INTRODUCTION GENERALE
L'homme est au centre de tout développement. Il est
à fois la fin et le moyen du développement. Si
l'amélioration de la santé, de l'éducation et de la
nutrition est une fin en soi, des êtres humains en bonne santé,
dotés d'une solide formation sont également le principal
instrument du développement. De nos jours, tous les pays aspirent au
développement économique. Ce développement exige des
hommes et des femmes en bonne santé tant sur les plans
éducationnel et sanitaire que nutritionnel.
L'amélioration de la santé des enfants est une
préoccupation majeure pour des chercheurs et gouvernements, surtout dans
les pays en développement où les enfants paient le plus lourd des
risques de morbidité et de mortalité. Les problèmes de
santé dont éprouvent la plupart des pays d'Afrique subsaharienne
ont donné lieu à de nombreuses recherches sur la santé des
enfants. Ces recherches jouent un rôle essentiel dans
l'élaboration des politiques et programmes de santé en faveur des
enfants. Toutefois, les expériences de certains pays à faible
revenu tels que le Costa Rica et le Sri Lanka montrent que même dans les
pays où la pauvreté est profondément enracinée, il
est possible de protéger et d'améliorer la santé de la
population (Banque mondiale, 1994). Le but est d'intensifier et de
réorienter les actions sanitaires déjà mises en oeuvre
pour pouvoir améliorer davantage la situation.
Cette recherche s'inscrit dans le respect des droits de
l'homme dont la santé fait partie intégrante depuis la
déclaration d'Alma Alta (1978). Les problèmes de santé
concernent toute la population, qu'il s'agisse de l'enfant ou de la femme.
Mais, les enfants sont les plus exposés aux maladies, aux infections.
Les causes de la mortalité élevée des enfants en Afrique
subsaharienne sont multiples et complexes. Les maladies diarrhéiques,
les infections respiratoires et la malnutrition sont parmi les causes les plus
connues et récurrentes observées chez les enfants de moins de
trois ans.
S'agissant de la malnutrition en particulier, il convient de
mentionner qu'elle sévit partout en Afrique noire et figure parmi les
principaux problèmes sanitaires (Akoto, 1985). Dans de nombreux pays,
elle contribue pour plus d'un tiers à la mortalité infantile
et
juvénile (Banque Mondiale, 1994). D'après
l'UNICEF, la malnutrition constitue une urgence silencieuse et invisible
faisant de terribles ravages chez les enfants. Elle est causée par une
combinaison de facteurs comme l'insuffisance alimentaire qualitative et
quantitative, les maladies infectieuses, la mauvaise qualité d'eau
consommée que l'on peut toutefois éviter par une hygiène
adéquate. Elle est également une des causes principales
d'insuffisance pondérale à la naissance et de troubles de
croissance. La malnutrition sous forme de carences en vitamines et
minéraux essentiels reste la cause de maladies graves ou de
décès chez des millions d'individus à travers le monde.
Lorsque l'enfant est malade, il commence à perdre de poids, puis il
devient malnutri et il se trouve au grand risque de contracter des maladies et
finalement de décéder. La malnutrition a des effets
néfastes sur le développement physique et psychique de l'enfant.
Elle est un déterminant de la mortalité des enfants par le fait
qu'elle rend faible les enfants face aux agents pathogènes et constitue
un élément essentiel du retard de croissance de ces enfants
(Rakotondrabe, 2004).
La grande majorité des victimes de la malnutrition vit
en Asie et au Pacifique. Presque un quart des victimes de la malnutrition se
trouve en Afrique subsaharienne, région du monde où l'on note la
proportion la plus élevée des enfants sous-alimentés (OMS,
1998). La cause fondamentale est la pauvreté au niveau du foyer, de la
communauté et de la nation, qui a pour résultat l'absence
d'accès à des nécessités de base comme la
nourriture, les services de santé et l'eau potable et l'hygiène
alimentaire.
La République Centrafricaine est l'un des pays
d'Afrique subsaharienne qui n'échappent pas à cette situation.
Selon le rapport de l'Enquête Démographique et de Santé
(EDSRCA, 1994-1995), au niveau national, 27,3 % des enfants de moins de trois
ans souffrent d'insuffisance pondérale modérée et 7,5 %
souffrent d'insuffisance pondérale sévère ; 33,6 %
souffrent de retard de croissance modérée et 14,3 % connaissent
un retard de croissance sévère ; 7,1% sont émaciés
de façon modérée contre 1,1 % le sont de façon
sévère. Le problème de déficience nutritionnelle en
Centrafrique est un sujet préoccupant.
Outre, ces inégalités face aux risques de
maladies ou de décès, les enfants centrafricains sont
également exposés à des inégalités en
matière de soins de santé. L'implication de la femme dans la
protection de l'état nutritionnel des enfants est très
importante. Malgré leur rôle essentiel de
mères, les femmes sont dans leur grande majorité
défavorisées quant à l'accès à
l'éducation, à une activité économique
décente et à d'autres moyens leur permettant d'améliorer
la qualité de leur vie et celle de leurs enfants.
Pour que les enfants soient en bon état nutritionnel,
il faudrait que la mère soit bien éduqué, et bien
instruite afin d'assumer sa responsabilité dans la gestion des
problèmes de santé de ses enfants. Il est aujourd'hui
communément admis qu'une éducation appropriée est source
de développement de par son impact sur la productivité ainsi que
sur les comportements individuels et sociaux. L'instruction n'est pas
uniquement importante pour accroître la productivité des individus
et des communautés. Elle est un moyen fondamental pour améliorer
les conditions et la qualité de vie. Lorsqu'elles ont
bénéficié d'un certain niveau d'instruction, les
mères peuvent jouer un rôle majeur dans l'amélioration de
l'état nutritionnel des enfants.
Ainsi, l'éducation de la mère pèse
lourdement sur l'état de santé de l'enfant (Cantrelle et al,
1985). Selon Koffi Annan, « toutes les études sans exception
montrent qu'aucun instrument de développement n'est plus efficace que
l'éducation des filles et l'émancipation des femmes. [...] La
pleine participation des femmes donne des résultats immédiats :
les enfants ou les familles sont en meilleure santé. Or, ce qui est vrai
pour les familles l'est aussi pour les collectivités, et finalement pour
le pays entiers»1.
A l'instar des autres pays d'Afrique, la Centrafrique est
confrontée depuis un certain temps à un problème tant sur
le plan nutritionnel qu'éducatif. La situation de la femme dans la
société centrafricaine s'est encore plus
détériorée avec la dure crise économique que le
pays traverse depuis quelques décennies et suite aux différentes
crises militaro-politiques qui ont secoué le pays entre 1996 et 2003. On
assiste à de vives tensions sociales marquées par de multiples
grèves des enseignants et du personnel de santé, d'où la
détérioration du système sanitaire et éducatif et
enfin des conditions de vie des ménages. Les effets du niveau
d'instruction de la femme sur l'état nutritionnel des enfants risque de
s'accroître, ces facteurs ne sont pas pris en compte. La meilleure
stratégie pour améliorer l'état nutritionnel des enfants
serait la promotion de la femme, en l'associant dans la prise de
décisions concernant la santé des enfants. Toutes ces
considérations suscitent en nous le
1 KOFFI Annan Secrétaire Générale des
Nations Unies, Session des Nations Unies sur le développement, 8 mars
2003.
questionnement suivant : en quoi l'état
nutritionnel des enfants de moins de trois ans en Centrafrique est lié
au niveau d'instruction de la femme?
Objectif de l'étude
L'objectif de cette étude est de contribuer à
améliorer la connaissance sur les déterminants de l'état
nutritionnel des enfants en Centrafrique. Pour cela, nous tenterons, d'une part
de faire ressortir l'impact du niveau d'instruction de la femme sur
l'état nutritionnel des enfants et de cerner les mécanismes
d'action par lesquels celui-ci agit sur l'état nutritionnel des enfants
d'autre part. Plus spécifiquement, il s'agira de :
. Décrire le niveau de l'état nutritionnel des
enfants de moins de trois ans ;
. Chercher l'impact du niveau d'instruction de la femme sur
l'état nutritionnel des enfants ;
. Déterminer les mécanismes par lesquels le niveau
d'instruction de la femme agit sur l'état nutritionnel des enfants.
Afin d'atteindre les objectifs fixés, la
présente étude s'articulera autour de deux grandes parties. La
première partie comporte deux chapitres. Dans le premier chapitre, nous
ferons le point sur la revue de la littérature sur les relations entre
les deux (le niveau d'instruction de la femme et l'état nutritionnel des
enfants). Le deuxième chapitre traite de la méthodologie. Il sera
essentiellement question d'examiner les sources de données, de
procéder à leur évaluation, de la construction des
indicateurs et décrire les méthodes statistiques retenues dans
cette étude. La deuxième partie sera consacrée à
l'analyse des données et à l'interprétation des
résultats d'analyse. Elle se subdivise également en deux
chapitres. Le chapitre trois, présente l'analyse différentielle
de l'état nutritionnel. Enfin, au chapitre quatre, nous examinerons les
effets du niveau d'instruction de la femme sur l'état nutritionnel des
enfants en Centrafrique.
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