§II : L'obligation de sécurité
Déceler l'obligation de sécurité dans le
contrat de travail n'est pas une idée
nouvelle171. Le respect de
l'intégrité physique de la personne n'est pas attaché
uniquement à l'existence d'une relation contractuelle. Ce respect est
souvent conçu à partir d'une obligation générale de
prudence et de diligence qui ne semble procéder expressément
d'aucun texte. L'obligation de sécurité prend une forme
particulière dans le rapport d'emploi qui s'explique dans une certaine
mesure par la situation du salarié envers l'employeur. L'obligation de
sécurité peut avoir des sources très variées. De
façon classique, cette obligation est presque exclusivement
approchée sous son aspect légal172.
Il semble également que le lien juridique de subordination modifie pour
une part l'approche et la justification classiques de cette obligation
contractuelle de sécurité. De la sorte, la valeur reconnue
à l'individu mais aussi la loyauté dans le contrat et
l'équilibre de la relation contractuelle conduisent à admettre
l'existence d'une obligation contractuelle de sécurité dans le
contrat de travail à la charge de l'employeur et ce
indépendamment de l'existence de textes spécifiques
régissent les règles d'hygiène et de
sécurité dans le cadre large de la relation de travail. La
consécration d'une
167 Ph. Waquet, « Le droit du travail et l'économie
à la cour de cassation. L'exemple du licenciement pour motif
économique », in Le droit du travail confronté à
l'économie, Dalloz, 2005, p.124
168Soc. 14 octobre 1994, Bull. V, n° 729
169 Soc. 3 avril 2001, Bull. V, n°114
170 A. Lyon-Caen, préc.
171 Soc. 11 octobre 1984, D. 1985 I.R. 442
172 Art.L 23 0-2
telle obligation paraît
récente173. Toutefois, l'idée
d'introduire l'obligation de sécurité dans le contrat a
été imaginée déjà dans de nombreux contrats
afin de mieux assurer la réparation du dommage
corporel174. En effet, l'existence de cette
obligation ressort bien évidemment du contrat lui-même et des
suites que l'employeur doit apporter à l'exécution de ses
obligations contractuelles. Ainsi, la bonne foi ou encore la loyauté
justifie tant soit peu que le chef d'entreprise exécute le contrat en
prenant soin de l'intégrité physique de l'autre partie au
contrat. S'agissant de la nature de cette obligation, si elle a une
portée décisive dans le cadre de la responsabilité civile,
il semble que dans le rapport d'emploi elle ne soit pas capitale. Toutefois,
selon la formule énoncée par la cour de cassation, l'obligation
de sécurité engage l'employeur à garder le travailleur
sain et sauf dans l'exécution de la prestation de travail. Il doit ainsi
prévoir des dispositifs de protection efficaces. Il doit établir
des signalisations. Il doit procéder à l'entretien des engins
notamment en ce qui concerne les dispositifs de
sécurité175.
Au final, l'employeur doit prendre toutes les mesures qui
s'imposent. Il faut souligner que la cour de cassation donne un objet plus
large à l'obligation que la « simple sécurité ».
Si la prévention et l'anticipation des risques s'impose à
l'employeur, il ne s'agit là que d'une obligation de faire en sorte que
le risque ne se réalisé pas. C'est assurément la fonction
extensive de la bonne foi que la cour de cassation mobilise pour faire peser
sur l'employeur une obligation contractuelle de sécurité.
Pourtant, à côté de ces obligations expressément
consacrées par la cour de cassation, certains auteurs recensent une
kyrielle d'autres obligations secondaires176 qui
seraient elles aussi dérivées de l'exigence de bonne foi. Notons
toutefois que faute de consécration prétorienne, leur consistance
ou leur inconsistance est discutée.
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