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La saisine du juge constitutionnel et du juge administratif suprême en droit public congolais

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par Dieudonné Kaluba Dibwa
Université de Kinshasa - DEA de droit public 2005
  

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II. POSITION DE LA COUR SUPREME DE JUSTICE A PROPOS DE CE MODE DE SAISINE

L'interprétation des dispositions invoquées par le requérant pour asseoir, sur le plan juridique, la saisine, a amené la Cour Suprême de Justice à déclarer que la section de Législation de celle-ci était l'organe compétent pour statuer à cet effet.

A la suite du requérant, la Cour Suprême de Justice a, dans son avis RL 09 du 20 janvier 2004, estimé que, conformément à l'article 159 du Code de l'Organisation et de la Compétence Judiciaires, la « Section de législation de la Cour Suprême de Justice donne des avis consultatifs notamment sur les difficultés d'interprétation des textes ».

Aussi, la Haute Cour a-t-elle conclu que le fait pour le requérant de solliciter « un avis éclairé sur les articles 76 et 94 de la Constitution » était conforme aux prescrits de l'article 159 précité114(*). Pour cette juridiction, la Section de Législation était valablement saisie pour connaître la requête sous RL 09 dont l'interprétation démontrait que le Président de la République avait agi uniquement sur base de l'article 159 susévoqué115(*). Cette position de la Cour a donné lieu à une forte controverse.

1. CONTROVERSE SUR LA POSITION DE LA COUR SUPREME DE JUSTICE

La summa divisio de cette controverse peut se résumer de la manière qui suit :

- les tenants de la thèse de la saisine conforme au droit ;

- les tenants de la thèse de l'action mal orientée.

2. LA THESE DE LA SAISINE FAITE DE BON DROIT

Les tenants de cette thèse se fondent d'une part sur l'interprétation littérale de l'article 159 du Code de l'organisation et de la compétence judiciaires et d'autre part sur la souplesse de l'effet juridique d'un avis.

En effet, par l'interprétation littérale de l'article 159 susvisé, les tenants de la thèse invoquée, en intelligence avec l'avis de la Cour Suprême de Justice soutiennent que l'interprétation des textes telle qu'évoquée ici est d'ordre général. Elle concerne aussi les dispositions constitutionnelles dans la mesure où la Constitution, bien que loi fondamentale, demeure un texte juridique.

Les partisans de cette thèse116(*)soulignent que l'article 159 du Code de l'Organisation et de la Compétence Judiciaires prévoit la possibilité d'un avis consultatif pour deux catégories de textes. D'une part, il reprend les projets de lois ou des règlements, et d'autre part, il fait état des « textes » dont les utilisateurs ont des difficultés d'interprétation. Pour eux, la teneur de la requête du 23 décembre 2003 qui a sollicité « l'interprétation exacte des articles 76 et 94 de la Constitution » résulte de la reproduction manifeste du terme « interprétation » dans l'article 159 précité.

Ils épousent ainsi l'interprétation de ce dernier en tablant sur l'article 115 de l'Ordonnance - loi n° 82-017 relative à la procédure devant la Cour Suprême de Justice117(*) en soutenant qu'il établit encore une fois la dichotomie.

En effet, concernant l'autorité habilitée à saisir la Section de Législation de la Cour Suprême de Justice, l'article 115 dispose qu'il s'agit d'abord de l'autorité habilitée à prendre l'acte législatif ou réglementaire ; ensuite, il est question de l'autorité «qui a pris l'initiative de la consultation».

Aussi, la thèse de l'action diligentée de bon droit estime-t-elle que la loi ne précise pas le genre de texte à soumettre à consultation, que ce texte soit constitutionnel ou pas. 

En outre, les partisans de la souplesse de l'effet juridique d'un avis minimisent l'effet juridique recherché par le requérant e soutenant qu'il s'agissait d'un simple avis et non d'un arrêt obligatoire. Cette thèse se fonde sur l'article 123 alinéa 3 de l'ordonnance - loi n° 82-017 relative à la procédure devant la Cour Suprême de Justice qui dispose que « l'avis ne lie pas l'autorité requérante de même qu'il ne met pas obstacle à toute action ultérieure contre l'acte pour cause d'illégalité ou d'inconstitutionnalité.

Aussi, contraindre le requérant à ne recourir qu'à la procédure d'interprétation de la constitution par la Cour Suprême de Justice, toutes sections réunies, limiterait les autres possibilités juridiques pourtant consacrées118(*).

Par ailleurs, en cas de recours en interprétation de la constitution, la Cour Suprême de Justice statue par voie d'arrêt dont l'effet juridique est fondé sur l'article 134 de l'ordonnance - loi portant procédure devant elle. Les effets juridiques de cette disposition, notamment l'abrogation de plein droit de certains actes déclarés non conformes n'ont pas été soustraits par le requérant119(*).

Cette thèse n'est pas partagée par ceux des auteurs qui soutiennent que l'action ouverte par la requête du Président de la République a été mal orientée. Il faut dire d'emblée que cette controverse doctrinale est issue des débats oraux et n'a pas la précision du support écrit.

* 114 Avis consultatif de la Cour Suprême de Justice n° RL 09 du 20 janvier 2004, inédit, p.2

* 115 Idem

* 116 Notamment les professeurs KABANGE NTABALA MWALIM et LUZOLO BAMBI LESSA de la Faculté de Droit de l'Université de Kinshasa. Il s'agit des avis verbaux donnés à l'occasion des conférences données à la Faculté de Droit de l'Université de Kinshasa.

* 117 Cet article dispose en effet que la section de législation de la Cour Suprême de Justice est saisie par requête de l'autorité habilitée à prendre l'acte législatif ou réglementaire ou de celle qui a pris l'initiative de la consultation.

* 118 Pour cette thèse, le requérant n'a cherché qu'à obtenir un éclairage juridique sans être totalement lié. Son attitude après l'avis de la Haute Cour est d'ailleurs contraire à cet avis. Il a recouru à cette procédure qui lui paraissait simple par rapport à la procédure d'interprétation de la constitution.

* 119 Cet article dispose que « tout acte déclaré non conforme à la constitution est abrogé de plein droit. L'inconstitutionnalité d'une ou de plusieurs dispositions d'un acte n'entraîne pas nécessairement l'abrogation de tout acte ».

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon