Section II : La gestion communautaire de la faune et de la
flore
Líexploitation des forÍts du bassin du Congo a
commencÈ trËs tÙt, autour des annÈes 1960.
Il s'agissait alors fondamentalement de l'exploitation
industrielle. Avec le temps, la faveur aussi de
la prise de conscience de l'importance des
forÍts dans la survie de la planËte, des voix ont
commencÈ se lever pour dÈnoncer l'exploitation
abusive des ressources forestiËres par les industriels. cette
Èpoque s'est amorcÈ le processus d'intÈgration des
populations locales dans la gestion des ressources naturelles de la
rÈgion, particuliËrement de la forÍt et de son contenu.
Dans
ce sens, un vif intÈrÍt s'est vite portÈ
sur la foresterie communautaire (I) et corrÈlativement sur la gestion
communautaire de la faune (II).
I - La foresterie communautaire
30 Document de StratÈgie de RÈduction
de la PauvretÈ, Cameroun 2OO5.
31 Article 36, alinÈa 3 code forestier de
la RDC.
32 Article 37 code forestier de RDC.
14
Il s'agit de rendre compte des possibilitÈs que la
loi des deux pays laisse aux populations riveraines des forÍts de
s'investir dans l'exploitation des ressources de cette derniËre.
Les forÍts communautaires doivent síÈtendre au maximum
sur 5 000 hectares. Leur gestion est ouverte la communautÈ
aprËs la validation díun plan de gestion par
líadministration des forÍts. Un constat liminaire s'impose
: le lÈgislateur camerounais s'est montrÈ plus originale
dans l'implication des populations que son homologue congolais. Tandis
que celui-ci prÈvoit l'exploitation des forÍts communales et
des forÍts communautaires, celui l n'a considÈrÈ que
trËs timidement l'exploitation des forÍts par les
communautÈs. la vÈritÈ, si la foresterie communautaire
s'avËre Ítre un prÈcieux instrument d'Èpanouissement
des communautÈs (A), il n'en demeure pas moins qu'elle se heurte
de multiples obstacles qui relativisent sa visÈe
participative (B).
A ñ Un instrument d'Èpanouissement des
communautÈs forestiËres
Avec la loi de 199433, le lÈgislateur
camerounais franchi un pas dÈterminant dans l'ouverture
de la gestion des forÍts aux populations. Cette ouverture
est d'autant plus significative qu'elle revÍt une originalitÈ
(1) dont nous ne manquerons pas de faire mention. Par
contre, le mÍme
enthousiasme n'est pas encore manifeste en RDC. Ceci se ressent,
et marque la diffÈrence, sur les modalitÈs d'exploitation des
espaces forestiers communautaires (2) dans les deux pays.
1- L'originalitÈ de la foresterie
communautaire
Le lÈgislateur congolais ne parle pas
expressÈment de foresterie communautaire. Il se contente de faire
mention de ' l'exploitation des forÍts des communautÈs locales
34. Cette allusion Èvasive la foresterie
communautaire est symptomatique des rÈticences que le
gouvernement congolais a vis--vis de la cogestion des
forÍts avec les communautÈs locales. Par contre, au
Cameroun, lato sensu, la foresterie communautaire regroupe
deux concepts : la forÍt communautaire d'une part et la
forÍt communale de l'autre. ces concepts il convient d'ajouter les
divers permis de coupe de bois.
La forÍt communautaire ne peut Ítre
attribuÈe que dans le domaine forestier non permanent,
alors que la forÍt communale se trouve
confinÈe dans le domaine forestier permanent de líEtat.
LíoriginalitÈ de la foresterie communautaire est qu'elle
apprÈhende la communautÈ dans ses diverses manifestations.
Tandis que le concept de forÍt communautaire repose sur une
assise sociologique. C'est--dire sur sa vocation
impliquer les communautÈs entendues comme l'ensemble des
personnes physiques qui la compose. L'autre concept, c'est--dire,
celui de forÍt communale repose sur la manifestation
Èminemment politique et juridique de la sociÈtÈ
rurale. Puisquíil repose sur la considÈration de la mairie qui
est une collectivitÈ territoriale dÈcentralisÈe. Dans ce
sens, une fois classÈe comme forÍt communale, la commune en
question obtient un titre foncier sur líespace forestier ainsi
classÈ. Par consÈquent, la mise en oeuvre de la
foresterie communautaire permet une triple intÈgration des
communautÈs riveraines des forÍts.
D'abord une intÈgration politique, puisqu'elle
sert de forum ocents les populations viennent Èchanger leurs
idÈes sur la maniËre dont elles entrevoient leur avenir commun et
l'Èvolution de leur terroir dans le temps. Puis, elle facilite
une intÈgration Èconomique. cet Ègard, elle permet
de dÈgager des moyens financiers susceptibles de contribuer
l'Èpanouissement des dites communautÈs ;
travers l'augmentation du pouvoir d'achat des villageois. Enfin, elle
permet de rÈaliser une intÈgration environnementale, dans
ce sens que la foresterie communautaire met la communautÈ face
ses responsabilitÈs de protection de gestion durable de
la forÍt, comprise comme leur milieu de vie. Ainsi, en s'occupant de
prÈserver leur propre intÈrÍt, elles aboutissent
sur la sauvegarde d'un intÈrÍt commun toute
líhumanitÈ.
Les populations locales participent la mise en
úuvre de la ForÍt Communale de trois maniËres
successives : la rÈunion d'information sur les limites de la
FC en vue d'obtenir son
33 Loi n°94/01 du 20 janvier 1994 portant
rÈgime des forÍts, de la faune et de la pÍche.
34 Article 111 code forestier de RDC.
15
classement, la prise en compte des usages locaux dans le plan
d'amÈnagement et la crÈation d'un comitÈ consultatif
dans le cadre du transfert de pouvoir de l'...tat aux communautÈs
rurales. Ceci est aussi valable pour les forÍts communautaires (FCt).
Pour ce qui est singuliËrement des FCt,
l'annÈe 2001 consacre l'engagement de l'...tat
camerounais faire des populations riveraines des
forÍts le maillon principal de la gestion de celles-
ci. En effet, c'est la date laquelle est
instituÈ le droit de prÈemption en faveur des communautÈs
locales. DÈsormais, toute forÍt susceptible d'Ítre
ÈrigÈe en forÍt communautaire est attribuÈe
en prioritÈ la communautÈ riveraine la plus proche qui en
fait la demande35. Ici, l'idÈe novatrice de base est
l'attribution l'exploitation en prioritÈ aux
communautÈs riveraines. Lí'arrÍtÈ de 2001
essaie de rÈtablir un Èquilibre que la loi de 1994 n'avait pas
jugÈ bon d'instituer entre les exploitants industriels et les
communautÈs locales. C'est une avancÈe majeure dans le processus
d'implication
des populations locales dans la gestion des forÍts au
Cameroun. La procÈdure jusque l en vigueur, d'accession
l'exploitation forestiËre, ne laissait aucune chance aux
communautÈs rurales,
gÈnÈralement dÈmunies, face aux richissimes
exploitants forestiers.
2 ñ Les modalitÈs d'exploitation des
espaces forestiers communautaires
La foresterie communautaire se veut un instrument de gestion
durable des forÍts et de ses multiples ressources. Il suffit de revenir
sur le contexte de l'adoption de ces diffÈrents concepts pour s'en
convaincre. Il Ètait question de limiter, tout au moins de
contrÙler davantage l'expansion des exploitations industrielles, pas
soucieuses de l'environnement et de la durabilitÈ des
ressources. Líexplique Ètant que les industriels sont des
commerÁants qui cherchent díabord maximiser leurs profits.
Ce faisant, l'on estimait que les populations locales prendraient mieux soin
des forÍts, car celles-ci sont en mÍme temps leur milieu de
vie.
Fondamentalement, mÍme s'il n'y a pas de grandes
diffÈrences dans la gestion des espaces
forestiers communautaires au Cameroun et en RDC, il persiste
tout de mÍme quelques disparitÈs notables. Aussi, elles
procËdent toutes deux de la mÍme cacophonie. Au Cameroun,
l'exploitation des forÍts communales ainsi que des forÍts
communautaires doit se faire suivant le respect du Plan Simple de Gestion
(PSG) d°ment validÈ par l'administration des forÍts.
Elle peut se faire soit en rÈgie, soit par vente de coupe, ou
alors permis d'exploitation ou par autorisation personnelle de
coupe36. De la mÍme maniËre, le code forestier de
RDC prÈvoit que l'exploitation des forÍts des communautÈs
locales peut Ítre faite soit par elles-mÍmes, soit par
l'intermÈdiaire d'exploitants
privÈs artisanaux, ou en vertu d'un accord
Ècrit37.
De ce qui prÈcËde, on remarque qu'il y a
amalgame. On comme l'impression que les lÈgislateurs
camerounais et congolais raisonnent par l'absurde. En effet, comment peut-on
admettre
en mÍme temps que la foresterie communautaire vise une
gestion durable des forÍts en limitant le
rÙle des exploitants industriels, et permettre que les
espaces forestiers communautaires puissent Ítre gÈrÈs par
ces mÍmes industriels. MÍme si la loi congolaise semble plus
logique en n'admettant que
les exploitants privÈs artisanaux38, un
doute subsiste cependant sur la capacitÈ du gouverneur de
province s'assurer effectivement que ces derniers soient
des exploitants artisanaux. Ces insuffisances tÈmoignent
souhait des difficultÈs que rencontre la mise oeuvre de la
foresterie
communautaire dans le Bassin du Congo.
B ñ Un instrument exposÈ de
multiples blocages
La foresterie communautaire est une institution qui
cherche encore ses marques dans le Bassin du Congo. Dans la
rÈgion, les entraves socioculturelles (1) s'associent un
balbutiement juridique qui cherche lui aussi ses marques (2) dans les
dÈdales des intÈrÍts particuliers.
35 Article 1er arrÍtÈ n°
0518/MINEF/CAB fixant les modalitÈs d'attribution en prioritÈ aux
communautÈs villageoises riveraines de toute forÍt susceptible
d'Ítre ÈrigÈe en forÍt communautaire.
36 Article 95 alinÈa 1 dÈcret
n° 95/531/PM du 23 ao°t 1995 fixant les modalitÈs
d'application du rÈgime des forÍts.
37 Art 112, alinÈa 2
38 Article 112, alinÈa 3
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1 ñ Les entraves socioculturelles
La foresterie communautaire mobilise d'Ènormes
ressources financiËres. La gestion de ces ressources est
subordonnÈe une organisation minimale des communautÈs.
l'occasion, on assiste
la naissance de conflits fratricides. C'est la
quÍte du leadership villageois. Des pÙles se constituent
autour de quelques Èlites plus ou moins
fortunÈes qui essaient de s'approprier les processus qui
conduisent la gestion des espaces forestiers
destinÈes la communautÈ.
Dans le mÍme Èlan, les communautÈs
forestiËres du Cameroun et de la RDC, se fondant sur
la tradition, consacrent non seulement un mode de gouvernement
gÈrontocratique, mais aussi une
certaine forme de misogynie. De ce fait, les femmes et les
jeunes sont presque toujours relÈguÈs au second plan. Mieux
encore, le problËme se pose en des termes plus sÈrieux quand
il s'agit de la participation des populations marginales tels que les
' pygmÈes 39. L'essentiel des FCt est concentrÈ
dans des villages des Bantous - qui sont les ' dominants . C'est aussi le cas
pour les FC, d'ailleurs aucun village ëpygmÈeí ne
constitue une commune. Par ailleurs, ces populations sont
systÈmatiquement mises cotÈ quand il s'agit de
constituer les entitÈs juridiques chargÈes de conduire le
processus d'acquisition de la forÍt et plus tard de la gÈrer.
Cette marginalisation n'est pas
que le fait des populations Bantous, elle se confirme
par la maniËre dont l'Etat se comporte par exemple au Cameroun. En
effet, le plan de zonage ne tient pas compte de la position des villages
des ëpygmÈesí que l'on appelle du reste '
campement , pour signifier le peu de cas qu'on fait de
leurs conditions de vie. A cet Ègard, l'Ètude des
aspirations profondes des populations du Cameroun que l'...tat camerounais a
fait rÈaliser, et qui a aboutit sur le Document de StratÈgie de
RÈduction de
la PauvretÈ (DSRP) ne prend pas en compte les
aspirations des populations ëpygmÈesí du
Cameroun40. Cette mise l'Ècart des
populations tribales est assez contradictoire avec la
reconnaissance par tous de ce que les ëpygmÈesí sont
les premiers habitants de la forÍt. ces entraves
socioculturelles s'ajoutent des obstacles juridiques.
2 ñ Les blocages juridiques
Sur le terrain du droit, on peut recenser plusieurs entraves qui
restreignent la participation
la gestion des ressources travers la foresterie
communautaire. Au Cameroun, alors que depuis
2001 l'on semblait voguer sur un nuage, un arrÍtÈ
de mars 200541 est venu rompre la sÈrÈnitÈ. En
effet, cette disposition impose dÈsormais la rÈalisation
d'une Etude d'Impact Environnemental
comme prÈalable l'acquisition d'une
FCt42. On s'inscrit ainsi dans la logique contraire celle
que
les autoritÈs adoptaient jusque l ;
savoir encourager la gestion des forÍts par les populations
locales. Le vÈritable problËme quoique juridique
des implications plutÙt Èconomiques et
financiËres. En effet, l'acquisition d'une forÍt
communautaire ou d'une forÍt communale nÈcessite
dÈj beaucoup d'argent43. Argent que les
villageois n'ont pas toujours. La rÈalisation d'une Ètude
d'impact sur l'environnement co°te substantiellement
chËre44. En imposer une comme prÈalable
l'acquisition d'une FCt participe simplement de la volontÈ d'exclure les
populations de la gestion des ressources ligneuses. Ceci est d'autant plus
flagrant que cette mÍme obligation n'est pas supportÈe
par les industriels qui ont beaucoup plus de ressources
financiËres, et qui plus est, sont le plus susceptibles de causer
des dommages graves et irrÈversibles l'environnement.
Pour ce qui est de la RDC, le lÈgislateur se
comporte comme si la reconnaissance aux
communautÈs locales du droit d'exploiter
elles-mÍmes leurs forÍts est un moyen de tirer les marrons
du feu. En effet, consciente de l'inexpÈrience des
populations locales dans cette entreprise, la loi prÈvoit la
possibilitÈ pour ces communautÈs de recourir
l'assistance de l'administration.
39 BASSALANG Marie Madeleine, La gestion des
ÈcosystËmes (Ö) Op. Cit, lire la note de bas de page n°14
p.5
40 Belmond T : Indigenous and tribal people and
poverty reduction strategies in Cameroon
41 ArrÍtÈ n°0069/MINEP du 08
mars 2005 Fixant les diffÈrentes catÈgories d'opÈrations
dont la rÈalisation est soumise
une Ètude d'impact environnemental.
42 Article 3, alinÈa IV D de
l'arrÍtÈ n°0069.
43 Trois millions de FCFA part l.
44 Entre trois et sept millions de FCFA.
17
Seulement, cette mÍme loi fait vite de rappeler
que cette assistance doit Ítre
rÈmunÈrÈe45. On remarque ici une
disparitÈ avec la loi camerounaise qui prÈcise bien que
l'administration doit assister les communautÈs qui en manifestent
l'intÈrÍt dans la gestion de leurs ressources
forestiËres,
et que, par ailleurs, cette assistance doit Ítre
gratuite46.
A la vÈritÈ ces obstacles se
rÈpercutent aussi sur les autres mÈcanismes qui permettent
la participation des populations la gestion des ressources ligneuses et
d'autres produits forestiers non ligneux l'exception de la faune qui
connaÓt un rÈgime particulier.
II - La gestion communautaire de la faune
La faune est un ÈlÈment indispensable dans
le maintien de l'Èquilibre des ÈcosystËmes forestiers.
Les forÍts du bassin du Congo abritent une impressionnante
variÈtÈ d'espËces animales. Celles-ci sont menacÈes
en grande partie par le braconnage; de mÍme que par la destruction de
leur habitat naturel. Les pays du Bassin du Congo ont, dans leur grande
majoritÈ, procÈdÈ la rÈception
de la CITES (Convention sur le commerce
international des espËces sauvages menacÈes d'extinction)
relative la protection des espËces menacÈes de disparition.
De ce fait, ils mettent sur pied certains mÈcanismes de protection
participative de la faune. Ainsi, au sens de la loi camerounaise, ce
mode de gestion s'entend comme toute approche de gestion des
ressources fauniques qui, dans toutes les phases de son Èlaboration et
de sa mise en oeuvre, intËgre de faÁon optimale les populations
locales et tous les autres intervenants47. A cet
Ègard, il est intÈressant d'apprÈcier leur
juste valeur les mÈcanismes de participation (A). Cependant,
force est de
constater que ces mÈcanismes participent pour
líessentiel d'un vaste amalgame (B).
A ñ Les mÈcanismes de
participation
Les mÈcanismes dont s'agit concernent les canaux par
lesquels la loi organise la participation des communautÈs la
gestion de la faune. Alors quíau Cameroun ces canaux regroupent
la fois des mÈcanismes communautaires (1) et les
procÈdÈs individuels (2), le lÈgislateur congolais
s'est arrÍtÈ seulement sur le deuxiËme mode de
participation.
1 ñ Les mÈcanismes
communautaires
Ici il est essentiellement question des Territoires de Chasse
Communautaires (TCC) et des
Zones d'IntÈrÍt CynÈgÈtiques
Gestion Communautaire (ZICGC).
Au sens de la loi camerounaise, un TCC ' est un territoire du
domaine forestier permanent faisant l'objet d'une convention de gestion
entre une communautÈ riveraine et l'administration chargÈe
de la faune 48. Il faut dire que le dÈcret
n°95/466/ PM du 20 juillet 1995 fixant les modalitÈs
d'application du rÈgime de la faune, est assez complet en
lui-mÍme. Il institut le droit de
prÈemption en faveur des communautÈs riveraines.
Le TCC est gÈrÈ par la communautÈ suivant les orientations
du plan díamÈnagement validÈ par
líadministration en charge des questions d'environnement, de la
forÍt et de la faune. Le plan díamÈnagement est le
document qui permet de concilier líexploitation des ressources et leur
protection. TrËs souvent líon a adoptÈ la politique des
quotas pour limiter une exploitation abusive des espËces.
Les ZICGC sont des espaces classÈs, eux aussi, en
faveur de la communautÈ riveraine la plus proche de la zone
concernÈe qui en fait la demande. Leur procÈdure de classement
est semble
celle des territoires de chasse communautaire et des
forÍts communautaires. Ils permettent de mener des activitÈs de
chasse sportives tout en percevant une taxe pour le compte de la
communautÈ.
Seulement, líexploitation des ZICGC se heurte au
braconnage qui va grandissant dans les forÍts
díAfrique Centrale. Par ailleurs les quotas
díabatages ne font pas particuliËrement líobjet de
45 Article 113, alinÈa 1 code forestier
congolais.
46 Article 31, alinÈa paragraphe 2, loi de
94.
47 Article 14, loi dÈcret n°95/466/
PM du 20 juillet 1995 (Ö) Op. Cit.
48 Article 19, loi dÈcret n°95/466/
(Ö) Op. Cit.
18
publication, ainsi les gestionnaires des ZICGC ne les
maÓtrisent pas toujours et mettent ainsi en pÈril des
espËces en voie de disparition. Ceci rÈvËle alors la
difficultÈ cruciale de la communication entre líadministration
et les autres acteurs de la protection de líenvironnement.
Aussi se pose le problËme de la gestion des revenus issus de la
gestion des ZICGC. Líon assiste des conflits internes aux
communautÈs.
2 ñ La participation individuelle
Parler de la participation individuelle
líexploitation de la faune renvoi líimplication par
le biais de divers permis de chasse. Cíest une
donnÈe que les lÈgislateurs camerounais et congolais ont
effectivement prise en compte.
Au Cameroun, on part sur le principe que la chasse traditionnelle
est libre sur toute líÈtendue
du territoire, sauf dans la propriÈtÈ des
tiers, dans une aire protÈgÈe ocents elle est soumise
une rÈglementation particuliËre tenant compte du plan
díamÈnagement. Pour contourner les limitations
du droit de chasse dues des protections
particuliËres, le lÈgislateur institue la technique des
permis. Il síagit essentiellement des permis de chasse, des
permis de captures, des permis de dÈtention des produits de la
faune, des permis de recherche a but scientifique, díune licence et
díun permis de game-ranching ou de game-farming, des
permis et des licences de chasse
cinÈmatographique et photographique49.
Cíest dire que la loi se veut ouverte une cogestion des
ressources fauniques, encore que ces titres
díexploitations confËrent leurs titulaires le droit
díexercer leurs activitÈs de chasse sur tout ou partie du
territoire national.
Pour sa part, le lÈgislateur congolais
prÈvoit les permis de petite, de moyenne chasse, les
permis de guide forestier, les permis de chasse
scientifique. Si dans líensemble, la gestion de la faune montre
une certaine disposition inclure les populations, líon se
rend compte que la loi forestiËre du Cameroun et celle de la RDC
participent toutes deux díun vaste amalgame.
B ñ La participation locale : un vaste
amalgame
Líamalgame dont il est question se
caractÈrise par le dÈsintÈrÍt des
lÈgislateurs pour la rÈglementation du secteur de la faune, et
de ses rapports avec les populations autochtones. Dans un premier temps,
líobservation permet de se rendre compte que la loi forestiËre
du Cameroun níest quíune ple copie de la loi forestiËre (1).
Par ailleurs, la technique de zonage qui est la base de la protection
des espËces est une immense source de conflit dans la pratique que ce soit
au Cameroun quíen RDC (2).
1 ñ La loi sur la faune : une ple copie de la loi
forestiËre
Le dÈcret díapplication du rÈgime de la
faune est ce que líon pourrait appeler un ' copier- coller de la loi
relative la faune. Cíest sous ce prisme que les droits
díusage dans les espaces respectifs de protection de la faune, les
mÈcanismes de participation des communautÈs riveraines de tels
espaces font sens. De ce point de vue, il est constant que le
lÈgislateur níait pas fait beaucoup díefforts pour adapter
la protection de la faune aux contextes locaux et aux nÈcessitÈs
spÈcifiques
sa protection. On comprend alors pourquoi la
dÈfinition de la chasse artisanale comporte le vice
d'impraticabilitÈ des mÈthodes traditionnelles de chasse que la
loi prÈvoit.
Par ailleurs, la gestion des forÍts faisant appelle
de gros sous, les institutions et les
diffÈrents titres de chasse excluent, ou
prÈcisÈment restreignent la participation des populations
locales, pour consacrer ' le privilËge des nantis . L'acquisition des
titres et autre permis de chasse
est soumise une procÈdure onÈreuse et
tortueuse. Les diffÈrentes politiques forestiËres ont toujours
marginalisÈ líaspect faune et les autres PFNL,
tÈmoin du peu díintÈrÍt accordÈ ces
secteurs. Les rËgles de gestion de la faune dans les rÈserves
forestiËres et les forÍts de production ne sont pas toujours
bien dÈfinies. A cause de cette faible perception de
líimportance du secteur faune, les dispositions rÈpressives
qui le rÈgissent sont peu contraignantes et peu dissuasives. Il en va
ainsi de
49 Article 34 alinea dÈcret n°95/466,
Idem.
19
la fiscalitÈ, peu incitative pour sa valorisation.
Líabsence de clartÈ, dans la dÈfinition
des droits consentis lÈgalement aux populations, entretient un
conflit larvÈ entre les populations et les responsables des eaux et
forÍts sur le terrain.
En effet les notions de chasse de subsistance, chasse
traditionnelle et de droits díusage se
confondent largement dans líinterprÈtation des uns
et des autres. Les dispositions actuelles des lois,
quelques exceptions prËs, tendent mettre les
populations hors jeu du fait que ces droits ne sont pas en
rÈalitÈ bien dÈfinis. Líinsuffisance
díeffort de mise en cohÈrence des conventions et accords
ratifiÈs avec les lÈgislations nationales
engendre les difficultÈs de divers ordres : financement des
contributions, mise en oeuvre des dispositions lÈgales et
partage des retombÈes. Parfois líinadÈquation des
dispositions des lois et des textes díapplication, quand
ceux-ci existent, complique leur mise en oeuvre (financement, logistique,
personnel). La faible cohÈrence entre les codes forestiers, et la vision
traditionnelle d'appropriation des terres est aussi un facteur important
de discorde dans la gestion des ressources
fauniques50.
La gestion des aires protÈgÈes en RDC est
rÈgie par líordonnance loi n°69-041 du 22 Ao°t
1969 relative la conservation de la nature. Le
problËme que soulËve la loi rÈgissant la chasse est
son applicabilitÈ, en líabsence de texte
díapplication devant faciliter les mesures díexÈcution.
En effet, Seul un arrÍtÈ ministÈriel pris chaque
annÈe permet de rÈglementer la chasse pendant cette
pÈriode. Mais une latitude est accordÈe aux autoritÈs
administratives et responsables de la faune sur
le terrain pour la mise en oeuvre de cette loi focalisÈe
essentiellement sur líexploitation de la faune
et les restrictions y affÈrentes.
2 ñ Le zonage : source de conflit
Pour bien comprendre La gestion des espaces de protection de
la faune au Cameroun et en RDC, il faut s'en rÈfÈrer au zonage.
En effet, le zonage est la technique juridique qui procËde du
dÈcoupage des l'espaces forestiers national en de zones destinÈes
des usages divers. Au Cameroun
les contours juridiques du zonage sont
dÈj tracÈs51, cependant qu'en RDC le
processus d'Èlaboration d'un cadre juridique consensuel est en cours de
maturation. Ce qu'il faut dire c'est que
dans les deux pays il se dÈgage une tendance forte
diviser les zones forestiËres en deux grands blocs52 :
les zones de protection intÈgrales et les zones de protection
partielles. Cette distinction permet de planifier la protection long
terme des ressources naturelles. La philosophie qui est la base de
cette technique níest que trËs louable. Seulement de
nombreuses insuffisances dans la
pratique sont líorigine des conflits sociaux.
Un rapport de l'Union mondiale pour la conservation de la nature
(UICN) relevait dÈj pour
la rÈserve du Dja, en 1993, que l'un des
problËmes gÈnÈrateurs de conflits et d'attitudes
revendicatrices concernait le manque de communication et de
concertation entre l'...tat et la
population locale. Nombre de dÈcisions ayant un impact
rÈel sur la vie de ces populations avaient souvent ÈtÈ
prises arbitrairement par des personnes extÈrieures la
rÈgion et sans consultation prÈalable des
villageois53. Depuis lors les choses níont pas vraiment
ÈvoluÈes. La dÈlimitation du parc national de
Campoío Man pose aujourdíhui le mÍme problËme du
manque de communication.
En RDC, la sociÈtÈ civile dÈnonce de en plus
le processus díÈlaboration du plan de zonage
de ce pays54. Sous líimpulsion de la
banque mondiale, le gouvernement congolais a adoptÈ de
maniËre prÈcipitÈ des mesures, sans consulter les
populations autochtones55, et de ce fait compromis
toute chance pour la nouvelle loi forestiËre
díúuvre pour le bien Ítre de ces populations. Tout
compte fait, ce sont peut prËs les mÍmes erreurs que celles
observÈes dans le
50 Ibrahima ly yadji bello, Etude sur les lois et
politiques sur la faune dans les pays d'Afrique centrale, Rapport final
CITES bwg / uicn mars 2003.
51 DÈcret n° 95/678 du 18 dÈcembre
1995, fixant le cadre d'utilisation des terres en zone forestiËre
mÈridionale.
52 Lois portant codes forestiers du Cameroun et de
RDC.
53 Article paru dans CanopÈe n° 12 -
Ao°t 1998.
54 Organisation Autochtones PygmÈes et
accompagnant les autochtones PygmÈes en RDC, RequÍte
adressÈe au panel d'inspection de la Banque Mondiale, p.26, 30 octobre
2005, Kinshassa-RDC.
55 Norbert YambaYamba Shuku, Rapport díappui
la revue Èconomique du secteur forestier, quelques observations
relatives aux interactions entre populations rurales et concessions
forestiËres en RDC, Banque Mondiale, Novembre
2003.
20
processus qui síest dÈroulÈ au Cameroun.
La participation la gestion se dÈcline ainsi travers les
droits d'usage, la gestion communautaire de la faune et de la flore.
Mais la fiscalitÈ forestiËre dÈcentralisÈe permet
d'apprÈhender un autre niveau de participation.
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