2000
1800
1600
1400
1200
1000
800
600
400
200
0
2. Evolution des sources d'impact et des politiques
Nous tenterons de définir si les tendances de ces
quarante dernières années présentent une augmentation ou
une diminution des principales sources de pressions sur l'environnement. Notre
approche de la question est pyramidale. Le sommet est représenté
par le moteur du système, soit la croissance; le milieu accueille les
principaux protagonistes, à savoir la production et la consommation; la
base est constituée des divers secteurs économiques. La pression
sur l'environnement peut être évaluée plus ou moins
précisément selon ces trois niveaux d'analyse.
En plus des rapports internationaux et nationaux sur
l'état de l'environnement (voir supra) des recherches rapides sur
internet nous ont souvent permis de présenter des évolutions
complètes sur quarante ans.
2.1. Croissance économique et environnement:
considérations générales
De 1970 à 2005, la croissance du PIB français a
atteint 87 %, dont 60 % entre 1970 et 1990 et 27 % entre 1990 et 2005 (calculs
à partir de données de l'OCDE).
Le graphique 4 illustre une évolution qui est d'ailleurs
propre aux pays industrialisés.
Graphique 4
Evolution du PIB
1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005
Source des données : OCDE, Comptes nationaux
des pays de l'OCDE - Edition 2006.
Les rétrospectives récentes qui analysent le
rapport entre croissance et environnement convergent autour du constat que le
modèle économique actuel, en termes de grandeurs et de substrats,
n'est pas viable. Ainsi, «c'est la vitesse et l'ampleur de ce
développement économique qui menacent l'intégrité
des services écologiques qui sous-tendent l'activité
économique. L'existence de limites physiques à la poursuite de la
croissance économique basée sur l'utilisation des ressources est
désormais généralement admise. » (AEE 2005 : 216)
Mais alors que le Club de Rome ne considérait que les
tendances néfastes de la croissance économique, de nos jours les
grandes organisations internationales soulignent les aspects positifs, par
exemple au travers de l'émergence des éco-industries, et
privilégient l'intégration de l'environnement dans les divers
secteurs économiques (voir infra). La responsabilité est
également passée des mains des producteurs à celles des
consommateurs.
2.2. Production et consommation
Le dernier Etat de l'environnement confirme au
niveau national une tendance constatée au niveau européen par
l'AEE et au niveau international par l'OCDE: le découplage entre
production et pressions sur l'environnement se confirme, tandis que les
pressions liées à la consommation s'intensifient. (Ifen 2006:
19-20)
Les racines du découplage entre production et pressions
remontent au rapport au premier choc pétrolier. En 1974, le rapport
Gruson dénonce le gaspillage et avance la nécessité de
développer l'efficacité énergétique et le
recyclage. Le premier Etat de l'environnement (1976) met clairement en
avant le moteur économique des nouvelles mesures d'économie
d'énergie et de ressources, en vue de réduire la
dépendance de la France en matières premières: «La
crise économique, loin de remettre en cause les politiques en faveur de
l'environnement, souligne leur utilité et leur nécessité.
C'est désormais dans l'intérêt même du
développement économique qu'il convient de ménager les
ressources naturelles et de les prendre en compte à leur juste
valeur.» (ME 1976: 134) Ce «désormais » traduit
une rupture avec les modes de production du passé.
La réduction des pressions s'applique en premier lieu
dès le début des années 70 sur les sites de production
(énergie et industrie), par le biais de progrès technologiques
qui réduisent les consommations d'énergie, de matières et
d'eau (éco-efficience), les déchets et les émissions dans
l'air et dans l'eau (pressions directes). Elle s'applique en second lieu aux
produits (pressions indirectes), avec l'apparition des éco-bilans et des
éco-labels vers le début des années 90 (ME 1991-1992:
69-71). Le tableau 2 synthétise la mutation de la perception des types
de réponses technologiques à apporter par le glissement des
processus vers les produits.
Ces évolutions, propres aux pays industrialisés,
conduisent l'OCDE à percevoir, fin des années 90, trois tendances
au sein des pays membres:
· un recul des produits et/ou facteurs de production pesant
lourdement sur l'environnement
· une moindre utilisation de certaines ressources
environnementales par unité de PIB
· la baisse des niveaux de pollution par unité de
PIB
(OCDE 1997 : 59-72)
Nous tempérons cette évaluation globale de la
réduction des pressions émanant de la production par deux
remarques:
· De grandes évolutions qui ne sont pas
liées à la politique environnementale expliquent pour une grande
part la réduction des pressions: les restructurations au niveau de
l'industrie (sidérurgie) et de l'énergie (centrales thermiques),
les délocalisations (les pressions sont elles- mêmes
délocalisées), et la tertiarisation progressive de
l'économie (essentiellement centrée sur le secteur secondaire au
début des années 70, l'économie repose de nos jours pour
les trois quarts sur le secteur tertiaire).41
· Le découplage n'apparaît pas
simultanément dans tous les secteurs de production. Ainsi, au niveau des
intrants agricoles (engrais azotés et pesticides), le découplage
apparaît plus tard, entre 1985 et 1994 (voir infra). (OCDE 1997: 137)
41 «Du fait du caractère immatériel de sa
production, le développement du tertiaire est présenté
comme une dématérialisation de l'économie qui
n'est pas censée engendrer de nuisances importantes. La croissance des
activités de services est supposée réduire l'impact
relatif de la croissance économique sur l'environnement.»
«Cependant, les connaissances manquent pour dresser un bilan des pressions
réellement exercées par les services. » Ainsi, « ce
constat en faveur des économies tertiarisées est moins
évident si l'on prend en compte l'ensemble des flux indirects
associés. » (Ifen 2006: 153, 168)
· Au niveau des produits, un accroissement des
quantités, lié à l'augmentation du niveau de vie et
à l'accélération de la consommation, contrebalance
fortement les améliorations qualitatives.
L'intensification des pressions liées à la
consommation se constate dans pratiquement tous les domaines. L'Ifen
synthétise l'influence du mode de vie des ménages sur
l'environnement depuis les années 60 pour trois postes essentiels: le
logement, la mobilité et l'alimentation (voir annexe n° 7). La
forte augmentation du nombre des ménages et la diminution de leur
taille42, l'augmentation du niveau de vie et du temps libre, l'offre
plus large de produits et de choix43 sont quelques unes des
causalités de l'intensification des pressions liées à la
consommation. Nous en déclinons d'autres au niveau des applications
sectorielles ci-après.
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