I-4 BIOLOGIE DES SALMONELLES
I-4-1) DEFINITION DES
SALMONELLES
Les salmonelles appartiennent à la famille des
Enterobacteriaceae. En microscopie optique, elles apparaissent comme
des bâtonnets a Gram négatif de 0,3 um à 1um de large et
longs de 1 à 6 um, mobiles grâce à une ciliature
péritriche (à l'exception du sérovar Gallinarum-Pullorum).
Les salmonelles sont des bactéries mésophiles se
développant à des températures comprises entre 5,2°C
et 47°C et de manière optimale entre 35 et 37°C, à des
pH compris entre 4,5 et 9, avec une activité en eau (Aw)
supérieur à 0,93. La Salmonella est une bactérie
naturellement présente dans l'intestin des animaux, en particulier chez
les volailles et les porcs. Elle vit également dans l'environnement. La
salmonelle peut survivre un an ou plus dans les aliments à faible
activité d'eau (ICMSF., 1996). Les personnes qui consomment des
aliments contaminés par Salmonella sont susceptibles de
contracter la salmonellose.
I-4-2) POUVOIR PATHOGENE DES
SALMONELLES
Le pouvoir pathogène est différent pour les
salmonelles typhiques, paratyphiques et pour les salmonelles non
typhiques.
I-4-2-1
Salmonella typhique et paratyphique
Les Salmonella responsables des fièvres
typhoïdes ayant l'homme pour seul réservoir, la contamination se
fait par ingestion d'eau ou d'aliments ayant subi une contamination
fécale d'origine humaine. Comme toutes les maladies à
transmission oro-fécale, ces fièvres surviennent le plus souvent
dans des zones où l'hygiène est précaire, et frappent
principalement les pays en développement en Asie, en Afrique ou en
Amérique Latine. Les données mondiales les plus récentes
font état de 17 millions de cas annuels de fièvre typhoïde,
et de 600 000 morts (Hu and Kopecko, 2003)
Les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes sont
causées par des Salmonella strictement adaptées à
l'homme, Salmonella Typhi, Salmonella Paratyphi A et
certaines souches de Salmonella Paratyphi B. Après une
période d'incubation de une à deux semaines, survient une
fièvre continue accompagnée de maux de
tête, d'anorexie, d'abattement
("tuphos" torpeur en grec), de douleurs abdominales avec
diarrhée ou constipation. Dans les formes bénignes, l'état
reste stationnaire pendant une quinzaine de jours puis la convalescence dure
plusieurs semaines. Dans les formes plus graves où des complications
peuvent survenir au niveau de l'intestin, du coeur ou de la vésicule, la
fièvre typhoïde peut être fatale en l'absence de traitement.
Le taux de mortalité est de 10% comparé à moins de 1% pour
les autres formes de salmonellose. Une antibiothérapie appropriée
abaisse le risque de mortalité à moins de 1%, mais on isole de
plus en plus de souches résistantes aux antibiotiques : au Vietnam, 75%
des souches isolées sont résistantes aux antibiotiques
classiquement utilisés, contre moins de 1% en France. Il existe de plus
un portage chronique de Salmonella Typhi : après
guérison d'une fièvre typhoïde, 2 à 5% des individus
continuent à excréter ces bactéries. Les symptômes
des fièvres paratyphoïdes sont similaires, mais le plus souvent
moins sévères, le taux de mortalité de cette salmonellose
étant par ailleurs bien plus bas que celui de la fièvre
typhoïde.
I-4-2-1
Salmonella non typhique
La salmonellose est une maladie grave qui peut même
parfois être mortelle. La salmonellose est la zoonose la plus
fréquente dans les pays européens. L'infection survient
habituellement après l'ingestion de produits d'origine animale. Les
salmonelles peuvent être présentes dans toute une série de
denrées alimentaires telles que les oeufs crus, la volaille, le porc, le
boeuf, d'autres produits à base de viande et les produits laitiers.
Les gastro-entérites sont provoquées par des
Salmonella ubiquistes présentes chez l'homme et les animaux. La
durée d'incubation est généralement de 1 à 2 jours
et dépend de la dose ingérée, de la santé de
l'hôte et des caractéristiques de la souche de
Salmonella. Les salmonelloses provoquent une forte
fièvre accompagnée de diarrhées,
vomissements et douleurs abdominales. Chez des adultes de condition physique
normale, une gastro-entérite disparaît sans traitement
après 3 à 5 jours en moyenne. En revanche, une
antibiothérapie doit être prescrite chez les personnes
âgées, les nourrissons, ou les personnes
immunodéprimées chez lesquelles l'infection peut être plus
sévère, voire mortelle.
Les principaux symptômes de la salmonellose (infections
non typhoïdiques) sont la diarrhée non sanglante, les douleurs
abdominales, la fièvre, les nausées et des vomissements qui
surviennent généralement 12-36 heures après l'ingestion.
Toutefois, les symptômes peuvent varier considérablement depuis
une maladie grave rappelant la typhoïde jusqu'à l'infection
asymptomatique. La maladie peut également entraîner des
complications plus sérieuses. Chez les sujets en bonne santé, la
dose infective varie selon les sérovars, les aliments incriminés
et la sensibilité des individus. Alors que certains (Varnam and Evans,
1991) ont pu montrer que 20 cellules pouvaient suffire à constituer une
dose infective minimale, d'autres études ont régulièrement
fait état d'un ordre de grandeur supérieur à
106 cellules(Korsak et al., 2004).
I-4-3 Caractères biochimiques des
Salmonella
Les Salmonella possèdent les
caractères généraux de la famille des Enterobacteriaceae
et des caractères différentiels intrinsèques.
I-4-3-1 Caractères de
famille
Huit principaux caractères déterminent la
famille des Enterobacteriaceae, ce sont :
1. bacilles à coloration de Gram négatif,
2. souvent mobiles grâce à leur ciliature
péritriche (rarement immobiles), non sporulés
3. bacilles qui cultivent sur les milieux ordinaires
4. bacilles aéro-anaérobies facultatifs
5. bacilles qui fermentent le glucose avec ou sans production
de gaz
6. bacilles qui réduisent les nitrates en nitrites
7. bacilles qui ne possèdent pas de cytochrome oxydase
(Hanes, 2003; ICMSF., 1996).
8. bacilles qui possèdent une catalase.
Certaines souches n'obéissent pas à tous ces
caractères, c'est le cas de :
Erwinia qui ne réduit pas les nitrates, de
Shigella dysenteriae sérotype 1 (SD1) qui ne possède pas
de catalase, de Salmonella galinarum-pullorum qui est immobile.
I-4-3-2 Caractères différentiels du
genre Salmonella
Les principaux caractères biochimiques permettant
l'identification
du genre Salmonella (Humbert et al., 1998)
sont :
Ø L'absence d'une uréase active, de tryptophane
ou de phénylalanine désaminase,
Ø l'absence de production d'indole et d'acétoine
(test de Voges-Proskauer négatif),
Ø La production d'hydrogène sulfureux à
partir du thiosulfate (présence d'une thiosulfate réductase).
Ø La décarboxylation fréquente de la
lysine et de l'ornithine,
Ø La pousse fréquente sur le milieu au citrate
de Simmons
I-4-4 Antigènes des
Salmonella
Les Salmonella peuvent posséder trois types
d'antigènes présentant un intérêt diagnostic (Dumas,
1958).
I-4-4-1 Antigène somatique O (Ag O)
L'antigène O est un antigène de la paroi. Les
antigènes O sont portés par les chaînes spécifiques
du lipopolysaccharide (LPS). L'antigène O possède des
propriétés immunisantes, c'est un complexe contenant une
protéine, un polysaccharide et un composé phospholipidique. On
distingue 67 facteurs O selon la nature des sucres entrant dans la
constitution des unités oligosaccharidiques du polysaccharide
(Humbert et al., 1998).
Les antigènes O sont formés d'une fraction
lipidique appelée lipide A qui est responsable des effets toxiques, du
core ou partie basale et du polysaccharide support de la
spécificité (Gledel and Corbion, 1991)
Les antigènes sont classés en facteurs O majeurs
et en facteurs O accessoires. Les facteurs majeurs sont liés à la
présence de certains sucres (abéquose pour O : 4,
tyvélose pour O : 9) (Humbert et al., 1998).
L'antigène somatique est stable ; il résiste
à l'alcool et au phénol pendant deux heures et demi à la
température de 100°C (Dumas, 1958).
I-4-4-2 Antigène flagellaire (Ag
H)
C'est un polymère de flagelline (protéine de
structure des flagelles). Cet antigène est thermolabile, détruit
par la chaleur à 100° C, par l'action de l'alcool et par les
ferments protéolytiques. Il résiste au formol et perd son
agglutinabilité par les anticorps en présence d'alcool et d'acide
phénique. Son développement optimum s'obtient sur les milieux
liquides mous après un séjour de 8 heures à 37 °C
(Dumas, 1958). La grande majorité des sérovars possèdent
deux systèmes génétiques et peut exprimer alternativement
deux spécificités différentes pour leur antigène
flagellaire. On dit que les antigènes flagellaires de
Salmonella sont diphasiques (Humbert et al., 1998).
I-4-4-3 L'antigène de virulence (Ag
Vi)
C'est un antigène de l'enveloppe, il a
été identifié chez trois types de sérovars :
Typhi, Paratyphi C et Dublin mais toutes les souches de ces sérovars ne
possèdent pas forcement cet antigène (Humbert et al.,
1998).
Cet antigène est considéré comme un
antigène de surface (Dumas, 1958), il est distinct de
l'antigène somatique et de l'antigène flagellaire.
L'antigène Vi rend les germes inagglutinables par les anticorps O quand
il est abondant. Il ne se développe pas si les cultures sont
effectuées au dessous de 25°C et au dessus de 40°C. Un
chauffage à 100°C le détruit et les germes deviennent
agglutinables par les anticorps O. Il est de nature
glucidolipidopolypeptidique.
A côté de ces antigènes il existe dans
le genre Salmonella, des structures protéiques de
surface : les pilis qui se différencient en pilis communs
(intervenant dans l'hémagglutination mannose dépendante) et en
pilis sexuels (intervenant dans la conjugaison bactérienne) et dont la
présence est codée par des plasmides (Gledel and Corbion, 1991).
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