Le projet de loi sur les partis politiques au Maroc( Télécharger le fichier original )par Hassan Bentaleb Université Montpellier 1 - Master recherche en science politique 2005 |
D- Le nouveau projet et la question financière :Face à cette situation critique du financement des partis politiques où les frontières entre le licite et l'illicite ne sont pas bien définies, les promoteurs de ce projet de loi sur les partis politiques pensent trouver le remède, en élargissant la participation de l'Etat au-delà des subventions aux campagnes électorales, et en augmentant le contrôle sur la comptabilité des partis. Portant une question demeure : Est-ce qu'une loi peut remédier à tous les maux de financement des partis politiques ? La réponse est évidemment non, puisque les expériences montrent bien que la problématique du financement existe toujours. C'est ce qu'on va voir à travers les légalisations des pays démocratiques dans ce domaine1(*)0.
1- L'exemple des législations des pays démocratiques :
Si l'expérience des Etats dans le domaine du financement des partis politiques est multiple, l'objectif reste le même : garantir l'équilibre entre le financement public et privé, promouvoir l'équité entre les partis politiques, endiguer la corruption, encourager la participation des citoyens dans le processus politique.
A- Belgique : Le législateur belge a imposé aux partis politiques certaines conditions, afin de bénéficier de financement : - Etre représenté dans les deux chambres. - Etre reconnu en tant que parti politique : présenter des candidats aux mandats de députés et sénateurs dans toutes les circonscriptions électorales d'une communauté et d'une région. - Le parti doit inclure dans ses statuts, son programme et dans son action la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. Ce financement est composé d'une partie forfaitaire : 5 millions de FB, et une partie variable : 50 FB par chaque vote validé, qu'il soit de liste ou nominatif aux élections législatives. Pour le financement privé, le législateur a limité les contributions des personnes physiques à 20 000 FB ou sa contre valeur à un parti politique, une liste ou un candidat. Et 80 000 FB ou sa contre valeur à l'ensemble des partis politiques, des listes ou des candidats. La contribution des personnes morales ou des associations est considérée comme illégale. Le législateur a obligé les partis politiques à enregistrer auprès de la Commission de Contrôle toute donation de 5000 FB et plus. Cet enregistrement est confidentiel, sauf sur demande de la Commission de Contrôle. Pour les dépenses électorales, le législateur a limité les dépenses maximales d'un parti politique à 45 millions FB, et les allocations. Et les dépenses des candidats à 500 000 FB majorés de 2 FB par électeur inscrit en ce qui concerne les candidats sortants + 1, et 200 000 FB pour les autres candidats. Ces dépenses électorales sont contrôlées par la Commission de Contrôle, composée majoritairement de la Chambre des Représentants et du Sénat, et est présidée par les présidents. Dans le cas d'un rapport hors délai, la Commission de Contrôle, peut pénaliser le parti concerné par une suppression de donation de 1 à 4 mois. En cas d'acceptation de dons illicites, c'est la réduction de la donation jusqu'à concurrence du double du montant pendant x mois, et une amende de 26 à 100 000 FB, voir même 200 000 FB1(*)1. B - Allemagne : En Allemagne, il y a un financement annuel des partis politiques : 1 DM par vote, et 50 DM pour chaque DM reçu de source privée. Mais il y a un certain seuil, le parti doit obtenir 5% des votes lors de la plus récente élection nationale ou européenne et doit obtenir 10% des votes dans la circonscription électorale concernée. Le législateur allemand a limité le financement public dans la limite globale de 230 millions DM. Pour le financement privé, il n'y a aucun limite aux contributions, mais sont considérées comme illégales les contributions en provenance de : fondations politiques et groupes parlementaires, les ONG, les entreprises dont plus de 50% des actions appartiennent à des étrangers, les donations d'un étranger de plus de 1000 DM, les donations faites dans le but d'obtenir un avantage économique ou politique. Et pour plus de transparence, le législateur a exigé de rapporter les donations de plus de 6000 DM, et un rapport annuel du président du Parlement sur les finances de chaque parti politique. Pour les dépenses électorales, il y a une liste très précise des dépenses autorisées des partis politiques, par contre, il n'y a pas de limite de dépenses mais limitation facto à cause des revenus. Ces dépenses électorales sont sous le contrôle du président du Parlement, qui peut dans le cas des rapports et des auditions hors délai, ne pas verser ou suspendre en tout ou en partie les subventions annuelles au parti concerné. En cas de fonds obtenus illégalement, la réduction du double de la somme de la subvention1(*)2. C - Canada : Il n'y a pas de financement public en dehors des campagnes électorales. Pour que les candidats bénéficient des fonds de l'Etat, ils doivent être légalement élus candidats officiels, avoir dépensé au moins 15% de la limite autorisée, avoir 15% du vote exprimé. L'Etat alloue 50% du maximum autorisé ou des dépenses réellement effectuées. Pour les partis politiques, il faut remplir les conditions suivantes : - Avoir 50 candidats officiels lors de la dernière élection générale. - Avoir dépensé au moins 10% de la limite maximum des dépenses. L'Etat alloue 22,5% du total des dépenses électorales telles que rapportées. Quant au financement privé, il n'y a aucune limite aux contributions, seules les contributions étrangères et anonymes sont considérées comme des contributions illégales. Les donations de plus de 100$ doivent être rapportées. Pour les dépenses électorales, la loi canadienne les définit comme : toute somme d'argent, dettes et obligations contractées, valeurs commerciales de tout bien et service rendu (sauf le travail volontaire). Et il a limité les dépenses électorales, premièrement par candidat, en fonction des votants inscrits sur la liste électorale : - Premier 15000, c'est 1,53$ par votant. - Entre 15000 et 25000, c'est 79$ par votant. - Au-dessus de 25000, c'est 40$ par votant. Deuxièmement, par parti, c'est en fonction du nombre de votants sur les listes électorales des circonscriptions où ils ont des candidats : 54$ par votant. Ces dépenses électorales sont contrôlées par le commissaire des élections nommé par le Président National des Elections, lequel est nommé par le Parlement. En cas d'infraction, la loi impose des amendes, jusqu'à 1000$, ou emprisonnement jusqu'à un an. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les pays ayant établi un financement public n'échappent pas aux affaires. * 10 - Table ronde organise par l'UC sous le thème « Etude comparative des lois relatives aux partis politiques » à Casablanca, le 29 juin 2004, avec la collaboration de l'Institut National Démocratique NDI.
* 11 - Ibid. * 12 - Ibid. |
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