexies II - 4 du CGI, à la différence
entre « d'une part, les primes ou cotisations ; les produits financiers ;
les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes,
rabais et remises obtenus ; les commissions et participations reçues des
réassureurs ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ;
les provisions techniques au début de l'exercice. Et, d'autre part, les
prestations ; les réductions et ristournes de primes ; les frais
financiers ; les provisions techniques à la fin de l'exercice ». De
plus, « les consommations intermédiaires comprennent
également les commissions versées aux courtiers, agents et autres
mandataires ».
4. Les redevables soumis au régime
micro-entreprises ou au régime déclaratif spécial dit
« micro-BNC » 44
Sont soumis au régime des micro-entreprises, aux termes
de l'article 50-0-1 du CGI, « les entreprises dont le chiffre d'affaires
annuel, ajusté s'il y a lieu au prorata du temps d'exploitation au cours
de l'année civile, n'excède pas 80 000 euros hors taxes s'il
s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises,
objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer
sur place, ou de fournir le logement (...), ou 32 000 euros hors taxes s'il
s'agit d'autres entreprises. »
Aussi, en vertu de l'article 102 ter du CGI, les
contribuables, « qui perçoivent des revenus non commerciaux d'un
montant annuel, ajusté s'il y a lieu au prorata du temps
d'activité au cours de l'année civile, n'excédant pas 32
000 euros hors taxes. », sont soumis au régime déclaratif
spécial « micro-BNC ».
La valeur ajoutée produite par les redevables, qui sont
soumis à de tels régimes fiscaux, est égale à 80%
de la différence entre le montant des recettes et, le cas
échéant, celui des achats45. Les achats à
prendre en compte ici s'entendent des achats de matières et de
marchandises, à l'exclusion des consommations de biens et services
44 Ce régime concerne les redevables qui perçoivent
des bénéfices non commerciaux (BNC).
45 Cf. article 1647 B sexies - II - 5 du CGI ; BO 6 E-1-00
n° 52 à 56.
en provenance de tiers qui ont été remplacés
par l'abattement de 20% applicable au calcul de la valeur ajoutée
susmentionnée46.
En pratique, la valeur ajoutée est
déterminée suivant les indications de la déclaration
spéciale (n° 1327-S TP) dont les rubriques correspondent aux
éléments de la déclaration de résultats.
II. L'interprétation des mots « hors taxes
» figurant dans la définition de la valeur
ajoutée, donnée par le
législateur
L'administration fiscale a opté pour une
interprétation restrictive de la notion de taxe exclue de la valeur
ajoutée, en adoptant un principe de non-déductibilité des
impôts et taxes dans le calcul du montant de la valeur ajoutée
(A). Les juges du fond, divisés en la matière, (B) puis le
Conseil d'Etat ont adopté une interprétation plus libérale
des termes « hors-taxe » de la définition de la valeur
ajoutée énoncée aux 1-II de l'article 1647 B
sexies du CGI (C).
A. Le principe de non-déductibilité des
impôts et taxes du calcul de la valeur ajoutée, retenu par
l'administration fiscale
La doctrine administrative interprète les termes «
hors taxes » des dispositions de l'article 1647 B sexies II - 1
du CGI de façon plus restrictive que la jurisprudence. En application de
la définition posée par cet article, les impôts et taxes
sont en général considérés par l'administration
fiscale comme n'étant pas déductibles pour le calcul de la valeur
ajoutée, bien qu'ils constituent une véritable charge pour les
redevables. Il en est ainsi, par exemple, de l'impôt sur les
sociétés, de la taxe sur les véhicules des
sociétés, de la taxe sur les salaires, des droits
d'enregistrement de la taxe professionnelle47. En effet, leur
déduction du calcul de la valeur ajoutée aurait pour effet
d'augmenter le dégrèvement accordé au titre du
plafonnement de taxe professionnelle.
Toutefois, il existe deux exceptions au principe de
non-déductibilité des impôts et taxes, à savoir
les droits indirects supportés par l'acheteur et les droits de douane.
Ceux-ci peuvent
46 « La pratique de la taxe professionnelle »,
éd. Francis Lefèbvre, 3e éd., 3/2006, n°
34540.
47 Le traitement fiscal des impôts et taxes dans la
détermination de la valeur ajoutée, Option finance n° 837 du
6 juin 2005, p. 39 et s.
être déduits pour le calcul de la valeur
ajoutée à la condition qu'ils se rattachent au coût d'un
bien ou d'un service lui-même déductible48. De la
même manière, les taxes sur le chiffre d'affaires et
assimilées autres que la taxe sur la valeur ajoutée, les
contributions indirectes et la taxe intérieure de consommation sur les
produits pétroliers (TIPP) peuvent être déduites du calcul
de la valeur ajoutée, même si ces impositions sont
comptabilisées en charge d'impôt49.
Néanmoins, l'administration a donné sa propre
définition de ce que recouvrait la notion de taxes sur le chiffre
d'affaires et assimilées, et de contributions indirectes, en la
restreignant aux impositions « qui figurent dans les deux premières
parties du livre Ier du CGI »50. Sa position demeure donc
très restreinte en la matière.
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