§2 - les ventes conditionnelles : domaine de
prédilection des promesses portant sur la chose d'autrui
La condition est un évènement futur et incertain
dont dépend l'existence ou l'anéantissement de l'obligation. Donc
elle diffère du terme par sa nature, puisqu'elle consiste dans un
évènement incertain, et par ses effets : elle n'agit pas
seulement sur l'exigibilité de l'obligation, mais sur son existence, et
d'autre part, son effet est rétroactif.
La signature d'une promesse de vente est de plus en plus
assortie de conditions. Mais le contenu ou le libellé de ces conditions
peut avoir des conséquences opposées selon qu'il s'agit de
conditions suspensives ou de conditions résolutoires. La condition est
suspensive lorsque la promesse de vente n'existe pas tant que la condition
n'est pas remplie. L'existence même de la vente dépend d'un
évènement futur et incertain ; alors que la condition est
résolutoire lorsque le compromis de vente existe, mais si la condition
se réalise, la vente peut être résiliée. Dans le
premier cas, la vente n'existe pas encore, dans le second, la vente est
déjà conclue.
Voici quelques exemples de conditions suspensives ou
résolutoires :
Des acquéreurs signent un compromis de vente, mais ne
s'engagent qu'à la condition d'obtenir un prêt. Il s'agit d'une
condition suspensive, puisque la vente n'est pas définitive tant que la
condition n'est pas remplie.
Parmi les vendeurs se trouve un enfant mineur. La vente est
conclue sous la condition d'une autorisation du juge de paix et de
l'homologation du tribunal. Il s'agit également d'une condition
suspensive.
dans la promesse de vente, il est souvent prévu que si
l'acquéreur ne passe pas l'acte notarié dans le délai de
quatre mois, le vendeur pourra demander la résolution de la vente. Dans
ce cas, il s'agit d'une condition résolutoire.
Mais il y a d'autres cas où la différence entre
condition suspensive et résolutoire n'est pas aussi nette. Ainsi,
certains compromis prévoient que la vente ne se réalisera que
lorsque tous les créanciers du vendeur auront marqué leur accord
sur le principe de la vente. Est-ce une condition suspensive ou
résolutoire ?
Quoi qu'il en soit, la différence entre condition
suspensive et résolutoire est capitale. Par exemple, si la promesse ne
prévoit pas de retarder le transfert de propriété
jusqu'à la date de la signature de l'acte, l'acquéreur est
propriétaire de l'immeuble dès que le compromis devient
définitif. C'est donc lui qui devra faire assurer l'immeuble. S'il
s'agit d'une condition suspensive, le transfert de propriété ne
se fera que le jour de la réalisation de cette condition : il ne
devra se soucier de l'assurance qu'à ce moment ; par contre, en cas
de condition résolutoire, il sera propriétaire dès la
signature du compromis, et devra immédiatement faire assurer
l'immeuble.
Fiscalement, le législateur prévoit que les
droits dus doivent être payés en l'état dans les quatre
mois.
Si la vente est assortie d'une condition suspensive, elle
n'existera que le jour de la réalisation de la condition : ce n'est
donc qu'à ce moment que commencera le délai de quatre mois. Par
contre, s'il s'agit d'une condition résolutoire, la vente est
définitive dès la signature du compromis, et les droits
d'enregistrement sont dus quatre mois plus tard. Si ultérieurement la
vente est résiliée, les droits d'enregistrement pourront
évidemment être récupérés.
Les vendeurs et acquéreurs doivent donc être
très attentifs à la rédaction de toutes les clauses de
compromis, surtout celles relatives aux diverses conditions qui
l'assortissent.
Les conditions suspensives et résolutoires concernent
généralement les points suivants : l'obtention du
crédit immobilier par l'acquéreur : si celui-ci ne veut pas
recourir à un emprunt, il doit impérativement inscrire une
mention manuscrite sur l'acte ; l'obtention du permis de construire en cas
d'achat du terrain ; l'absence d'inscription hypothécaire ; la
purge d'un droit de préemption administratif ou locataire. Cependant,
les parties ont la possibilité d'insérer d'autres conditions
résolutoires à condition qu'elles ne portent pas atteinte
à l'ordre public, qu'elles soient licites et qu'elles ne
dépendent pas de la seule volonté de celui qui s'engage.
Ainsi, à côté des conditions d'origine
conventionnelle très importantes pour les promesses de vente des biens
immeubles d'autrui (A), il existe d'autres conditions d'origine légale
qu'on ne saurait ne pas évoquer ici. (B)
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