Parmi les nombreux indicateurs conjoncturels publiés
par l'Insee, nous avons sélectionné ceux qui nous semblent
résumer le climat social et économique, à savoir le taux
de chômage, la croissance et le pouvoir d'achat. L'évolution de
ces trois indicateurs depuis les années 60 jusqu'en 2007 (voir annexe
n° 3) nous permet de définir des orientations conjoncturelles
basées sur un intervalle de cinq à dix ans (en fonction des
grandes tendances) précédent les trois phases.
Nous constatons sans étonnement qu'un taux de
chômage bas ou dont la tendance est en baisse favorise l'émergence
d'une impulsion environnementale. Par contre, les orientations de la croissance
et du pouvoir d'achat (nous couplons ces indicateurs en raison des similitudes
de leurs courbes) ne convergent pas, à première vue, vers une
trame commune aux trois temps. Comment expliquer ce décalage apparent
entre des situations sociales et économiques pourtant globalement
imbriquées? Examinons de près l'évolution de la
conjoncture économique.
A l'époque de la création du ME, l'effort de
reconstruction et de rattrapage technologique des Trente
glorieuses9 s'essouffle: la croissance du PIB passe de 8,1 % en
1960 à 6,1 % en 1970. Mais en parallèle apparaît le
phénomène de post-modernisme, décrit par le sociologue
Ronald Inglehart dans La révolution silencieuse (1977), et
résumé par l'Eurobaromètre de 1988 (Bonnaffe: 82) :
«Les pays occidentaux ont connu, depuis la deuxième guerre
mondiale, la paix et une prospérité économique sans
précédent. Cet environnement favorable s'est accompagné
d'un formidable essor des moyens d'éducation et d'information et d'une
transformation rapide des emplois. De ces mutations découle, une
évolution des systèmes de valeurs, qui se traduit par
l'émergence de mouvements tels que le pacifisme ou le mouvement
Vert. » (voir infra). Les chocs pétroliers de 1973 et 1979
et les résultantes chutes de la croissance - plus que 1,7 % en 1980 ! -
et du pouvoir d'achat viennent temporairement ébranler cet acquis ;
l'environnement est disgracié de l'agenda politique.
Il faut attendre le contre-choc pétrolier de 1986 et la
relance économique - croissance de 4,2 % en
1989 - pour que la question reprenne de l'ampleur. C'est dans ce
contexte qu'est lancé le PNE.
Par opposition, le Grenelle est lancé dans un climat
de ralentissement économique: 1,9 % de croissance en 2007 en comparaison
avec les 3,9 % de 2000. Mais comme en 1971, les besoins de base sont
globalement disponibles.
Nous concluons de cette évolution que les niveaux et
les orientations de la croissance et du pouvoir d'achat ne sont pas
déterminants dans l'émergence des grandes impulsions de la
politique environnementale. Le facteur de stabilité
économique nous semble par contre primordial.