A sa création, le ministère de la Protection de
la Nature et de l'Environnement est partagé entre une fonction de
gestion directe avec comme structure centrale et verticale la Direction
générale de la protection de la nature (obtenue du
ministère de l'Agriculture), et une fonction prépondérante
de mission pour assurer la coordination intersectorielle de l'environnement
avec une structure horizontale (héritée de la DATAR).
Dans un premier temps, la complémentarité entre
ces deux fonctions engendre une stratégie de conquête de nouvelles
compétences: «l'administration de mission se charge le plus souvent
de la reconnaissance et de l'offensive, tandis que l'administration de gestion
occupe ensuite le terrain ». (Bazin 1973 : 351-352) Mais avec plus de
recul, « Cette conception s'est révélée assez
rapidement peu opérationnelle dans la mesure où le
ministère n'avait pas réellement de moyens de coordination ni
d'action, l'une et l'autre se confondant dans la pratique. Des secteurs de
compétence cruciaux pour la pratique de l'environnement lui
échappaient. La concurrence d'autres ministères traditionnels
était forte... » (Kessler 1999 : 72)
En conséquence, maintes problématiques sont
gérées en comités interministériels,
constitués de représentants des ministères
concernés, d'experts indépendants mais aussi, dans certains cas,
de représentants des intérêts en jeu. (Chabason et Larrue
1998: 68) Nous voyons dans ces structures une base à la prise de
décision par conciliation, caractéristique des politiques
environnementales françaises (voir infra).
Les compétences de gestion du ME ce sont
néanmoins étoffées au fil du temps en parallèle
à diverses
évolutions au niveau de son administration :
l'augmentation du nombre de Directions centrales, la
mise en place de
services déconcentrés aux niveaux régional et
départemental et la tutelle ou cotutelle
23 Si les premières expériences de parcs naturels
régionaux en offrent l'illustration, l'effort le plus achevé
d'harmonisation par la DATAR concerne la politique de l'eau (voir infra).
En avril 1969 se forme au sein de la DATAR un groupe de travail
informel «pour explorer les perspectives d'une action
interministérielle dans le domaine de l'environnement ». (Bazin
1973 : 53-55, 68)
24 « La DATAR présente enfin l'avantage de ne pas
être rattachée à l'un ou à l'autre des divers
ministères mais, par l'intermédiaire d'un ministre
délégué, au Premier ministre. Cette situation évite
d'accorder à un département ministériel en particulier un
rôle privilégié qui pourrait être difficilement
reconnu par les autres ministères - ce qui paralyse souvent la
coordination interministérielle. » (Bazin 1973 : 69)
25 Direction générale de la
protection de la nature au sein du ministère de l'Agriculture, direction
de la technologie, de l'environnement industriel et des mines au sein du
ministère du Développement Industriel et Scientifique, mission
permanente de l'environnement au sein du ministère de l'Equipement et du
Logement.
26 Voir dernière note.
d'établissements publics. L'élaboration de
législations fondatrices et d'autres instruments de politiques
sectorielles a étayé cette autonomisation.
Mais la voie vers l'indépendance n'a pas
été de tout repos: les compétences du ME ont ainsi maintes
fois virevolté en fonction des découpages ministériels,
eux-mêmes fonction de l'orientation politique du gouvernement et des
pressions extérieures plus ou moins fortes.