La préparation de la loi de finances au Sénégalpar Babacar CISS Université Gaston Berger de Saint-Louis - Master 2 en Droit Public 2020 |
Paragraphe 2 : La finalisation du projet de loi de financesLe processus de validation gouvernementale du projet de loi de financesse déroule suivant plusieurs étapes. D'abord, il est engagé des séances de pré arbitrage par le MFB au début du mois de septembre et d'arbitrage du Premier Ministre.87(*)Ensuite après ces arbitrages le projet fait un passage en conseil des ministres pour adoption avant que les modifications éventuelles ne soient apportées en vue de sa consolidation et de son dépôt éventuel au Parlement.La tenue de ces rencontres de négociation budgétaire est en effet l'un des grands moments de la vie de l'administration des finances dans l'Etat. Marquant le début du processus de finalisation du projet, ces rencontres réunissent le ministre des finances et les autres acteurs budgétaires ministériels et institutionnels.Pratiques traditionnelles,elless'opèrent avant ou à l'approche de l'envoi des lettres-plafonds qui fixent définitivement l'évolution des crédits ministériels. Cette étape dans la mise au point progressive du budget est l'occasion de discussions serrées entre les responsables budgétaires des ministères (les directeurs techniques et centraux, les directeurs des finances et du matériel) et la direction du budget. Ces réunions d'arbitrage se tiennent au niveau du ministre du Budget, puis, en tant que de besoin, au niveau dela Primature. Elles permettent de trancher les points de désaccord qui subsistent entre la direction du Budget et les ministères à l'issue des conférences budgétaires, et par conséquent d'arrêter officiellement le niveau des emplois et des crédits pour chaque ministère pour les trois prochaines années. Elles se concluent par l'envoi par le Premier ministre des lettres-plafonds, qui fixent le niveau des enveloppes de crédits des trois prochaines années et les plafonds d'emplois pour l'année suivante. Les plafonds par programme des crédits arbitrés, dans ce cadre, constituent le nouveau budget triennal de l'État.Il s'agit surtout, à travers ces séances d'arbitrages, de développer un véritable dialogue de gestion avec les ministères sectoriels dans le souci d'affiner la qualité de la programmation budgétaire et d'accroître l'efficacité de la dépense publique de l'Etat. Ces rencontres entre le patron des finances et ses collègues sectoriels permettront d'obtenir un consensus sur les allocations budgétaires. Il s'agit de confirmer les allocations retenues lors de l'arbitrage technique et éventuellement de partager des préoccupations qui n'auront pas été retenues lors de l'arbitrage technique afin d'apporter les solutions. Les ministères devront déterminer, par la suite, dans le respect des plafonds fixés dans les lettres-plafonds, la meilleure répartition de leurs enveloppes de crédits et d'emplois entre les différents programmes et actions pour atteindre les objectifs de performance assignés aux différents responsables de programme. Cette répartition est discutée au cours des conférences de répartition. Celles-ci réunissant chaque ministère et la direction du Budget, qui s'assure notamment de la « soutenabilité » de la répartition proposée par les ministères, c'est-à-dire que les dépenses obligatoires et inéluctables sont bien couvertes. Dans la mesure où les plafonds par programme sont d'ores et déjà fixés dans le cadre du budget triennal, la procédure budgétaire menée pendant l'année impaire est sensiblement allégée. Ainsi, après les réunions techniques, on passe directement aux conférences de répartitionqui permettent, notamment d'effectuer la répartition des crédits par programme dans le respect des plafonds de dépenses fixés dans le budget triennal ; de procéder à la répartition des emplois par programme ; de fixer les plafonds d'emplois des opérateurs de l'État ; et en cas de circonstances exceptionnelles, de réajuster le montant des plafonds accordés aux ministères. Si ces réunions de répartition ne permettent pas d'aboutir à une répartition consensuelle, les points de divergence sont soumis à l'arbitrage du Premier ministre (arbitrage de répartition). C'est au cours de cette période donc que le projet de budget est finalisé tant dans sa partiedépenses que dans sa partie recettes.Pour les dépenses, c'est au cours des réunions de répartition que la Direction dubudget et les ministres répartissent, dans le respect des plafonds arrêtés par le Premier ministre, lescrédits et les emplois entre les différents programmes et actions d'une mission en tenant compte dudébat d'orientation budgétaire. Parallèlement, les responsables de programme travaillent sur leurstratégie et les objectifs à atteindre, de manière à pouvoir finaliser les projets annuels de performancede chaque programme.Après ces arbitrages, le projet de loi de finances est soumisau Conseil des Ministres présidé par le Président de la République. Ce Conseil est marqué par un exposédu Ministre des Finances sur les grandes lignes du budget proposé, suivi par des demandesd'éclaircissements du Chef de l'Etat sur certains aspects du projet et par la formulation, par le Président de ses hautes instructions à propos de l'action gouvernementale dans le cadre dubudget en question. En ce qui concerne les recettes, leur montant est décidé le plus tard possible par leGouvernement (entre Juillet et Septembre) en fonction des prélèvements et des allègements fiscauxenvisagés et de leur incidence budgétaire. Ce chiffrage des recettes fiscales est surtout l'oeuvrebilatérale du Premier ministre et du ministre des finances. Quant à la Direction du budget, elle jouesurtout un rôle pour les recettes non fiscales et les taxes affectées à des personnes morales autres quel'Etat.A ce moment, l'ensemble des dépenses et des recettes sont définitivement arrêtées. Peuvent,alors, avoir lieu la finalisation de la rédaction du projet de budget, ainsi que la dernière étape de natureprocédurale.88(*) Au terme des arbitrages budgétaires et après la mise à jour des documents budgétaires issus du cadrage, notamment le Document de Programmation pluriannuelle des Dépenses (DPPD) et le Projet annuel de Performance (PAP), le Ministre chargé des Finances finalise l'avant-projet de loi de finances de l'année à venir et le transmet au Secrétaire général du Gouvernement.L'avant-projet de loi de finances est adopté en Conseil des Ministres au plus tard le 20 septembre.Après cette adoption chaque ministre ou président d'institution actualise son projet de budget sur la base des arbitrages rendus et en transmet la version finale au Ministre chargé des Finances.Ces projets de budget et les autres documents annexés au projet de loi de finances sont ainsi transmis à la Direction chargée de la Programmation budgétaire au plus tard le 30 septembre, pour consolidation.89(*)Les modifications effectuées lors de l'adoption du projet de loi de finances, serontprises en charge par le MFB et les institutions et ministères sectoriels par uneharmonisation des données saisies sur le système informatique et dans la versionfinale des documents (PLF, DPBEP, DPPD/PAP...). Le travail de mise à jour et de saisie des budgets sur le systèmed'information (SIGFIP) est effectué par la DGB en tenant compte du dernier arbitrageet des engagements arrêtés par le gouvernement. A l'issue de cette étape, la première monture dela Loi de finances de l'année est élaborée.90(*)Les Ministères sectoriels et les Institutions Constitutionnelles procèdent à la mise à jour et à lafinalisation de leurs projets de budget, rédigent leurs rapports de présentation avantleur transmission au MFB.Ensuite la DGB finalise le projet de loi de finances par la préparation de l'exposé général desmotifs du projet de loi de finances. Elle prend en compte le dernier arbitrage décidé par le Conseil des ministres avecdes plafonds de dépenses pour chaque ministère ou Institution. Ensuite, elle valideles modifications des projets de budget réajustés avant de réaliser le tirage etl'assemblage du PLF et des fascicules budgétaires.Enfinle projet est transmis à l'Assemblée nationale avantle 15 octobre en vue de son adoption.Cette transmission ouvre ainsi la phase parlementaire de la procédure de préparation de la loi de finances. DEUXIEME PARTIE : ADOPTION DU PROJET DE LOI DE FINANCES Si l'élaboration à part entière du projet de Loi de Finances incombe au Gouvernement, sonadoption relève toutefois de la compétence du Parlement.Stéphanie DAMAREY considèreCette phase parlementaire de la procédure comme « longue et monotone »91(*). Elleconstitue un moment décisif dans le processusbudgétaire dans la mesure où elle détermine la position définitive du Parlement vis-à-vis duprojet. En cas d'approbation, la voie est ouverte pour la promulgation de laloi et en cas de rejet, il appartient au gouvernement de prendre un décret devant sesubstituer provisoirement à la loi de finances pour permettre la poursuite de la marchenormale des rouages de l'Etat.92(*) Cette étape obéit aux dispositions de la Constitution, de la loi organique portant loi de finances et du règlement intérieur de l'Assemblée Nationale. Le projet de loi de finances estdéposé sur le bureau de l'Assemblée nationale, après validation en conseil des ministres, au plus tard le 15 octobre93(*). Ainsi commence ce que l'on appelle le « marathonbudgétaire »94(*), qui va durer un peu près de trois mois et qui conduira à l'approbation définitive du budget à la findu mois de décembre pour une application dès le1er janvier de l'année d'exercice budgétaire. La procédure d'examen et de vote des lois de finances se déroule dans le respect des principes de sincérité, de transparence et de loyauté dans les rapports entre l'Exécutif et le Parlement. Ainsi, l'article 145 de la LOLF fait obligation au gouvernement d'accompagner son projet de plusieurs documents pour en faciliter la compréhension et améliorer la transparence des rapports institutionnels entre le gouvernement et l'assemblée nationale. Il s'agit principalement du rapport définissant l'équilibre économique et financier, des résultats connus des gestions antérieures et perspectives,du plan de trésorerie prévisionnel et mensualisé de l'exécution du budget,du document de programmation budgétaire et économique pluriannuelle, des documents de programmation pluriannuelle de dépenses ayant servis à la préparation des budgets des ministères et de plusieurs annexes explicatives qui développent le montant des crédits présentés par nature de dépenses, par programme ou par dotations. Elles sont également accompagnées du projet de performance de chaque programme qui doit préciser la présentation de chacune des actions et de chacun des projets prévus par le programme, les coûts associés, les objectifs poursuivis, les résultats attendus pour les années à venir mesurés par les indicateurs de performance ainsi que les résultats obtenus des années antérieures.Ce projet doit aussi préciserla justification de l'évolution éventuelle des crédits par rapports aux dépenses effectuées l'année antérieure, l'échéancier des crédits de paiement associés aux autorisations d'engagement et, par catégorie d'emploi la répartition prévisionnelle des emplois rémunérés par l'Etat et la justification des variations par rapport à la situation antérieure (chaque année il faut que le ministère justifie le paiement du personnel mais aussi s'il y a du nouveau personnel, il faut justifier ses postes). Les annexes explicatives informent également les parlementaires, pour chaque budget annexe et chaque compte spécial du trésor, du montant des recettes et des dépenses par nature spécifiquement concernant les comptes de prêts et avances de l'encourt et des échéances des prêts et avances consentis par l'Etat. Elles comprennent également un état développé des restes à payer par l'Etat (ce que l'Etat doit aux autres) au moment du dépôt du projet de loi de finances et un état des restes à recouvrer (au titre des prêts, au titre des avances ou au titre des impôts, c'est-à-dire ce que les autres doivent à l'Etat) ainsi que l'état de l'encourt et des échéanciers du service de la dette. Le gouvernement doit également exposer aux parlementaires la stratégie d'endettement public. La dernière étape de cette phase est la promulgation et la publication de la Loi des Finances par le Président de la République si toutefois la loi a été validée par le parlement ; sinon des modes alternatives de mise en application de celle-ci sont prévues dans le but de permettre la continuité de l'action administrative. Il sera analysé d'abord la Présentation du projet de loi de finances au parlement (Chapitre Premier) avant de voir sa procédure d'approbation (Chapitre Deuxième). * 87 Entre le mois d'Août et le mois de Septembre ; d'après le calendrier budgétaire. * 88 La Préparation du projet de loi de finances, www.FallaitPasFaireDuDroit.fr * 89 Article 16, Décret 2019-120 du 16 janvier 2019 portant préparation de la loi de finances. * 90 La finalisation du projet de budget, www.budget.gouv.sn. * 91 Stéphanie DAMAREY, Finances Publiques. * 92Professeur Hicham BOUCHARTAT, Cours de Finances Publiques, Faculté polydisciplinaire de Larache. * 93Décret 2019-120 du 16 janvier 2019 relative à la Préparation de la loi de finances au Sénégal. * 94Damien CATTEAU, Droit Budgétaire et Comptabilité Publique, hachette, 3ème édition, 2016, P.77. |
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