6.3. Modularité technique : encapsulation des
connaissances
La modularisation de la conception des produits complexes
contribue à rendre difficilement accessibles les compétences
critiques (Pil & S. K. Cohen 2006). Cette approche donne
la possibilité de fragmenter les compétences de
l'organisation. Ainsi, au niveau organisationnel,
les compétences complexes tendent à être
plus tacites car chaque concepteur révèlera le moins possible sur
le fonctionnement de son module. De plus, le système
d'intégration interne implique une spécialisation des
intervenants et une interaction sociale difficile à appréhender
par l'extérieur. L'imitation des rivaux et l'expropriation par le
partenaire sont rendus de cette manière délicates et
coûteuses.
La division du travail en conception, inspirée par la
modularité (Ernst 2005), offre des possibilités de gestion des
compétences et d'apprentissage des organisations (Sanchez & Mahoney
1996). Elle permet de produire des composants isolément du fait de leur
interfaçage faible et de les modifier sans remise en cause de l'ensemble
du système (Mikkola 2003). Les règles de codage ainsi que les
interfaces partagées réduisent le flux d'information et
atténue donc le transfert de connaissances (Ernst 2005). Le degré
d'apprentissage du partenaire varie inversement au degré de la
modularité des composants (Mikkola 2003).
Un composant, qui englobe en son sein des connaissances, peut
être catégorisé selon la stratégie
d'interdépendance entre le client et le fournisseur dans le cycle de
développement (spécification, conception, analyse,
réalisation, test, validation). Il est acheté sur
étagère dans un cas purement contractuel ou
co-développé dans un cas plus relationnel. Entre ces deux
possibilités, les tâches peuvent être réparties au
niveau des spécifications (black box) ou au niveau de l'analyse
détaillée L'interdépendance est opérationnalisable
par le niveau d'investissement spécifique dans la relation par rapport
au coût de la transaction. (Mikkola 2003).
Bref, la nature des compétences est un
déterminant de leur transfert. La modularisation de la conception permet
d'encapsuler les connaissances pour les gérer efficacement et pouvoir
les protéger. Abordons maintenant l'autre élément de la
dynamique de transfert qu'est la gouvernance.
7.Gouvernance et transfert des
compétences
La dynamique interorganisationnelle est
caractérisée par un certain nombre de facteurs. Il y a le facteur
d'asymétrie de pouvoir des deux partenaires induite par leur
contribution dans le flux des compétences. Il y a également le
contexte dans lequel le transfert s'effectue et le mode de gouvernance convenu
à cet effet. D'autre part, le lien social entre les intervenants est de
nature à fluidifier le transfert des compétences. Enfin, le
donneur peut prévoir le risque de perdre des compétences
critiques alors que le receveur peut imaginer recevoir des données
inutilisables ou de mauvaise qualité. La confiance réciproque
joue un rôle important en minimisant ces deux perceptions de risque.
(Easterby-Smith et al. 2008)
|