Chapitre II :
La participation des acteurs internationaux la
gestion des ressources naturelles du Basin du Congo
La gestion des ressources naturelles et notamment des
ÈcosystËmes forestiers díAfrique
Centrale intÈresse la planËte toute entiËre et
ce plus díun titre. Líenvironnement entendu comme
' líespace dans lequel vivent des Ítres humains
et dont dÈpend la qualitÈ de leur vie, leur santÈ, y
compris pour les gÈnÈrations venir 106.
Justement, líun des particularismes les plus poussÈs du Droit
International contemporain de líEnvironnent est que cíest un
Droit essentiellement altruiste. Non seulement il consacre la protection des
ressources pour la pÈrennitÈ de celles-ci, mais aussi
pour líÈpanouissement des gÈnÈrations
prÈsentes et venir. Il suffit de se rappeler dans ce sens que
le Bassin du Congo est le second pourvoyeur de la planËte en
oxygËne aprËs líAmazonie.
DËs lors quíon considËre la
sociÈtÈ internationale comme acteur de la gestion des
ressources naturelles, et principalement de la gestion des
ÈcosystËmes forestiers, il se pose fondamentalement deux
ordres de problËmes : díabord celui du fondement de cette
participation. Autrement dit, il síagit de savoir au nom de quoi est-ce
que la sociÈtÈ internationale doit síimmiscer dans la
gestion des ressources. En effet, líimpression se dÈgage,
selon laquelle, ce sont les plus grands destructeurs de
líenvironnement mondial qui, se fondant sur
líintÈrÍt gÈnÈral de
líhumanitÈ, síÈrigent en donneur de leÁons.
Des ...tats qui se sont appuyÈs sur leurs ressources forestiËres
pour
se dÈvelopper et continue aujourdíhui
encore de polluer líenvironnement global avec leurs industries.
Ceci crÈe des ressentiments dans les pays en dÈveloppement et
dont líexploitation des ressources forestiËres est une source
substantielle de revenue. Aussi pertinent que soient les dÈbats
sur ce champ, nous níen faisons pas notre objet
díÈtude. Il est constant, et cíest ce qui nous
intÈresse, que la sociÈtÈ internationale participe
effectivement la gestion des ressources forestiËres
du Bassin du Congo. Ce qui nous amËne au
deuxiËme aspect, celui qui sera au centre de nos
prÈoccupations. En effet, il síagit de rechercher et
díÈprouver les modalitÈs de cette participation.
Avant 1992, la communautÈ internationale Ètait
uniquement constituÈe des ...tats, du moins pour ce qui concerne la
gestion de líenvironnement. Le sommet de Rio sur la protection
de la biodiversitÈ a opÈrÈ une sorte díextension
de la notion de communautÈ internationale. DÈsormais il faudra
compter avec les Organisations Non Gouvernementales (ONG). Aussi, il
semble bon propos díenvisager díune part líaction
de la sociÈtÈ des ...tats sur la gestion des ressources
naturelles
du Bassin du Congo (section I) avant díanalyser la
participation des ONG internationales cette gestion l (section
II).
106 CIJ, avis du 8 juillet 1996, sur la
licÈitÈ de la menace ou de líemploi díarmes
nuclÈaires. ConfirmÈ par líArrÍt du 25
09 1997, projet gabcikovo-nagymaros entre la Slovaquie et la
Hongrie.
49
Section I : La sociÈtÈ des ...tats et les
ressources naturelles forestiËres du Bassin du Congo
La sociÈtÈ des ...tats constitue
líobjet principal du Droit International classique. Nous
assimilons les organismes intergouvernementaux la manifestation de la
volontÈ des ...tats. Dans cette section il est question de ressortir
clairement le rapport que la sociÈtÈ internationale entretien
avec les ressources naturelles forestiËres du Bassin du congo. De fait,
Les pays de la sous-rÈgion bÈnÈficient de
líassistance multiforme des partenaires bilatÈraux et
multilatÈraux pour la gestion de leurs ressources forestiËres. La
participation de la sociÈtÈ internationale touche les domaines
variÈs, mais il convient de les regrouper sous les deux aspects les
plus saillants que sont la participation normative (I) et la
coopÈration agissante (II).
I - La participation normative
La sociÈtÈ des ...tats participe
líÈdification díun corpus normatif propre la
gestion durable des ressources naturelles forestiËres. La normalisation
environnementale ' apparaÓt comme líexpression de
líauto-respect des exigences environnementales en vigueur et peut
Ítre analysÈe comme une traduction concrËte du principe de
responsabilitÈ qui doit guider líexercice des activitÈs
humaines lorsquíelles sont porteuses díun
risque pour la santÈ humaine et líenvironnement
107. Tout compte fait, la normalisation environnementale peut
prendre líaspect díune normalisation
technique (A) et díune normalisation juridique (B).
A ñ Les normes techniques
A notre sens, la normalisation technique concerne les
aspects pratiques relatifs la quantitÈ et la qualitÈ
de líexploitation des ressources naturelles. Les sources de cette
normalisation environnementale remonte dans le temps. Elle a commencÈ
Ècrire ses lettres de noblesse avec la norme ISO 9000, mais
cíest vÈritablement avec la norme ISO 1400 quíelle a
acquise toute la valeur internationale quíon lui reconnaÓt
aujourdíhui. Ces normes sont le fait soit
díorganismes indÈpendants de contrÙle (OIBT), soit
díun ensemble de pays fabricants ou consommateurs. On peut citer
dans ce sens les normes instituÈes par líUnion
EuropÈenne. Les normes techniques se caractÈrisent par leur
grande diversitÈ (1). Il importe de síinterroger sur la
portÈe juridique de ces normes (2).
1- La diversitÈ des normes techniques
Les normes techniques dans líensemble se
caractÈrisent par leur grande diversitÈ. Elles concernent
les secteurs díactivitÈs aussi variÈs que
líÈlectronique, les tÈlÈcommunications (Ö)
et sont issues des organismes tels que les institutions
financiËres, les ...tats, les institutions internationales (FAO,
OMS). Cependant, les normes relatives la gestion des ressources
naturelles environnementales, qui nous intÈressent ici au premier
plan, sont les normes de procÈder, les normes dites de labels et
les normes de certification. Les normes de procÈder sont des indications
que les produits en question ont ÈtÈ exploitÈs
par des moyens techniques Ècologiquement rationnelles. Il
síagit díimposer aux exploitants forestiers des
techniques díexploitation qui correspondent une certaine
idÈe de la gestion durable. Les normes dites de labels sont des signes
distinctifs apposÈs sur un produit et attestant des fins
commerciales, que ce produit est conforme
des spÈcifications techniques et a fait líobjet
díun contrÙle prÈalable par un organisme
compÈtent108.
Ici líaccent est plutÙt mis sur la valeur marchande
de la notoriÈtÈ acquise par certains producteurs
bien dÈterminÈs. Les normes de certification, quant
elles sont celles qui attestent la demande du
107 DOUMBE BILLE StÈphane, la normalisation
environnementale in recueil des communications sÈminaire relatif
la formation aux textes juridiques, YaoundÈ, p.130, Brain
Trust 2003.
108 Idem.
50
fabricant ou du producteur díun produit que celui-ci
des caractÈristiques techniques dÈcrÈtÈes
dans
un rÈfÈrentiel technique tel quíun cahier
des charges ou une charte de qualitÈ et faisant líobjet
díun contrÙle. Cíest aussi un procÈdÈ
qui permet díattester de líorigine du produit et du
respect des exigences pratiques de production109. Cíest dans
ce sens quíil faut apprÈcier le processus AFLEG
(Application de la LÈgislation ForestiËre et la
Gouvernance en Afrique) initiÈ dans le Bassin du congo. En tout
Ètat de cause, penchons nous sur la valeur probante de ces normes.
Au-del de cette aspect finaliste de la
normalisation, on classe gÈnÈralement les normes
suivant leur mode díÈlaboration. Cette
classification se fonde sur la pratique belge. Il peut soit síagir des
normes homologuÈes ou des normes enregistrÈes. Les normes
homologuÈes sont celles produites par une institution
spÈcialisÈe sur la base díune proposition Ètablie
par un membre effectif
ou une commission technique existante, soit sur un document
normatif díorigine international. Le texte dÈfinitif est
rÈdigÈ par la commission compÈtente. Il est tenu compte
des remarques formulÈes
lors des enquÍtes publiques. Par contre,
une norme enregistrÈe est une norme díorigine
internationale qui avec líaccord de la commission
compÈtente, composÈe des reprÈsentants des
producteurs, des consommateurs, des administrateurs publiques et des
milieux scientifiques et commerciaux est soumise au comitÈ de
direction pour líadoption comme norme belge. Ces normes sont des
Èquivalents des normes europÈennes. Cependant on
síinterroge sur leur portÈe juridique dans un espace
gÈopolitique comme le Bassin du Congo.
2- La portÈe juridique de la normalisation
technique
Les normes belges et europÈennes peuvent Ítre
considÈrÈes comme des rËgles de l'art ou
de savoir-faire. Le cas ÈchÈant, on peut y faire
rÈfÈrence dans les rÈglementations. La
rÈfÈrence aux normes peut Ègalement Ítre
utilisÈe dans les cahiers des charges et est mÍme obligatoire
dans les cas
ocents la rÈglementation de l'Union
EuropÈenne (UE), pour l'octroi des marchÈs publics,
est
d'application. Il s'agit d'une rÈfÈrence
indicative. Toutefois, dans des cas exceptionnels, une norme homologuÈe
peut Ítre rendue obligatoire par simple rÈfÈrence
explicite son indicatif dans la rÈglementation
Les normes qualitatives et quantitatives de gestion des
ressources forestiËres tendent garantir la conformitÈ de
celle-ci une finalitÈ díexploitation durable et une
nÈcessitÈ de certaines spÈcifications des produits
forestiers. Elles sont cependant imprÈgnÈes du vice
díunilatÈralisme. En effet, aussi pertinentes que soient ces
normes, elles sont trËs souvent líÈmanation de
líunique volontÈ des pays consommateurs. Sous ce rapport, elles
apparaissent comme la manifestation díun rapport de force
dÈsÈquilibrÈ entre les pays producteurs et les ...tats
consommateurs. Autrement dit,
ces normes pourraient síanalyser comme un paravent pour
lÈgitimer le productivisme contemporain. Mais il faut tout de
mÍme dire que ces normes permettent díamÈliorer les
mÈthodes díexploitation
des ressources forestiËres et de ce fait de contribuer
la gestion durable de celles-ci. Tout compte fait, cette normalisation
ne doit pas occulter líaspect le plus important de la
normalisation qui se manifeste sous le prisme du droit.
B ñ La normalisation juridique
Cet autre mode de participation de la
sociÈtÈ des ...tats est principalement le fait de la
construction du DIE, Droit qui influence tout aussi bien la gestion des
ressources naturelles dans le bassin du Congo que níimporte
ocents sur la planËte. Líaccession la
juridicitÈ, cíest--dire líacquisition du statut de
norme juridique peut suivre des voies et des mÈcanismes juridiques
variÈs. Elle peut prendre la forme des conventions
bilatÈrales ou des conventions multilatÈrales. De nos jours,
il existe plus de 500 traitÈs et autres accords internationaux
relatifs líenvironnement. LíÈdification
díun ordre juridique environnemental international est
marquÈ par sa dualitÈ (1) et prÈsente une
spÈcificitÈ quíil convient díanalyser (2).
109 Les conditions techniques
díexploitation concernent le respect des diamËtres minimum
de coupe de bois par exemple et líexemption des petits et des
úufs des animaux lors de la chasse.
51
1- La dualitÈ de la normalisation
juridique
On peut classer les rËgles de DIE dans deux grandes
catÈgories. Les normes juridiquement contraignantes et les
rËgles juridiquement non contraignantes. Cette distinction se
justifie par le volontarisme qui irrigue les relations entre ...tat et
notamment tout le Droit International. Les normes juridiquement contraignantes
sont gÈnÈralement ÈlaborÈes sous
líÈgide des Nations Unis. Il síagit essentiellement du
respect des engagements que les ...tats prennent dans le cadre du
Droit international conventionnel. Cíest dire que ceux-ci
manifestent leur volontÈ Ítre liÈ dans un
document officiel. Le consentement Ítre liÈ se manifeste
par la ratification des traitÈs, la signature des conventions et leur
validation parlementaire. Evidemment, pour quíils puissent avoir des
effets dans líordre juridique interne du pays concernÈ, le
traitÈ ou la convention internationale doit au prÈalable
faire líobjet díune publication dans le journal officiel, ou tout
autre moyen institutionnel prÈvu par les Droits Constitutionnels
des pays. De ce point de vue, les ...tats ne peuvent pas se
soustraire leurs obligations. Sous peine díy Ítre
contraints par la communautÈ internationale dont
le bras sÈculier est le Conseil de SÈcuritÈ
des Nations Unis.
Globalement, les ...tats du Bassin du Congo et
singuliËrement le Cameroun et la RDC sont tous parties aux conventions
majeures de protection et de conservation des ressources naturelles
dans le monde. On peut citer dans ce sens la convention des
Nations Unis relative la protection de
la BiodiversitÈ adoptÈe Rio le 13 juin1992
et entrÈe en vigueur le 29 septembre 1994. Cíest aussi
le cas pour la convention CITES adoptÈ
Washington le 3 mars 1973 et entrÈe en vigueur le 1er
juillet 1975 ; qui rÈglemente líimportation,
líexportation, la rÈexportation et líintroduction en
provenance de la mer des spÈcimens des diffÈrentes espËces
inscrites dans ses annexes.
Les normes juridiquement non contraignantes font partie de la
normalisation lege ferenda, c'est--dire le droit en devenir. Elles
constituent pour leur part des dÈclarations de principes qui
visent orienter líaction des gouvernements et ont vocation
accÈder la juridicitÈ. A travers les canaux classiques
díÈlaboration des rËgles internationales. Dans ce
sens, il suffit de rappeler la dÈclaration sur les forÍts et
líagenda 21, issue de la dÈclaration de RIO. TrËs souvent,
elles sont le fait des institutions internationales. Celles-ci ne
peuvent adopter que des rÈsolutions, des dÈclarations,
des programmes díactions qui constituent la soft law. Aussi, il
faut mentionner líapport de la doctrine. La contribution des
intellectuels et des scientifiques la construction díun DIE plus
efficace et surtout plus juste. Reste quand mÍme que ces
normes juridiquement non contraignantes ont une grande importance. Elles
síimposent la communautÈ internationale comme
rËgle de conduite.
2- La spÈcificitÈ de cette
normalisation
La normalisation technique et la normalisation juridique
souffrent toutes deux du manque díun organe universel de coordination de
líúuvre commune de construction díun corps de normes
universellement acceptÈes. Le seul organe qui joue ce
rÙle sur le terrain du droit est le PNUE
(Programme des Nations Unis pour líEnvironnement).
Cependant la vÈritable spÈcificitÈ de la
normalisation environnementale se situe sur un tout autre terrain
et ne concerne vÈritablement que
la normalisation juridique.
Il síagit de la technique mÍme de
construction de ces normes. Le DIE contemporain
procËde par la technique des traitÈs cadres.
Un traitÈ cadre est un systËme conventionnel qui
síÈchelonne dans le temps. Il est constituÈ díun
traitÈ principal et prÈvoit un ou plusieurs protocoles
ou accords complÈmentaires, qui síy rattachent
tout en gardant une certaine autonomie. Sous ce
rapport, le traitÈ principal contient des
orientations majeures. A la vÈritÈ il síagit dans ces
traitÈs principaux de dÈfinir la philosophie qui prÈsidera
la dÈfinition des normes pratiques de gestion. Au nombre des
traitÈs cadres on peut citer la convention de New York
relative aux changements climatique signÈe dans la ville qui
porte le mÍme nom. Aussi les traitÈs cadres permettent
aux parties de prendre líengagement de continuer nÈgocier.
De ce point vu, ils crÈent gÈnÈralement un cadre de
travail qui permettra ultÈrieurement aux parties de poursuivre
les nÈgociations. La convention cadre sur les changements
climatiques en donne une parfaite illustration. Elle remet presque
entiËrement líaction entre les mains de la confÈrence des
parties.
52
Le deuxiËme axe du systËme conventionnel mis
sur pied par le traitÈ cadre est bien Èvidement le
protocole ou líaccord additionnel. Ces instruments juridiques sont
plus pratiques. Ils contiennent les rËgles directement applicables.
Il síagit vÈritablement des normes de fonds qui peuvent
Ítre considÈrÈes comme des normes self exÈcutives.
La technique des traitÈs cadre participe
du volontarisme qui caractÈrise le Droit
International, dans ce sens que tous les ...tats parties la convention
de base ne sont pas nÈcessairement parties aux
dÈveloppements successifs sur la question. Il suffit de
rappeler cet effet le cas du protocole de Kyoto. Les
...tats-Unis, originairement partie la convention principale
(convention de new York sur les changements climatiques), ont
refusÈ de ratifier le protocole additionnel adoptÈ
Kyoto.
Tout compte fait, le DIE síappui principalement sur
la technique des traitÈs cadres. Ceci síexplique un peu du fait
que toute rÈglementation visant protÈger
líenvironnement a sa finalitÈ dans líavenir.
MÍme síil existe actuellement une vingtaine de
traitÈs cadre dans le DIE, on peut dÈplorer quíil
níen existe aucun spÈcifique la gestion des
ÈcosystËmes forestiers díAfrique Centrale et partant
des ressources naturelles forestiËres renouvelables du Bassin du
Congo. On assiste plutÙt une prolifÈration de
conventions vocation universelle. Cette úuvre normative
contribue avec la coopÈration toujours grandissante assurer la
participation de la sociÈtÈ des ...tats
la gestion des ressources naturelles du Bassin du Congo
II ñ La coopÈration agissante
Nous entendons par coopÈration agissante les
pressions directes que les partenaires bilatÈraux et
multilatÈraux exercent sur les pays du Bassin du Congo dans le
sens díune gestion durable des ressources naturelles
forestiËres. LíAfrique noire entretien avec la
communautÈ internationale et principalement avec les pays
europÈens, depuis la colonisation, une coopÈration
ciblÈe sur líexploitation des ressources naturelles. Les
conditionnalitÈs environnementales (A) ont survÈcues aux
politiques díajustement structurel des annÈes 1980. Mais il faut
bien rendre compte
de la mobilisation internationale qui se manifeste dans les
programmes et projets de gestion durable des ressources forestiËres du
Bassin du Congo (B).
A- Les conditionnalitÈs
environnementales
Le terme conditionnalitÈ est la base un terme de
la science Èconomique. Il est líapanage des organisations
financiËres internationales. Mais il faut dire que ce substantif ne
recouvre aucune dÈfinition, ou plus prÈcisÈment : '
(Ö) ne fait líobjet díaucune codification en droit
international 110. Pour le professeur Maurice
Kamto111, ce terme a nÈanmoins fait florËs dans
le
langage international actuel et connaÓt une
utilisation intensive dans des domaines variÈs. La doctrine
essaie de donner une dÈfinition juridiquement intelligible de
cette notion. Cíest dans ce sens que VANDERVORST estime que ' La
conditionnalitÈ environnementale est le fait pour une organisation
financiËre internationale de considÈrer une ou plusieurs mesures
liÈes la protection de líenvironnement comme
nÈcessaire ou souhaitable au dÈclenchement ou au maintien
díune ou plusieurs de ses opÈrations 112. Ainsi,
il semble intÈressant de síarrÍter sur le contenue
de cette conditionnalitÈ (A) avant díen apprÈcier
les implications sur la gestion des ressources naturelles
dans le Basin du Congo (B).
1- Le contenue de la conditionnalitÈ
environnementale
La conditionnalitÈ environnementale est
díapparition rÈcente, elle apparaÓt dans le monde
en dÈveloppement avec la crise Èconomique des
annÈes 70 et 80, dans le cadre des plans
110 VANDERVORST Alain, Contenu et portÈe
du concept de conditionnalitÈ environnementale : vers un nouvel
instrument au service du droit et de la protection de líenvironnement en
Afrique ? UniversitÈ de Rouen 2OO3.
111 KAMTO MAURICE, ProblÈmatique de la
conditionnalitÈ en droit international et dans les relations
internationales,
in La conditionnalitÈ en droit international, pp 10-11.
112 VANDERVORST, Contenu et portÈe du
concept de conditionnalitÈ (Ö) Op. Cit. p.4
53
díajustement structurel visant líorigine
líassainissement des finances des ...tats en crise113. Elle
fait son lit dans les mÈcanismes de líaide au
dÈveloppement. Dans ce contexte, son contenu est encore assez diffus. Il
va se prÈciser avec le temps jusqu' revÍtir les habits
quíon lui connaÓt aujourdíhui.
La pratique de la conditionnalitÈ
environnementale síencre dans les principes de
prÈcautions et de prÈvention. Il est question de
subordonner le financement díun projet la garanti que ce
dernier ne constituera pas une source de dommage environnemental
irrÈparable. Dans ce sens les bailleurs de fonds amËne les pays
en dÈveloppement principalement procÈder la
refonte
de leurs cadres juridiques, afin de les adapter aux exigences
de protection de líenvironnement. Les outils les plus utilisÈs
sont les Ètudes díimpacts environnementales et la consultation
prÈalable des populations riveraines des sites des projets de grande
envergure.
LíEIE encore appelÈe Ètude
díincidence sur líenvironnement síanalyse comme
líapprÈciation prÈventive des effets nocifs que peut
receler, pour la santÈ de líhomme et/ou pour
líenvironnement, la rÈalisation de certaines
activitÈs qui sont de nature perturber la qualitÈ et le
cadre de vie. LíEIE níest pas une simple formalitÈ, elle
doit permettre aux dÈcideurs de prendre une dÈcision
ÈclairÈe. Elle doit ressortir líÈtat de
líenvironnement avant le projet, dÈcrire les risques
quíencourent ledit environnement du fait de la rÈalisation
du projet et enfin dÈfinir les voies et moyens prÈvus
pour remÈdier ses consÈquences. Sur cette base, la
viabilitÈ du projet est plus mesurable.
Líautre canal privilÈgiÈ de la
conditionnalitÈ environnementale est líexigence de
consultation des populations. Cíest dire que la
conditionnalitÈ environnementale intËgre aussi les
exigences de participation la gestion des ressources et
plus simplement líexigence de dÈmocratie environnementale.
.
2- Líimpact de la conditionnalitÈ
environnementale dans le bassin du
Congo
La coopÈration agissante trouve un terreau fertile dans
les pays du Bassin Congo. Ceux-ci entretiennent des relations
poussÈes avec les principaux bailleurs de fonds de la
planËte. La consÈquence se fait ressentir. Les institutions
internationales sont trËs impliquÈes dans
líamÈlioration des cadres juridiques locaux de gestion des
ressources naturelles. Dans ce sens la Banque Mondiale a
ÈtÈ la base de la reforme de la loi forestiËre du
Cameroun qui a abouti sur la
loi de 1994. Cette loi est fondamentalement meilleure
que celle díavant 94 et elle sert mÍme de
rÈfÈrence pour les pays de la rÈgion et de la
sous-rÈgion114. Seulement, cette reforme aussi pertinente
que soit elle des fissures et impose une nouvelle rÈforme au
risque díaboutir líobjectif contraire. En fait ce nouveau
texte fait la part belle aux industrielles et níassure pas
vÈritablement la mise des úuvres des dispositions de la loi.
Par ailleurs, la mÍme institution conduit la RDC sur
les traces de ce qui síest passÈe au
Cameroun. De ce point de vue, il est urgent de prendre beaucoup
de prÈcaution pour ne pas finir
díembraser ce pays qui souffre dÈj
beaucoup des difficultÈs nÈes des frustrations díune
rÈpartition inÈquitable de ses ressources. La
sociÈtÈ civile congolaise quoique peu organisÈe
síest dÈj mobilisÈe pour limiter les
dÈrapages, mais le gouvernement de la RDC semble pris entre les
mailles
de la conditionnalitÈ environnementale.
Il ne faut pas croire que la coopÈration
agissante se limite aux conditionnalitÈs
environnementales et leurs limites. Elle ne
concerne pas que les institutions financiËres internationales,
et touche aussi les ...tats, Elle intËgre de mÍme les programmes et
projets de gestion durable des ressources forestiËres.
B ñ Les programmes et projets de gestion
durable
La gestion des ressources naturelles dans le Bassin du
Congo suit des processus aussi
113 TCHEUWA Jean Claude, in La
conditionnalitÈ en droit international (Ö) Op.cit, p.84.
114 Cf. DOUMBE-BILLE StÈphane, le droit
forestier en Afrique centrale et occidentale : analyse comparÈe,
Etude juridique en ligne 41, p. 34, Fao dÈcembre 2004.
54
diffÈrents que variÈs. Elle est
líúuvre des partenariats dÈveloppÈs pour les
besoins de cette cause. Les deux pans les plus significatifs de cette
coopÈration mÈritent lÈgitimement de retenir notre
attention de part leur envergure et leur capacitÈ
mobiliser les acteurs internationaux les plus importants. Il
síagit díune part de action universellement soutenue, dans
le cadre du Partenariat pour les ForÍts du Bassin du Congo
(PFBC) (2) et de líautre de la coopÈration avec
líUnion EuropÈenne pour la gestion durable des EcosystËmes
Forestiers díAfrique Centrale (ECOFAC) (1).
1- Líapport de líUnion
EuropÈenne
Les objectifs spÈcifiques de la coopÈration
UE-Afrique Centrale dans le secteur de la gestion durable des
ressources naturelles renouvelables portent sur une prise de conscience
du potentiel Èconomique et scientifique de la richesse
biologique de la rÈgion ; la formulation de politiques nationales
et rÈgionales durables, la gestion rationnelle des
ÈcosystËmes forestiers et la conservation des diversitÈs
biologiques. Deux programmes sont mis en oeuvre dans ce secteur,
ECOFAC (ÈcosystËmes forestiers díAfrique centrale), le plus
important, et DABAC115
(DÈveloppement díAlternatives au Braconnage en
Afrique Centrale).
ECOFAC est un programme de conservation de la
biodiversitÈ et de renforcement des
capacitÈs de gestion des aires protÈgÈes
qui complËte des actions financÈes par le FED dans certains pays
du Bassin du Congo. Il utilise aussi bien des ressources du PIR que
díautres sources de financement, comme par exemple la ligne
budgÈtaire ForÍts tropicales. Le programme ECOFAC constitue
la plate-forme des actions de conservation des ÈcosystËmes
forestiers et díappui la gestion de six aires
protÈgÈes díAfrique Centrale. Ce programme síest
dÈroulÈ pendant douze ans et
a atteint la fin de sa troisiËme phase. FinancÈ
par le Fonds EuropÈen de dÈveloppement ; rËglement
communautaire du 10 juillet 1994 CEE relatif aux cations communautaires dans le
domaine de la protection des forÍts tropicales dËs 1989. La
communautÈ síy engage apporte son appui financier
et sa compÈtence technique aux actions allant dans la
protection des forÍts tropicales, et díautre part
articuler ses cations dans ce domaine sur les programmes
nationaux et internationaux existants. DABAC est un programme de
DÈveloppement d'Alternatives au Braconnage en Afrique
Centrale. Dans cette sous-rÈgion, la chasse commerciale
de gibier en destination des grands centres urbains a perturbÈ les
Èquilibres ancestraux dans les forÍts. Bien des populations
animales sont en rÈgression dans un nombre croissant de rÈgions.
Le projet DABAC propose aux populations de trois pays d'Afrique Centrale
(Gabon, Cameroun et Congo) des activitÈs alternatives pour contrecarrer
la progression du braconnage. Le principal objectif vise la diffusion
de l'Èlevage d'aulacodes, gros rongeurs apprÈciÈs des
consommateurs. Cela implique la mise en place de stations de production de
gÈniteurs et la formation des candidats Èleveurs. Un
programme de sensibilisation permet aux populations de connaÓtre les
principaux enjeux de cette nouvelle activitÈ. Il est dÈplorable
que cette autre initiative ne couvre que trois pays. A notre sens un tel
programme devrait síÈtendre sur tout le Bassin du Congo.
2 - Líimplication universelle : le
PFBC
Le Partenariat pour les ForÍts du Bassin du Congo
(PFBC) est une association regroupant une trentaine díorganisations
gouvernementales et non gouvernementales. Le PFBC est une initiative de
type II dans la classification de la coopÈration. Les initiatives de
type II sont destinÈes mettre en úuvre líAgenda 21
adoptÈ au Sommet de la Terre de Rio en 1992 et ont constituÈ un
des rÈsultats majeurs du Sommet Mondial pour le DÈveloppement
Durable (SMDD) de Johannesburg,
fin ao°t 2002. Le PFBC a pour objectifs
d'amÈliorer la communication entre ses membres et la coordination
entre leurs projets, programmes et politiques afin de promouvoir une gestion
durable des forÍts du Bassin du Congo et d'amÈliorer la
qualitÈ de vie des habitants de la rÈgion. Les 29 membres
fondateurs du PFBC rentrent dans trois grandes catÈgories :
gouvernements, organisations intergouvernementales et organisations non
gouvernementales. Pour la premiËre fois une action collective
adoptÈe líÈchelle mondiale est mise en
úuvre pour la gestion durable des ressources
115 Sur líensemble de la question, visiter
le site de ECOFAC et DABAC.
55
naturelles renouvelables du Bassin Congo.
La facilitation, aspect sensible qui assure la participation
effective de tous les acteurs, a ÈtÈ assurÈe par le
gouvernement amÈricain de 2002 2005. Au Sommet des Chefs
d'...tat de Brazzaville116, la France,
reprÈsentÈe par le PrÈsident Chirac, a pris en
charge la Facilitation du PFBC. Il a placÈ líaction de
son pays sous le signe de trois objectifs prioritaires : renforcer
le
dialogue entre les acteurs du Bassin, afin de crÈer une
dynamique qui encouragera les bailleurs de fonds síengager
davantage pour la rÈalisation d'objectifs convergents ; lutter contre le
commerce illicite du bois tropical, travers le renforcement des moyens
humains et logistiques de surveillance des forÍts, le renforcement
des contrÙles douaniers, tant en Afrique qu'en Europe; favoriser
le renforcement des capacitÈs nÈcessaires une gestion
durable des forÍts.
Au bout du compte, la sociÈtÈ des ...tats
est vÈritablement intÈressÈe par la gestion des
ressources naturelles du Bassin du Congo et principalement des ressources
forestiËres
renouvelables. Ceci tÈmoigne síil en Ètait
encore besoin de líimportance de ces ressources et de la
nÈcessiter díassurer leur pÈrennitÈ travers
les mÈcanismes de gestion participative, qui impliquent
par ailleurs les Organisations Non Gouvernementales assise
internationale.
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