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L'alternance politique au Sénégal : 1980-2000

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par Adrien THOUVENEL-AVENAS
Université Sorbonne Paris IV - Master 2 2007
  

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2. L'avènement de l'hégémonie senghorienne :

Critiquant l'aspect élitiste et "français" du parti de Guèye, Senghor et son compagnon de route Mamadou Dia fondent un véritable parti de masse, le Bloc Démocratique Sénégalais (BDS), capable d'attirer les nouveaux citoyens "français", essentiellement des ruraux. Les victoires électorales sur Guèye sont alors récurrentes : 1948, 1951, 1952, 1956 et 1957. Le BDS devient la grande formation politique du Sénégal. Léopold Sédar Senghor, fort de cette suprématie et de son statut de ministre français3, lance un premier appel à l'unité, qui aboutit à la formation d'un nouveau parti en collaboration avec l'Union démocratique sénégalaise (UDS) : le Bloc populaire sénégalais (BPS). Il n'inclue cependant pas la Fédération socialiste SFIO du Sénégal, Lamine Guèye réorganisant son parti sous le sigle du MSA (Mouvement socialiste africain) pour l'élection de l'Assemblée territoriale de mars 1957. Ce scrutin est d'une extrême importance, puisqu'il est le premier à prendre en compte les changements initiés par la loi Defferre de 1956, qui abrogent le double collège et instaurent le suffrage universel. Mais cette tentative s'avère être un échec cuisant. Le MSA récolte 13 sièges alors que le BPS en obtient 47.

Ces scores médiocres sonnent le glas des ambitions de Lamine Guèye. Ce dernier se résout à "se faire avaler" par la machine senghorienne4. En 1958, le BPS et le MSA fusionnent, donnant naissance à l'Union Progressiste Sénégalaise (UPS). Ce nouveau parti possède la totalité des 80 sièges de l'Assemblée nationale. Il promeut dès ses premiers mois d'existence le ralliement à la Communauté de De Gaulle, contrairement au Parti Africain de l'Indépendance (PAI). Le "Oui" massif du Sénégal (70.362 voix contre 21.901 de non) renforce l'idée que l'UPS est devenue incontournable. L'échec de la Fédération du Mali et l'indépendance acquise le 4 avril 1960 permettent quant à elles l'adoption d'une Constitution sénégalaise, qui voit le jour le 25 août 1960.

Il y est stipulé que le Président de la République (Senghor accède à la tête de l'Etat le 5 septembre 1960) est élu pour sept années par un collège électoral limité, composé de députés et de délégués

3 Il est secrétaire d'Etat à la présidence du Conseil dans le gouvernement Edgar Faure du 1er mars 1955 au 1er février 1956. Il sera ensuite ministre conseiller du gouvernement Michel Debré, du 23 juillet 1959 au 19 mai 1961.

4 Lamine Guèye devient alors un fidèle... de Senghor. En guise de récompense, il occupe le poste honorifique de Président de l'Assemblée nationale de 1960 jusqu'à sa mort en 1968.

des conseils municipaux et régionaux. La plus haute magistrature du pays assure la continuité de l'Etat et sa représentation à l'étranger. Elle désigne le Président du conseil, qui nomme les ministres et coordonne la politique intérieure. Il est investi par les députés qui peuvent le démettre en adoptant une motion de censure. Ils votent également le budget et les lois.

La séparation des pouvoirs est respectée dans cette Ière République sénégalaise. On constate que le binôme Senghor-Dia a une répartition à peu près égale des pouvoirs. Ce couple politique, qui fonctionne depuis la formation du BDS en 1948, cumule l'intelligence dialectique de Senghor et le pragmatisme de Mamadou Dia 5. Mais cet équilibre des forces est bientôt mis à mal par les luttes partisanes. Le 14 décembre 1962, le député Théophile James reproche à l'Assemblée nationale le maintien de l'Etat d'urgence depuis août 1960, date à laquelle le Sénégal a décidé de mettre fin à sa collaboration avec l'ancien Soudan français. Une motion de censure est aussitôt adoptée à l'encontre de Mamadou Dia par une quarantaine de parlementaires. Se sentant trahi, le Président du conseil fait entrer la gendarmerie place Tascher le 17 décembre 1962 et ordonne l'arrestation des quatre députés qui lui sont les plus hostiles 6 . L'Assemblée nationale donne alors solennellement à Senghor les pleins pouvoirs. Mamadou Dia est mis en détention le soir même. Cet événement marque la fin du bicéphalisme de l'exécutif au Sénégal.

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