I ñ Le contenu des droits díusage
La signification des droits d'usage varie selon que l'on soit
au Cameroun ou en RDC. En effet, alors que d'un cÙtÈ la loi
semble avoir consacrÈe une conception Ètroite des droits d'usage
(A),
de l'autre ces droits revÍtent une certaine consistance
(B).
A ñ La conception Ètroite du
Cameroun
C'est la loi forestiËre de 1994 qui dÈfinit le
concept de droits d'usage au Cameroun. Il s'agit
en rÈalitÈ des prÈrogatives
traditionnelles et sÈculaires reconnues aux communautÈs
villageoises
riveraines des forÍts pour continuer tirer leur
subsistance de leurs forÍts. Dans cette perspective il
est essentiel d'Èclairer tout d'abord, la notion de
communautÈ riveraine (1) avant de se pencher sur l'affectation que la
loi destine au produit des droits d'usage (2).
1- La notion de communautÈ riveraine
Les droits díusage sont Ètroitement liÈs
la communautÈ riveraine. La loi camerounaise22 parle
de communautÈ riveraine23, mais aucun moment
elle ne dÈfinit exactement ce qu'on doit entendre par l.
De ce point de vue, il y a un vide juridique, qui contribue
confondre les communautÈs villageoises. Cependant, la pratique tend
considÈrer les communautÈs riveraines des forÍts
comme les populations qui vivent dans et autour des espaces forestiers depuis
des gÈnÈrations
et qui ont l'habitude de tirer le support de leur vie dans ces
forÍts. Ainsi, l'on considËre deux critËres essentiels comme
Ètant opÈratoires dans la description des communautÈs
riveraines des forÍts.
Il s'agit tout d'abord de la proximitÈ
gÈographique. Ici il faut vivre dans ou autour de la forÍt. C'est
dire que toute personne qui ne se revendique pas cette proximitÈ et de
surcroÓt ne peut l'Ètablir
par les mÈcanismes coutumiers d'appartenance
un groupe sociologique ne peut pas, de ce fait,
bÈnÈficier des droits d'usage.
Il s'agit aussi de l'usage habituel ou sÈculaire du
produit de la forÍt comme support de vie. Il
convient ici díanalyser líhabitude en
considÈration des gÈnÈrations. De la sorte les
communautÈs qui revendiquent les droits díusage doivent pouvoir
Ètablir que leurs ascendants occupaient avant eux
ces espaces forestiers et en tiraient le produit de leur
subsistance. Aussi il faut comprendre que
líusage ne se limite pas
líapprovisionnement en produits comestibles. Il síÈtend
líutilisation de la forÍt pour la pratique des rites
sacrÈs et líexpression de la culture locale. Sans vraiment
exclure cet autre aspect de líusage des forÍts, la loi
níen fait pas expressÈment mention et síintÈresse
plutÙt líaffectation quíon doit faire des produits
forestiers comestibles.
2- Líaffectation limitÈe des droits
díusage
La loi prÈcise l'affectation qui doit Ítre faite du
produit des droits d'usage. En effet, ce sont des produits destinÈs
l'auto consommation. C'est--dire que les
bÈnÈficiaires de cette catÈgorie de
22 Loi n° 94/01 du 20 janvier 1994 portant
rÈgime des forÍts, de la faune et de la pÍche.
23 Article 8, loi du 20 janvier 1994.
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droit sui gÈnÈris ne peuvent pas commercialiser
les produits qu'ils tirent de la forÍt dans le cadre de
líexercice de leurs droits coutumiers. Ils doivent juste en
user pour assurer leurs besoins dits fondamentaux. Les produits en
question concernent tout aussi bien les produits ligneux (le bois) que
les Produits Forestiers Non Ligneux (PFNL). Dans ce sens on fait
rÈfÈrence aux produits fauniques
et aux divers produits et fruits issus des arbres.
D'ailleurs, les droits d'usage sont reconnus
indÈpendamment de l'espace forestier dans lequel
on se trouve. Quíil síagit du domaine forestier
permanent, ou de celui non permanent. De la sorte,
mÍme les exploitants forestiers ne devraient pas
pouvoir s'opposer l'exercice des droits d'usage pour des produits
non mentionnÈes dans leurs titres d'exploitation24.
Cette pratique est symptomatique de la participation des populations
locales la gestion de l'environnement et cadre bien avec la
protection durable des ressources naturelles. Tout compte fait, la
RÈpublique
DÈmocratique du Congo offre une toute autre conception.
B ñ La conception plus large de la RDC
Les droits d'usage forestiers tels que dÈfinis dans la loi
congolaise permettent de dÈterminer
les bÈnÈficiaires classiques de ces droits
(1). Le lÈgislateur Congolais opËre une extension des
bÈnÈficiaires des droits d'usage (2).
1 ñ Les bÈnÈficiaires classiques des
droits díusage
Aux termes de l'article 36 de la loi forestiËre de la
RÈpublique DÈmocratique du Congo, les droits d'usage forestiers
des populations vivants l'intÈrieur ou
proximitÈ du domaine forestier sont ceux rÈsultants de
coutumes et traditions locales. Ici comme au Cameroun, les
critËres de revendication des droits d'usage forestiers semblent se
retrouver. Il s'agit alors des critËres gÈographiques : ceux
si se traduisent par la proximitÈ, ainsi que par le fait de vivre
effectivement de
la gÈnÈrositÈ des espaces forestiers
concernÈs.
D'un autre cotÈ, le systËme repose sur les
coutumes et traditions locales. Il s'agit d'une approche culturelle des
droits d'usage. En effet, les sociÈtÈs traditionnelles
africaines utilisent la forÍt comme un espace sacrÈ. Espace de
conservation des rites ancestraux. C'est le lieu de transition entre les
gÈnÈrations ; un endroit ocents l'on acquiert et ou l'on
peut perdre tout les pouvoirs. La coutume et la tradition s'analysent
aussi comme l'effet d'habitude. La rÈcurrence le long des
gÈnÈrations de l'usage de l'espace forestier comme pourvoyeur de
biens nÈcessaires la vie. Si les bÈnÈficiaires des
droits d'usage síidentifient aux mÍmes qu'au Cameroun, la
loi Congolaise revÍt une particularitÈ quant
l'Ètendue des droits d'usage.
2- Líextension des bÈnÈficiaires des
droits díusage
Contrairement la lÈgislation camerounaise
qui limite les droits d'usage aux seules populations riveraines des
espaces forestiers, la loi congolaise ouvre la possibilitÈ tout
congolais
de jouir des droits d'usage. En effet, l'art 41 de la loi
forestiËre de RDC dispose : ' tout Congolais peut exercer des droits
d'usage sur l'ensemble du domaine forestier protÈgÈ (...) . La
diffÈrence est nette. Ici la participation la gestion des
ressources naturelles n'est plus liÈe la situation
gÈographique, mais elle se base tout simplement sur la
nationalitÈ.
L'ouverture des droits d'usage ' tout congolais consacre
une vision plus altruiste de la
participation des populations la gestion des
ressources naturelles, et contribue manifester la volontÈ
de supprimer toute discrimination dans la gestion des ressources nationales de
la RDC. Il faut dire tout de mÍme que le droit de tous les congolais
de jouir des droits d'usage se concentre dans les forÍts
protÈgÈes. C'est--dire des forÍts qui font partie du
domaine privÈ de l'Etat congolais. C'est dire que dans les deux autres
domaines forestiers, ils sont limitÈs aux populations riveraines.
24 Art 62 et 155 de la loi du 20 janvier 1994
prÈvoit des sanctions l'encontre des exploitants forestiers qui
violent les droits d'usage des populations quand celles-ci recueillent
les produits non expressÈment mentionnÈs dans le titre
d'exploitation.
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Cíest une avancÈe significative quíil
convient de relever, pour síen fÈliciter. Cependant, de
nombreuses entorses apparaissent pour relativiser cette volontÈ de
participation au niveau local.
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