Après avoir annoncé sa volonté de
rénover une nouvelle fois le code électoral, Abdou Diouf consulte
son parti le 27 février 1991. Le PS, entièrement
dévoué à son chef depuis 1990, se plie de bonne
grâce aux requêtes de son secrétaire général,
qui exige "une révision de la Constitution pour déconcentrer
le pouvoir, mettre sur pied un gouvernement responsable de la gestion des
affaires, dirigé par un Premier ministre nommé et révo
qué par le Président, mais aussi comptable devant
l'Assemblée nationale" 104 . Il rétablit de fait le
régime qui fut en place de 1970 à 1983, l'article 35 en moins.
Cette initiative "intéresse" le PDS et le PIT, tandis
que les autres membres de la CONACPO sont nettement plus
réservés. Abdoulaye Wade brise finalement comme en 1988 le front
de l'opposition pour répondre favorablement à l'appel d'Abdou
Diouf. Cette attitude semble montrer que le fondateur du PDS accorde une
certaine confiance au chef de l'Etat et que le dialogue a été
maintenu entre les deux hommes depuis la rupture de la table ronde en 1988.
Malgré une certaine réticence de la base libérale, le PDS
vote la révision constitutionnelle de mars 1991 qui rétablit la
Primature, la motion de censure et le droit présidentiel de dissoudre
100 Albert Bourgui, "Une bonne longueur d'avance ",
Jeune Afrique, n° 1564, 1er janvier 1991.
101 Abdou Diouf réutilise cette expression le lendemain
des élections municipales. "Je suis élu par le peuple pour
régler ses problèmes. Je suis le Père de la nation". "Vote
massif", Le Soleil, 26 novembre 1990.
102 "Décrispation ", Le Soleil, 2 janvier
1991.
103 La CONACPO regroupe : And Jëf, la LD/MPT, le MSU, l'OST,
le PAI, le PDS, le PLP, le PPS et l'UDP. "Le PDS rej ette les propositions
du pouvoir", Le Soleil, 4 janvier 1991.
104 "Abdou Diouf prend du recul", Jeune Afrique, n°
1576, 19 mars 1991 et "Rétablissement du poste de Premier ministre :
appel au rassemblement", Le Soleil, 1 er mars 1991.
le Parlement 105.
Au contraire de la LD/MPT et d'And Jëf, Wade ne fixe
presque aucune condition d'entrée au gouvernement. Cette docilité
s'explique par le fait que le chef de l'opposition trouve son compte en
obtenant quelques ministères. Il concrétise une ambition
personnelle qui a rythmé sa vie depuis 1974. En outre, il pense qu'en
étant plus près des affaires de l'Etat, il peut convaincre le
peuple sénégalais et les influents chefs d'Etat étrangers
qu'il n'est pas un simple "agité" mais un homme politique
compétent, capable de diriger le pays. Il atteint donc une forme de
consécration lorsqu'il obtient la garantie de Diouf qu'il sera l'un des
hommes clés du prochain gouvernement.
Pour coordonner la future équipe ministérielle
PS-PDS, Abdou Diouf recrée un poste de Premier ministre. Cette fonction
est au début des années 1990 revenue à la mode en Afrique,
après avoir été laissée de coté au cours de
la décennie précédente. Le profil de la personne choisie
est souvent le même : un homme discret, relativement compétent et
doté d'une réputation d'homme intègre. On trouve ainsi
Alassane Ouattara en Cote d'Ivoire, Sadou Hayatou au Cameroun ou Casimir
Oyé-Mba au Gabon 106 . Ces nominations permettent aux dirigeants ou aux
régimes en place depuis plusieurs décennies de calmer pour un
temps les demandes populaires de démocratisation. De surcroît, le
présidentialisme africain à outrance, sans garde-fou, est de plus
en plus mal vu par les bailleurs de fonds.
Alors que le nom de Moustapha Niasse circule avec insistance
dans les rues de Dakar, Abdou Diouf désire avoir à ses
cotés un homme plus effacé et surtout plus fidèle. C'est
pour ces raisons qui rappelle à la Primature son ami de toujours, Habib
Thiam. Cependant, le chef de l'Etat propose à son ancien ministre des
Affaires Etrangères un super-ministère de l'Industrie... que
Niasse refuse 107.
Habib Thiam a pour tâche de diriger un gouvernement
à majorité présidentielle élargie qui comprend,
pour la première fois depuis presque quarante ans, des hommes
appartenant à un parti autre que le PS. Outre Abdoulaye Wade,
officieusement vice-Premier ministre avec sa fonction de ministre d'Etat...
sans portefeuille, le PDS obtient trois autres ministères. Ils sont
attribués à Ousmane Ngom (ministre du Travail et de la
Formation), Jean-Paul Dias (ministre de l'Intégration Economique
Africaine) et Aminata Tall (ministre délégué auprès
du ministre de l'Education Nationale). Le PIT, récompensé pour
son soutien à Diouf lors de la crise mauritanienne, obtient lui aussi un
ministère. Amath Dansokho, secrétaire général du
PIT, devient ministre de l'Urbanisme et de l'Habitat.
On constate que les postes offerts à l'opposition ne
sont pas de première importance ou alors ils ont des contours mal
définis. C'est notamment le cas d'Abdoulaye Wade. Bien qu'il
dépende uniquement du Président de la République et qu'il
ait un droit de regard sur tous les dossiers, il ne bénéficie
d'aucun local et n'a à sa disposition qu'un seul assistant technique
108. La présence de ces ministres-opposants n'a donc pas une
influence directe sur la politique
105 "Le PS et le PDS votent la révision ", Le
Soleil, 22 mars 1991.
106 "Un nouvel acteur : le Premier ministre (...) personnage
providentiel chargé d'assurer la transition démocratique",
Le Monde, 8 juin 1991.
107 Lors d'un entretien accordé à Jeune
Afrique, Habib Thiam révèle que Moustapha Niasse a
exigé un statut de ministre d'Etat pour rentrer au gouvernement. Or,
l'accord passé entre Diouf et Wade prévoit que Abdoulaye Wade
soit le seul ministre d'Etat. Cette information, bien que fortement plausible,
est réfutée la semaine suivante par Moustapha Niasse. Albert
Bourgui, Siradiou Diallo et Hugo Sada, "Moustapha Niasse : "non, je ne
regrette rien"", Jeune Afrique, n° 1583, 7 mai 1991.
108 "Les assistants de Me Wade", Lettre du continent, 6
février 1992.
menée par le gouvernement, mais elle rassure l'opinion
publique. En effet, c'est un signe
d'ouverture politique envoyé par Abdou Diouf, qui
souligne la volonté de son parti de ne plus vouloir accaparer tous les
rouages du pouvoir.
L'ouverture aurait pu être plus prononcée, mais les
autres partis politiques sénégalais invités ont
refusé de participer à ce gouvernement, bien souvent à
cause de l'extrême réticence de leur
base.
La formation de ce gouvernement à majorité
présidentielle élargie offre la possibilité au
Sénégal "de conserver une longueur d'avance sur les autres
Etats africains". Depuis le
sommet France-Afrique de la Baule en 1990, et la critique
à peine voilée de François Mitterrand à l'encontre
des partis uniques africains, l'heure est au multipartisme sur le
continent. De nombreux observateurs pensent ainsi, suite
à ce discours, que c'est la France qui a imposé de fait au
Sénégal ce nouveau type de gouvernement 109 . Or, on pense que si
l'avis
français a bien évidemment eu une influence sur
le rapprochement Diouf-Wade, le gouvernement d'union nationale est avant tout
la concrétisation d'une volonté propre au Sénégal,
exprimée depuis le milieu des années 1980 110 et
favorisée par la fin de l'ère Collin et
"l'efficace boycott" par l'opposition des municipales de
1990.
Convaincus de la bonne volonté présidentielle,
les ministres PDS et PIT favorisent une
concertation avec les autres partis politiques afin de modifier
rapidement le code électoral. Les travaux sont placés sous la
responsabilité d'une commission nationale de réforme du
code
électoral, dirigé par l'impartial
Kéba Mbaye, qui bénéficie de la confiance des opposants.
Pour éviter l'échec de la table ronde de 1988, cette commission
consulte les requêtes des partis
un à un, mais aussi les avis de la société
civile et des associations. Sur les 17 partis recensés en 1991, 3
seulement refusent de participer à la consultation. Il s'agit du MSU, de
l'OST et du
PPS.
Les 14 partis qui travaillent sur le nouveau code
électoral trouvent rapidement une trentaine de points d'accord. Voici
ci-dessous les principaux 111 :
- La majorité passe de 21 à 18 ans
- Le vote des Sénégalais de l'étranger est
à présent autorisé
- Le passage dans l'isoloir devient obligatoire
- L'identification des électeurs par une pièce
d'identité le jour du vote devient obligatoire
- L'utilisation d'encre indélébile pour
éviter les votes multiples devient obligatoire
- La fonction présidentielle est à présent
limitée à deux mandats
- Les partis doivent être représentés
à présent au sein des bureaux de vote par des assesseurs
- La distribution des cartes doit dorénavant se faire en
présence de représentants des partis
- La durée des campagnes électorales passe de 14
à 21 jours
- Les contentieux électoraux sont à présent
de la compétence de la Cour suprême
- Les élections présidentielles et
législatives ne doivent plus être concomitantes
- Les coalitions politiques sont dorénavant
autorisées
- Les campagnes déguisées sont à
présent interdites
- Pour les élections législatives, on inclut 70%
de proportionnelle et 30 % de scrutin majoritaire
- Les candidats bénéficient dorénavant
d'une immunité tout au long de la campagne électorale
109 "La cohabitation à la française est
devenue le nec plus ultra de tous les politologues, professeur
d'université français, qui rédigent les nouvelles
Constitutions africaines. Dans les pays où les Présidents
sortants ont les attributs du pouvoir, l'armée et l'argent, il est
fortement recommandé aux chefs de l'opposition de se contenter des
postes de Premier ministre ou de président de l'Assemblée
nationale". Antoine Glaser et Stephen Smith, "Les nouveaux blancs aux
commandes de l'Afrique", Libération, 1er février 1994.
110 Mar Fall, l'Etat d'Abdou Diouf ou le temps des
incertitudes, Point de vue l'Harmattan, 1986. 111 Le Soleil du 21
et 23 mai 1991.
On note que la revendication majeure de l'opposition - le
passage obligatoire dans l'isoloir - est enfin acceptée par le pouvoir
socialiste.
Certains points de discorde subsistent néanmoins Le PS
refuse que soit inscrite dans la Constitution l'incompatibilité entre la
fonction présidentielle et la fonction de chef de parti. Cette position
est compréhensible, la vie politique interne du PS ayant une influence
directe sur la vie de l'Etat sénégalais. De plus, n'ayant
toujours pas trouvé en 1991 un bras droit susceptible de le remplacer,
Abdou Diouf ne peut pas se permettre d'abandonner sa position dominante au
PS.
La formation gouvernementale rejette aussi l'instauration
d'un Sénat - certainement à cause de l'échec des
négociations à ce sujet en 1988 - et la durée de 6 ans
proposée par l'opposition pour le mandat présidentiel, le PS
jugeant que pour "compenser" la limitation des mandats, le chef de l'Etat doit
pouvoir bénéficier de deux septennats 112.
Pour satisfaire l'ensemble des participants, les
requêtes socialistes sont acceptées. Le septennat renouvelable une
fois est instauré tandis que le nouveau code électoral ne fait
que "recommander" au Président de la République de mettre fin
à son rôle de chef de parti. Ces deux points ne paraissent pas
gêner outre mesure l'opposition, Abdoulaye Wade qualifiant même
à la fin des négociations le nouveau code électoral de
"presque parfait".
D'autres réformes importantes sont menées au
cours des premiers mois de "cohabitation". Abdou Diouf crée le 25 mai
1991 un Haut Conseil de la Radio Télévision (HCRT). Il est
chargé de faire respecter la diffusion hebdomadaire de la propagande des
partis dans les médias d'Etat, d'assurer une bonne retransmission des
débats parlementaires et de veiller à un certain "pluralisme" de
l'information. Cette "révolution" est accompagnée par la
création d'une grande émission politique contradictoire
mensuelle.
Cette ouverture des médias à l'opposition est
encourageante. En parallèle, on note dans les colonnes du Soleil
un plus grand intérêt quant à l'actualité et
aux idées des opposants. Après avril 1991, on peut lire en page
centrale du quotidien gouvernemental de longues interviews d'Abdoulaye
Wade, Amath Danshoko, Landing Savané, Babacar Niang etc... chose
inimaginable quelques mois auparavant 113.
L'impartialité des médias devient par
conséquent un objectif prioritaire du gouvernement. La loi signée
par Abdou Diouf le 3 septembre 1992 l'atteste :
"il est apparu nécessaire de rappeler les
conditions d 'un traitement objectif de l 'actualité politique, dans le
respect des règles déontologiques applicables à la
profession de journaliste. (...) A chaque fois que l 'importance de l
'événement le justifiera, les journaux
télévisés et radiophoniques rendront compte des
réunions des instances dirigeantes des partis politiques
légalement constitués et des manifestations à
caractère national que ceux-ci organiseront. Si un parti politique, un
syndicat, une organisation patronale ou une association représentative
de la société civile en font la demande, le Haut conseil pourra
éventuellement ordonner la diffusion de mises au point pour
rétablir l 'objectivité de l 'information ".
La justice, sévèrement critiquée depuis
1988, connaît elle aussi des réformes pour la rendre "plus
crédible, plus efficace, plus compétente et plus impartiale" 114
. La Cour suprême est divisée en trois juridictions : le
Conseil constitutionnel, le Conseil d'Etat et la Cour de cassation.
112 " Réserves sur deux points", Le Soleil, 23
août 1991.
113 Voir l'entretien de Landing Savané du 21 août
1991 et celui de Babacar Niang du 3 septembre 1991.
114 Propos du ministre de la Justice, Serigne Lamine Diop.
"Réforme du système judiciaire ", Le Soleil, 29 mai
1992.
Cette vague d'ouverture correspond à une
période d'état de grâce dans le pays. Le conflit
sénégalo-mauritanien prend officiellement fin avec la
restauration des relations diplomatiques entre les deux pays ; la situation en
Casamance, pesante en 1990, s'apaise après la signature d'un accord de
paix ; les grèves universitaires sont moins nombreuses etc.
De surcroît, les déclarations amicales de Wade
envers Diouf foisonnent 115 . On surprend même le leader PDS... dansant
avec la première dame du Sénégal 116 . Les sopistes sont
ainsi sommés de respecter le consensus en vigueur. En août 1991,
Abdoulaye Wade n'hésite pas à licencier le directeur de
publication de Sopi et le secrétaire national de l'information
du PDS suite à un article critiquant le gouvernement 117 . Il oeuvre
donc pour la paix sociale, et permet au Sénégal de redevenir
"fréquentable". Abdou Diouf récolte les fruits de cette politique
en juin 1992 en étant reçu avec faste par la France,
François Mitterrand se déplaçant jusqu'à Roissy
pour accueillir son homologue sénégalais.
Cet état de grâce n'est même pas
contesté par les principales victimes de la cohabitation, à
savoir les partis non gouvernementaux. Abdoulaye Bathily reconnaît que
Diouf et Wade ont fait "une combinaison au sommet qui a
désamorcé la bombe sociale" 118 . Sonnés par le
départ du chef charismatique de l'opposition, les membres de l'ancienne
CONACPO sont à présent divisés. Dès la fin 1991,
trois personnalités de l'opposition - Landing Savané, Babacar
Niang et Abdoulaye Bathily - annoncent leur candidature... pour
l'élection présidentielle de 1993.
Ils tiennent pourtant sensiblement le même discours.
Ils dénoncent la traîtrise d'Abdoulaye Wade, qui a en quelque
sorte "pactisé avec le diable" ; se plaignent de la fermeture des
médias d'Etat aux partis non gouvernementaux et s'insurgent face... aux
prévisibles fraudes électorales de 1993 119.
Toutefois, Landing Savané est celui qui tire le mieux son
épingle du jeu au cours de la période. En effet, son parti And
Jëf arrive à créer une "union des gauches" en fusionnant
avec l'Organisation Social des Travailleurs (OST), l'Union pour les
Démocraties Populaires (UDP) et le cercle des lecteurs de Suxxuba.
Ce regroupement des différents partis de la gauche
révolutionnaire a pour objectif de "combattre le régime
Diouf- Wade" 120.
Dans ses interventions, Landing Savané s'attaque
principalement non pas au chef de l'Etat mais bel et bien au fondateur du PDS.
Il présente le parti libéral comme un parti bourgeois, qui
achète ses militants grâce à des allégeances. Face
à la multiplication de ce type de déclarations, Wade ironise et
affaiblit un peu plus ses amis d'hier en les invitant "à se joindre
(au gouvernement) (...) au lieu de ces inutiles coups d'épée
contre un adversaire si conscient de sa force et de son
invulnérabilité qu 'il se soucie finalement peu de cette vaine
agitation"121.
La force de caractère d'Abdoulaye Wade a des
répercussions sur les rapports qu'entretient le Sénégal
avec le FMI et la Banque mondiale. Il milite pour une renégociation des
programmes conclus et une remise en cause de la NPI et de la NPA. En
déclarant dès sa nomination "maintenant, c 'est fini les
contraintes et les conditionnalités" et en critiquant l'absence
de
115 "Je m'entends parfaitement avec Abdou Diouf, nous
faisons tout en commun (...) nous n'avons jamais eu la moindre divergence sur
le moindre problème ". "Diouf- Wade : le ticket gagnant ? ", Jeune
Afrique, n° 1 606, 15 octobre 1991.
116 Voir la photo d'Abdoulaye Wade et Elisabeth Diouf dansant
ensembles. "Soirée de gala de la Croix rouge", Le Soleil, 10
juin 1991.
117 Suite à cette affaire, Wade déclare : "le
Soleil et la radio essaient de s'adapter au changement, pas Sopi". "Affaire
Sopi", Le Soleil, 16 août 1991.
118 Marie-Pierre Subtil, "A la veille du sommet de la
Conférence islamique, "Etat de grâce" politique et "bombe sociale"
à Dakar", Le Monde, 8 décembre 1991.
119 Francis Kpatindé, "Opposition es-tu là ? ",
Jeune Afrique, 3 décembre 1991.
120 "Landing Savané, secrétaire
général", Le Soleil, 17 décembre
121 "Troisième conférence nationale des
anciens du PDS", Le Soleil, 30 décembre 1991.
distributions de semences et d'engrais, le ministre d'Etat
souhaite pousser Abdou Diouf à tenir tête plus
régulièrement aux bailleurs de fonds. Habib Thiam semble avoir la
même volonté, puisque dans un large entretien accordé au
Soleil le 26 juillet 1991, il désapprouve également la
NPA et la NPI.
Le chef de l'Etat suit l'avis de ses deux ministres. Il
prône à partir de la première moitié de
l'année 1991 un ajustement plus tourné vers le
développement et la croissance, et moins sur les équilibres
macroéconomiques 122 . La nouvelle position sénégalaise
heurte les bailleurs de fonds, déjà méfiants depuis la
parution du rapport Berg. Cette attitude détériore donc les
relations Sénégal-FMI, ce qui n'arrange pas la situation
économique du pays, bien mal en point entre 1991 et 1992.
Cependant, ces difficultés sont
reléguées au second plan derrière l'euphorisme
régnant durant les premiers mois du gouvernement d'union nationale. Cet
état de grâce est consolidé par les multiples
événements de portée mondiale organisés sur le sol
sénégalais entre décembre 1991 et février 1992.
L'espace de quelques semaines, le Sénégal est le centre de
l'Afrique.
Le premier évènement qui a lieu sur le sol
sénégalais est la réception de l'Organisation de la
Conférence Islamique (OCI). Premier pays subsaharien à recevoir
l'OCI, le Sénégal s'est doté d'importantes infrastructures
pour accueillir les délégations. Le pays, peuplé à
plus de 90% de musulmans, veut faire de cette réunion un
événement politique majeur. Mais les absences conjuguées
des chefs d'Etat marocain, égyptien et surtout saoudien font de la
conférence un semi-échec. Même s'il est élu à
cette occasion président de l'OCI pour trois ans, Abdou Diouf
n'égale pas sur le plan médiatique sa "performance" de 1981
à Taïf. Vexé par cet affront, le chef de l'Etat
déclare dans Le Monde du 10 décembre 1991 : "nous
respectons les Arabes plus qu 'ils nous respectent. Ce sixième sommet de
l'OCI en est l'illustration ".
La déception laisse cependant bien vite la place
à l'enthousiasme, puisque le Sénégal organise en janvier
la Coupe d'Afrique des Nations 1992. Cette compétition est l'occasion
pour Diouf de se rapprocher de "sa" jeunesse, qu'il tente
désespérément de reconquérir depuis 1988
123. Le chef de l'Etat mise sur une victoire du
Sénégal pour bénéficier d'un "effet Coupe
d'Afrique". Les proches du régime dioufiste pense qu'une victoire des
"Lions de la Téranga" pourrait jouer sur le moral des
Sénégalais et profiter au Président indirectement, le
football étant le sport national du Sénégal avec la lutte.
La jeunesse verrait en Diouf "un Sénégal qui gagne" et voterait
pour lui en 1993, la majorité ayant été abaissée
à 18 ans. Le gouvernement se donne donc les moyens pour réus sir
"sa" CAN. Il octroie 1,4 milliards FCFA pour l'organisation de
l'événement ; 1,3 milliards FCFA pour l'amélioration des
stades et 1 milliard FCFA pour les équipements de
télévision 124.
Les politiques, désireux de "rentabiliser" leur
investissement, troublent la préparation de l'équipe nationale en
se rendant sur le camp d'entraînement des joueurs. Lors de leur visite du
2 janvier 1992, les ministres se montrent, font de larges sourires en compagnie
des sportifs
122 Abdou Diouf soutient ainsi à RFI : "j'ai
pensé ces derniers mois à la dimension sociale de la politique de
l'ajustement. L 'ajustement sans la croissance, sans le développement n
'a pas d'avenir et ne conduit pas à la prospérité ". "Le
nouveau gouvernement marque un changement dans la continuité ", Le
Soleil, 11 avril 1991.
123 Son discours du 4 avril 1989 est particulièrement
révélateur. Dans son allocution, située entre deux crises
majeures (la contestation post-électorale et la crise
sénégalo-mauritanienne), Abdou Diouf rend hommage à la
jeunesse "force vive et incarnation de la nation en devenir" et
n'hésite pas à prendre cette position étonnante : "que
notre jeunesse soit contestatrice, je n'y vois pas une calamité
nationale". Il tente ainsi par tous les moyens de faire oublier ses propos
thièssois de 1988. Voir Le Soleil, 5 avril 1989.
124 "La valse des milliards", Jeune Afrique, n°
1615, 23 janvier 1992.
et... tirent des penaltys en costard-cravate 125 .
Outre Habib Thiam, on compte parmi les footballeurs d'un jour Ousmane Ngom.
Cette présence n'est pas anodine, le message politique est fort : les
photographes et les caméras doivent souligner la bonne ambiance qui
règne au sein du gouvernement.
Le Président reçoit quant à lui
l'ensemble de la sélection au palais présidentiel. Il accorde une
attention toute particulière à Jules-Francois Bocandé,
avec qui il n'hésite pas à poser longuement pour les photos 126 .
L'homme en question a de quoi attirer la convoitise présidentielle. Il
est considéré à l'époque comme le meilleur joueur
du pays (il a été le meilleur buteur du championnat de France en
1986), il a le brassard de capitaine et surtout, comme son nom l'indique, il
est d'origine casamançaise. C'est donc à lui que Abdou Diouf
offre un immense drapeau sénégalais. Le sport, le patriotisme et
la politique s'entremêlent durant la préparation des "Lions". Le
message du gouvernement est très clair : il faut gagner la coupe
127.
Après avoir lancé officiellement la
compétition, Abdou Diouf assiste au premier match des
sénégalais contre le Nigeria. A sa grande satisfaction, il est
applaudi par l'ensemble du stade, composé à majorité de
jeunes. Les débuts des "Lions" sont pourtant chaotiques, puisqu'ils
perdent 1-2 contre le Nigeria. La pression est donc déjà grande
lors de la deuxième rencontre contre le Kenya, seule une victoire
pouvant permettre au Sénégal de continuer la compétition.
Abdou Diouf, stressé... ou plus certainement
désintéressé par le match en lui-même, n'assiste pas
à la rencontre. La propagande gouvernementale met alors en avant la
présence dans les tribunes d'Elisabeth Diouf, Abdoulaye Wade et d'autres
ministres PS et PDS. Toutes ces personnes ne font pas dans la demi-mesure pour
se congratuler à la suite de la large victoire sénégalaise
3-0 128 , qui qualifie la sélection pour les quarts de finale. Les
premiers effets de la CAN se font ressentir : la Casamance est en fête -
suite notamment à une bonne prestation de Bocandé - et la
jeunesse s'associe à la joie exprimée par les ministres du
gouvernement d'union nationale. "L'effet CAN" parait prendre la tournure
souhaitée, mais cela est sans compter sur une élimination
prématurée de la sélection sénégalaise.
Les "Lions de le Téranga" sont en effet
éliminés le match suivant par le Cameroun 1-0, sans gloire... et
surtout sans coupe. Cette sortie prématurée est vécue
comme un drame national129. Elle constitue également une
humiliation, étant donné que c'est le "cousin" ivoirien qui
termine quelques jours plus tard champion d'Afrique. Le presse gouvernementale
cherche alors un coupable et en trouve un tout désigné en la
personne du sélectionneur national, le français Claude Leroy.
Le Soleil explique que "l'échec de l'équipe
nationale, c'est donc l'échec personnel de son entraîneur qui
avait en toute clarté et en toute responsabilité fait un choix.
Celui ci ne s'est pas avéré payant (...) finalement, il n'y a pas
de malédiction en sport. Tout a une base scientifique et rationnelle.
Tout peut s'expliquer scientifiquement" 130.
Comme souvent en Afrique, les commentaires sportifs des
journalistes sont accompagnés... par ceux des hommes politiques. Ces
derniers critiquent les mauvais choix de l'entraîneur mais aussi son
salaire, estimé sur quatre ans à 216 millions FCFA. On comprend
que le sort
125 "Habib Thiam à l'entraînement des Lions :
"nous vous faisons confiance"", Le Soleil, 3 janvier 1992.
126 "Abdou Diouf : allez les lions", Le Soleil, 6
janvier 1992.
127 Abdou Diouf déclare : "c 'est un message que
vous allez délivrer, un message de paix et de fraternité de la
jeunesse africaine a l'ensemble des jeunes du monde entier avec (...) comme
objectif la con quête de la Coupe africaine de football". "Abdou Diouf :
allez les lions", Le Soleil, 6 janvier 1992.
128 "Coupe d'Afrique des Nations : un ballon très
politique", Jeune Afrique, n° 1 620, 31 janvier 1992.
129 "Le camp sénégalais s'explique ", Le
Soleil, 26 janvier 1992.
130 "Choix incohérent.. échec logique",
Le Soleil, 21 janvier 1992.
du français est scellé quelques jours tard,
à la lecture d'un communiqué du conseil des ministres :
"Dans sa communication, le Président de la
République a évo qué le déroulement de la
dix-huitième CAN avec l'élimination prématurée de
l'équipe nationale du Sénégal en quart de finale. Il a dit
sa peine et celle de tout le peuple sénégalais devant cet
évènement, mais a estimé que "nos Lions se sont battus
même s'ils ont manqué de réussite. Ils sortent de cette
compétition la tête haute". Il convient dont de rendre hommage au
peuple sénégalais et a sa jeunesse pour leur mobilisation et leur
appui massif. Il faut redoubler d'effort a dit le chef de l'Etat qui a
demandé de penser dès maintenant aux échéances
futures et de les préparer par l'élaboration rapide d'un plan de
relance du football sénégalais par la base. Le Président
de la République a ensuite souligné la nécessité de
tirer toutes les leçons de notre participation à cette
compétition et de situer les responsabilités de façon
objective" 131.
La conférence de l'OCI et l'organisation de la CAN
sont donc des semi-échecs pour Abdou Diouf et son gouvernement d'union
nationale, le pouvoir n'ayant pas réussi à en tirer les
bénéfices escomptés. Le déplacement du Pape
Jean-Paul II clôture cette période de grands
événements internationaux au Sénégal.
Cette visite, importante pour ramener au calme une Casamance
très fortement christianisée, a été
organisée par Abdou Diouf et sa femme, de religion chrétienne,
contre la volonté de la confrérie mouride 132 . En dépit
de certains avis défavorables, le gouvernement d'union nationale -
notamment Habib Thiam, Abdoulaye Wade et Amath Dansokho - se presse autour du
chef de la chrétienté lors de son arrivée à Dakar,
le 18 février 1992. Les élections sénégalaises
approchant, il est de bon ton d'afficher son ouverture religieuse pour
séduire l'électorat chrétien.
Le principal objectif de Jean-Paul II au cours de ce voyage
est d'apaiser la situation casamançaise. Le conflit séparatiste
connaît entre 1989 et 1991 des périodes de fortes tensions, les
rebelles ayant trouvé en Guinée-Bissau une zone de repli
idéale. Les morts se comptent par centaines, voire milliers. Les
réponses de l'armée sénégalaise sont violentes, on
parle même d'arrestations et de rafles aveugles 133 . Pour mettre fin au
conflit, Abdou Diouf décide de faire un geste et gracie le 27 mai 1990
350 séparatistes casamançais. Dans la foulée, un accord de
paix est signé entre le MFDC et le gouvernement. Une commission de paix,
regroupant l'Abbé Diamacoune, des membres du MFDC et des
éléments du PS et du PDS, est crée. On croit le
problème casamançais en passe d'être résolu, mais en
décembre 1991, les violences reprennent avec l'assassinat d'un
député et d'un président de conseil rural 134 . Le chef de
l'Etat, qui prépare la visite symbolique de Jean Paul II à
Ziguinchor, met alors en place une commission de gestion de la paix en janvier
1992.
C'est dans ces conditions que le Pape prône durant son
séjour la paix. Il prononce notamment ces mots : "pendant de trop
longues années, vous avez connu des périodes de
déchirement, des familles divisées, des deuils, des villages et
des champs ravagés, tous, vous aspirez à la réconciliation
et à l'unité. Vous devez construire ici la demeure de la paix.
Vous ne pourrez le
131 "Relance du football par la base", Le soleil, 22
janvier 1992.
132 Abdou Diouf raconte : "Le Khalife
général des Mourides n 'a pas été enthousiaste
(...) j 'ai dit : "mon devoir est de vous informer, je vous informe. Il y a
deux raisons. Le Pape est un chef d'Etat, je dois recevoir un chef d'Etat.
Deuxièmement, nous avons une communauté chrétienne qui a
besoin de voir son guide. C'est ma responsabilité de la protéger
et de lui offrir ce cadeau de recevoir le guide spirituel de la
chrétienté". Abdou Diouf : entretiens avec Philippe Sainteny,
Emission livre d'or, RFI, 2005.
133 "Amnesty International dénonce l'usage de la
torture en Casamance", Le monde, 13 janvier 1991.
134 "Un député tué en Casamance :
réactions après l'attentat", Le soleil, 25 décembre
1991.
faire que tous ensemble" 135 . L'abbé
Diamacoune Senghor, qui assiste à la messe pontificale à
Ziguinchor, déclare en guise de réponse : "la violence nous a
été imposée en Casamance et sans la justice, la
réconciliation ne serait construite que sur du sable. J'espère
que le Pape montrera la voie"
Rassuré par ces propos, le Pape quitte le
Sénégal en pensant qu'une solution de paix définitive peut
être prochainement trouvée. C'est l'inverse qui se produit,
puisque à partir de juillet 1992, on assiste à une très
grande intensification du conflit casamancais. Toutefois, la visite papale
reçoit un écho favorable dans l'ensemble du pays et panse quelque
peu les plaies ouvertes depuis 1988. Cet évènement clos "la
grande récréation"136 débutée avec la
conférence de l'OCI. Le quotidien reprend le dessus. Les
premières tensions au sein de la cohabitation apparaissent.
En effet, la présence des ministres libéraux au
gouvernement ne fait pas que des heureux. Certains socialistes n'acceptent pas
le fait de se retrouver en deuxième ligne derrière un Abdoulaye
Wade entreprenant et qui agit souvent de concert, du moins durant les premiers
temps de la cohabitation, avec le chef de l'Etat.
En outre, le conseil des ministres n'est plus pour la
formation dioufiste un lieu où circulent des renseignements secrets,
dissimulés aux autres partis. Les ministres socialistes font à
présent attention à ce qu'ils disent, cherchant à ne pas
dévoiler toutes leurs informations à leurs collègues PDS.
La méfiance générale aidant, tous les dossiers sont
extrêmement discutés, chacun essayant d'imposer à l'autre
ses idées 137 . Une fracture se crée au sein même du
gouvernement entre les membres socialistes et libéraux. Les ministres de
la société civile, en manque de base politique, sont quant
à eux plus enclins à soutenir les ministres PDS :
"très vite, on s'aperçut que les nouveaux
cultivaient ou essayaient au plus haut point de bonnes relations avec les
ministres chargés des finances ou de l'économie. Ces derniers,
souvent technocrates, sans base politique,
avaient aussi besoin de points d'appui."
138.
Par conséquent, les accrochages entre Thiam et Wade se
multiplient 139 . L'affrontement le plus net concerne le Fonds pour la
Promotion Economique (FPE) de 39 milliards FCFA, accordé par la BAD le
22 novembre 1991. Selon Habib Thiam 140, ce fonds doit
être raccordé à lui pour éviter tout
détournement d'argent (221). Abdoulaye Wade, qui n'a aucune sympathie
pour Thiam, dénonce cette appropriation. Le ministre d'Etat
débute alors une véritable campagne de presse pour que le FPE
soit ratt aché à Famara Ibrahima Sagna, ministre de l'Economie et
des Finances. Ce choix n'est pas anodin, puisque Sagna est un allié de
Wade - il a oeuvré pour son entrée au gouvernement - et il n'est
un secret pour personne qu'il lorgne sur la Primature. En lançant cette
polémique, Abdoulaye Wade essaie donc d'affaiblir le Premier ministre.
Cette tentative est un "succès", puisque jusqu'à son
départ du gouvernement, le FPE occupe l'espace médiatique
sénégalais.
135 Sennen Andriamirado, "Casamance c'est la guerre !",
Jeune Afrique, n° 1653, 16 septembre 1992.
136 Elimane Fall, "La récréation est finie au
Sénégal" , Jeune Afrique, n° 1624, 26 février
1992.
137 "Les débats, style parti politique, où
l'on pouvait passer toute une nuit à discutailler des points et des
virgules, envahirent notre réunion hebdomadaire du conseil". Habib
Thiam, Par devoir et amitié, pp.121, Paris, Rocher, 2001.
138 Habib Thiam, Par devoir et amitié,
pp.122-123, Paris, Rocher, 2001.
139 Habib Thiam raconte l'un de ces multiples accrochages
: "Abdoulaye Wade crut bon de m'appeler au téléphone pour me
dire sa conception sur la manière de gouverner. A cause du ton
employé, rogue et donneur de leçons, je l'ai envoyé sur
les roses en lui précisant qu'aussi longtemps que j'occuperais le poste
de Premier ministre, il en serait ainsi". Habib Thiam, Par devoir et
amitié, pp.123, Paris, Rocher, 2001.
140 Dans ses mémoires politiques, Habib Thiam consacre un
chapitre entier au FPE pour justifier son utilisation. Habib Thiam, Par
devoir et amitié, Paris, Rocher, 2001.
En dépit de ces frictions, le gouvernement d'union
nationale a tout de même dépassionné le débat
politique, favorisé une ouverture du régime et contribué
au retour d'une certaine paix sociale, excepté en Casamance. Certaines
personnalités, comme Amath Dansokho, suggèrent ainsi... une
candidature unique pour la présidentielle de 1993 141 . Si Abdou Diouf
semble tenter par cette idée - Habib Thiam soutient dans ses
mémoires que le chef de l'Etat propose à la fin de l'année
1992 le poste de Vice-Président à son ministre d'Etat 142 -
Abdoulaye Wade réaffirme sa volonté de conquérir le palais
présidentiel, "son devoir étant d'amener le PDS au pouvoir,
car le parti est majoritaire" 143. Le fondateur du
PDS annonce de ce fait sa candidature à la présidentielle au
cours de l'hivernage 1992 mais se prononce pour le maintien des ministres PDS
au gouvernement.
Suite à cette annonce, le climat gouvernemental
devient relativement pesant. Des conseils ministériels officieux se
tiennent sans la présence du PDS, les ministres libéraux
n'apparaissent plus dans les médias d'Etat, on assiste même
à un procès entre Le Soleil et le ministre Jean-Paul
Dias 144 . Pour mettre fin à l'isolement de sa formation, Abdoulaye Wade
propose à la fin du mois d'août 1992 aux autres partis
d'opposition de rentrer au gouvernement. Il essuie un refus
général. Le chef de l'Etat réappuit alors son soutien
à son ministre d'Etat et demande au gouvernement de ne pas se lancer
dans la campagne préélectorale bien que... ses propres
comités de soutien commencent déjà à faire leur
apparition dans les médias d'Etat 145.
Abdoulaye Wade quitte finalement le gouvernement le 18
octobre 1992, suite à un vote du bureau politique PDS. Pour justifier
son départ, il évoque la marginalisation dont il est victime
depuis l'annonce de sa candidature. Il indique néanmoins son intention
de retravailler avec Abdou Diouf après les élections, preuve que
les deux hommes ont appris à se connaître et à s'estimer
depuis avril 1991 146 . Ils se quittent ainsi en bons termes, ce qui laisse
penser que la campagne de 1993 va être nettement moins agitée que
la précédente.