La théorie du patrimoine à l'épreuve de la fiducie( Télécharger le fichier original )par Thomas Naudin Université de Caen - Master 2 Recherche en Droit Privé 2007 |
2. - La cessibilité des droits du constituant161. - Outre les difficultés suscitées par la prohibition, non justifiée selon nous, des fiducies-libéralités, la question de la transmission du patrimoine fiduciaire se retrouve également, d'une manière sous-jacente, relativement à la cessibilité des droits que le constituant possède « au titre de la fiducie »173(*). Ce point tel qu'envisagé dans la loi prête le flan à deux critiques, la première tenant à la transparence fiscale de ces droits (a) et la seconde aux restrictions légales à leur cessibilité (b). a. - La transparence fiscale des droits du constituant162. - C'est l'article 2013-1 du Code civil qui évoque la cessibilité des « droits du constituant au titre de la fiducie », en en posant les contraintes. L'évocation de ces « droits » peut faire penser dans un premier temps aux droits sociaux que reçoit l'associé en contrepartie de ses apports174(*). Le constituant d'une fiducie, transférant la titularité de biens et de droits à un patrimoine d'affectation se verrait alors reconnaître en contrepartie la titularité de droits portant directement sur ce patrimoine, envisagé alors dans son ensemble en tant qu'universalité, et non plus sur ses éléments individuels. Ces droits fiduciaires permettraient de fonder aisément l'imposition des résultats du patrimoine d'affectation directement entre les mains du constituant, et ce d'une manière analogue à la situation de l'associé d'une société de personnes, fiscalement transparente. 163. - Le fiduciant serait alors titulaire d'un droit sur le patrimoine d'affectation, qu'il pourrait céder. Mais cette analyse, qui conférerait une certaine cohérence à la notion de patrimoine d'affectation telle qu'envisagée dans la loi, ne semble pas être celle qu'opère le droit fiscal. La loi du 19 février 2007 a en effet introduit un article 1378 septies du Code général des impôts en vertu duquel « pour l'application des droits d'enregistrement, les droits du constituant résultant du contrat de fiducie sont réputés porter sur les biens formant le patrimoine fiduciaire. Lors de la transmission de ces droits, les droits de mutation sont exigibles selon la nature des biens et droits transmis ». Le constituant a certes un « droit » en contrepartie du transfert fiduciaire, mais ce droit ne porte pas sur un patrimoine, mais sur ses éléments. Toujours par analogie avec les sociétés, cela reviendrait à considérer que la cession des parts sociales ou des actions devrait être regardée fiscalement comme la cession d'une partie du patrimoine de la personne morale, et que l'imposition serait fonction de sa composition. Or fiscalement, la cession de droits sociaux est soumise à un régime spécifique approprié à la tangibilité juridique de ceux-ci175(*). 164. - Fiscalement, la transparence des « droits » du constituant au titre de la fiducie équivaut à la négation du patrimoine d'affectation. Ainsi, que le constituant cède un bien de son propre patrimoine ou qu'il cède une partie d'un patrimoine fiduciaire, cela revient fiscalement à la même chose. Le législateur a, et cela est très critiquable, omis de définir la nature de ces droits. Cependant, il semble que leur fonction essentielle soit de justifier les dispositions fiscales frappant le constituant. * 173 Selon la lettre même de l'art. 2013-1 du Code civil. * 174 V. M. Cozian, A. Viandier et Fl. Deboissy, préc. * 175 V. art. 726 du Code général des impôts. |
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