II Clarification des termes
Ø PROTESTATION, ACTION,
MOBILISATION : les définitions ne manquent pas d'autant
que sont employés indifféremment les termes de
« protestation », « action » ou
« mobilisation ». Entendus « au sens de toute
action concertée de un ou plusieurs groupes cherchant à faire
triompher des fins partagées » (PAGNUCCO R., 1995 :
145-183), tous qualifieraient un processus permettant à un
« groupe social de passer d'un état passif (...) à
la participation active à la vie publique » (C. TILLY,
1978 : 69). Pourtant, ces termes désignent des
phénomènes très variés, qui relèvent
à la limite de modes d'analyses différents quels que soient les
caractères qu'ils ont en commun, comme les « vastes
mouvements de politisation affectant un groupe social ; (...) (les)
manifestations de masse isolées au inscrites dans une succession
d'agitations et de troubles ; (la) consolidation d'engagements individuels
s'agrégeant en un mouvement organisé et
institutionnalisé » (LAGROYE, 1991 : 309).
L'objectif n'étant pas de rentrer dans une discussion sémantique,
les trois termes sont semblables.
Ø LUTTE REVENDICATIVE :
« Une lutte revendicative n'est pas en elle-même un
mouvement social ; elle peut être défense corporative,
utilisation de la conjoncture sur le marché du travail, pression
politique même » (TOURAINE, 1992 : 279).
De fait, pour que cette lutte évolue vers la formation d'un
véritable mouvement social, elle doit s'exprimer en fonction des valeurs
de la société qui l'environne. En outre, un mouvement social
n'est pas un facteur direct de changement, il ne vise pas à
détruire la forme et l'esprit de la société dans laquelle
il s'exerce. Il oriente, il induit par l'action collective de ses agents, des
modifications internes. ( LAFARGUE : 21)
Ø MOUVEMENT SOCIAL : Des
différentes définitions qui existent, celle de Guy ROCHER
(1968 : 146-17) est opératoire dans le cadre de cette étude.
Le mouvement social est selon l'auteur « une organisation
nettement structurée et identifiable, ayant pour but explicite de
grouper des membres en vue de la défense ou de la promotion de certains
objets précis, généralement à connotation sociale.
Ce qui caractérise principalement un mouvement social, c'est qu'il est
essentiellement revendicateur : il cherche à faire connaître
et à faire triompher des idées, des intérêts, des
valeurs, etc. Un mouvement social n'est donc ni un cercle d'étude
platonique, ni un ermitage ; il est forcément actif sur la place
publique. Il cherche à se gagner des adhérents, à retenir
l'attention du public ou d'un certain public et des élites
dirigeantes »
Ø MOBILISATION POLITIQUE : on
peut retenir avec François CHAZEL que la mobilisation politique
désigne « la création de nouveaux engagements et de
nouvelles identifications - ou quelquefois la réactivation de
loyautés et d'identifications oubliées - ainsi que le
rassemblement, sur cette base, d'acteurs ou de groupes d'acteurs dans le cadre
d'un mouvement social chargé, au besoin par la confrontation directe et
éventuellement violente avec les autorités en place, de
promouvoir et parfois de restaurer des fins collectives ». La
mobilisation politique suppose ainsi la réunion de trois
éléments constitutifs : l'activation des engagements et des
identifications, la formation d'un mouvement social, la définition de
fins collectives. Autant d'éléments qui peuvent recouvrir les
domaines les plus divers de l'action politique : aussi pourra-t-on faire
état de « mobilisation citoyenne », de
« mobilisation révolutionnaire », de
« mobilisation électorale », de
« mobilisation partisane » ou de « mobilisation
syndicale ».
La mobilisation politique se distingue de la mobilisation
sociale qui se rapporte, quant à elle, au changement social. Elle
désigne le processus de déliquescence des allégeances
traditionnelles et des transformations qui en dérivent : Karl
DEUTSCH, notamment suggère qu'en s'émancipant de son groupe
communautaire d'appartenance, l'individu tend à s'intégrer
à un public mobilisé dont la constitution renouvelle
profondément la configuration des sociétés et des
systèmes politiques qui en sont affectés. En ce sens, la
mobilisation est autant un processus de changement qu'un état qui se
mesure à l'aide d'indicateurs (urbanisation, alphabétisation,
essor des médias, développement d'un marché, essor des
communications etc.) (Guy HERMET, Bertrand BADIE, Pierre BIRN BAUM, Philippe
BRAUD, 1994 : 172)
CHAPITRE
2ème : METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
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