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L'utilité d'une coopération technique au sud du Sahara: Le cas des relations Cameroun-Unesco

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par Gérard Martial AMOUGOU
Université de Yaoundé II SOA - DEA en Science politique 2006
  

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2. ÉTAT DE LA QUESTION

2-1. LA PORTÉE DES TRAVAUX MAJEURS7 PORTANT SUR LA COOPÉRATION CAMEROUN-UNESCO

Raymond EPOTE (1976) est le premier à s'être intéressé aux activités de coopération technique de l'UNESCO au Cameroun. Son étude porte sur trois projets spécifiques, à savoir : L'institut de pédagogie appliquée à vocation rurale (IPAR-Yaoundé) ; IPAR-Buéa ; institut national sur l'éducation (INE). Aussi, parvient-il à un bilan mitigé des projets du fait de l'absence de coordination au niveau de l'évaluation par les différentes parties (UNESCO, PNUD et Cameroun), des problèmes institutionnels et la carence d'une main d'oeuvre qualifiée. Surtout, l'auteur insiste sur le fait que ces limites viennent se greffer autour d'un problème central qui est celui de la difficulté des autorités camerounaises responsables de l'éducation à montrer comment la philosophie de la ruralisation de l'enseignement devra se traduire au sein des projets et quelles méthodes précises devront être utilisées pour rendre cette philosophie effective et opérationnelle. D'où les experts UNESCO détachés sur le terrain évolueront en dents de scie.

Jacqueline Toumba Kotto (1999) dans un rapport de stage de D.E.S.S8 effectué au bureau sous régional de l'UNESCO de Yaoundé, part d'une perspective historique et évolutive de la coopération pour relever progressivement les nouveaux enjeux et champs d'activités de cette coopération qui, globalement semble produire des « résultats encourageants ».

MENYE ONANA Perpétue Félicitée (2003) s'intéresse sur la préparation de la 32ème session ordinaire de la Conférence Générale de l'UNESCO par le Cameroun. Ici, l'auteur dans une perspective réaliste justifiera sa démarche par le fait que « l'objet de l'étude de la diplomatie et plus particulièrement l'étude de la théorie des relations internationales, pour les étudiants des pays en développement, est de chercher à changer l'environnement international en la faveur de leur États ». Et le plus souvent, cette entreprise se réalise par le biais de la « diplomatie multilatérale au sein des organisations internationales ». (MENYE ONANA, 2003 : 2). Plus précisément, il s'agit de voir comment le Cameroun prépare la Conférence Générale de l'UNESCO sous le prisme de son intérêt national, afin d'améliorer sa visibilité diplomatique.

7 Il s'agit pour l'essentiel des travaux universitaires, les revues et rapports provenant des instances concernées ayant été délibérément mis de côté, du fait de leur portée scientifique relative.

8 Diplôme d'Etudes Supérieures Spécialisées

Au terme de son analyse, l'auteur tirera un avantage certain dans l'acquisition d'un savoir opérationnel en diplomatie multilatérale, même si elle relèvera une insuffisance des moyens de communication humains et matériels alloués à la commission nationale et à la Délégation Permanente, ainsi qu'une absence de collaboration étroite au niveau du Cameroun.

Globalement, les différents travaux sus-évoqués ont le mérite d'appréhender les relations Cameroun-UNESCO dans un aspect bien spécifique qui, de ce fait, en améliore l'intelligibilité.

Le mérite de Raymond Epote est d'avoir mené un travail de terrain, d'où la portée empirique est considérable. Toutefois, l'auteur semble moins s'intéresser aux dysfonctionnements existants au sein de l'UNESCO même, problèmes qui sont parfois communs à toutes les Organisations internationales. Ensuite, il ne met pas véritablement en relief les raisons profondes qui peuvent expliquer l'absence d'une plate-forme philosophique au sein des pouvoirs publics camerounais. Enfin, il reste assez muet sur la clarification de ce qu'il appelle « l'aspiration profonde des populations camerounaises ».

Jacqueline Toumba Kotto de son côté aborde les relations Cameroun-UNESCO à partir d'une approche « historiciste ». Ce faisant, l'auteur appréhende l'organisation de ses origines, afin de mieux évaluer son rôle dans un bureau hors siège. Mais il s'agit moins d'un travail scientifique, qu'une exposition empreinte de généralités, sans investigation profonde, des informations sur l'UNESCO et de sa coopération avec le Cameroun. Ce d'autant plus que « le résultat des différents travaux et études effectués pendant le stage, (doivent rester confidentiels) » !

Menye Onana Perpétue, enfin semble scruter l'action du Cameroun dans l'UNESCO sous le prisme de l'intérêt national camerounais. Ce faisant, elle s'inscrit dans la veine réaliste qui, à son avis, est plus que jamais nécessaire dans un contexte de coopération multilatérale. Cependant, elle semble parler de l' « intérêt national » sans spécifier la notion dans son contexte actuel. Car autant il est vrai que l'intérêt national nécessite une reconsidération dans la conjoncture actuelle, autant il n'a pas exactement la même signification au sein des « pays en développement », tant il est vrai que les études menées en politique comparée y relèvent des trajectoires spécifiques, et parfois contradictoires (Gazibo, Badie).

De façon globale, ces différents travaux semblent moins s'appesantir sur l'impact du contexte international dans l'appréhension des relations Cameroun-UNESCO. En plus, le rôle joué par l'individu est minoré lorsqu'il n'est pas simplement ignoré ; d'où notre objectif

d'appliquer la méthode de la sociologie des organisations à cette étude qui s'inscrit également dans la littérature spécialisée des organisations internationales.

2-2. LA COOPERATION CAMEROUN-UNESCO ET THEORIE DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES

L'intérêt porté aux Organisations internationales est sans cesse grandissant, au regard des attentes opérées à leur égard. On pourrait, sans prétention à l'exhaustivité, citer la gestion des problèmes de coordination dans la fourniture des biens publics mondiaux, la santé, l'environnement, la paix. Elles permettent de définir et stabiliser les droits de propriété des acteurs internationaux, opèrent un minimum de redistribution des ressources à l'échelle planétaire en dispensant une assistance technique, une aide financière (Smoots et al..., 2006 : 405) Des demandes analogues sont adressées à l'UNESCO dans le cadre de la protection du patrimoine culturel mondial, de l'éducation de la santé, de la communication, la science et les droits de l'Homme. C'est qu'une pluralité d'activités relevant de ces différents secteurs est opérationnalisée au sein des pays sous l'égide de l'UNESCO qui, de ce fait est perçue comme un rempart contre les aléas du système international issus de `l'anarchie hobbesienne'. C'est pratiquement tous les aspects de la vie humaine qui relèvent peu ou prou de sa compétence. D'où bon nombre de théories se sont penchées sur la dynamique des organisations internationales. Dans le cadre strict de notre objet d'étude, le fonctionnalisme de David Mitrany semble le plus apte à poser la grille d'analyse la plus convenable à l'étude de la coopération entre le Cameroun et l'UNESCO.

David Mitrany qui en 1943 va publier A Working Peace System, incarnera le fonctionnalisme, héritier de la tradition fonctionnaliste. Théorie empirique mise en oeuvre par des praticiens internationaux, elle se propose de renverser la tendance internationale où chaque État était considéré comme un « loup » par l'autre, afin d'atteindre le stade de la « paix perpétuelle » chère à Kant. Pour y parvenir, il était question de détourner l'attention portée sur les États pour atteindre l'Homme. Ce faisant, Mitrany substitua aux critères de la sécurité et de l'intérêt qui sont flous et font généralement l'objet des interprétations contradictoires, les critères de paix, de bien-être et de participation comme finalité par excellence de l'action internationale. Dès lors, des fonctions nouvelles et précises vont de ce fait être envisageables en vue de «développer le rôle et les attributions d'organisations internationales fonctionnelles, seuls acteurs en mesure de remplacer la confrontation par la

coopération ». Une telle approche très technicienne de la vie internationale brillait de par sa progressivité et son empirisme (ibidem : 96).

Toutefois, l'on observe que l'évolution de la coopération avec les organisations internationales en Afrique n'obéit véritablement pas au schéma tracé par les adeptes de la théorie fonctionnaliste. Parce que les Pays en développement (PED) sont des bénéficiaires de l'assistance technique internationale, parler de la coopération Cameroun-UNESCO, c'est également parler de l'assistance technique de l'UNESCO. Or le principal défaut de ce courant de pensée, à en croire Jean-Jacques Roche, c'est la prétention irréversible d'un tel processus qui préconise le primat de la « nécessité » sur la volonté politique, l'union politique devant nécessairement être la résultante automatique de l'union économique. (Roche, 2001 : 98) Pourtant, une lecture attentive des régimes politiques sub-saharienne semble indiquer que l'État n'est pas vraiment prêt à partager sa souveraineté, ciment par excellence de sa revendication du monopole de la contrainte. De même en Afrique tout comme ailleurs, « la dimension politique de la coopération et son autonomie apparaissent souvent comme des facteurs essentiels », certaines agences des Nations unies réputées plus `fonctionnelles' et les plus techniques comme l'Unesco et l'Organisation internationale du travail ont souvent été politisées » (Smoots et al..., op.cit : 238).

Mais tout de même, le mérite de cette double école qui se distingue du réalisme comme de la simple coopération intergouvernementale, ressortit du fait qu'elle se présente comme « des méthodes de découverte et d'apprentissage d'un vouloir vivre en commun des États » (Roche, op.cit : 99) C'est dire que l'émergence des institutions internationales obéit à une volonté de créer un cadre favorable à l'accession aux solutions « rationnelles » à travers un effort de « dépolitisation » de certains enjeux. Finalement, en dépit des critiques portées aux idées fonctionnalistes et néo-fonctionnalistes, force est de noter que Mitrany lui-même « a dû reconnaître en 1946 que l'Organisation des Nations unies ne correspondait pas autant qu'il le souhaitait à ses idées, sauf pour ce qui concernait les agences spécialisées » (Smouts et al, idem : 238), à l'instar de l'UNESCO ! L'exploration de la pertinence de la thèse de Mitrany dans un État sub-Saharien va ainsi constituer le socle de notre problématique.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote