III. NOTRE POINT DE
VUE
L'article 131 de la Constitution du 4 avril 2003 dispose que
« la Cour Suprême de Justice peut être saisie d'un
recours visant à faire déclarer une loi non conforme à la
Constitution de la Transition notamment par un nombre de députés
au moins égal au dixième des membres de l'Assemblée
Nationale, dans les six jours francs qui suivent son adoption
définitive ».
De cette disposition, il découle que tout recours
soumis à l'appréciation de la Cour en cette matière, doit
répondre aux trois conditions non alternatives suivantes, à
savoir :
- la signature du recours par un dixième au moins des
membres de l'Assemblée Nationale ;
- l'adoption définitive d'une loi par
l'Assemblée Nationale et ;
- le respect du délai de six jours francs courant
à partir de l'adoption de loi.
Dans l'espèce examinée, il ressort qu'aucune de
ces conditions n'a été respectée par les
représentants, et que c'est à bon droit que la Cour Suprême
de Justice s'était déclarée incompétente pour
examiner une telle requête.
L'examen de ces deux cas nous a permis de relever que dans
l'arrêt R.Const 06/TSR, la Cour Suprême de Justice a
été autant rigoureuse qu'impartiale alors que dans l'avis
consultatif R.L. 09 du 20 janvier 2004, elle nous a paru moins courageuse.
Il faut préciser d'emblée que les notions de
courage et de vertu ressortissent du langage moral. Mais la justice n'est-elle
pas finalement une question éthique ? La symbolique de la justice
n'est-elle pas deux plateaux soutenus au milieu par un glaive
c'est-à-dire le fait et le droit soutenus par la puissance publique
(l'imperium) ? Lorsque au mépris de cette logique de justice le
droit est dit, il n'est pas rare de constater qu'il est contesté et
méprisé à son tour perdant ainsi son caractère
normatif au seul profit de son apparat autoritaire.
Nous ne pouvons pas perdre de vue aussi un aspect pratique
susceptible de constituer une tentative d'explication rationnelle de cet
état de choses. En effet, il n'est pas inutile de constater que la
quasi-totalité de nos hauts magistrats sont des juristes de haut niveau
oeuvrant depuis vingt-cinq ans, en moyenne, dans le domaine de droit
privé et judiciaire sans avoir eu à trancher des matières
de droit public du reste rares devant les juridictions inférieures dont
ils proviennent.
La création des tribunaux administratifs dans la
constitution du 18 février 2006 est de nature à exiger une
spécialisation académique et professionnelle des magistrats
siégeant en ces matières délicates.
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