III - Evolution des instruments de gestion de
l'environnement
La particularité et la complexité des
problèmes d'environnement suscitent en soi un degré
élevé d'expérimentation des politiques d'action publique.
(Lascoumes 2008) En regard de l'évolution sur quarante ans, la
multiplication des sources d'impact, des stakeholders et la
globalisation des enjeux conduit à une complexification des instruments
d'intervention. Cette complexité/complexification des problèmes
et des réponses justifie une approche des politiques publiques par les
instruments.
Nous commencerons par décrire les grandes tendances de
changement des instruments sur quarante ans, puis nous nous pencherons sur le
changement du rôle de l'Etat qui en résulte. Nous nous
intéresserons ensuite à l'influence extérieure, plus
particulièrement européenne, sur les politiques environnementales
françaises, et nous terminerons par un regard sur les évaluations
des experts et sur les défis à relever.
Les publications d'experts, notamment Lascoumes, Halpern
(2007), Szarka (2001), Larrue (1999), Theys (1998), Chabason et Larrue (1998)
et les grands rapports internationaux (AEE 2005, OCDE 1997, PNUE 2002 et 2007)
représentent nos principales sources. Nous regrettons de ne fournir le
point de vue que d'un seul expert étranger (Szarka, 2001) sur la
situation française. Notons cependant que l'analyse de Chabason et
Larrue est publiée en anglais dans un ouvrage sur les politiques
européennes.
1. Des instruments de contrainte aux instruments de
concertation
Nous commencerons par préciser la typologie
employée pour étudier les instruments, puis nous nous pencherons
sur l'évolution française, et nous terminerons par une
présentation nuancée de l'analyse par Lascoumes de la lutte
contre la pollution atmosphérique.
1.1. Questions de typologie
Depuis le milieu des années 80, les publications sur
les instruments d'intervention publique proposent de nombreuses classifications
et typologies. Inspirée de l'ouvrage de Christopher Hood, The Tools
of Government (1986), la typologie de Lascoumes et Le Galès (2004:
361 ; tableau récapitulatif en annexe n° 14) présente
l'avantage de différencier les instruments en fonction de leur
ancienneté. Tandis que les instruments de première
génération (législatif et réglementaire,
économique et fiscal) sont caractérisés par leur parcours
d'élaboration légale, les instruments de deuxième
génération (conventionnel et incitatif, informatif et
communicationnel, normes et standards) présentent des formes de
régulation moins dirigistes. Enfin, les instruments de troisième
génération ou méta- instruments (planification,
schéma d'organisation, convention cadre) servent à coordonner les
instruments traditionnels. (Lascoumes et Le Galès 2004 : 359-362)
Notons que c'est sous cette dernière catégorie
que nous rangeons le PNE et les textes législatifs émanant du
Grenelle (voir supra) - le Grenelle étant en soi considéré
comme un processus. Ainsi, un méta-instrument
répond à ce que Rumpala nomme un
méta-problème, «autrement dit un problème
qui vient englober et dépasser des situations problématiques
déjà installées tout en contribuant à les
redéfinir par rapport à cette perspective élargie.»
(Rumpala 1999 :188-189) Les méta-instruments perpétuent
l'innovation au travers de la particularité des modalités
d'intervention qu'ils coordonnent. De plus, ils s'intègrent parfaitement
dans les justifications qui accompagnent généralement l'annonce
d'une « nouveauté instrumentale »: un geste politique
cherchant à produire un effet de rupture; une solution à
l'échec des instruments d'action antérieurs; l'introduction de
valeurs censée renouveler ou enrichir l'action publique, par exemple
l'ouverture au marché [cas du PNE] et la participation [cas du
Grenelle]. (Lascoumes et Le Galès 2004 : 358)
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