· Bilans et projets futurs des adolescents
Nous nous sommes intéressés aux envies et
projets des adolescents adoptés, afin de voir quels étaient leurs
objectifs futurs.
Bilan de l'adoption
Beaucoup des adolescent m'ont confié s'estimer chanceux
d'avoir été adoptés. Ils ont conscience qu'ils n'auraient
pas eu la même vie s'ils étaient restés dans leur pays avec
leur famille adoptive. « Je pense que j'ai beaucoup plus de
chances de réussir ma vie ici, qu'en étant au Guatemala. Je veux
continuer à faire ce que je fais, à aider les gens, à
travailler dans le social. » (Karine, page 7)
Cependant, être adopter est pour eux synonyme de
beaucoup d'interrogations sur ces origines, sur son identité.
« Je me dis qu'il faut être positif et se donner les
moyens d'atteindre ses objectifs, c'est sûr que des fois tu doute, mais
il ne faut pas s'arrêter à ça sinon tu fais une
dépression (rires) (page 11). Ariane
dévoile ici les moments de doutes qu'elle a pu avoir tout au long de son
adolescence. Mais elle réussi à s'en sortir en allant de l'avant,
en combattant les préjugés sur sa couleur de peau, sur ses
origines haïtiennes. Aussi, aller visiter son pays lui a permis de mettre
des images sur ce pays qui est une partie d'elle-même. Elle a pu
constater la pauvreté qui existe, et à laquelle elle a
échappé.
Quand on l'interroge sur sa vie de famille plus tard, et le
fait de vouloir des enfants, elle répond : « J'ai
envie d'avoir des enfants, mais en adoption...Enfin je suis un peu critique
face à l'adoption, nan c'est bien en soi, mais je me pose des questions,
j'ai des réserves. » (Ariane, page 11). Les
réserves sont en fait des points d'interrogations face au pays
d'origine. Est-ce véritablement aider le pays que de lui
retirer ses enfants orphelins, qui sont l'avenir, même pour un
pays en crise comme Haïti. Certains adolescents adoptés aimeraient
en effet que l'on prenne plus en compte l'avis du pays d'origine, et son
avenir. Il faudrait plus d'aides de la part des pays d'accueil, afin d'aider le
pays à se sortir de sa pauvreté. Par exemple, Ariane
suggérait que les sommes versées par les parents adoptifs aillent
directement pour des projets de développement du pays.
Christine elle au contraire est tout à fait d'accord
pour adoption plus tard, pourvu que son copain le soit aussi. Cela ne lui pose
aucun problème. « C'est sûr que j'aimerais bien
avoir des enfants, et pourquoi pas adopter, mais il faut aussi que le chum soit
ok pour adopter » (Christine, page 9)
Projets professionnels et bénévolat
On a pu remarquer que les adolescents ont une certaine
attirance pour les métiers dans le secteur de la santé ou du
travail social. Par exemple, Laurence, « J'aimerais devenir
infirmière, je trouve que c'est un beau métier que d'aider les
gens, donc là j'apprend la technique du
métier » (Laurence, page 3)
Marie elle, se destine à une carrière
plutôt sociale, axée sur le travail en post-adoption, qu'elle a
déjà eu l'occasion de pratiquer en aidant sa mère dans son
travail associatif. « C'est vrai que plus tard, pourquoi pas
travailler dans un groupe d'adolescent avec des adoptés, j'aimerais
ça. (Page 6). Karine témoigne aussi ce souhait de rester
et d'évoluer dans le domaine de l'adoption et de la post-adoption.
« Moi j'aimerais vraiment travailler là-dedans,
continuer à témoigner. Je pense devenir assistante sociale. Il
n'y a pas longtemps, on a été avec ma mère à une
conférence au Texas, sur l'importance des liens avec la famille
biologique dans une adoption (page 7)
Gabriel lui envisage de partie en mission humanitaire avec sa
mère biologique, restée en Belgique. Ils se voient tous les ans.
Partir avec sa mère (qui est en fait une religieuse) va lui permettre de
développer la relation qu'il a déjà avec elle.
« Cet été avec ma mère biologique, on va
au Cameroun, on va faire de l'humanitaire, travailler dans un orphelinat, ils
sont très pauvres. (Page 10) Encore une fois, on note le
souhait d'aller aider les gens de la part de cet adolescent de quatorze ans. Au
niveau de son projet professionnel, il ajoute :
« Si j'avais les notes qu'il faut, j'aimerais quand
même être médecin en Afrique, médecin ou
vétérinaire. (Page 10)
Famille future de l'adolescent adopté
L'entretien comportait une question concernant les souhaits de
la future famille de l'adolescent. Emma elle, nous confiait :
« Je pense que je me marierai plutôt avec quelqu'un de
Polynésie oui, je préférerais je
pense ». (Emma, page 4). Adoptée à l'âge
de cinq ans, elle a eu besoin de retrouver sa famille biologique durant un an,
pour avoir les réponses à ses questions. Elle souhaitera donc se
marier avec un homme de son pays d'origine plus tard.
Concernant sa famille, Gabriel a émis certaines peurs,
au niveau de son père biologique. « Je me demande
parfois si j'ai des enfants plus tard, qu'ils deviennent comme mon père
(qui a violé sa mère), ça oui
ça me fait peur. (Page 10). Le père biologique de
Gabriel était un soldat cambodgien qui fut emprisonné dans un
camp durant la guerre. Cet homme a subit plusieurs épreuves, a perdu
toute sa famille durant le conflit. Cet homme a violé la mère
biologique de Gabriel. Son témoignage était difficile à
écouter. C'est pourquoi Gabriel a peur d'avoir dans ses gênes, un
trait de caractère commun avec son père biologique, concernant sa
violence. C'est une inquiétude récurrente chez les adolescents
adoptés qui n'ont pas d'informations sur leur famille. Ils se posent des
questions au niveau biologique, physiologique. « Plus tard,
j'aimerais me marier avec une latino, et aussi adopter. De toute façon,
tant que tu as des enfants et puis que tu les aimes, peu importe comment tu les
as eu ». (Gabriel, page 10)
Marie-Pierre elle voit plutôt sa future famille en tant
que femme indépendant et célibataire. Ayant un problème
d'attachement avec ses parents adoptifs, son souci d'aimer se diffuse jusque
dans ses relations personnelles et affectives. « Je ne suis
pas une grande partisane de l'amour alors (rires), j'ai de la misère
à croire au mariage et à l'amour. Je suis un peu aigrie à
ce niveau-là. Je n'ai pas besoin de mari, j'adopterais sûrement
des enfants, je serais une femme indépendante. J'ai même
déjà refusé des fiançailles ».
(Marie-Pierre, page 14)
Emma se pose quand à elle des questions sur son lieu
d'habitat plus tard, le Québec ou la Polynésie ? Elle y
réfléchit encore... « Je ne sais pas où
j'aimerais vivre plus tard, parce que je me sens bien là-bas, et je me
sens bien ici. En fait les deux font partie de moi. J'ai une moitié des
deux en moi. Mais quand même je suis plus polynésienne que
québécoise ». (Emma, page 2)
Stéphane lui voit sa famille de manière
originale. « Ma famille, je la vois assez originale, par un
père, une mère et un enfant. Mais des parents, et puis tout un
groupe d'enfants, de tous horizons différents, de toutes origines (...),
de toute façon, je sous ouvert ». (Michael, page 11)
Ici encore, on peut voir que l'adoption créée une ouverture
d'esprit vis-à-vis des typologies familiales, vis-à-vis des
différentes possibilités de fonder une famille.
Nous laisserons à Stéphane le soin de terminer
cette partie. Il a dix huit ans et a bien résumé son adoption,
malgré les difficultés de recherche d'identité qu'il a pu
rencontrer. « Ben moi mon avenir est bien parti là, il
y a eu une bonne base. L'arbre est en train de pousser et il y a les feuilles
qui sortent qui s'épanouissent. Tout ceci grâce à mes
parents, grâce à mes proches, à mes amis (page
11). J'aimerais bien faire quelque chose dans le domaine de l'adoption
(...) rendre des parents heureux, voir le plus beau jour de leur vie, et les
avoir aidé pour ça (page 11).
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