II.1.1. Schéma
logique
Il s'agit de la mise en place des structures de
l'expérience à partir desquelles nous auront les composantes
universelles de la conscience et de son rapport à l'objet. Le sens que
Hegel donne de la section conscience dans son ensemble est de nous
emmener au terme du mouvement régressif, vers ce qui constitue le
véritable point de départ de la philosophie. C'est en fait la
relation humaine exprimée dans son principe. Nous sommes à cet
effet poussé loin de l'évidence première de laquelle nous
nous croyons inexistants dans notre relation aux choses. Ainsi se
présente à nous le mouvement structurel qui est celui de la
conscience de soi dans son rapport à son objet (P.-J.
Labarrière, 1976 : 152-153).
Il ressort de ce principe qu' en venant `hors de soi',
la conscience de soi se perd elle-même, s'apercevant comme autre, en
même temps qu'elle perd aussi l'autre, à la place duquel elle
s'aperçoit elle-même (t.1, p.156). Ceci implique un double
mouvement négatif et positif. Lorsqu'il est négatif, la
conscience sursume l'autre pour se poser elle-même dans sa certitude
essentielle objectivée, et elle se sursume elle-même dans la
mesure où cet autre n'est autre qu'elle (t.1, p.157). Et lorsqu'il
est positif, elle supprime son autre et se place à nouveau comme
égale à elle-même. Elle se retire ainsi, si l'on peut le
dire, de l'autre. Elle se laisse exister dans son autonomie retrouvée
(t.1, p.156).
Voilà comment nous pouvons styliser le mouvement
structurel de la conscience dans son rapport à son objet. Et c'est
à ce niveau que le schéma logique atteint toute sa
complexité. En effet, comme le dit l'auteur :
« La première conscience de soi n'a pas
l'objet devant soi, comme cet objet est au début et seulement pour le
désir ; maintenant, l'objet est un objet indépendant et
étant pour soi ; la conscience de soi ne peut rien
d'elle-même sur lui, s'il ne fait pas en soi-même ce qu'elle fait
en lui » (Ibidem.).
L'opération de la conscience à ce niveau
(caractérisée par un double aspect de négativité et
de positivité) est «tout aussi bien son faire que le faire de
l'autre ; car l'autre (conscience de soi) est aussi bien autonome,
enfermée dans soi, et il n'y a rien dans elle qui ne soit par
elle-même » (Ibid). Nous arrivons de ce fait
à un double mouvement des deux consciences de soi. Chacune voit l'autre
faire la même chose qu'elle. De plus chacune fait elle-même ce
qu'elle exige de l'autre. Et les mots de Hegel arrivent à
point pour expliciter cela en affirmant :
« L'opération est donc à double
sens, non pas seulement en tant qu'elle est aussi bien une opération sur
soi que sur l'autre, mais aussi en tant qu'elle est, dans son
indivisibilité, aussi bien l'opération de l'une des consciences
de soi que de l'autre » (t.1, p.157).
L'opération de ces deux consciences de soi est donc une
seule et même opération indivisible. Et dans celle-ci, chacune est
à soi par la médiation de l'autre.
En vue de l'effectivité de la reconnaissance, cette
opération revêt d'une importance capitale. Telle est donc pour
Hegel le mouvement de la reconnaissance. C'est une relation type qui
doit permettre la compréhension de la figure qui traite de la
Domination et de la Servitude. Ainsi la dialectique de
la reconnaissance qui en découle implique deux mouvements : la
lutte pour la vie et pour la mort, symbolisé par le paradigme du rapport
entre le maître et l'esclave. Ces relations traduisent la condition
typique déterminante du mode d'être de l'homme dans le monde.
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