SECTION II. LES AMENAGEMENTS NECESSAIRES AU SUCCES DE
L'INTRODUCTION EN BOURSE
1. Les changements juridiques et managériaux à
opérer
La société devra remplir les conditions
d'admission communes à tous les marchés
réglementés à savoir : il doit s'agir d'une
société par action. Il sera donc parfois nécessaire
de transformer une SNC ou une SARL en SA. De plus, les titres
admis aux négociations sur
un marché réglementé ne doivent
être assujettis à aucune clause restreignant leur libre
négociabilité. Ces clauses qui consistent le plus souvent
en des pactes d'agréments et des clauses de préemptions sont
en effet incompatibles avec le souci de liquidité et doivent par
conséquent être supprimée. Les actionnaires peuvent
néanmoins organiser le contrôle de
la société par des pactes ou des
protocoles d'actionnaires extra statutaires par lesquels ils s'obligent
mutuellement à respecter des droits de préemption ou
d'agrément en cas de sortie. La licéité de ces pactes
n'est pas mise en cause, mais la jurisprudence ne leur accorde pas toujours une
totale efficacité. Enfin, tous les titres de capital appartenant
à une même catégorie doivent avoir les mêmes
droits.
L'introduction en bourse implique en outre de présenter
au marché une entreprise dotée d'une structure simple et
claire. La poursuite de cet objectif nécessitera parfois
d'opérer une restructuration du groupe auquel appartient
la société de manière à présenter
un groupe homogène intégrant les entités qui
participent au résultat. Les résultats consolidés
permettront de tenir compte des bénéfices de l'ensemble
du groupe. Cette restructuration juridique qui peut durer plus d'un
an, consistera en des prises de
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participations, en la constitution d'une holding
coiffant l'ensemble des filiales, parfois en des échanges de
titres de la société introduite contre des titres de
filiales détenus par des actionnaires. Plus l'intégration
sera forte, plus les filiales pourront bénéficier
de l'introduction de la société mère.
La dénomination sociale devra dans certains cas
être révisée afin d'être rendue plus compatible
avec une politique de communication financière à
caractère fortement international. Il s'agira alors de
simplifier la raison sociale par la suppression des termes SA, en
privilégiant le nom de la marque commerciale, ou tout
simplement en choisissant
un nom facile à mémoriser et à prononcer.
La liquidité du titre peut être
optimisée en augmentant le nombre d'actions et en diminuant leur
valeur nominale. Ce résultat peut être obtenu par des
opérations de division de titre ou d'augmentation de capital par
incorporation de réserve.
Afin de séduire le marché, la
société aura intérêt à adopter les
principes du gouvernement d'entreprise1. Dans cette
perspective, elle pourra être amenée à modifier
ses organes de gestion et à adopter le système
du directoire et du conseil de surveillance. Des comités
indépendants peuvent êtres mis en place. Ainsi un comité
financier émettant des avis sur les opérations financières
de la société, contrôlant les procédures et
méthodes comptables appliquées ainsi que les
procédures d'information et de « reporting », un
comité des rémunérations faisant des
recommandations relatives à la fixation des
rémunérations et aux avantages consentis aux principaux
salariés et mandataires sociaux,
un comité d'investissement se prononçant sur tout
projet d'investissement, un comité des nominations, sont autant de
mesures visant à garantir une certaine transparence au sein de
la société.
La CMF peut demander le changement des commissaires au
compte de la société en faveur d'un cabinet dont la
signature est internationalement reconnue ou qu'elle a
1 Acte uniforme OHADA relatif au Droit des
sociétés commerciales, Art. 828 à 831
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agréé. La société devra
également mettre en oeuvre un contrôle de gestion et un
contrôle interne si elle n'en est pas déjà dotée.
Par ailleurs, la société doit posséder
les actifs incorporels nécessaires à son activité. Il
conviendra donc d'organiser la cession au bénéfice de la
société des brevets et marques possédés par les
anciens actionnaires lorsque ceux-ci constituent un élément
important de l'exploitation. A l'inverse, la détention par la
société d'actifs superflus et pénalisants en terme
de rentabilité pourrait avoir une conséquence
négative sur la valorisation de l'entreprise. Des sorties d'actifs
par voie de cession à un actionnaire, ou d'attribution par voie de
réduction du capital peuvent donc s'avérer avantageuses pour la
société.
2. Aménagements anti-OPA
Plusieurs dispositifs permettent de se prémunir dans une
certaine mesure des OPA et
OPE agressives1. Il convient néanmoins de
rappeler que ces procédés ont généralement un
impact négatif sur la valorisation de l'entreprise.
Leur mise en place doit donc être
mûrement réfléchie.
Les statuts pourront prévoir l'adoption du
régime des titres au porteur identifiables. L'assemblée des
actionnaires peut également voter une autorisation permettant
d'utiliser l'autorisation de procéder à des augmentations de
capital non réservée en période d'offre publique.
3. Mise en place de pactes d'actionnaires
Certains pactes extra - statutaires peuvent voir le jour
après que les statuts de la société auront
été purgés des clauses restreignant la libre
négociation des titres. Des pactes
de préemption et de préférence peuvent
faciliter la constitution d'un noyau dur. Ces
1 Sur l'ensemble de la question voir « OPA, OPE
et autres offres publiques », Alain Viandier, Editions Francis
Lefebvre n°320s
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pactes doivent êtres transmis à la CMF et
à l'entreprise de marché qui en assure la
publicité. Il peut également s'agir de droit de sortie
conjointe permettant de céder ses titres aux mêmes conditions
de prix et de garantie que l'autre partie au pacte, ou encore des pactes de
limitations de participation et de concertation avant toute nouvelle prise de
participation, de manière à se prémunir de certains
effets de dilution des droits de vote. Ces pactes peuvent constituer une
action de concert.
Les personnes agissant de concert sont tenues
solidairement aux obligations qui leurs sont faites par les lois et les
règlements et sont réputées n'en former qu'une au regard
des obligations de déclaration de franchissement de seuil et
des réglementations relatives aux offres publiques.
Il s'agit en l'occurrence des obligations de déclaration
de franchissements de seuils auprès du CMF et de la
Société concernée, des déclarations d'intentions
pour les douze
mois à venir requises par le règlement
général de la CMF.
***
L'inscription des sociétés à la cote
constitue une décision statique à long terme qui ne doit pas
être appréhendée avec légèreté.
L'introduction en bourse suppose le respect de conditions
précises contrôlées par la CMF, en termes de montant
du capital social, de chiffres d'affaires, de bénéfice,
de volume minimal d'actions mises sur le marché, d'informations sur la
situation économique
et financière de la société et de garanties
à offrir.
Lorsqu'une société s'inscrit en Bourse, elle
s'expose au jugement de cette dernière.
Si les tendances sont favorables, elle bénéficiera
d'une bonne appréciation du cours de ses titres. Dans le cas contraire,
elle constatera l'état de morosité de ses titres.
Informées sur le cadre réglementaire du
marché financier et des enjeux et
contraintes liés à une introduction en
Bourse, les entreprises candidates devront alors, pour une
réussite de l'opération d'introduction, mener un certain
nombre d'actions en
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s'entourant de partenaires, dans le cadre d'un long
processus tel que l'illustre la seconde partie de notre travail.
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