Annexes 5
ENTRETIEN 4
IDE 4 : Je m'appelle IDE
4, j'ai, je suis diplômée depuis 18 mois, je travaille en
Unité de soins intensifs en cardiologie à l'hôpital la
pitié salpêtrière depuis l'obtention de mon diplôme
en juillet 2019, c'est mon premier service.
Moi : Quelles sont les
pathologies prévalentes traitées dans l'unité
?
IDE 4 : La plupart des patients
qui sont pris en charge présentent soit une décompensation
cardiaque, soit une insuffisance cardiaque, soit une infarctus du myocarde, on
a aussi des patients qui présentent des multiples pathologies, par
exemple, on a des patients qui ont une insuffisance cardiaque et une
insuffisance rénale associée. On a des patients qui viennent
avant l'implantation d'un pacemaker, qui ont aussi un défibrillateur du
fait d'une défaillance cardiaque parce qu'ils présentent des
troubles du rythme. On a aussi des patients qui ont une défaillance au
niveau d'une valve. On a des patients qui viennent à la suite de pontage
artério-coronarien ou après une greffe du coeur.
Moi : Selon vous, qu'est-ce que
l'éducation thérapeutique du patient ?
IDE 4 : C'est aider le patient
à être autonome dans sa prise en charge, c'est lui donner les
moyens de pouvoir réaliser des soins avec des choses qui lui sont
accessibles. L'ETP consiste à mettre le patient à l'aise, c'est
plutôt expliquer au patient en fonction de sa pathologie, comment
s'approprier le soin. Quand je pense à l'ETP, je pense à un soin
que le patient va faire de manière autonome. C'est utiliser des mots qui
sont simples et mettre en place un exercice ou un exemple qui lui permet de
s'approprier les choses.
Moi : A quel moment proposez-vous
l'ETP ? A qui ? Qu'en est-il du patient atteint en post IDM ?
IDE 4 : Je choisi un moment
où je pense que le patient est à l'écoute, je sais que
c'est un moment où on va pouvoir parler librement, où on est
tranquille, et qu'on ne sera pas dérangé. Quand on met en place
l'ETP, on essaie de savoir, si le patient comprend bien le soin qu'il va devoir
réitérer par la suite. On doit leur expliquer
l'intérêt de chaque traitement ou de chaque soin.
En ce qui concerne le patient en post IDM, ce ne sera pas
juste après son retour de la coronarographie, on essaiera par la suite
d'essayer de savoir s'il a bien compris ce qui s'était passé,
d'essayer de voir avec lui ses habitudes de vie, on
va essayer de comprendre les facteurs de risque qui sont en lien avec son
infarctus du myocarde : son alimentation, tabagisme, activité
physique, son hygiène de vie. On lui explique que ce sont des facteurs
importants dans la survenue de l'infarctus du myocarde.
Moi : Quels sont les objectifs de l'ETP
pour un patient en post IDM ?
IDE 4 : L'objectif est qu'il
réalise qu'il y a des gestes dans sa vie de tous les jours qui ne sont
pas forcément bonnes pour sa santé, qu'il en prenne conscience
d'une part, d'autres parts, l'infirmière doit revoir avec lui les choses
qu'il pourrait modifier, ou auxquelles il pourrait faire attention. On peut
aussi faire intervenir la diététicienne, ou un tabacologue pour
réduire sa consommation de tabac, ou mettre en place des patchs de
nicotine.
Moi : Y a-t-il des
bénéfices pour ce type de patient d'intégrer un programme
d'ETP ? Si oui, lesquels ?
IDE 4 : Oui je pense qu'il y a un
bénéfice parce que justement certains ne se rendent pas compte
que l'hygiène de vie qu'ils ont tous les jours ne correspondent pas
forcément à leur santé et qu'en vieillissant on a beaucoup
plus de mal à éliminer et à améliorer.
Moi : Y a-t-il un parcours de soins
particulier pour le patient en post IDM ? si oui, comment est-il
planifié et qui assure la coordination ?
IDE 4 : La plupart des IDM
arrivent avec le SAMU, ils passent directement en salle de
cathétérisme. Le coronarographiste dilate les artères
bouchées par stent, ils sont ensuite transférés en soins
intensifs pour une surveillance en continue par scope. Ils restent en moyenne 3
jour en USIC parce qu'à la suite d'une dilatation il peut apparaitre des
troubles du rythme, ou d'autres complications. En fonction de leur état
de santé, ils sont transférés par la suite en cardiologie
pour réadapter leur traitement (bétabloquant, statines...), ils
seront suivis par la diététicienne pour
rééquilibrer leur alimentation. A la suite de l'hospitalisation,
ils peuvent être transférés en réadaptation
cardiaque pour permettre au coeur de récupérer à son
rythme avant de reprendre la vie normale.
Moi : Y a-t-il des limites à l'ETP
pour ce type de patient ? Si oui, lesquels ?
IDE 4 : oui notamment si le
patient est totalement réfractaire au fait de participer à une
éducation thérapeutique. La plupart des patients qu'on a en
cardiologie sont des personnes âgées, si elles ont
déjà des troubles cognitifs, elles n'auront pas la
capacité de comprendre ce qu'on leur dit même si on utilise des
mots assez simples, et qu'on adapte l'ETP à eux, cela ne suffit pas
toujours. Il y a aussi le fait que certains patients ne comprennent simplement
pas ce qu'on leur dit, quelques fois, ils montrent qu'ils ont compris et qu'on
on creuse derrière, on s'aperçoit qu'ils n'ont pas compris la
situation. Il y a aussi la barrière de la langue. Il y l'organisation et
la charge de travail qui peuvent être une limite à l'ETP, on a
envie de mettre en place une éducation thérapeutique avec un
patient parce qu'on voit justement qu'il est en difficulté, mais on a du
mal a trouver du temps pour mettre en place l'ETP surtout avec la crise
sanitaire actuelle. On peut aussi faire appel aux infirmières de
l'hôpital de jour qui font beaucoup d'éducation
thérapeutique.
Moi : Selon vous, l'ETP modifie-t-elle la
manière d'approcher la prise en charge du patient en post
IDM ?
IDE 4 :oui surtout si le patient est réfractaire
à l'ETP, l'approche ne sera compliquée mais pour ceux qui ont des
difficultés à comprendre les choses, on sait qu'ils ont besoin de
beaucoup plus de temps d'accompagnement.
Moi : Aviez-vous besoin d'acquérir
ou d'avoir des compétences particulières pour faire de l'ETP
?
IDE 4 : Je pense qu'il faut avoir
des outils pour rendre l'ETP un peu plus ludique. Pendant ma formation en IFSI,
j'ai pu avoir 42 heures de cours d'ETP ce qui m'a aidé à mettre
en place l'ETP pour les patients que j'ai eu à prendre en charge, ca m'a
aider à rendre les patients plus autonomes, plus actifs de leur
santé.
Moi : Dans votre exercice au quotidien,
pouvez-vous quantifiez le temps passé pour l'ETP ? Selon vous, ce
temps est-il suffisant ? Si non, pourquoi ce temps est-il
insuffisant ?
IDE 4 : C'est difficile à
quantifier, l'ETP est quelque chose qu'on fait tout le temps. On explique
à chaque fois le soin qu'on va faire, son intérêt, son but,
ce temps n'est pas quantifiable.
Moi : Comment le patient en post IDM
représente-t-il sa pathologie chronique ? Comment perçoit-il
l'ETP ?
IDE 4 : C'est patient
dépendant, il y en a qui réalise que leur coeur a
été affecté de manière importante et qu'il va
falloir changer leur mode de vie. Pour d'autres, notamment chez les fumeurs,
ils se disent qu'ils ont été pris en charge, ils ne vont pas
forcément réaliser l'importance de la situation. D'autres vont
réaliser que c'est important, qu'ils vont risquer de mourir et que s'ils
ne modifient pas leur hygiène de vie, l'infarctus risque de se
réitérer et ça n'aurait peut-être pas une issue
favorable.
Les patients en règle générale sont
plutôt réceptifs au fait qu'on mette en place une ETP, ils la
perçoivent favorablement parce que l'ETP s'adapte à leur
état de santé. D'autres ont conscience qu'ils ont failli mourir
mais ne se voient pas changer soudainement leur mode de vie. Ils
nécessitent un temps d'adaptation. Des fois, il y en a qui
réintègre leur infarctus.
Moi : Le patient a-t-il des
difficultés à adhérer à l'ETP ? Si oui,
lesquels ? Pourquoi ?
IDE 4 : Le patient oui peut avoir
du mal à adhérer à l'ETP parce que soit il pense qu'on
veut s'introduire dans sa vie et qu'on veut tout modifier. Il peut y avoir la
barrière de la langue qui peut être une difficulté. Si
l'ETP qu'on met en place n'est pas adaptée à sa situation,
à son mode de vie, si l'ETP n'est pas personnalisée, si le
patient à des difficultés de compréhension, des troubles
cognitifs, si le patient refuse d'adhérer à l'ETP.
Moi : Selon vous, l'IDM peut-il être
une occasion d'apprentissage pour le patient ?
IDE 4 : Oui ca permet d'apprendre
que l'hygiène de vie est nécessaire pour préserver son
coeur, sa santé de manière générale. L'ETP apprend
au patient à revivre autrement.
Moi : Quels sont les
bénéfices de l'ETP pour le patient en post IDM en termes de
qualité de vie ?
IDE
4 : Il apprendra à changer son hygiène de
vie.
Moi : Dans votre travail au quotidien,
vous semble-t-il que l'ETP contribue à réduire les complications
de l'IDM ? Si oui, de quelle manière ?
IDE 4 : Un patient stenté
peut reboucher son stent, le patient doit comprendre l'intérêt de
changer son mode de vie, de prendre ses traitements. Souvent le patient
stenté va se sentir mieux et ne va pas sentir obliger de prendre les
médicaments ce qui peut conduire à une récidive et peut
être un arrêt cardio-respiratoire.
Moi : Dans votre travail au quotidien,
vous semble-t-il que l'ETP améliore l'observance des prises
médicamenteuses ?
IDE 4 : Oui, si on n'explique pas
au patient l'intérêt de ses médicaments pour sa
santé, il ne va pas se sentir acteur de sa pathologie, et de sa
santé. L'IDE doit mettre le patient au centre de sa santé pour
qu'il soit plus alerte de complications par la suite.
Moi : Selon vous, le patient
rencontre-t-il des difficultés à suivre les recommandations
hygiéno-diététiques que lui impose sa pathologie ? Si
oui, lesquels ?
IDE 4 : oui, si le patient n'est
pas suivi, ou si on ne lui explique pas ce qu'il doit changer dans son
hygiène de vie au quotidien il peut relâcher les efforts. Souvent
le patient n'arrive pas à suivre les règles
hygiéno-diététiques parce que ces moyens financiers sont
insuffisants. Les hommes sont plus souvent atteints d'un infarctus du myocarde
et souvent ce n'est pas eux qui cuisinent, il est important d'éduquer
aussi l'épouse.
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