Texte - sens - traduction
Le support de la pièce est le texte. Le fait que Daniel
Mesguich et son collaborateur artistique Xavier Maurel aient eux-mêmes
traduit La Tempête les a menés à une analyse
profonde du texte, aussi bien sémiotique que syntaxique, ce qui leur
permet d'expliciter clairement le texte aux acteurs pendant les lectures, et
à travers eux au public.
Leur traduction fait preuve d'une grande liberté
créative. Ils ont essayé de faire en sorte qu'elle soit parfois
littérale et parfois plus en accord avec le son du texte, sa
mélodie poétique. Il y a tout un travail stylistique :
chiasme, jeux de mots, allusion au Bateau Ivre, allitérations
et assonances, même un rajout d'un texte d'Hélène Cixous
qui rehausse la poésie du texte. Tout au long des
répétitions le texte a d'ailleurs été
modifié, adapté selon la réalité du jeu, et le fait
qu'il soit enregistré sur disquette informatique était
très pratique pour ces changements.
Les chansons de la pièce ont eu leurs mélodies
créées par une chanteuse qui ensuite les a fait
répéter aux acteurs. Le masque qui est placé entre le
troisième et le quatrième acte est une création originale.
Daniel Mesguich a voulu qu'il soit le paroxysme du "théâtre dans
le théâtre": c'est une scène de Richard III
ponctuée de répliques extraites de plusieurs pièces de
Shakespeare : Roméo et Juliette, Hamlet, etc. On
retrouve là l'idée que La Tempête serait une
conclusion/résumé de son oeuvre.
Le concert baroque du début et la mise en scène
de l'arrière-plan narratif-la trahison du frère, l'ordre
particulier choisi pour la suite- commencer par la scène qui suit la
tempête pour ensuite jouer cette dernière dans un temps
rétroactif-, ainsi que le fait de matérialiser des doubles des
personnages par des poupées ; tout cela souligne la liberté
créative dont Daniel Mesguich a voulu faire preuve en mettant en
scène La Tempête. Les coupures pratiquées dans le
texte sont d'un même ordre mais répondent aussi à
l'impératif de dynamisme requis pour éviter la lassitude qu'une
pièce trop longue pourrait provoquer.
Les acteurs
Ils ont un travail important du langage- pendant les
lectures- : la diction, la prononciation, la clarté de la voix, le
rythme des répliques. Par exemple pour Daniel Mesguich il faut respecter
les alinéas du texte. Dans La Tempête certains acteurs
doivent chanter et ont pour cela travaillé avec une professionnelle.
Ils ont d'autre part un travail du corps et ont une formation
d'expression corporelle. Les déplacements, les gestes,même sans
parole peuvent signifier quelque chose, ou doivent simplement être
harmonieux, esthétiques. Encore une fois on se rapproche du domaine de
la danse mais de façon moins travaillée, moins
élaborée. Les acteurs de complément présents dans
la pièce n'avait d'ailleurs aucun texte et n'avait qu'à
travailler cette partie physique, certains d'entre eux étant acrobates
de métier.
L'acteur a aussi un travail psychologique et émotionnel
à effectuer pour définir son personnage et l'incarner face au
spectateur. Parfois des pseudo-costumes aident à se mettre dans la peau,
la posture du personnage. Daniel Mesguich a eu lui-même une formation en
art dramatique, donc il est très bien placé pour comprendre et
diriger les acteurs dans leur travail. L'art dramatique était surtout
travaillé en salle Escande, et à chaque fois les acteurs
faisaient preuve d'imagination et d'initiative, en suggérant des
idées au metteur en scène, ouvert à la concertation, leur
laissant aussi un droit de modification de leur texte.
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