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La promesse de vente de la chose d'autrui


par Florent Kuitche Takoudoum
Université de Nice sophia antipolis - Master II droit de l'immobilier et de l'urbanisme 2007
  

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Chapitre II

Ratification de la promesse par le véritable propriétaire

Nous allons aborder la nature juridique de la ratification (§1) avant de nous intéresser à ses conséquences (§2).

§1) Nature juridique de la ratification

Il arrive rarement que le véritable propriétaire ratifie un acte de disposition fait sur sa chose par un tiers, mais les cas se présentent tout de même en pratique, et la jurisprudence, dans la mesure où elle admet que la vente d'une chose d'autrui peut se réaliser si le vendeur acquiert la chose par la suite, assimile à cette hypothèse, celle où le véritable propriétaire ratifie la vente : la nullité se trouve couverte ; l'acheteur ne courant plus le risque d'éviction, ne peut plus répudier cette acquisition et devient définitivement propriétaire de la chose87(*), à condition toutefois qu'il n'ait pas encore exercé son action ou manifesté l'intention de l'exercer88(*).

Lorsqu'il s'agit de préciser cette dernière condition, des divergences apparaissent entre les décisions, selon leur façon de concevoir la ratification. Certaines, plus timides, interprètent la ratification comme la formation d'un nouveau contrat ; pour que ce contrat puisse se former, il faut que l'acheteur n'ait pas encore retiré son consentement, et il peut le retirer en une forme quelconque89(*). Mais d'autres décisions plus hardies précisent au contraire avec raison que la ratification n'est pas une vente nouvelle, mais simplement la renonciation au droit de revendiquer ; alors on ne tient compte que de l'exercice de l'action en nullité pour rejeter la ratification90(*). Encore cette restriction, inspirée du souci de respecter au moins en apparence l'article 1599, devra-t-elle être abandonnée.

La ratification crée une situation nettement différente de la précédente. Lorsque le promettant acquiert la chose d'autrui qu'il avait vendue, il se produit deux transferts de propriété : la propriété de la chose passe de l'ancien propriétaire au vendeur, pour être transférée immédiatement du vendeur à l'acheteur. Ici le propriétaire antérieur consent le transfert de la propriété directement au profit de l'acheteur ; il n'y a qu'un seul transfert de propriété et la chose ne passe pas dans le patrimoine du vendeur, mais du « vérus dominus »91(*). C'est une différence fondamentale qui entraîne d'importantes conséquences.

§2) Effets et conséquences de la ratification.

Ce procédé est plus avantageux au point de vue fiscal, puisqu'il ne donnera lieu qu'à un droit de mutation au lieu de deux. Au point de vue civil, le bien ainsi transmis sans passer par le patrimoine du vendeur ne peut se trouver grevé d'aucun droit réel de ce dernier, notamment d'une hypothèque légale ou judiciaire. Supposons par exemple qu'un individu marié vende un immeuble d'autrui : s'il en devient ensuite propriétaire, l'immeuble est immédiatement transféré à l'acheteur, mais il passe dans le patrimoine du vendeur un instant de raison, et c'est suffisant pour qu'il se trouve grevé de l'hypothèque légale de la femme. Si l'opération se réalise par une ratification du « vérus dominus », l'immeuble échappe à l'hypothèque légale.

Le « vérus dominus » et l'acquéreur sont étrangers l'un à l'autre : ils n'ont pas contracté ensemble. Par quel mécanisme juridique peut- on alors admettre que la propriété se trouve ainsi transférée directement de l'un à l'autre ? Le terme de ratification que l'on emploie ici pourrait suggérer de dire que tout se passe comme si le vérus dominus avait donné mandat au vendeur ; par le mécanisme de la représentation, le vérus dominus se substituerait au vendeur dans le contrat. Mais cette explication serait inexacte ; Le terme de ratification recouvre des choses différentes, et la ratification dont il s'agit ici n'est pas celle qui est donnée par un mandat dont le mandataire a excédé ses pouvoirs. La différence résulte du fait que, dans notre hypothèse, le vendeur ne s'est pas présenté à l'acheteur comme agissant pour le compte du propriétaire ; il a contracté pour son propre compte. Dans ces conditions, il ne peut y avoir représentation, faute de condition indispensable de la déclaration de qualité92(*). L'acheteur ne peut se voir imposer la substitution d'un autre vendeur à celui avec qui il a contracté. Les effets du contrat demeurent entre ceux qui l'ont passé et ne sont pas déplacés sur le « vérus dominus » ; l'obligation de garantie ne pèse pas sur ce dernier, mais sur le promettant.

Dans le cas de ratification par le véritable propriétaire, ce n'est donc pas le contrat de vente qui effectue le transfert de la propriété. Mais si dans notre droit le consentement suffit à transférer la propriété, la volonté unilatérale ne suffit pas : il ne suffit pas que l'aliénateur consente le transfert, il faut encore que l'acquéreur l'accepte. Si la ratification du propriétaire a le pouvoir d'effectuer le transfert de la propriété, c'est parce qu'elle vient s'insérer dans le contrat préexistant. Aussi cet effet ne peut se réaliser que si les droits conférés à l'acquéreur correspondent exactement à ce que le contrat devait lui procurer. Il n'en serait pas ainsi par exemple dans le cas où le propriétaire qui ratifie aurait au préalable consenti une hypothèque sur le bien ; la ratification ne pourrait alors parfaire le contrat de vente et transférer la propriété. La jurisprudence arrive d'ailleurs au même résultat, bien que par un autre raisonnement93(*).

La ratification, lorsqu'elle a lieu sera généralement la conséquence d'une convention intervenue entre le véritable propriétaire et le vendeur ; elle peut être faite à titre gratuit et constituer ainsi une donation indirecte au profit du promettant ; plus souvent, elle sera consentie à titre onéreux. Mais ces rapports entre le vendeur et le véritable propriétaire sont sans influence sur l'efficacité de la ratification.

Enfin la jurisprudence n'admet pas que l'efficacité de la ratification puisse être rétroactive94(*). Elle semble surtout s'inspirer pour cela du souci de protéger les tiers. Il est bien certain que la ratification ne saurait rétroagir contre les tiers, mais l'argument n'est pas suffisant, car rétroactivité entre les parties et rétroactivité à l'égard des tiers sont deux choses distinctes. La ratification consistant dans une renonciation au droit d'invoquer l'inopposabilité, on ne voit pas pourquoi le propriétaire ne pourrait y renoncer même pour le passé ; libre d'y renoncer ou non, il doit être libre d'y renoncer plus ou moins complètement. Il y a donc là une question d'interprétation de la volonté.

Quoi qu'il en soit, que l'efficacité de la promesse de vente se fasse par l'acquisition ultérieure du bien immeuble par le promettant, ou par ratification du verus dominus, la promesse de vente d'un bien immeuble d'autrui crée une obligation d'acquérir pour transmettre pesant sur la tête du promettant.

* 87. Sur les circonstances pouvant valoir ratification, voir Civile, 18 janvier 1870, D.1870. 1. 127, s. 1870. 1. 145.

* 88. Req ; 30 décembre 1872, pré. ; Civ 26 juillet 1926, préc. ;

* 89. Dijon, 9 mars 1881, préc.

* 90. Lyon, 19 février. 1908. Préc.

* 91. La situation serait la même dans le cas où le véritable propriétaire vient à succéder à l'auteur de l'acte : l'acte de disposition lui devient alors opposable, non pas parce qu'il renonce à se prévaloir de l'inopposabilité, mais parce qu'il recueille dans la succession l'obligation de garantie ; le résultat est le même. Sur cette hypothèse, voir : cass. Belge, 30 janv. 1941, page 1941.

* 92. Voir sur ce point Rouast, Cours de droit civil approfondi, 1947-1948, p. 63 et suivant.

* 93 . V ; Req ; 30 décembre 1872, D ; 1873. 1. 437, S. 1973. 1. 125.- pour la jurisprudence, c'est la conséquence du principe que l'action en nullité disparaît lorsque l'acheteur n'est plus menacé d'éviction ; pour que la ratification soit efficace, il ne suffit pas qu'elle supprime le danger d'éviction qui existe, il faut encore qu'elle n'en crée pas d'autres du chef de celui qui ratifie. Dans notre hypothèse, l'acheteur risquant d'être évincé par le créancier, conserve son action.

* 94. Req. ; 6 juillet 1831, S. 1831. 1. 307.

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